Avec D14 à Barcelone, un témoignage

Jeudi soir vers 19 h, je suis parti avec D14 (organisatrice de la manif du 14 décembre à Bruxelles contre le sommet européen) pour aller manifester à Barcelone. Nous sommes partis avec plus ou moins 140 personnes en 3 cars. Vers midi, le vendredi, nous sommes arrivés à la frontière espagnole. Après une fouille minutieuse des cars et un contrôle des cartes d'identités (qui a duré 2 h !) la police espagnole nous a dit de rentrer dans les bus. Sans aucune explication, alors que nous pensions que tout était OK et que nous pouvions continuer notre voyage, la police a ordonné aux chauffeurs des bus de faire demi-tour et de retourner en France.

Arrivés de l'autre coté de la frontière, plusieurs bus français avec des activistes d'ATTAC nous ont rejoints. Eux aussi étaient refoulés par les Espagnols sans raison, sans contrôle.

Révoltés par ce blocus illégal, nous avons occupé une partie de l'autoroute. Après un petit temps les CRS ont ordonné aux chauffeurs des cars de s'en aller et ont obligé à coup de matraques les activistes à rentrer dans les bus.

Après une petite discussion dans le groupe nous nous sommes « repliés » sur Perpignan, où nous avons été accueillis par des camarades du syndicat français SUD et où nous avons retrouvé les gens d'Attac. Le soir, nous avons dormi avec plus ou moins 300 activistes dans un hall de sport d'une école mise à notre disposition grâce à l'intervention du syndicat SUD. Après une petite fête improvisée et une bonne nuit de sommeil nous sommes rassemblés devant le Palais des congrès à Perpignan. Au cours de la matinée, arrivaient de plus en plus de cars refoulés par les Espagnols : Attac de Toulouse, Marseille, Aix, des groupes du syndicat SUD et de LCR, etc.
Entre-temps, les préfectures autour de la frontière espagnole avaient interdit a tous les bus de circuler sur l'autoroute. Ainsi les Français se faisaient complices de la politique de blocus des Espagnols.
Pour montrer notre désaccord avec cette politique qui met cause la liberté de circulation (tant vantée par tous les défenseurs de l'UE) et notre liberté de pouvoir nous exprimer contre la politique de libéralisation et de privatisation, de destruction des acquis sociaux de l'Union européenne, nous avons organisé une manif à Perpignan avec environs 1 500 personnes (une vingtaine des bus s'étaient regroupés entre-temps à Perpignan).

Après cette manif, nous sommes retournés avec 15 bus en direction de la frontière. Entre-temps, il était déjà 17 h. On était à 180 km de Barcelone et la manif à Barcelone allait commencer vers 18 h. Finalement vers 17 h 30 les Espagnols ont réouvert leurs frontières. Un bus de D14 à encore rejoint Barcelone où ils ont assisté à la fin de la manifestation (avec 500 000 participants !) et au concert avec Manu Chao.

Quelques réflexions sur ce qui s'est passé :

– Notre chauffeur de bus – d'origine Espagnole – n'a pas hésisté à faire la comparaison avec la politique fasciste de Franco. Je pense qu'il a raison. J'ai personnellement eu un contact avec le chef de cabinet de Durant qui était sur place à Barcelone. Il allait faire une démarche auprès de l'ambassadeur et me recontacter. J'attends toujours. Le chef de cabinet m'a dit « qu'il ne pouvait rien faire, parce que se sont les Espagnols qui décident ». Belle démocratie l'Union européenne ! On n'a pas entendu non plus Di Rupo ni Michel.

– La démarche des Espagnols et des Français montre clairement que l'Union européenne a peur que des activistes de tous les pays d'Europe se rencontrent et fassent l'unité. Ceci montre la voie à suivre. Si nous voulons arrêter la politique de privatisation, de libéralisation et de guerre de l'Union européenne, nous devons multiplier les contacts internationaux entre activistes, syndicalistes...

– Le blocus n'a pas empêché que la manifestation à Barcelone a connu un succès historique : 500 000 participants.

arch/ive/ief (2000 - 2005)