Manif 28/10: Imbuvables by Grégory D’Hallewin Wednesday, Nov. 02, 2005 at 5:36 PM |
Le 28 octobre il y´avait plus de 100 000 employés et ouvriers que sont venus a Bruxelles pour protester contre les plans de fin carrières du gouvernement.
10h15. La gare du Nord. On peut déjà voir de petits groupes verts et rouges se former. Mais dans les minutes qui suivent, c’est l’ensemble du bâtiment - son immense cage de verre comme le couloir auquel aboutissent les escaliers des quais - qui est submergé. L’appel, lancé en front commun tant par la FGTB-ABVV, la CSC-ACV et le syndicat libéral, a été reçu cinq sur cinq. Tous protestent contre le dit « Pacte de solidarité entre générations » du gouvernement Verhofstadt. Un pacte qui n’a « de solidarité » que le nom, selon le responsable des Jeunes CSC de Mons-La Louvière Bertrand Sculier. Si l’essentiel des mécanismes de sécurité sociale est pour l’instant sauvé, on n’instaure pas une solidarité en maintenant les vieux au travail alors que les jeunes restent au chômage. Si la solidarité passe par la diminution des acquis sociaux et la rétrogradation des biens et de la qualité de vie, alors ce n’est pas de la solidarité.
La région de Mons-La Louvière a en effet d’excellentes raisons de s’inquiéter des implications de ce Pacte, car le taux de chômage y est un des plus élevés en Belgique et le chômage des jeunes y est le plus élevé en Wallonie. Beaucoup d’entreprises soit délocalisent, soit se restructurent et nombre de sociétés voient leurs infrastructures vieillir. C’est une région qui souffre déjà particulièrement, d’autant que le taux de pauvreté y est particulièrement élevé : la commune de Wasmes ( Borinage ) compte le taux de pauvreté le plus élevé du pays. Les avantages substantiels aux employeurs qu’impliquent ce Pacte n’aideront en rien les créations d’emploi. Bien des entreprises par le passé ont profité des subsides et des avantages avant de délocaliser. C’est pourquoi le nombre de manifestants originaires de cette partie du Hainaut s’élevait à pas loin de 2500 pour la seule CSC.
Très vite, on parle de 100 000 participants, venus de toute la Belgique, appartenant aux trois syndicats et aux groupes socioprofessionnels ainsi qu’aux tranches d’âge les plus variés. Des métallos aux fonctionnaires. De l’horeca au textile. De l’ industrie du diamant aux enseignants. Des étudiants aux employés. Des ONG ( VKJ, Oxfam ) sont aussi de la partie. Symboliquement, des militants de la SETCA-BBTK, avec des militants CSC et ACV ( moins nombreux que les SETCA-BBTK ) accompagnés du groupe Marche mondiale des femmes et de Groen !, occupent les marches de la Bourse. Les gens de la SETCA en sandwich portent à l’avant le dessin de Pierre Kroll où un père de famille à la retraite dit à son fils : Fiston, je vais peut-être retravailler. Ce à quoi le fils répond : A ma place alors. L’hélicoptère de la police fédérale tournoie discrètement sur les manifestants. Cependant, le dispositif de police reste mesuré et aucune provocation n’a lieu de part et d’autre. L’ambiance reste bon enfant. Mais une colère latente laisse penser que, si gouvernement et associations patronales ne revoient pas leurs positions, ce n’est qu’un début.
A l’arrivée du cortège, gare du Midi, les grands leaders syndicaux prennent la parole. Luc Cortebeeck, qui, après avoir dénoncé les aberrations du Pacte, lance au gouvernement et aux patrons, conformément à la tradition de la CSC, un appel à reprendre le dialogue. Lui succède le populaire Jean-Claude Vandermeeren, secrétaire national de la FGTB. Il souligne qu’il y a plus de 100 000 personnes en rue et que le gouvernement doit être à l’écoute des travailleurs, sinon il n’est pas démocratique. S’il ne modifie pas son attitude, il faut continuer le combat dans l’unité syndicale. Nombre de points du Pacte sont qualifiés d’imbuvables, car ils impliquent de faire travailler les personnes âgées plus longtemps alors que 140 000 jeunes sont au chômage. Il rappelle les fameux 200 000 emplois promis par le gouvernement Verhofstadt et que personne n’a jamais vus. Si la sécurité sociale a été préservée, un authentique refinancement ne pourra se faire que par une véritable politique de l’emploi. Une politique qu’appelle aussi de ses vœux le secrétaire de la CSC, Josly Piette. Il accuse le Pacte de détricoter les conventions collectives et souligne qu’il risque d’accentuer le stress chez les travailleurs âgés, ne serait-ce que parce que les conditions de travail ne sont pas optimales et qu’en cas de licenciement les employeurs se débarrassent d’abord des travailleurs les plus âgés. Il espère que la manifestation facilitera, lors de la prochaine réunion le 8 novembre, la remise des problèmes sur la table et la renégociation de nombreux points.