arch/ive/ief (2000 - 2005)

Congo / Les manipulateurs de l’UDPS n’abandonnent pas
by raf Wednesday, Jul. 06, 2005 at 9:44 PM

L’UDPS, parti d’Etienne Tshisekedi, vit dès à présent «sur pied de guerre» avec le gouvernement congolais. C’est ce qu’a déclaré la direction du parti au lendemain de l’échec de l’action de l’UDPS contre le gouvernement. Le parti avait espéré que la population congolaise suivrait son appel à descendre massivement dans la rue le 30 juin, jour de fête nationale. Mais dans la capitale, la plupart des gens sont restés chez eux. Le parti de Tshisekedi n’abandonne pas la lutte et continue d’essayer de rallier l’opinion publique.

Raf Custers, en direct de Kinshasa

La direction de l’UDPS a fait le 1er juillet le bilan de la journée d’action du 30 juin. Elle critique le fait que la «police politique» et l’armée ont étouffé la marche de protestation contre le gouvernement. Remy Masamba, secrétaire général, et le porte-parole du parti Jean-Baptiste Bomanza ont dit à ce propos que des militaires parlant Portugais ont été signalés parmi les troupes de répression, suggérant ainsi l’implication de soldats angolais et donc l’incapacité du gouvernement congolais à maintenir l’ordre lui-même. Des centaines de manifestants auraient été arrêtés, dont plusieurs cadres de l’UDPS. Selon l’UDPS, l’action a bien reçu le soutien de la population, car tout Kinshasa était «paralysé». La répression aurait coûté la vie à 13 personnes à Kinshasa (mais l’UDPS ne cite que deux noms) et à 57 personnes dans l’ensemble du pays.

Etienne Tshisekedi, le «Leader Maximo» de l’UDPS, a annoncé début avril que des élections générales devaient avoir lieu au Congo pour le 30 juin, car c’est à cette date que, d’après lui, devait se terminer la période de Transition de 24 mois. Le parti n’accepte pas que le Parlement ait entre-temps prolongé une première fois la transition de six mois. «La Récréation est terminée», a encore répété Masamba ce 1er juillet. Le Congo a un système unique de «partage du pouvoir» avec 1 président et 4 vice-présidents. D’après les partisans de Tshisekedi, cette formule est caduque et «1+4 égale zéro». Selon les slogans de l’UDPS, le Congo repasse le 1er juillet au régime de transition des années 90, quand le président Mobutu tenait encore le Congo sous sa dictature, dont Tshisekedi fut brièvement Premier ministre. Les militants de l’UDPS donnent dès aujourd’hui le titre de nouveau président du Congo à Tshisekedi.

L’UDPS, qui dans le meilleur des cas peut être considéré comme un parti social-démocrate, n’en est pas à un mensonge ou une tromperie près. Ainsi les sources officielles disent que pendant les incidents dans la capitale deux personnes seulement ont été tuées. Concernant la réussite de l’opération «Ville morte», le parti ne dit pas que la fête nationale du 30 juin est un jour férié, que les gens ne devaient pas aller travailler et qu’il n’y avait donc pas de transports publics. L’UDPS ne dit pas non plus que ses propres militants ont forcé des pompistes à bloquer le trafic. L’info sur les militaires angolais est de l’intox pure et simple. Le 30 juin, des agents de différents services de police sont intervenus contre les manifestants, mais pas les militaires. Les manifestations n’étaient d’ailleurs pas autorisées. La nouvelle Unité de Police Intégrée est effectivement en partie entraînée en Angola, aussi par des instructeurs européens d’ailleurs, mais elle est composée Congolais. Il faut aussi se demander pourquoi l’UDPS chicane maintenant sur la formule 1+4. Remy Masamba, son secrétaire général, porte encore ce 1er juillet une chemise colorée avec le slogan «Etienne Tshisekedi, père de l’Accord Global» (qui est à la base de la formule décriée).

La façon dont ces derniers mois l’insatisfaction générale de la population congolaise a été élevée en véritable «psychose» fait penser aux plus grossières manipulations de l’extrême droite. L’insatisfaction est effectivement grande et sensible. Elle vient du chômage massif et du fait que les fonctionnaires, qui ne gagnent déjà pas grand-chose, ne sont payés que trop tard ou pas du tout. Les policiers et les soldats reçoivent aussi leur solde bien trop tard, ce qui explique le banditisme «d’hommes armés non-identifiés et en uniforme». L’UDPS dirige le mécontentement contre la classe politique qui n’aurait réalisé aucune de ses missions ou promesses.

La grande majorité des habitants de Kinshasa n’ont pas participé aux marches de protestation. Pas par peur de la répression, mais surtout parce que beaucoup refusent de porter Etienne Tshisekedi à nouveau sur la scène politique. Son passé politique plaide d’ailleurs radicalement contre lui. En septembre 1960, Tshisekedi était déjà du côté de Joseph Désiré Mobutu quand celui-ci a écarté le premier Premier ministre du Congo, Patrice Lumumba, lors de son premier coup d’état. Le gouvernement Lumumba avait à peine deux mois. Quand Mobutu en 1965 a pris une nouvelle fois le pouvoir (il n’en a été chassé qu’en 1997 par un soulèvement dirigé par Laurent-Désiré Kabila), Tshisekedi a été ministre de l’Intérieur. En 2002, alors que le Congo était confronté à une guerre d’occupation, Tshisekedi a commis une nouvelle faute aux yeux de beaucoup de Congolais. Il a conclu un pacte avec les rebelles du RCD, qui collaboraient à leur tour avec l’armée rwandaise d’occupation.

La récréation est finie, selon l’UDPS, le parti vit maintenant «sur pied de guerre», il se trouve dans la phase juste avant la véritable guerre. À la question de savoir ce qui devrait se passer concrètement pour donner satisfaction politique à l’UDPS, la direction du parti ne peut que répondre qu’il faut la Réconciliation et le Dialogue. Traduction libre: que Tshisekedi puisse participer au pouvoir et donc au partage des postes et des fonds.

L’UDPS lance de nouveau des mots d’ordre dans toutes les directions. Dès demain, toutes les autos du Congo (excepté celles des diplomates et de l’ONU) doivent se parer d’une palme ou d’un ruban blanc. Le parti de Tshisekedi va aussi porter plainte contre les opérateurs GSM Celtel et Vodacom. Le 30 juin, ceux-ci auraient coupé les communications entre les dirigeants de l’UDPS. L’UDPS appelle à acheter dorénavant les unités d’appel GSM auprès d’un opérateur chinois.

(*) Le présent article a été publié sur http://archive.indymedia.be.