arch/ive/ief (2000 - 2005)

Bolivie : pays bloqué, tout est possible...
by fab Friday, Jun. 03, 2005 at 5:31 PM

Le parlement n'a toujours pas ouvert de session, les protestaions augmentent, le pays est bloqué, Mesa est isolé...

Hier soir, le précaire accord parlementaire qui prévoyait une session en vue de trouver une solution à la crise politique et sociale du pays échouait. La tension a atteint la limite avec des accusations mutuelles de boycott de l'accord entre les députés de Santa Cruz et ceux du MAS. Le MAS s'opposait à l'installation du Congrès (assemblée législative), puisque deux tiers des votes sont nécessaires pour inscrire un ordre du jour, le MAS y a vu une manoeuvre du président du parlement, Hormando Vaca Díez, et il a réclamé un accord de fond pour commencer la séance. Evo Morales a de nouveau accusé Vaca Díez de “manoeuvrer”, tandis que la brigade cruceña se retranchait dans la revendication du référtendum sur l'autonomie régionale et contre l'incorporation de l'Assemblée Constituante dans l'agenda. Les parlementaires "vont rentrer à l'hémicycle 'à l'aveuglette'", a lancé un législateur. "La brigade parlementaire de Santa Cruz veut manipuler le Congrès en faveur de ses demandes régionales", a dit le président de la Brigade parlementaire de La Paz, Alejandro Zapata, dans un climat politique dominé par des accusations mutuelles de déstabilisation.

L'incertitude a augmenté à propos de la continuité dans ses fonctions du président Carlos Mesa, soumis aux pressions croisées en faveur des autonomies régionales (de la part des cruceños) et de l'Assemblée Constituante et de la nationalisation des hydrocarbures (par les mouvements sociaux). Hier les protestations et les blocages se sont massifiées dans tout le pays, y compris les routes qui mènent à l'Argentine (au sud) et au Pérou (au nord). La grève totale du transport qui a paralysé La Paz, les accès entre La Paz et El Alto ont été à nouveau bloqués avec des troncs et des pierres, et les alteños menaçaient d'assiéger le dépôt de Senkata, qui approvisionne en combustible la capitale. En 2003, les tentatives pour débloquer ce point stratégique avaient commencé l'escalade de répression étatique et de résistance sociale qui a débouché sur le renversement du gouvernement de Gonzalo Sanchez de Lozada.

Hier, des versions ont été démenties à propos d'un soulèvement de policiers qui se seraient refusés à réprimer les manifestants, avec leurs propres revendications. Cependant, l'agression de l'Union de la Jeunesse Cruceñiste contre des indigènes et des paysans qui ont essayé de rentrer dans la ville de Santa Cruz de la Sierra a échauffé les ardeurs dans cette région orientale. Evo Morales a accusé les jeunes cruceños d'être des "paramilitaire, le bras armé du Comité Civique". Ils ont répondu que "à Santa Cruz nous sommes un peuple civilisé, nous n'allons pas permettre d'être occupés par des 'collaps' (indigènes)". Les paysans cruceños ont décidé hier de bloquer l'ancienne route qui mène a Cochabamba "contre l'agression fasciste".

Le directeur d'un organe de presse, qui a eu une entrevue hier avec Carlos Mesa, a dit à Página/12 que le président s'est montré déprimé et dépourvu d' initiatives pour trouver une sortie de tunnel. La Chambre des Exportateurs s'est jointe aux entrepreneurs qui ces derniers jours ont réclamé un pas de côté de Mesa. Alors que la Fédération de petites et moyennes entreprises de El Alto a dit que dans cette ville et à la Paz 500 000 emplois étaient menacés, en raison des mesures de pression, bien qu'elle se soit solidarisé avec les revendications sociales et a réclamé la démission du président bolivien. L'industrie de El Alto exporte des textiles et des bijoux en or, ce qu'il est rendu compliqué en raison de l'impossibilité d'accéder à l'océan Pacifique.

"Ni 30 ni 50 %, nationalisation !", chantaient hier soir les manifestants dans les environs du Parlement, consigne qui s'étend dans les secteurs populaires boliviens. A la fermeture de cette édition , les députés du MAS et d'autres mouvements indigènes essayaient d'empêcher l'ouverture de la session parlementaire si celle-ci n'inscrivait pas à son ordre du jour la convocation à l'Assemblée Constituante. De leur côté, les cruceños accusaient le MAS de bloquer une sortie de crise.

Pablo Stefanoni
Pagina/12, 3 juin 2005