Bolivie : entretien de Evo Morales by fab Friday, May. 27, 2005 at 6:05 AM |
Le député du Mouvement au Socialisme (MAS) recoit quatre journalistes étrangers dans son bureau du Parlement bolivien. Tandis qu' à quelques centaines de mètres, des milliers de ses alliés de la Centrale Ouvrière Bolivienne (COB) tentent de porter leur protestation aux portes de l'édifice. La bataille se déploit. Ceux de la COB lancent de la dynamite et la police leur répond avec des gaz lacrymogènes. Le son des détonations est par moments étourdissant. Morales, impassible, se comporte comme si cela n'avait rien à voir avec lui.
– Quelles modifications voulez-vous dans la Loi des Hydrocarbures approuvée il y a un peu plus d'une semaine ?
– Ce que nous voulons est que l'Etat bolivien prenne une véritable possession des hydrocarbures. La Bolivie a besoin de partenaires pas de maîtres de ses ressources. C'est ce qui se passe au Vénézuéla, à Cuba. Fidel (Castro) m'a dit un jour qu'il avait signé des contrats avec des compagnies pétrolières internationales parce qu'il avait besoin d'investissements. Il m'a expliqué que si l'entreprise ne trouvait pas de pétrole, l''Etat cubain ne perdait rien. Si elle en découvrait et commencait à l'exploiter, le gouvernement recoit 40 % des profits et l'entreprise 60 % jusqu'à ce qu'elle récupère son investissement. Une fois qu'elle y parvient, l'Etat commence à recevoir 80 % et l'entreprise, le reste. Ceci est un commerce équilibrée, non ?
– Quelle est la voie pour résoudre l'affrontement national au sujet des aspirations d'autonomie de la province de Santa Cruz ?
– Nous ne pouvons pas permettre que le référendum pour l'autonomie de Santa Cruz se réalise avant l'élection de délégués pour la réforme de la Constitution. Si c'est le cas, les cruceños peuvent s'assoir a la table de négociations pour la réforme en condition de supériorité par rapport aux huit autres provinces. Une sortie possible est que le référendum et l'élection des délégués de l'Assemblée Constituante se fassent simultanément mais qu'auparavant s'établissent les conditions pour la négociation de la réforme de la Carta Magna. Je suis disposé a m'assoir à dialoguer avec le Comité Civique de Santa Cruz (organe qui a impulsé le référendum dans la province) pour parvenir à un accord dans les conditions d'un procesus d'autonomie solidaire.
– Que se passe-t-il si tout échoue, jusqu'a quand peut se maintenir une situation comme celle que vit la Bolivie aujourd'hui ?
– Je ne sais pas jusqu'à quand nous pouvons être ainsi. La seule chose que nous voulons est que la sortie, quelle qu'elle soit, soit démocratique. S'il est nécessaire de convoquer des élections anticipées... Bien, en ce moment je ne sais pas, mais au moins c'est une solution démocratique. Ceci est le plus important. Maintenant il y a un grand vide de pouvoir en Bolivie. Le président Mesa pourrait passer à l'histoire s'il adopte une position nationaliste, souveraine. Maos Mesa n'est maintenant plus une solution, il n'est qu'en train de nuire au pays.
Fernando Gualdoni
Pagina/12, 26 mai 2005