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Raoul Marc Jennar (Oxfam): "Le sommet de l'UE était une opération cosmétique"
by Morgane Delaisse Thursday, Mar. 24, 2005 at 5:23 PM

Le Sommet européen n'aurait été qu'un jeu pour calmer les esprits...


Raoul Marc Jennar (photo raf)

“Le Sommet de printemps de l'Union Européenne est censé être le Sommet social annuel. Pour moi, ça relève d'une liturgie européenne pour faire croire que l'Europe s'intéresse au social mais ce qu'on rappele, c'est qu'elle donne la priorité à la stratégie de Lisbonne. Mais aujourd'hui cette stratégie c'est 19 millions de chômeurs, c'est la prétention qu'on peut faire du social avec du libéral et c'est un échec retentissant. Même un journal aussi libéral que The Economist en Grande Bretagne convient que les grands perdants de la stratégie de Lisbonne, ce sont les travailleurs. Néanmoins, on répète à satiété qu'il faut continuer dans cette voie là. Ce qui veut dire continuer à prétendre qu'on pourra augmenter l'emploi, améliorer le niveau de vie des gens avec la flexibilité, la dérégulation, la compétition, la concurrence comme normes suprêmes des relations et des activités humaines. Autrement dit, pour les dirigeants, si ça n'a pas marché, c'est parce qu'il n'y a pas eu assez de flexibilité, pas assez de dérégulation, pas assez de concurrence alors que cinq années ont démontré que ce ne sont pas ces principes qui empêchent la casse sociale, les destructions d'emplois et le démantèlement du modèle social européen, au contraire.

Je ne connais pas de partis politiques dans les parlements aujourd'hui qui remettent pas en cause les principes de la stratégie de Lisbonne. Sauf au Parlement européen, le Groupe des Gauches Unies Européennes, présidé par Monsieur Wurtz qui lui a tenu des propos non équivoques lors d'un débat. A part ce groupe politique là, tous les autres, en particulier en Belgique, tous, avant de formuler des nuances ou des restrictions, dressent des lauriers à la Stratégie de Lisbonne et à ces objectifs de faire de l'Europe l'économie la plus compétitive du monde. Comme si la compétition était l'alpha et l'oméga de la vie en société. On a oublié que dans cette stratégie il y avait un pillier social et un pillier environnemental. Et la Commission s'est bien gardée de faire des propositions sérieuses par rapport à ces pilliers.

Ce sommet est une opération “cosmetic”, pour calmer les opinions publiques car la prise de conscience et la colère montent. On fait semblant de changer le vocabulaire, on ne change pas les politiques. Ce n'est pas ce qui a été convenu sur la directive Bolkestein qui est de nature à me rassurer dans la mesure où les dirigeants insistent toujours sur la libéralisation des services. La proposition Bolkestein ce n'était que la mise en oeuvre de ce principe. Il y a une énorme hypocrisie là-dessus: on centre les débats sur Bolkestein mais cette proposition n'est qu'une application au niveau européen de l'Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) de l'OMC qu'aucun parti de type gouvernemental ne remet en cause en Belgique. L'AGCS n'est remis en cause ni par les socialistes, les libéraux ni les CDH et leurs équivalents dans le nord du pays.

Plusieurs sondages démontrent que le “non” peut l'emporter au référendum français. D'abord, le fait que Monsieur Chirac, ayant signé le Traité constitutionnel, est quasi contraint de le défendre. Il assume la responsablité politique de l'avoir acceptée et le fait que ses ministres ont participé à sa négociation. Au delà de ça, il clair que le Président de la république française semble envisager un 3ème mandat présidentiel. L'hypothèse de l'échec de ce référendum pour lui le condamne à une fin de carrière. Son acharnement à essayer d'éviter les choses qui fachent, les choses qui montrent l'Europe dans sa réalité, en ce sens est révélateur. C'est sur que la révélation de la portée de la proposition Bolkestein a provoqué une énorme émotion et on y a vu ce que ce que sera l'Europe de la Constitution. Il y a dans ce traité des articles très clairs sur la libéralisation des services, sur la liberté d'établissement et de circulation des services. On pourrait dire que Bolkestein c'est une anticipation de la Constitution avant même qu'elle ait été ratifiée. Et le bon sens populaire ne s'y est pas trompé.”

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