Communique CRER - CRACPE sur la Commision Vermeersch by CRER Tuesday, Feb. 15, 2005 at 4:58 PM |
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15 février 2005
Communiqué de presse :
Le rapport de la commission Vermeersch est à plusieurs niveaux un grand pas en arrière pour les droits des demandeurs d’asile et des sans papiers – Témoignage d’un incident sur un vol SN Brussels-Airlines vers Kinshasa
Le 15 février le rapport de la commission Vermeersch est présenté à la commission de la chambre des affaires intérieures. Les associations Coordination contre les Rafles, les
Expulsions et pour la Régularisation (CRER), Collectif de Résistance Aux Centres Pour Etrangers (CRACPE) et Vluchtelingen Aktie Komitee (VAK) s’opposent à l’élaboration aussi bien qu’au contenu concret de ce rapport qui essaie de légitimer les pratiques violentes des expulsions.
Vu la composition de la commission ( presque uniquement les services de police et de l’aéroport) et la mission très limitée que la commission s’est définie, la seule conclusion que l’on peut tirer de ce rapport est que la violence est éthiquement acceptée. Le point de départ de leur rapport était la nécessité ou non d’une procédure d’expulsion, Par la suite la commission n’a cherché qu’à démontrer que les procédures d’expulsions actuelles étaient éthiquement acceptables.
Pour réaliser ces expulsions, la commission trouve que tous les services sociaux responsables de l’accueil et du bien-être des demandeurs d’asile, comme les CPAS et les centres ouverts, doivent y participer. La commission veut aussi diminuer les contrôles judiciaires, déjà très restreints, des conditions d’enfermement des personnes dans les centres fermés. En cas de refus de départ, la durée d’enfermement serait à chaque fois augmentée. La commission parle même de séparer les familles afin de faciliter les expulsions ! Ceci est manifestement une violation du droit à la vie de famille. Il est clair que tous les droits et la conservation des droits des demandeurs d’asile doivent céder le pas pour arriver à une procédure d’expulsion souple.
Les justifications éthiques formulées par la commission nous semblent pitoyables. Sans aucune motivation la commission stipule qu'une politique d’asile et des procédures d’expulsions plus strictes ne peuvent que diminuer les migrations. Les migrations ont toujours existé et les contrôles accrus aux frontières vont les rendre plus difficiles, plus dangereuses et ne feront qu’augmenter le nombre de victimes des passeurs. L’organisation UNITED (united for intercultural action) souligne que 5000 personnes sont mortes suite à la politique d’asile européenne (jusqu’au 9-06-2004).
Au lieu de dépenser des millions d’euros à une politique d’enfermements et d’expulsions à court terme, le VAK, la CRER et le CRACPE plaident pour une politique qui permet à nouveau l’exil, un accueil humain des exilés et une politique de développement durable et équitable, permettant de garantir des conditions de vie décentes dans tous les pays, des relations équilibrées au niveau international constituant la base d’une solution visant à permettre au migrant de choisir le pays ou il veut vivre.
Les associations publient le témoignage d’une tentative d’expulsion sur un vol SN Airlines. L’incident nous prouve clairement que le contrôle social des passagers contre les expulsions est empêché par les services de police et qu’ils n’hésitent pas à utiliser la violence. Pourtant ce contrôle social était un des arguments de la commission Vermeersch pour ne plus filmer les tentatives d’expulsions.
Il s’agit du témoignage d’un des passagers d’un vol de Zaventem vers le Congo ou plusieurs passagers avaient tenté de protester contre une expulsion. Ces passagers ont été extraits du vol par les services de police avec beaucoup de violence. Nous n’avons plus eu aucune nouvelles de ces trois passagers.
A l’occasion du troisième anniversaire de SN Airlines, nous dénonçons avec force la collaboration systématique de cette compagnie aux déportations forcées, organisés par l’état.
Témoignage incident sur le vol de SN Brussels Airlines à destination de Kinshasa
Que s'est-il donc passé dans le vol SN ... du dimanche 28 novembre au départ de BXL à destination de Kinshasa ...
Par la présente, je tiens à relater des faits dont j'ai été le témoin direct. En effet, j'ai assisté à un incident - déplorable et qui selon moi, aurait pu être évité - qui a eu lieu au sein d'un avion de ligne de la compagnie SN BXL airlines.
J'étais une des dernières personnes à embarquer dans l'avion. Lorsque je rejoins ma place, en queue de l'appareil, je réalise que plusieurs personnes sont en train de protester à haute voie. Il s'agissait d'une altercation verbale entre 2 passagers, l'un d'origine africaine et l'autre à l'apparence européenne. Ce dernier s'est très vite présenté comme étant un représentant de l'ordre (gendarme ou policier). Je n'ai pas directement saisi le sujet de leur conversation. D'autres passagers assis à mon niveau m'ont expliqué qu'ils protestaient à cause de 2 personnes (d'origine africaine) qui siégaient tout derrière, les yeux bandés, les mains liées et entourés de 6 autres gendarmes ou policiers.
Au fur et à mesure que la voie des protagonistes montaient, d'autres passagers ont été interpellés et se sont dirigés là où nous étions. Ce n'est qu'après plusieurs minutes de discussions que j'ai enfin saisi le motif de leur mécontentement.
Les personnes qui protestaient ne voulaient pas voyager en compagnie de 2 personnes que l'Etat belge refoulait. Ils estimaient qu'en tant que client d'une compagnie privée, ils ne se sentaient pas en sécurité en présence des expulsés et des gendarmes.
Ces personnes ont demandé, puis réclamé que les 2 expulsés soient débarqués. Que si l'Etat belge rapatriait des personnes jugées comme illégales, qu'elles le soient par d'autres moyens. Le ton est vite monté de la part des passagers "africains", d'un autre côté certain gendarme et 1 employé au sol (gendarme ou SN) essayait de les persuader que c'était une pratique courante et que la sécurité des passagers n'étaient en danger. Ces paroles constituaient leur seul discour.
En effet, après avoir observé les 2 personnes en question, elles semblaient fort calmes, voire absente comme complètement groguies.
Les passagers debouts (entre 20 et 30 personnes) ont réclamé l'intervention du commandant afin qu'il puisse les écouter et statuer en tant que représentant de l'autorité à bord.
Le commandant est venu, est resté à peu près 60 secondes et est reparti en disant 2 choses :
que les voyageurs qui n'étaient pas content pouvaient débarquer de l'avion et s'arranger pour repartir avec un autre vol ;
et que ceux qui ne s'assayaient pas lorsqu'il pousserait les moteurs seraient débarqués.
Ce commandant n'a pas répondu aux passagers qui lui disaient avoir peur pour leur sécurité.
L'avion a commencé à faire ses manoeuvres. Nous avons quitté le quai d'embarquement en marche arrière pour faire quelques mètres. Le commandant constatant que +/- une trentaine de personnes étaient debout a annoncé qu'il retournait à sa position de départ. Il a ajouté que les personnes contestataires seraient débarquées.
L'avion s'arrête. Par le hubelot, plusieurs véhicules de gendarmeries sont visibles. La porte arrière de l'avion s'ouvre. Près d'une quinzaine de personnes montent rapidement et commencent à hurler que le désordre est fini (entre gendarmes en uniforme, personnel au sol ou autre non identifiables par le port d'un badge ou d'une quelconque tenue). Entre-eux, les nouveaux arrivants parlent néérlandais.
Ces personnes sont guidées par un individu qui avait pris part au débat d'avant (cette personne avait débarqué car étant apparemment personnel au sol). Il a pointé du doigt deux passagers d'origines africaines qui s'étaient montrés déterminées dans leur prise de position. Aussitôt ce doigt pointé, les gendarmes sont tombés sur ces personnes avec une violente détermination aussi. Ils les ont attrapés à plusieurs, tirant leur vêtement, agrippant leur membres, emprisonnant leur tête, donnant des coups pour répondre aux tentatives de défenses des 2 africains. L'interventions des représentants de l'ordre et des autres ont été d'une violence grave. Plusieurs passagères ont commencé à pleurer, affolées et en quasi état de choc. Les 2 personnes sont plaquées au sol et menotées. On entend leur cris de douleur. On percoit aussi leur pleur : la honte de subir un tel traitement.
Deux y sont passés, les autres sont effrayés par tant de violence et d'agressivité, mais le nettoyage n'est pas fini. Guidé par une gendarme, d'autres se précipitent vers le milieu de l'appareil où une autre personne, la troisième, considérée comme contestataire, est tirée de force vers l'arrière de l'avion. De même que pour les 2 autres, son évacuation se fait sans ménagement : elle est poussée à reculon vers la sortie, le bras d'un gendrame autour de son coup de sorte que cet homme respire avec peine. Sa tête heurte violemment le rebord du compartiment à bagages.
Voilà "à qui le tour" entend-on.
On entend encore certaines femmes pleurer. Personnes ne bougent. On se rassier et on se sent mal. Mal d'avoir assister à une telle démonstration de violence gratuite, mal de ne pas avoir eu le courage ou la bétise d'intervenir en s'interposant devant des hommes en uniformes. Bousculé parce qu'il est difficile de comprendre que cette situation n'a pu se résoudre par un dialogue contruit et structuré. Et puis, pourquoi l'Etat rapatrie des personnes par vol civil, que penser, que resentir lorsqu'on voit des personnes les yeux bandés, les mains attachées et 6 gendarmes autour ???
Je tiens à souligner que je suis indigné par cette intervention violente des représantants de l'ordre belge ; mais je suis tout autant abassordi par la légèreté du commandant face à cette situation. Le commandant aurait pu faire en sorte que cet épisode ne tourne pas au drame pour 3 personnes. Selon moi, il a fait preuve d'un manque flagrant de professionnalisme en ne gérant pas les débats. Il s'est retranché derrière une position intransigente, ne donnant, de fait, aucun espace à l'écoute, au dialogue et au règlement pacique de ce conflit.
Amnesty International by Christine Tuesday, Feb. 15, 2005 at 8:44 PM |
swart.bika@skynet.be 0498/715247 4000 LIEGE |
Voilà le
COMMUNIQUÉ DE PRESSE Amnesty International Belgique
publié à ce sujet.
Bruxelles, le 4 février 2005
La Commission Vermeersch II n'est pas à la hauteur.
Amnesty International n'est pas entièrement convaincue par les recommandations de la Commission Vermeersch II, rendues publiques le mercredi 2 février. Des jalons pour une politique d'expulsion «humaine et efficace», c'est ainsi que la Commission Vermeersch II désigne sa longue liste de recommandations concernant l'expulsion des demandeurs d'asile déboutés et des illégaux. La Commission formule des propositions concrètes afin d'améliorer la politique existante. Cependant, Amnesty International est d'avis, sur cer tains points, que la Commission n'est pas à la hauteur, entre autres là où elle évoque les suites à réserver aux actes de résistance à l'expulsion, le traitement des plaintes et le contrôle des enregistrements vidéos.
La Commission Vermeersch II, ou Commission chargée de l'évaluation des instructions en ce qui concerne les expulsions (II), a présenté son rapport final à la Commission de l'Intérieur de la Chambre des Représentants. Dans ses recommandations, la Commission a manifestement tenu compte du point de vue d'Amnesty International. Cependant, il y a un certain nombre de lacunes dans le rapport et les recommandations de la Commission sont parfois contradictoires avec le droit international.
Ainsi, par exemple, la Commission établit que la résistance à l'expulsion forcée ne peut être récompensée. Celui qui résiste mérite punition. Cette punition comprend, entre autres, que l'individu concerné peut être détenu
jusqu'à ce qu'il abandonne toute résistance et puisse effectivement être expulsé. Une durée maximale ‹ jusqu'à présent huit mois ‹ de détention ne serait plus d'actualité. En outre, le terme résistance n'est pas clair. Cela
fait craindre qu'un simple refus de collaboration ou une rébellion physique suffisent pour être sanctionné. Il existe donc un risque certain qu'un étranger puisse rester en détention pour une durée indéterminée. Dans le
passé, la Belgique a déjà été épinglée par le Comité des Nations unies contre la torture en ce qui concerne la durée vraiment trop longue de la détention administrative. La Commission Vermeersch II propose maintenant
d'allonger encore cette durée !
Une seconde préoccupation concerne le contrôle en matière d'expulsion forcée. L'amère réalité du passé indique que celui-ci est nécessaire. En cas d'actes de violence perpétrés par les agents de police lors d'une tentative
d'expulsion, Amnesty International reconnaît que les personnes qui en sont victimes ont le droit en théorie de déposer une plainte auprès des tribunaux. Toutefois, compte tenu des difficultés pratiques pour exercer ce droit, Amnesty International rappelle la nécessité d'instaurer un mécanisme de dépôt de plainte accessible, effectif et impartial. À cet égard, Amnesty International demande aussi que les expulsions soient filmées, contrairement
à l'avis rendu par la commission Vermeersch.
Dans un proche avenir, le rapport sera discuté en long et en large à la Commission de l'Intérieur de la Chambre et au sein du gouvernement. Amnesty International conclut que la politique d'expulsion belge doit être améliorée, mais que le législateur et le gouvernement doivent le faire en tenant compte du droit international en matière de droits humains. La politique d'expulsion ne doit pas seulement être «humaine et efficace», elle doit aussi pouvoir soutenir l'épreuve des droits humains. /FIN