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AGC Splintex / "Séquestration", mais qui prend qui en otage?
by raf Friday, Dec. 03, 2004 at 10:23 PM
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La multinationale Asahi Glass Company (AGC) Automotive veut licencier 284 personnes à son usine à Fleurus. AGC l'annoncé jeudi lors d'un conseil d'entreprise extraordinaire. La réaction a été immédiate: la direction a été retenue dans l'entreprise pendant presque 30 heures. "Scandale! Séquestration!" ont crié des médias, en parfaite consonance avec le patronat belge.

Le groupe japonais AGC – qui se dit "le Numéro Un du secteur verrier mondial" – est propriétaire de l'usine d'AGC Automotive à Fleurus où l'on produit des pare-brises et vitres de voitures. En février 2004, nous dit Paul Lootens (sécrétaire national FGTB, responsable pour ce secteur depuis le mi-novembre) la direction explique que Fleurus est l'usine la plus mauvaise du groupe. "Il faudra des mesures", dit-elle, sans pourtant préciser. Lors du conseil européen d'entreprise en septembre elle assure par contre qu'il n'y aura pas de restructurations.

Annonce illégale

Mais mercredi dernier, le 1 décembre, la délégation syndicale est alerté. La direction envoit une invitation pour un conseil d'entreprise extraordinaire qui devra avoir lieu le lendemain, jeudi 2 décembre, au lieu du 14 décembre comme prévu. Selon l'agence de presse Belga, mercredi dans l'après-midi une grève commence.
Jeudi matin la direction annonce sa restructuration à la délégation syndicale mais en même temps - pendant que la réunion est en cours - elle envoit une lettre à tout le personnel avec les détails du drame qu'elle a préparé: suppression de 284 emplois sur 834. En Annexe: le text d'un plan social. Lorsqu'à la fin la direction prend ses paperasses et veut emballer, elle est poliment demandée de rester où elle est et de ne pas quitter l'entreprise. Christian Viroux, FGTB-Charleroi: "Nous l'avons demandé de réfléchir de son côté, comme nous allons réfléchir du notre".

Les représentants du personnel ont immédiatement fait remarquer à la direction que, puisqu'il s'agit d'un licenciement collectif, elle n'a pas respecté la loi-Renault. La procédure prévoit que dans de telles circonstances la délegation doit être informée d'abord. A 10 heures la délégation adresse la parole à une assemblée générale du personnel.

Vers 12h45 l'agence Belga distribue la nouvelle que la direction est séquestrée. La dépêche reprend l'argumentation patronale et dit: "La direction a expliqué que l'usine de Fleurus est confrontée à un
manque de rentabilité qui se traduit par des pertes récurrentes depuis
cinq ans, malgré des efforts de recapitalisation de 155 millions
d'euros, et 43 millions d'investissements". La nouvelle de ladite "séquestration" se répand comme un feu courant. Vers 18h on apprend "qu'une entrevue est prévue avec le ministre wallon de l'Economie et de l'Emploi, Jean-Claude Marcourt, à
l'Hôtel de Ville de Charleroi". Le comité d'alerte, une nouvelle structure de conciliation, est également activé.

L'artillerie patronale

Mais vers 19h30 le patronat belge entre en scène.  L'agence Belga: "L'action de séquestration conduite à l'encontre de la direction de l'entreprise AGC Automotive, à Fleurus, a été fortement condamnée par les représentants patronaux. Le président de la fédération belge des entreprises (FEB), Luc Van Steenkiste, l'a qualifiée de "tout à fait inacceptable. (...) Van Steenkiste a estimé que le comité d'alerte devait pouvoir faire son travail. Si ce comité ne parvient pas à trouver une solution rapidement, "les employeurs durciront leur point de vue", a-t-il déclaré en marge des négociations interprofessionnelles qui se déroulaient jeudi".

Vendredi matin Van Steenkiste est omniprésent dans les médias. Et pendant la nuit il a déjà considérablement durci son ton: ce matin il déclare que tant que la direction d'AGC n'est pas libéré les négociations interprofessionnelles ne reprendront pas. En d'autres mots: les travailleurs de Fleurus portent la responsabilité si les négociations interprofessionnelles échouent.

Pendant la journée le patronat sort toute une artillerie: la FEB exige qu'un accord de 2002 soit mis en cause et que désormais les authorités sous la direction du ministre de l'Intérieur interviennent automatiquement et immédiatement. La FEB demande en d'autres mots une intervention immédiate de la police fédérale. A cela s'ajoute une déclaration de l'Union Wallonne des Entreprises (UWE) "qui a rappelé son opposition à toute forme de privation de liberté dans le cadre d'un conflit social".

Les patrons ne s'expriment pas sur le fait que – 3 jours avant le Saint-Nicolas – quelques 840 familles se voient condamnées à une longue période d'angoise et d'incertitude.

Privé de vie

Vendredi après-midi les présidents des Commission Paritaires 115 et 218 pour le secteur verrier invitent travailleurs et direction à se mettre ensemble pour une première tentative de conciliation. La réunion est convoquée pour 14 heures. Mais comme la direction n'a été renvoyée de l'usine vers 12h30 – après une décision en assemblée générale – et que les directeurs décident d'aller se raffraîchir avant de confronter les représentants du personnel, la réunion commence seulement peu avant 17 heures.

Dans le nouvel immeuble du ministre du Travail, à côté de la gare de Midi, nous soumettons les déclarations patronales à quelques travailleurs et syndicalistes. Un travailleur: "Vous savez qu'à Charleroi on trouve maintenant 1 emplois pour 40 personnes actives! Chez nous 1 sur 3 est menacé. On parle de privation de liberté ici? Mais nous sommes privée de notre vie". Tony Marzola, délégué CSC: "La FEB veut évidemment utiliser tout argument pour imposer son cahier de revendications au monde du travail". Christian Viroux, FGTB: "Nous sommes abassourdis! La FEB nous prend en ôtage en disant que ça serait de notre faute si les négociations interprofessionnelles n'aboutissent. Qui prend donc qui en ôtage?".