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Dernières infos sur le Suicide d'un Congolais à Merksplas
by PASSE MURAILLE Saturday, Sep. 18, 2004 at 6:03 PM

Non respect par l'Office des étrangers du droit au regroupement familial prévu par la législation européenne et belge.


Informée par le communiqué du MRAX et de la Ligue des Droits de l'Homme, du suicide d'un jeune à Merksplas, j' ai décidé d'effectuer une visite parlementaire vendredi 10 septembre à Merksplas, pour mieux comprendre le déroulement des événements, recueillir des infos.

Par Zoé Genot, députée fédérale ECOLO

Situation à Merksplas :

Ce monsieur a d'abord été enfermé le 26 février 2004 au centre fermé de Vottem puis transféré à Merkplas le 9 mars. Il était assez angoissé et solitaire. Dès le début il aurait demandé à être seul. Mais aurait été mis en groupe, puis suite à ses difficultés et demandes répétées, en cellule individuelle.

Finalement il eut droit à une formule mixte : 4 heures en salle commune, et le reste seul .

Cet été, assez désespéré, il multiplia les appels à l'aide dans toute les directions.

C'est pendant qu'il était en salle commune qu'il s'est suicidé dans une toilette. Mercredi en fin d'après-midi, lors du comptage, à l'heure de "promenade", une personne manquait. Il sera trouvé quelques minutes après, trop tard. Le parquet est venu sur les lieux et a constaté le suicide.

Sa femme, fut prévenue le jour même, et amenée à Merksplas, où elle pu rencontrer les congolais qui partageaient la salle commune avec son mari.

Dans la soirée, la direction décida d'informer les autres groupes de prisonniers. Une des ailes (la plus ancienne, sans douches journalières) se rebella, manifesta sa solidarité en cassant télés, éviers, mobilier...

La direction fit intervenir la police, plusieurs personnes furent mises en cellule d'isolement, et le même scénario se répéta le jeudi matin. Au total 11 personnes furent isolées, puis transférées immédiatement dans d'autres centres fermés. Une autre aile protesta avec des affiches.

Vendredi au 127bis et à Bruges, après l'information, il y eut aussi de petits mouvements (refus de quitter le réfectoire,...)

Le principal reproche fait à la direction est le suivi psychologique insuffisant. La personne ayant souvent évoqué ces envies suicidaires et ayant déjà fait de multiples tentatives, méritait une attention particulière.

Il n'y a qu'une psychologue à Merksplas pour plus de 11O pensionnaires (capacité de 180) et pour le personnel. Elle s'occupe principalement de « raisonner » les personnes isolées et de la préparation à l'expulsion.

Deux médecins extérieurs assurent en semaine, deux heures de permanence par jour , après avoir vu un-e des 5 infirmier-e-s du centre.

La situation administrative de la personne :

Marié avec une belge, il avait le droit d'effectuer une demande d'établissement (art. 40 de la loi du 15.12.1980)

 - En novembre 2003, il a introduit cette demande qui a donné lieu à une décision négative de l'Office des étrangers au motif qu'il n'était pas en possession d'un passeport.

Il n'avait pas encore consulté d'avocat, et n'a donc pas fait de recours.

 - En mars 2004, il est arrêté et mis en détention administrative à Merksplas.

 - Il obtient un nouveau passeport et veut introduire une nouvelle demande d'établissement.

 - Son épouse résidant à Verviers: c'est à Verviers que la demande d'établissement doit être introduite , il est donc transféré de la prison de Merksplas à la prison de Verviers.

 - La commune de Verviers refuse d'acter la demande d'établissement au motif qu'il n'habite plus à Verviers (!) C'est absurde puisqu'un étranger illégal, marié avec une ressortissante belge (ou de l'UE) a le droit d'effectuer une demande d'établissement vis-à-vis de son épouse domiciliée dans la commune. Et ce, même s'il n'a pas lui-même de domicile légal, et même si pour des raisons indépendantes de sa volonté, il ne peut résider avec elle !

 - On le ramène à Merksplas.

 - L'avocat prend contact avec l'Office des étrangers qui au début ne comprend pas pourquoi il a été renvoyé à Merksplas.

 - Ensuite, l'Office des étrangers dit à l'avocat que son client ne peut pas faire une demande d'établissement parce qu'il a fait l'objet dans le passé d'un arrêté ministériel d'expulsion (! C'était faux car, lorsqu'une personne, qui fait une demande d'établissement, est considérée comme présentant des risques pour l'ordre public, elle reçoit une décision négative - annexe 20 - susceptible d'un recours en révision suspensif, et elle peut se défendre devant la Commission consultative chargée de rendre un avis à l'Office des étrangers. Mais pour que cette procédure puisse être mise en route, il faut que la demande d'établissement de départ ait été actée par la commune !)

 - L'avocat contacte alors l'adjoint de M. ROOSEMONT (directeur de l'Office des étrangers) et lui fait part de la situation. Celui-ci lui répète que son client ne peut pas faire de demande d'établissement au motif qu'il a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion dans le passé, L'avocat lui répond ce qui est expliqué ci-dessus.

L'adjoint dit aussi qu'une autre raison est le fait que son client est illégal et que par conséquent il ne peut pas faire de demande d'établissement. L'avocat lui rappelle que la Cour de Justice des Communautés européenne a condamné la Belgique pour avoir mis des conditions supplémentaires (à celles prévues dans la législation de l'UE) aux demandes d'établissement suite à un mariage avec un ressortissant belge ou européen. Selon l'enseignement de la CJCE, il n'est pas nécessaire d'être en séjour légal ou titulaire d'un visa pour pouvoir introduire une demande d'établissement suite à un mariage avec un ressortissant belge ou de l'UE établi en Belgique.

 L'adjoint de ROOSEMONT n'était pas ouvert à la discussion (l'avocat s'est demandé s'il ne comprenait pas ou faisait semblant de ne pas comprendre...)

 - Son client lui téléphonait tous les jours complètement désespéré

- l'avocat se préparait à introduire une requête en référé auprès du Président du Tribunal de première instance pour faire condamner la commune à acter la demande d'établissement lorsqu'il a appris que son client s'était suicidé...

 - Lorsqu'il a repris contact avec l'Office des étrangers, on lui a tout simplement dit qu'il avait déjà souvent menacé de se suicider... !!!

 Situation dramatique et kafkaïenne.

 Zoé GENOT, députée fédérale ECOLO

 zoe.genot@ecolo.be

Transmis par Passe Muraille

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