arch/ive/ief (2000 - 2005)

OMC : Coup de force des pays riches
by Raoul Marc Jennar (Oxfam) Wednesday, Aug. 04, 2004 at 10:55 AM

Exaspérés par l'intransigeance et l'arrogance des Occidentaux , les pays en développement ont bloqué les négociations à l'occasion de la 5ème conférence ministérielle, à Cancun en septembre dernier. Depuis lors de multiples tentatives de relance ont été tentées par les gouvernements des pays riches sous la pression constante des groupes de pression du monde des affaires et de la finance.

En novembre 2001, sous la pression des pays riches et au nom de «la lutte contre le terrorisme», les Etats membres de l'OMC adoptaient un programme de négociations qui devaient se terminer fin 2004 et qui fut baptisé «Agenda de Doha pour le Développement.»

En dépit de son intitulé, aucune décision effectivement favorable aux pays en développement n'est sortie à ce jour de ces négociations. Les pays riches entendent imposer leurs propositions. Ils sont donc restés sourds à des alternatives plus équilibrées avancées par les pays en développement. Exaspérés par l'intransigeance et l'arrogance des Occidentaux , les PVD ont bloqué les négociations à l'occasion de la 5ème conférence ministérielle, à Cancun en septembre dernier. Depuis lors de multiples tentatives de relance ont été tentées par les gouvernements des pays riches sous la pression constante des groupes de pression du monde des affaires et de la finance.

Ces efforts se caractérisent à la fois par des méthodes de prise de décision qui sont une insulte aux principes démocratiques et qui ne relèvent que des rapports de force, par des modifications des concepts et du vocabulaire qui changent la formulation des propositions, mais laissent la substance intacte, par des pressions directes sous forme de retrait d'aides comme l'Union européenne vient d'en infliger au Kenya, un des porte-parole les plus éloquents des pays africains. Le texte final, adopté ce 31 juillet, est issu d'une réunion restreinte d'une trentaine de pays à laquelle seuls les gouvernements les moins opposés aux propositions occidentales ont eu le droit de participer, les autres étant réduits à accepter ou à rejeter le résultat, forcés ainsi d'endosser la responsabilité de l'échec.

Le texte adopté, sil précise quelque peu les termes du programme de Doha dans certains dossiers auxquels les pays en développement sont sensibles, reporte surtout son échéance à décembre 2005.

Les précisions apportées dans le dossier agricole ne sont pas assorties dun calendrier qui les rendraient crédibles, les modalités arrêtées pour des négociations en matière d'investissement limitées à la facilitation des échanges nécartent pas de l'OMC de possibles négociations sur les autres questions liées à l'investissement, les propositions sur le coton ne sont pas juridiquement contraignantes, les dispositions relatives à l'accès au marché des produits industriels menacent la survie des industries dans le Sud. En outre, ces dispositions ont offert l'occasion aux pays riches d'inclure de nouvelles avancées dans le processus de mondialisation néolibérale destructrice de la souveraineté des peuples.

Dans le domaine de l'Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) des dispositions extrêmement importantes ont été adoptées qui vont accélérer le démantèlement des services publics et la marchandisation globale des activités de service:

- les 105 pays qui n'ont pas présenté de listes de services qu'ils sont disposés à privatiser devront le faire pour mai 2005 ;

- une évaluation de l'ampleur des privatisations ainsi «offertes» par chaque pays sera effectuée par l'OMC à cette échéance ;

- il sera vérifié si ces «offres» débouchent sur une véritable ouverture des marchés et une privatisation substantielle ;

- il sera vérifié si un «haut niveau de libéralisation» est atteint, «aucun secteur, ni aucun mode de fourniture de service n'étant exclu a priori»

- les négociations sur les législations et réglementations nationales considérées comme des «obstacles non nécessaires au commerce» ainsi que sur les subventions considérées comme «entraînant des distorsions à la concurrence commerciale» devront être finalisées.

Une fois de plus, les négociations commerciales internationales telles quelles sont conduites dans l'enceinte de l'OMC illustrent la permanence d'une volonté des Occidentaux de dicter leur loi au monde. Tout le reste relève d'une rhétorique qui trompe de moins en moins les peuples.