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[Interview] David Pestiau (PTB): "La voix inutile, c’est celle des partis au gouverne
by Georges Alves Wednesday, Jun. 02, 2004 at 2:34 PM

« La voix inutile, c’est celle qui s’exprime pour les partis au gouvernement qui, malgré certaines promesses, d’année en année, [continue traduire] plutôt des programmes antisociaux. » Entretien téléphonique de David Pestieau, 2ème sur la liste PTB (Parti du Travail de Belgique), dans la perspectives des élections européennes et régionales du 13 juin prochain.

David Pestieau, comment réagissez-vous au fait que votre parti n’ait pas accès aux médias en cette période électorale ?

D.P. : C’est un déficit de démocratie. Il n’est pas normal. Avant les élections on doit avoir comme principe l’égalité complète de tous devant les médias. Même dans des pays comme la France - ce qui ne sont pas spécialement des modèles de supers démocraties - au moins les candidats aux élections présidentielles ont chacun en temps d’antenne, une tribune, des débats télévisés auxquels ils peuvent participer… On voit exactement le contraire maintenant en Belgique puisque le dispositif électoral de la RTBF vous donne zéro seconde à s’exprimer alors que pour les partis socialiste, écologiste, etc. il y a des heures et des heures d’antenne. Là, il y a une discrimination évidente. Ca nous semble pas normal. C’est pour ça qu’on s’est battu pour avoir accès finalement aux médias et on a obtenu quarante secondes. Quarante secondes sur les quatre ans ! vous vous rendez compte ?

Vos chances de remporter ne serait-ce un siège sont tout de même quasi-nulles, pourquoi tenez-vous vraiment à participer à ces élections ?

D.P. : D’abord on participe aux élections surtout pour donner un signal clair à l’électeur, il peut s’exprimer contre la politique du gouvernement, il peut protester contre cette politique sans voter pour l’extrême droite ; voter pour un programme clair comme le nôtre, par exemple : « Les gens d’abord, pas le profit ». Ca c’est la première chose. Deuxièmement, c’est parce qu’on estime qu’on doit se battre même si, pour nous, le combat est un combat inégale, même si notre voix est encore assez faible, sinon c’est uniquement la voix des puissants qu’on entendra.

Les partis traditionnels appellent à voter utile … Un vote pour un parti comme le vôtre, le PTB, n’est-ce pas une voix perdue  d’avance pour l’électeur ?

D.P. : Je crois plutôt que c’est le contraire : la voix inutile, c’est celle qui s’exprime pour les partis au gouvernement qui, malgré certaines promesses de faire une politique au service des gens, d’année en année, traduisent plutôt des programmes antisociaux. Il suffit de voir le fait qu’on veux maintenant allonger la carrière. Il suffit de voir aussi le marché du travail qui est dérégulé… Tout ça, c’est mené, soit-disant par des politiques de gauche. L’Europe libérale qui décide de toute sorte de décision, comme par exemple, la privatisation de la Poste, de la SNCB… tout ça, c’est décidé par des gens qui ont été, soit-disant élus de manière utile. Donc, ça nous paraît inutile de voter pour des partis qui vont être contre les gens et qui vont travailler pour le profit. Ca, ça nous paraît vraiment inutile.

Quels sont les points les plus importants que vous mettez en avant dans votre programme ?

D.P. : On met essentiellement trois grands points en avant : le premier point, c’est au niveau de l’emploi. Nous, on estime qu’il n’est pas normal qu’on allonge la carrière pour des travailleurs concrètement en Belgique et qu’on veut attaquer la pré-pension et que, d’un autre côté, les jeunes finalement sont sans emploi. Ils sont dans la rue, alors que si on défendait le droit à la pré-pension avec le remplacement par un jeune, obligatoirement ; on permettrait que le plus ancien ait un repos bien mérité et, d’un autre côté, que le plus jeune ait un emploi et un avenir … parce que, pour l’instant, c’est pas du tout ce qu’ils ont. Le deuxième grand point qu’on met en avant, c’est le fait qu’on veut une médecine accessible et, particulièrement , les médicaments complètement remboursés. On constate que certains pays arrivent à le réaliser tout simplement en imposant à l’industrie pharmaceutique d’avoir des prix justes grâce à un système contrôlé par l’Etat. Et enfin, pour financer tout ça, on pense qu’il est temps de mettre fin à un tabou en Belgique, et ce tabou, c’est le fait qu’il n’y a pas d’impôt sur les grandes fortunes. Nous, on paye 30 à 40% d’impôt pour le salaire ; on devrait taxer 1% d’impôt sur les grandes fortunes, comme celle du chef d’Interbrew de Spoelberg qui se monte 80 milliards d’anciens francs belges ! Et donc, 1% sur cette grande fortune nous permettrait, par exemple, d’ouvrir des crèches qui manquent cruellement actuellement aux parents.

Comment les électeurs peuvent-ils se renseigner sur votre programme sans passer par des médias de service public?

D.P. : La première chose qu’on a faite, c’est développer nos propres moyens de communication : on a un journal et un site qui est visité par plus de trois mille personnes par jour. C’est le site www.ptb.be. Là, on trouve pas mal d’information alternative. Deuxièmement, on essaie d’informer un maximum de gens dans des quartiers et dans des entreprises par un travail militant. Et puis, on essaie aussi de percer dans la question médiatique. C’est-à-dire qu’on essaie d’abord de passer dans des médias comme Indymedia, par exemple, ou des radios libres et puis, on continue à mener le combat pour obtenir un accès aux médias de service public. C’est un point qu’on va certainement développer dans les années à venir. Parce qu’il n’est pas normal que des partis qui ont une alternative anti-capitaliste ne puissent pas s’exprimer dans les médias. Le système maintenant est de fait qu’on construit de plus en plus un système où il y a quatre grands partis - on va dire de gouvernements - et la seule opposition qui est présentée dans les médias comme une opposition au gouvernement, c’est celle de l’extrême droite. Non seulement que c’est quelque chose de très mauvais parce qu’on ne peut pas donner une alternative aux gens contre le gouvernement, mais deuxièmement – et ça c’est encore plus important – on fait le jeu de l’extrême droite. Finalement la seule alternative qu’on donne aux gens qui sont dégoûtés par la politique du gouvernement, c’est de dire : « voter extrême droite » et ce message, on veut le briser, on veut avoir un accès intégral aux médias. Mais on va de toute façon d’abord et avant tout compter sur nos propres forces pour le développer.