arch/ive/ief (2000 - 2005)

Colloque: les législations antiterroristes européennes au regard des droits de l’homme.
by Progress Lawyers Network Thursday, Feb. 12, 2004 at 2:37 PM
antwerp@progresslaw.net

Ce 27 février 2004 se tiendra à Bruxelles un colloque pour discuter des législations antiterroristes européennes. Différents orateurs sont prévus, certains venus de différents pays européens afin qu’ils nous parlent de leur expérience, d’autres nous parleront de la nouvelle loi belge sur les infractions terroristes. Présentation de l’actualité du colloque.

Fin septembre 2004. Rentrée sociale chaude. Le gouvernement a mis en oeuvre une batterie de mesures antisociales dont une réduction drastique de son investissement dans la sécurité sociale. Détricotement du droit à la pension, exclusion du chômage, flexibilitté et employabilité ou travail à peine forcé. La tension est à son comble. Plusieurs délégations syndicales ont décidé des journées de grève en protestation et bloquent l’accès de leurs entreprises . Jean et ses collègues sont très actifs au piquet et, un soir, épuisés par leur journée, s’emportent … Alors que des huissiers accompagné par des policiers veulent mettre fin au piquet de grève, des coups sont échangés.
Deux jours plus tard, un collectif de chômeurs envahit les bureaux de la direction de l’ONEM et menace de retenir ses membres dans le bâtiment tant qu’ils n’auront pas été entendu par le gouvernement. Hamid est alors un jeune chômeur qui n’en pouvait plus de se faire refuser à tous les boulots où il se présentait …

Février 2005. Le gouvernement est revenu sur certaines de ses mesures mais tout le monde ne peut fêter dignement cette victoire. Jean et Hamid reçoivent une inviation à comparaître devant le tribunal correctionnel de Bruxelles. Nos deux comparses sont respectivement poursuivis du chef de « coup et blessures volontaires » pour le premier et de « menace de prise d’otage » pour le second, « portant gravement atteinte au pays et commis intentionnelement dans le but de gravement déstabiliser ou détruire les structures fondamentales politiques, constitutionnelles, économiques ou sociales du pays ». En clair, ils sont tous les deux poursuivis pour avoir commis des infractions terroristes.
Cette qualification entraîne une aggravation particulièrement importante des peines qui leur seront imposées. Jean risque entre X et Y ans et Hamid entre Z et W ans de prison fermes alors que, sans intention "terroriste", les peines prévues pour coups et blesssures s'étalent de A à B ans et de C à D ans pour "menace de prise d'otage" (voir dans le Code pénal et la loi du 19 décembre 2003 pour remplacer ABCBXYZW : gros travail mais cela me semberait plus clair et précis. Je ne sais pas si la menace de prise d'otage existe en dehors de la loi terrorisme, à vérifier).
Infractions terroristes ? Le 11 décembre 2003, le parlement belge votait effectivement la loi sur les infractions terroristes. Cette loi fait suite à une décision-cadre du conseil de l’Union européenne qui impose aux Etats membres de l’UE d'introduire la notion de terrorisme dans leur loi nationale.

Elle n’a suscité aucune discussion substancielle sur les bancs du parlement. Et ce, malgré les protestations de certaines personnalités pour qui cette loi permet une criminalisation des mouvements politiques et sociaux radicaux.
Un appel européen avait déjà été lancé durant le mois de novembre 2001 sous le titre : « les droits démocratiques ne doivent pas devenir les dommages collatéraux de la guerre contre le terrorisme ».

Selon cet appel, « le projet est présenté comme une réaction aux attentats de New York et de Washington. Pourtant, dans l’état actuel de la législation, les auteurs d’attentats similaires ne pourraient rester impunis dans aucun pays européen.

La nouvelle législation proposée par la décision-cadre du Conseil n’ajoute dès lors aucune plus-value à l’arsenal législatif qui permet de combattre des actions de cette nature.

Par contre, la définition proposée est à ce point large qu’elle permettrait de criminaliser et de qualifier de « terroriste » toute forme de lutte sociale ».
La loi belge permet aussi de telles dérives. L’exemple de Jean ou Hamid n’est pas qu’une simple fiction. Il correspond aux critères qui sont exigés par la loi.
Pour prendre d’autres exemples, la « perturbation de l’approvisionnement en eau et électricité et toute autre ressource naturelle fondamentale » réduirait à du terrorisme une action sociale chez les travailleurs de ces secteurs si elle a pour effet « de mettre en danger des vies humaines ».
L’année dernière, des manifestants ont entrepris l’action « Trainspotting » : le but de ces protestations étaient d’empêcher le matériel de guerre américain transporté en Belgique par train d’arriver à bon port. De tels actes sont susceptibles d’être qualifiés de « capture de moyens de transport » constituant une infraction terroriste selon le cadre légal qui est nouvellement fixé.
Bien sûr, une certaine gravité des faits est requise mais, en réalité, tout relève de l’appréciation « souveraine » du juge. Cet arbitraire démontre que cette législation anti-terroriste pourra surtout servir de nouvelle machine de guerre contre les droits démocratiques fondamentaux et contre ceux qui, pour diverses raisons, se trouveraient « en opposition » avec un système économique, politique et social de plus en plus mondialisé et injuste.
Il est indispensable de rassembler les voix critiques contre cette loi et son équivallent européen. Un colloque se tiendra sur ce sujet le vendredi 27 février 2004 à l’initiative du réseau d'avocats Progress Lawyers Network. Ce colloque se propose d’offrir une analyse pointue des législations européennes sur la lutte contre le terrorisme. Il fera le point sur la collaboration qui existe entre l’UE et les Etats-Unis ainsi que sur la situation des droits et libertés dans ce pays depuis le 11 septembre 2001. Il présentera enfin le recours organisé devant la Cour d’arbitrage contre la loi belge sur les infractions terroristes.