Juste un mot pour briser le silence... by PILI Friday December 05, 2003 at 04:16 PM |
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Près de 1200 jours de grève de la faim, 107 morts, 500 mutilés...
Juste un mot pour briser le silence...
Chers amis,
Bientôt, nous allons commémorer le martyre des prisonniers politiques de Turquie en résistance depuis 3 ans et deux mois contre l’introduction des prisons de haute sécurité de type F où règnent le non-droit et la torture, véritables mouroirs où un grand nombre de prisonniers poursuit encore et toujours, une grève de la faim à outrance avec l’espoir d’obtenir la levée du régime d’isolement en vigueur.
Nous allons également commémorer les prisonniers tombés entre les 19 et 22 décembre 2000 au cours d’un assaut militaire jamais vu dans l’histoire, dans lequel 8 bataillons de la gendarmerie et 37 divisions d’infanterie avaient étaient déployés autour de 20 prisons. Cette « opération tendresse » de « retour à la vie » comme l’avait décrite Hikmet Sami Türk, le ministre de la « justice » de l’époque, coûta la vie à 28 prisonniers politiques.
Il y a juste 3 ans, des prisonniers sans défense, affaiblis par 60 jours de grève de la faim avaient été assassinés par balles, asphyxiés, carbonisés dans un déluge de bombes fumigènes, de bombes incendiaires et de jets de lance-flammes. Dans un seul dortoir de la prison de Bayrampasa, six femmes ont été brûlés vives.
Au dehors, la répression n’a épargné aucune organisation démocratique : presse censurée, persécutions contre les journalistes et les militants des droits humains, mise sous scellés de leurs asssociations etc...
Pour les autorités, il fallait à tous prix étouffer le mouvement des grèves de la faim, montrer que la société était complètement pacifiée, que la Turquie était enfin « démocratique » et que l’on pouvait désormais entamer les pourparlers pour l’adhésion du pays à l’Union européenne.
En réponse, l’UE a ouvertement soutenu l’Etat terroriste de Turquie en publiant, par le truchement du Comité européen pour la prévention de la torture, des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) un rapport positif sur l’opération du 19 décembre, minimisant au possible les crimes commis par l’Etat. Pire, dès le début, l’UE avait soutenu le projet des prisons cellulaires de type F en les déclarant « conformes aux normes européennes ».
Le massacre des prisonniers avait commencé par le crépitement des mitrailleuses. Il se poursuit aujourd’hui par le silence.
Depuis, 107 prisonniers et leurs proches sont décédés dans cette résistance contre la torture, l’indifférence et le silence.
Pour briser le silence, des familles de prisonniers ont tenté de rencontrer les autorités, ont bloqué des ponts et des routes, ont occupé des bureaux de partis, ont organisé des rassemblements devant les prisons, ont collecté des signatures, ont chahuté des rencontres officielles, ont parcouru en tout des milliers de kilomètres depuis le début de la résistance... A chaque fois, elles ont été brutalisées, mises en garde à vue, torturées, jugées et parfois même incarcérées.
Pour briser le silence, finalement, ces familles se sont laissées mourir. Jeunes filles de 20 ans ou mères de famille de plus de 40 ans ont succombé à leur jeûne prolongé les unes après les autres.
Pour briser le silence, des prisonniers libérés parfois après 20 ans d’incarcération, ont préféré poursuivre leur jeûne et mourir aux côtés de ces familles plutôt que de goûter à leur liberté.
Pour briser le silence, au-dehors comme à l’extérieur des prisons, des gens se sont immolés par le feu.
Pour briser le silence, certains ont payé de leur liberté, de leur santé ou de leur vie.
Pour briser le silence, nous vous demandons juste d’envoyer un message de solidarité à ces prisonniers en grève de la faim, à leurs familles et à leurs proches.
La plate-forme internationale de lutte contre l’isolement (PILI) regroupant une série d’organismes et d’individus luttant contre la torture, organisera un symposium international sur les prisonniers politiques, la torture et l’isolement carcéral à Florence, du 19 au 21 décembre, au Palazzo Vecchio. Nous lirons vos messages au cours de ce symposium, les publierons et les enverrons à leurs destinataires en Turquie. Si certains sujets traités durant ce symposium vous intéressent et que pour l’une ou l’autre raison, vous ne pouvez vous y rendre, nous vous saurions gré de faire parvenir vos contributions écrites, analyses, communiqués ou suggestions. Celles-ci seront publiées dans les actes du symposium.
Merci d’avance.
Plate-forme internationale de lutte contre l’isolement
e-mail : isolation@post.com
Bruxelles : 0032 2 230 08 66
Florence : 00 39 347 138 09 80