Du 21 au 30 novembre au Botanique : 4ème Festival du Cinéma d’Attac by Attac-Bruxelles Thursday November 20, 2003 at 02:06 PM |
Dans le chaos des confrontations mondiales de plus en plus violentes - portées par les nouveaux damnés de la terre contre l’indifférence et la vénalité de nos sociétés –, comment ne pas abandonner? Comment faire entendre la voix des résistances?”
Resist, de Dirk Szuszies ouvrira le 4ème Festival du Cinéma
d'Attac. Pendant qu'en Extrême-Orient une guerre d'agression faisait
rage, à New York les happenings du Living Theatre défaisaient les
oracles des va-t-en-guerre tout en faisant le spectacle. C'étaient les
années 60.
Depuis, le Living - déclaré dix fois " cliniquement mort "-
nous revient dans "la nouvelle vague" des résistances en passant
par Gènes, le Liban sud ou la Palestine. Anarchiste, pacifiste, humaniste…
son message constitue une extraordinaire interpellation tant sur le fond des combats
menés que sur leurs formes.
Autre "événement": Power and terror, Noam Chomsky in our times donne la parole à l'un des intellectuels US les plus insolents. Les Etats-Unis ont-ils "cherché" les attaques du 11 septembre ? Nombreux sont les Américains à se poser cette question et à s'arracher les derniers livres du célèbre linguiste et politologue Noam Chomsky. Power and terror et 11/9 sont des best-sellers dans cinq pays dont les Etats-Unis et ont été traduits dans 22 langues.
L'engagement ? En d'autres temps déjà, des intellectuels se sont
dressés pour la justice et la liberté.
En 1936, le monde entier désavouait la complaisante soumission des gouvernements
occidentaux envers l'Allemagne nazie et l'Italie fasciste. Tristan Tzara, André
Breton, Pablo Picasso, Ernest Hemingway et beaucoup d'autres se mobilisaient
pour la défense de l'Espagne républicaine. La création
des Brigades internationales fut le fait de la solidarité entre travailleurs
et intellectuels du monde entier. André Malraux, dans son livre L'Espoir,
la photographe Greda Taro, tuée sur le front de Brunette, le grand reporter
Robert Capa et le documentaliste Joris Ivens en livrèrent au monde le
témoignage sublime.
Or aujourd'hui, de notre époque peu avare en conflits, nous n'entendrions,
si nous n'y prêtions pas garde, que les voix amplifiées par la
force des mass medias des chantres inconditionnels de la mondialisation et des
hérauts de "la guerre humanitaire". Ces "intellectuels
à gage" que l'Histoire ne retiendra pas autrement que les Céline
et Drieu la Rochelle.
Oppositions de masse? Des manifestants de Cancun , des paysans de La Paz, des
250.000 du Larzac, des ouvriers de Ford Genk, … nécessité
fait loi.
Cette propension explique et justifie, en tous cas, la reconduction d'un Festival
de Cinéma qui tient à la fois du rendez-vous culturel et politique,
donnant à voir et à entendre une diversité d'expériences
comme le mouvement réel, dans son sens large, se le figure.
Autant alors le répéter pendant dix jours: plus de 30 films et
presque autant de débats pour "décrasser l'information de
la marée noire des mensonges et des omissions".
Les diverses projections du film Resist déboucheront sur un premier
débat de qualité dont le thème sera "Quand la Culture
devient combat" animé par Abel Carlier, professeur à
l'IHECS, et Jacques Delcuvellerie metteur en scène de Rwanda 94. Le lundi
24 novembre,le film sera suivi d'une rencontre avec Joe Dekmine (directeur du
Théâtre 140), et enfin, le dimanche 30 novembre, avec Paul Biot
(créateur du Festival du théâtre-action porté dans
les usines occupées par les travailleurs et bien d'autres endroits où
Dieu n'a jamais daigné s'arrêter).
Power and Terror connaîtra trois débats également. Le premier avec Anne Morelli (professeur de critique historique à l'ULB, auteur de Propagande de guerre) et Michel Wery du GRIP. le second débat, avec Janette Habel, concernera plus particulièrement l'Amérique Latine et le dernier, dimanche 30, sera animé par Jean Bricmont (co-auteur de La fin de la fin de l'histoire, et préfacier du plantureux Tous pouvoirs confondus de Geoffrey Guens) et Henri Houben (économiste, membre du Secrétariat d'Attac-Bruxelles).
Y A-T-IL ENCORE DES OUVRIERS DANS LA CLASSE ?
Ressources humaines a révélé Laurent Cantet au public belge. A l'inverse des productions commerciales qui isolent les personnages de tout contexte social, le réalisme utilisé dans ce film de "classe" emporte intelligemment la conviction du spectateur. L'histoire dépeint l'enjouement puis le désarroi d'un jeune cadre, stagiaire dans l'entreprise où travaille son père engoncé dans la honte de sa condition d'ouvrier et fini par l'inéluctable confrontation prolétaire/exploiteur, une nécessaire révolte contre le despotisme patronal. Avec des acteurs, presque tous "non professionnels", qui donnent chair aux personnages sortis des comités de chômeurs… tout contribue ici à donner une tonalité expressément humaine à une histoire plus vraie que nature. Mateo Alaluf , sociologue, professeur à l'ULB, et auteur du "Dictionnaire du prêt-à-penser" animera le débat qui suivra, sur le thème des sciences humaines aux services des chefs d'entreprise?.
Michael Moore a fait un malheur avec "Bowling for Columbine". Dans "Roger and me", il relate, avec génie, la traque du PDG de General Motor responsable d'une vague de licenciements massifs à l'usine de Flint, USA.. Michael Moore se lance ainsi à la poursuite de Roger et nous fait pénétrer, candides et audacieux, sur les gazons verdoyants et les terrains de jeux d'une bourgeoisie d'affaires sablant le champagne, ou dans leurs palaces payés par les plantureux bénéfices de la spéculation financière. Son humour ne sera pas de trop pour affronter les laquais du système. En chemin, nous découvrons l'Amérique des pauvres gens à 5 dollars l'heure, jetés à la rue faute de ne plus savoir payer leur loyer …
Sur le même front "Le Chômage à une histoire" est un film dense, étançonné par des années de travail à rassembler documents, interviews, analyses. En bref, un travail colossal, sur ces années où l'histoire sociale a marché à reculons. Pensez, voilà trente ans que les patrons sont à l'offensive … avec, dans les appareils d'Etat, des gestionnaires politiques, libéraux de droite et de gauche, chargés de leur faciliter la tâche. Gilles Balbastre, journaliste au Monde diplomatique, en discutera avec le public.
SE SENTIR D'ATTAC
Réalisme de situation? En temps réel, 300.000 kilomètres par seconde, l'argent invisible circule. Argent noir, argent gris, le tout mélangé… ça fait du blanc, une transmutation des métaux qui aurait fait rêver les alchimistes d'antan. Par quel saint mystère? Pascal Lorent et Denis Robert l'expliquent -à travers un excellent documentaire "L'affaire Clearstream racontée aux ouvriers de Daewoo" et Jean-Marc Lauwers (membre du Conseil scientifique d'Attac) en précisera les techniques plus particulières, pour ce qui concerne la spéculation et les cadeaux officiels en matière d'amnistie fiscale.
Dans la même veine, "L'autre mondialisation" de François Christophe est un excellent rappel des combats contre l'OMC, de la spéculation et de son remède, son grain de sable (la taxe Tobin). Déstabilisation, dévaluation financière en Corée, au Japon, en Russie, passez la monnaie: les grands jouent au Monopoly avec la vie des peuples.
Penser global, agir local: expérience locale, "Barricade" de Yannick Bovy et Mathieu Sonck relate le projet d'une maison communautaire dans un quartier de Liège. Ensemble, des personnes réfléchissent et vivent d'autres habitudes de consommation. Sur le ring (pardon: "pour le débat") : Jacques Nikonoff. Le Président d'Attac-France n'a certes pas été boxeur comme Jack London, mais quand même: ouvrier en usine, délégué CGT, habitant en HLM "Cité des 4000" pendant 23 ans, chômeur, il entreprend finalement des études à l'Université Paris VIII, puis à l'ENA. En 2000-2001, il est membre de la direction du PCF. Aujourd'hui, il enseigne l'économie à Paris VIII…
EST-CE AINSI QUE LES HOMMES VIVENT?
Grappes humaines au travers du Ténéré, en camions, sur de maigres rafiots, des containers ou dans les soutes à bagages, les nouveaux gueux sont prêts à tout pour rejoindre L'Eldorado européen. Deux longs métrages en témoignent : "Frontière" de Mostèfa Djadjam, et "Terre de Confusion" de Paola Stevenne. De Ceuta (enclave espagnole au Maroc) à Berlin, le film nous livre les mécanismes de l'immigration pour tous ces sans-papier que nous croisons chaque jour dans les grandes métropoles urbaines, tous ces travailleurs déprimés aux salaires comprimés.
Est-ce ainsi que les hommes vivent? L'Eldorado: l'Europe des droits de "L'être
humain", ou l'Europe proxénète? Ou les deux à
la fois ? 500 à 800.000 femmes sur le marché, livrées à
la prostitution, jolies blondes d'Ukraine ou jolies brunes de Colombie, qui
ont cru en nos vertus et n'ont plus que leurs yeux pour pleurer. "Lilya
4 ever" de Lukas Moodysson, n'est qu'à peine une fiction. Lilya,
16 ans, vit dans un faubourg sinistre de la nouvelle Russie. Sa mère
fait connaissance par annonce avec un Américain qui lui propose de franchir
l'Atlantique, mais Lilya apprend bientôt qu'elle ne sera pas du voyage.
Le débat, avec Sophie Jekeler, juriste et présidente de l'association
Le Nid et Françoise Guillitte d'Amnesty International portera sur la
traite des êtres humains.
Le réalisateur Patric Jean (un habitué du festival d'Attac) viendra
nous présenter son dernier film "La raison du plus fort".
Le public aura ainsi l'occasion de revenir sur les ressorts de ce fulgurant
et passionnant moyen-métrage: précarité et répression,
ici en Europe. L'insistance des autorités européennes et des gouvernements
nationaux à traiter la pauvreté, qui s'amplifie depuis des années,
par des formes sophistiquées de contrôle social, fera d'ailleurs
l'objet d'une discussion avec l'une des meilleurs spécialistes de cette
question centrale: la juriste Anne Maesschalk.
Que devient-on, quand on ne s'appelle pas Léon, et qu'on fait partie de la quatrième génération? Calqué sur un discours raciste prononcé par J. Chirac, devenu depuis Président de la République, "Le bruit, l'odeur et quelques... étoiles" raconte l'histoire d'un jeune de Toulouse, tiré comme un lapin alors qu'il tentait "d'emprunter" un véhicule. Révolte, bagnoles incendiées, vitrines cassées, trois jours d'affrontements, policiers et CRS venus de partout pour la reconquête du quartier. Eric Pittard a construit son film comme un opéra, interviews d'un trio de copains qui porteront la révolte plus loin, des témoins, du commissaire de police, des avocats: le racisme suinte de partout. Le groupe Zebda intervient en chansons (on pense à L'opéra de quat'sous de Brecht). Au fond, y a-t-il un avenir pour la jeunesse des quartiers de relégation? Andréa Rea (sociologue et professeur à l'ULB) aura plein de choses à nous faire partager à ce propos en ce qui concerne une autre grande ville: Bruxelles.
"Être et avoir" de Nicolas Philibert nous conte l'aventure
au quotidien d'une école à classe unique, qui réunit tous
les enfants d'un même village perdu au coeur de l'Auvergne.
"Une leçon de tolérance" de Roger Beckmans nous
ouvre les portes d'une école de quartier populaire: une vie au quotidien
avec des enfants d'ici et d'ailleurs.
"L'éducation à la Liberté"; la pédagogie
de Paulo Frère pause la réflexion de ce que devrait être
l'éducation. Trois films et des débats nécessaires à
l'heure ou l'école est en crise.
"Histoire de vie brisée" de Bertrand Tavernier nous dévoile l'injustice de la double peine: emprisonnement et suivi d'une expulsion du territoire. Le film nous donnera l'occasion de faire le point sur le combat contre la double peine en Belgique.
Avec "Genèse d'un repas" de Luc Moulet, une boîte
de thon, une banane et des œufs nous entraînent dans une brillante
explication de l'exploitation économique.
Avec "Brevets-Santé-Biodiversité, Apartheid Médical"
sont abordés des thèmes subordonnés mais tout aussi cruciaux:
nourriture, agriculture, santé, médicaments, affrontements entre
grands et petits producteurs à l'OMC, recontextualisé dans le
rapport Nord/ Sud.
"Le Sida, une histoire de l'AZ" nous narre le racket pratiqué
par les grandes firmes pharmaceutiques, qui n'ont d'autre soucis que le poids
de leur portefeuille. Dans les forums qui suivront, les réalisateurs
Anne Martinow (réalisatrice et poductrice de l'émission Dunia)
et Thierry Keestelot (chercheur à Oxfam) apporteront éclairages
et expertises de première main.
PENDANT LA PAIX, LA GUERRE CONTINUE
Et si la solidarité avec les peuples s'écrivait en priorité "Palestine"? Dans Un ticket pour Jérusalem, un projectionniste, dont le métier consiste à apporter un peu de culture aux enfants palestiniens sous forme de cinéma, doit composer à l'infini avec un matériel et une jeep de merde. Heureusement, blindé d'un idéal d'acier, il réussit à passer au travers des affres de la guerre omniprésente; des barrages de l'armée d'occupation aux intimidations des colons. Pour le débat: le réalisateur Michel Kleïfi, d'origine palestinienne (né en Israël, vivant et travaillant en Belgique) et Nadia Farkh de l'Association Belgo-Palestinienne.
La Solidarité? Sans cliché ou pathos, elle s'exprime dans "Palestine, ceux qui gardent la clé" de Ronnie Ramirez et "Barrières". Le film de Alain De Halleux est un face à face en noir et blanc entre israéliens et palestiniens , spectateurs bouleversés ici, et acteurs là-bas.
"Rachida" nous raconte le courage d'une population, principalement berbère et surtout féminine, à travers la révolte d'une jeune enseignante contre la mouvance islamiste.
Envolée vers l'Afrique noire avec "Kisangani Dairy"
où Hubert Sauper, le réalisateur, se retrouve dans un train affrété
par l'ONU, non loin de Kisangani, à la recherche de réfugiés
rwandais. Ils sont, dit le film, une centaine de mille, errant dans la forêt
depuis 1995. Affamés, malades à bout de forces, sciemment oubliés.
Colette Braeckman, grande spécialiste de l'Afrique, journaliste au Soir
et correspondante du Monde diplomatique, sera notre invitée pour nous
parler de la République démocratique du Congo en compagnie du
réalisateur, le vendredi 28 novembre.
"Les oranges vertes du Liberia" souligne l'absurdité
et la manipulation dans lesquelles ont fait patauger l'Afrique.
Regard sur autre continent avec "La Noce" de Pavel Longuine, un mariage loin de Moscou qui sert de prétexte pour porter un regard malicieux sur l'URSS, cette ancienne grande puissance qui fit trembler les rois. Nina Bachkatov, et Nathalie Mélis, spécialistes de la Russie, nous permettront d'y voir plus clair.
Retour vers les points chauds avec "La Révolution ne sera pas télévisée" de Kim Bartley. Ami de la Révolution Cubaine, Hugo Chavez n'est pas "de plus en plus controversé" comme aime à le répéter la chaîne Arte. Au contraire, il est de plus en plus soutenu... par les pauvres. En avril 2002, Chavez a été emprisonné et a été forcé de démissionner lors d'un putsch dirigé par le patron des patrons venezueliens et organisé avec l'appui d'une poignée de militaires à têtes décorées formés au USA. Soutenus par les multinationales et les médias privés venezueliens qui manipulent une frange de la classe moyenne, le coup d'état fut applaudi comme une victoire de la démocratie par le gouvernement US et espagnol. Chavez sera délivré par une véritable marée humaine, descendue des quartiers populaires, et des militaires resté loyaux au président. Un reportage en direct, une extraordinaire et fantastique leçon de politique. Elle sera suivie d'une discussion avec nos amis du Collectif Venezuela 13 avril.
A noter aussi, le samedi 29 novembre, La Tierra prometida de M. Littin, une immense fresque bouillonnante de couleurs, de symboles et de légendes, qui retrace la vie d'une commune populaire créée par des affamés au Chili, dans les années trente.
En conclusion, nous vous attendons tous pour cette 4ème éditions du festival de cinéma d'Attac en espérant que ce foisonnement de cinéma et d'idée nous fera avancer sur les chemins qui mènent à un autre monde.