arch/ive/ief (2000 - 2005)

Ce que Belgrade cherche à cacher sur les extrémistes du Sandjak
by Albator Sunday November 02, 2003 at 07:37 PM
albator@nospasm.org

Le Sandjak de Novi Pazar, future terre de djihad?

Source : http://www.artel.co.yu
Après l'arrivée au pouvoir de la DOS à l'automne 2000, la mouvance la plus radicale de l'Islam balkanique n'a cessé de se développer au Sandjak de Novi Pazar, amenant une épuration ethnique larvée de tout ce qui n'est pas bosniaque et musulman. Aperçu sur une situation que Belgrade tente de cacher.

Intimidations en tous genres, mitraillages à l'arme automatique de façades d'églises orthodoxes, profanations de cimetières et lieux de prières, insultes racistes peintes sur les murs des habitations des non-musulmans, appels au Jihad dans les feuilles de choux financées par l'Union européenne ou les ONG islamiques… Rien n'est épargné depuis plus de deux ans aux familles chrétiennes du Sandjak de Novi Pazar, avec la sourde complicité des autorités de Belgrade qui semblent préférer un pourrissement de la situation et un exode massif des non-musulmans qu'un affrontement direct avec les tendances les plus dures des islamistes locaux. La ferveur religieuse des musulmans de Novi Pazar se quantifie avec l'ouverture récente d'une madrasa (école coranique), qui abrite plusieurs sections pour jeunes filles. Les femmes apparaissent de plus en plus voilées dans les rues de Novi Pazar. Certains attribuent cette mode à l'influence grandissante du Mechihat de la communauté islamique du Sandjak et certaines rumeurs accusent ce même Mechihat de donner 250 euros par mois à chaque femme qui accepte le voile (Vesti, 22 avril 2002). Il est fort probable que ces femmes aient reçu un soutien de la communauté islamique ; en revanche une rémunération mensuelle de 250 euros paraît excessive, compte tenu du niveau de vie moyen des habitants de la région. Quoi qu'il en soit, au regard des mannequins exposés en vitrine de leurs magasins, les boutiquiers semblent suivre cette " mode ".

Des liens avec la Bosnie

Ce renouveau de l'islam au Sandjak est à mettre en relation avec le développement du fondamentalisme musulman en Bosnie. Des reporters de guerre du New York Times auraient eu la surprise de déchiffrer des instructions relatives au maniement d'explosifs chimiques, rédigées en " bosniaque " (serbo-croate) dans un refuge d'Al Qaïda à Kaboul en Afghanistan. Ce serait un expert de la CIA qui aurait opportunément rassemblé ce matériel. Sur l'une des brochures retrouvées, il y aurait eu la mention " Upotrebljena u Oklahomi " (" Utilisée à Oklahoma "). Un passeport bosniaque aurait même été retrouvé sur place. Au regard de ce type de sources, il faut bien évidemment parler au conditionnel ; la CIA ayant la fâcheuse habitude de désinformer. Mais, suite aux attentats contre le World Trade Center, le quotidien viennois Presse se fit l'écho du rôle des Mudzahidin dans les guerres de l'ex-Yougoslavie. Toujours d'après Presse, les guerres de Bosnie auraient mobilisé sur le terrain 900 à 1 500 Mudzahidin face aux Serbes. Généralement originaires d'Arabie Saoudite ou d'Afghanistan, une partie d'entre eux est restée en Bosnie et aurait acquis la nationalité bosniaque. Selon le quotidien de Banja Luka, Le Journal indépendant, ce sont neuf organisations islamistes et plusieurs organisations humanitaires qui auraient agit de connivence avec cette mouvance. Parmi les organisations les plus actives, on recense ainsi Elbard Bosnia, ou Slobodna Bosna (Bosnie libre), dont le siège se trouve à Zemun en banlieue de Belgrade. L'organisation rassemble surtout des combattants aguerris. Vehabije est plutôt une organisation doctrinaire, dirigée par Osman Galijasevic. Elle est apparue en 1995. Ses fonds proviennent principalement du Soudan et d'Arabie saoudite. Elle a une grande influence parmi la jeunesse bosniaque de Velika Kladusa. Des sources proches de l'OTAN soupçonnent l'existence de liens entre l'organisation bosniaque Crvena Ruza (Rose rouge) et le Hamas. Ce sont les activistes de Crvena Ruza qui auraient tentés d'assassiner le musulman pro-serbe Frikret Abdic à Bihac en Bosnie. L'académie islamique de Bihac et le lycée islamique de Cazin seraient les viviers de recrutement de Crvena Ruza, mais aussi de l'organisation islamiste de Cazin, Zetra. D'autres nébuleuses moins structurées possèdent quelques ramifications, telles la Ligue des patriotes, De 3 à 9, La Jeunesse active de l'islam, dirigée par Adnan Pezo de Zenica, L'Union des jeunes musulmans, les Jeunes musulmans (nom d'un mouvement collaborationniste de la 2ème Guerre mondiale), Fatih et El-Fatih, qui perpétuent soigneusement la tradition des Mudzahidin. L'OTAN soupçonne également certaines organisations humanitaires de soutenir les nébuleuses islamistes activistes. Parmi ces organisations suspectées se trouvent Nahala, Human Appel International, Al Haramani, le Fond pour la renaissance de l'islam (Vesti, 17 avril 2002). Un engagement militant qui trouve des échos au sein même des structures et partis officiels de la fédération de Bosnie-Herzégovine. Ainsi, à Sarajevo, de jeunes militants du SDA se sont affrontés cet été à la police à l'occasion d'une rencontre de football Bosnie-Yougoslavie, alors qu'ils cherchaient à " ratonner " les joueurs venus de Belgrade. Deux Serbes sont passés à tabac, Bojan Ilic et Veljko Belojica. Les suspects sont interpellés. Il s'agit de trois bosniaques, Besim Mavric, Enes Gicic et Adnan Alibabic. Après enquête judiciaire, le juge d'application des peines, Shefcet Licin, relâcha les trois prévenus. Les Serbes érigèrent des barricades en signe de protestation autour de la ville. Une intervention rapide de la police a calmé les ardeurs des uns et des autres. Selon le prêtre orthodoxe Mihailo " tout ce qui s'est passé est un mauvais présage, pour nous les Serbes. Il nous semble que les musulmans ne sont plus prêts à davantage de tolérance et de compréhension. C'est à dire, qu'un courant est apparu, un groupe d'hooligans pour être plus précis, qui souhaitait tout simplement empêcher de fêter la victoire de la représentation yougoslave " (Vesti, 26 septembre 2002). Après ces incidents, la communauté serbe a mis sur place un Comité pour la protection des Serbes de la Raska. Les représentants sont partis négocier une solution à Belgrade avec le Premier ministre serbe d'alors, Zoran Djindjic. Le président du Comité, Dragic Pavlovic, ne cache pas que la survie des Serbes dans la région dépend en grande partie de leur poids économique. Tout ce que l'on peut dire, c'est que les juteux trafics des musulmans ne jouent pas en faveur d'une pérennisation de la présence orthodoxe. De leur côté, les partis pro-bosniaques accusent d'anciens policiers serbes de vouloir volontairement semer des troubles en vue d'exploiter un certain mécontentement chez les non-musulmans. C'est notamment la thèse retenue par le représentant spirituel des musulmans de Novi Pazar, le mufti Zurkolic. Ce dernier se félicitait dans Danas (7 décembre 2002), d'être entendu par le Premier ministre serbe Zoran Djindjic : " J'ai rencontré pour la première fois le Premier ministre Djindjic en tant que membre de la délégation de toutes les communautés religieuses constituée à propos de l'introduction de cours de religion dans les écoles. Notre deuxième rencontre portait sur le sujet de l'Université. Après cela, Zoran Djindjic est venu à Novi Pazar et il a été le premier chef du gouvernement serbe à rendre visite à la communauté islamique au cours des cent dernières années. Il a été sensible à mes idées sur le Sandjak comme une région créatrice des liens, un pont de communication entre la Serbie et le monde arabe. Son soutien s'est concrétisé avec mon voyage à Dubai, dans le cadre d'une délégation d'État. Le fait d'inclure, pour la première fois, un mufti dans la délégation d'état a beaucoup contribué à une image positive de la Serbie, ce qui m'a été confirmé par les journalistes et les diplomates au siège de la Ligue arabe ". En octobre dernier, les élections en Bosnie ont mis en avant le candidat extrémiste du SDA, Sulejman Tihic, contre son concurrent du SDP, Haris Silajdzic, un ex partisan d'Izetbegovic. Et lorsque l'on connaît les liens historiques qui existent entre militants du SDA et activistes pan-islamistes au Sandjak, on peut aisément imaginer ce qui pourrait arriver en cas de durcissement des positions des irrédentistes musulmans de Novi Pazar.

Une zone stratégique essentielle

La bande de terre montagneuse de 8 887 km² qui se trouve à cheval entre la Serbie et le nord du Monténégro, appelée Sandjak de Novi Pazar, n'est autre que l'ancienne Raska serbe. Zone géographique hautement stratégique puisqu'elle confère un accès à la mer à Belgrade et qu'elle garantie pour Podgorica un lien direct avec sa tutrice serbe, ce territoire équivaut en superficie à un département français. C'est justement cette zone qui semble être la clef de voûte de la fameuse pénétrante verte : de la Macédoine à la poche de Bihac en Bosnie, en passant par le Kosovo, l'Albanie et le sud de la Serbie, cette pénétrante n'est que l'ensemble des résidus religieux du défunt empire ottoman, où de nos jours se concentrent la majeure partie des mahométans des Balkans ex-Yougoslaves. Antique terre serbe, la Raska dû subir le joug ottoman du XIVème siècle à 1912 avant d'être rattachée à la Serbie par le Traité de Bucarest de 1913. Aujourd'hui, sur quelque 400 000 âmes, seulement 40% ne sont pas mahométans. Ces derniers se concentrent principalement dans les montagnes et hors des villes. Dans les faits, la revendication d'un statut d'autonomie pour le Sandjak en vue de son rattachement futur à la Bosnie musulmane obéit à des considérations géopolitiques de type "civilisationnelles", non réductibles à un nationalisme ethnique classique. C'est en fait uniquement sur des considérations politico-religieuses qu'est basée cette revendication. Jusqu'en 1912, l'ancienne Raska n'est qu'une simple entité géographique désignant la pointe extrême de l'empire ottoman avant l'Autriche-Hongrie. Même au sein de la Yougoslavie de Tito, pourtant si généreuse avec les musulmans, cette bande de terre montagneuse ne constitua jamais une véritable entité administrative autonome. C'est pourquoi, les activistes islamistes du Sandjak évoquent les précédents bosniaques et kosovars.

" Interdit aux chiens, aux Juifs et aux Serbes ! "

Depuis la fin des années 1980, le chef de file de la puissance communauté musulmane de Novi Pazar est le docteur en théologie Suleyman Ugljanin, responsable du Muslimansko Nacionalno Vijece Sanzaka (MNVS ou Conseil national des musulmans du Sandjak), le parti indépendantiste musulman du Sandjak. Elu député à Belgrade et proche du DS de Zoran Djindjic, Ugljanin a été formé au fondamentalisme islamique en Bosnie et en Turquie. Cet ancien membre du Parti d'action démocratique (SDA) de Bosnie, est à l'origine de la première antenne locale à Novi Pazar du BNVS, le mouvement national bosniaque du Sandjak, étroitement lié aux islamistes d'Izetbegovic. En juillet 1997, lors d'une violente manifestation, il a rendu public la revendication de "statut spécial" pour le Sandjak, première condition vers une indépendance totale et un rattachement à une grande Bosnie islamiste. Cette demande fut réitérée le 1er mars 1999 lors d'une conférence pan-islamiste tenue à Sarajevo au moment de la crise du Kosovo, revendication que le quotidien Blic, financé par la nébuleuse de Soros, s'est fait un plaisir de promouvoir. En Turquie, Suleyman Ugljanin est étroitement lié au Refah Partisi, le parti islamiste turc devenu depuis l'AKP. Ami personnel de Necmettin Erbakan, Ugljanin a fait de nombreux voyages dans les pays musulmans dont l'Iran, lors d'une Conférence islamiste et en Egypte chez les Frères musulmans. Ugljanin se targue également d'être l'ami de Recep Tayyip Erdogan, le chef de file de l'AKP. En 1990, Ugljanin est présent lors de la fondation du SDA d'Alija Izetbegovic. Particulièrement impliqué dans le conflit en Bosnie, il envoie en 1992 un détachement de sa garde personnelle participer à l'épuration ethnique des quartiers serbes à Sarajevo. Un engagement qui fait suite à sa participation active dans divers trafics d'armes entre Zagreb et Ankara, un an plus tôt. La même année, les musulmans du Sandjak organisent un référendum d'autodétermination devant mener à l'indépendance. Puis c'est un grand nombre de localités qui tombe sous le contrôle des islamistes, dont Novi Pazar (120 000 habitants) dans les années qui suivent. La propagation du conflit bosniaque vers le Sandjak est évitée de justesse en 1991-1992, grâce à l'intervention d'unités particulières du SDB venues tout spécialement de Belgrade se débarrasser physiquement de plusieurs centaines d'activistes pan-islamistes et de volontaires musulmans étrangers. C'est l'époque où nombre de cafés et lieux publics d'agglomérations du Sandjak affichent ouvertement des écriteaux sur leurs devantures : " Interdit aux chiens, aux Juifs et aux Serbes ! " Plusieurs actions antiserbes se développent alors. En 1991, l'affaire d'un chauffeur de taxi serbe égorgé sur les hauteurs de Prijepolje à Kamena Gora fait grand bruit. Belgrade lance alors une vaste opération à l'aide des forces spéciales du RDB pour calmer les ardeurs des militants islamistes les plus combatifs : plusieurs rafles ont lieu le long des principales voies de communication. La ligne de chemin de fer Bar-Belgrade est notamment particulièrement surveillée en raison de la possible présence de commandos islamistes infiltrés. Au moment où la guerre éclate en Bosnie, le chef de file des islamistes du Sandjak s'enfuit discrètement à Istanbul où il ouvre un bureau du "Sandjak indépendant et musulman". Cette officine est alors traitée au même titre qu'une ambassade. En 1995, de retour à Novi Pazar avec un pactole de 17 millions de dollars (fruits de divers trafics d'armes), il lance la liste électorale "Za Sandjak. Dr. Suleyman Ugljanin" et est élu député à l'assemblée fédérale de la RFY en 1996. Il se range aussitôt dans les rangs de l'opposition dite démocratique et tisses des liens avec le Parti démocratique de Zoran Djindjic. Après la prise du pouvoir de la nouvelle équipe politique en automne 2000, un ministère yougoslave des "Communautés nationales et ethniques" voit le jour. Véritable machine à revendications et à subventions pour tous les groupements plus ou moins indépendantistes et antiserbes qui pullulent alors en RFY, ce ministère est dirigé par le musulman Rasim Ljajic, président du SDP (Sandjacke demokratske partije), le concurrent direct du MNVS. Il s'agit ouvertement de promouvoir le communautarisme et le séparatisme. Une action qui facilite grandement Suleyman Ugljanin dans sa volonté de voir s'établir un Sandjak indépendant et islamiste et qui ouvre une permissivité sans précédents à partir du printemps 2001. Depuis, d'autres petites formations ont vu le jour à Novi Pazar comme le Parti social-libéral du Sandjak de Bajram Omeragic.

"Ben Laden comme un modèle"

"Nous considérons Ussama Ben Laden comme un modèle pour les croyants. Il défend les musulmans à travers le monde. Les Taliban ne peuvent pas être vaincus par l'Occident. Même s'ils meurent, ils deviennent des martyrs de la foi" (L'Humanité, 5 octobre 2001). L'homme qui tient ces propos quelques jours après le 11 septembre 2001 n'est autre que l'imam Mensur, professeur d'arabe à la madrasa de Novi Pazar. Depuis sa réouverture en 1990, 120 garçons âgés de 15 à 20 ans suivent les cours de cette école coranique. Tous se préparent à devenir des imams, renforçant les cadres religieux où l'islamisme constitue le principal référent identitaire d'une majorité de la population. Cet appel au Jihad se retrouve dans le mensuel régional Voie de l'islam qui n'hésite pas à faire l'apologie du régime des Taliban installé à Kaboul. Le mensuel y qualifie notamment de "juste" l'interprétation des lois coraniques par les Taliban. D'autre part, dans ce même numéro d'octobre 2001, la Voie de l'Islam fait état de la récente visite de délégations iraniennes et bosniaques à la madrasa. Comme en Bosnie et au Kosovo, la ré-islamisation affecte tous les niveaux de la société au Sandjak. Depuis l'année 2001, on aperçoit de plus en plus de barbes et de femmes voilées dans les rues de Novi Pazar. Avec le soutien d'ONG occidentales, l'écrivain éditeur Saban Sarenkapic a créé à Novi Pazar le centre de rencontres Damad dont l'objectif est de promouvoir la culture musulmane auprès des non-musulmans. Dans la demeure du grand mufti du Sandjak, Muamer Zurkolic, contiguë à la madrasa et au local qui imprime la Voie de l'islam, une immense photo de pèlerins à La Mecque tapisse un des murs de la salle centrale. En octobre 2001, lors d'une entrevue à l'AFP, le mufti se disait "très inquiet de ce qui se passe dans le monde". Et de poursuivre : "J'ai le sentiment que l'Occident veut imposer sa culture au reste de la planète. Nous devons sans cesse travailler à la défense de notre identité". Avant de prévenir "Ici, au Sandjak, les forces anti-islamiques tentent de revenir". Ces "forces anti-islamiques" étant bien évidemment les chrétiens orthodoxes serbes et monténégrins. Une menace selon le mufti qui ne peut être écartée sans l'appui de frères musulmans venus d'ailleurs. Ainsi, en octobre 2001, l'hebdomadaire Nedjelni Telegraf dévoilait la présence d'une trentaine d'activistes wahhabites à Novi Pazar et plus de 200 à Sjenica, plus à l'ouest. Leur action se serait alors limitée à des campagnes de prosélytisme.

Nettoyage ethnique au nom d'Allah

Phénomène souvent passé sous silence par la presse nationale et internationale qui tente de minimiser l'ampleur du phénomène ou carrément de l'ignorer, les familles serbes minoritaires de Novi Pazar quittent peu à peu la région. S'inspirant de l'expérience des derniers Serbes du Kosmet, la minorité serbe de Novi Pazar tente, tant bien que mal, de vendre ses biens avant de partir définitivement. En effet, de troublantes similitudes apparaissent avec l'exode silencieux des Serbes du Kosovo des années 70 et 80. Le même phénomène semble, actuellement, se reproduire à Novi Pazar. D'autant plus que les juteux trafics que drogue, qui s'y développent en corrélation avec la mafia albanaise, permettent aux acheteurs de presser les familles serbes à partir. Vendre un bien à bon prix, même contraint, est toujours mieux que de l'abandonner. D'après le responsable du SUP local, Suad Bulic, Novi Pazar serait devenu un important carrefour pour les trafiquants de drogue du Monténégro, Kosovo, Bulgarie et Turquie. Selon les dires de la police, cette ville serait même devenue le principal " magasin de transit " des trafiquants de drogue du Kosmet. Comme pour le Kosovo dans les années 1980-1990, les trafiquants bosno-musulmans achèteraient, avec des sommes ainsi amassées à la hâte, les propriétés des familles serbes (Vesti, 4 décembre 2002). Et gare à celui qui refuserait de vendre ! Le problème de l'émigration forcée des Serbes ne date pas d'hier. Les statistiques sont fort explicitent à ce sujet : En 1941, la commune de Novi Pazar comptait 60% de Serbes. En 1961, ils sont 55%. Il est vrai que le nettoyage ethnique au nom d'Allah mis en œuvre par les milices musulmanes du Sandjak, alliées du IIIème Reich, y est pour beaucoup. Mais en 1974, ils ne sont plus que 39,5%. En 1981, leur présence chute à 29% et en 1991, Novi Pazar compte 22,4% de Serbes. Enfin, en 2001, les Serbes constituent moins de 20% des habitants de Novi Pazar. A savoir, qu'au cours des deux dernières années, plus de 1 000 familles serbo-orthodoxes ont quitté l'ancienne Raska serbe. A ce rythme Novi Pazar sera bientôt une commune ethniquement et religieusement purifiée. Aujourd'hui, les Serbes y sont marginalisés politiquement, économiquement et culturellement. Les autorités locales ne semblent guère de soucier de leurs problèmes et la présence de l'Etat de Serbie-Monténégro est largement insuffisante. Les bonnes consciences objectent que cet exode serait lié à la " précarité économique " de la région. Cette explication semble erronée : La plupart des Serbes qui quittent Novi Pazar s'installent dans les régions voisines de Kraljevo et Kragujevac, où les conditions de vie sont plus pauvres qu'à Novi Pazar et le chômage plus élevé. Souvent, les Serbes de Kragujevac et Kraljevo, natifs de Novi Pazar, retournent y travailler. L'autre témoin de la meilleure santé économique des habitants de Novi Pazar est le fait que certains terrains bien situés se vendent jusqu'à 20 000 euros les 100 mètres carrés (Vecernje Novosti, 26 août 2002). En revanche la communauté islamique de Novi Pazar, par la voie de son représentant le mufti Muamer Zurkolic, accuse le gouvernement de Belgrade de ne pas faire assez de concessions, concernant les " droits des musulmans ". Le mufti Zurkolic souligne les prétendues maigres possibilités urbanistiques pour la construction de nouveaux lieux de culte. Ils dénonce sur un même ton larmoyant les problèmes alimentaires pour les appelés musulmans de l'armée serbo-monténégrine et insiste sur l'obligation qu'il entend imposer aux femmes d'apparaître voilées sur les documents d'identité. Un pas de plus vers une application stricte des principes du Coran. Mais Muamer Zurkolic assure déjà que l'application de la Charia, la loi coranique, ne pouvait pas être à l'ordre du jour tant qu'il resterait des non-musulmans au Sandjak. Depuis le changement d'équipe politique en Serbie en octobre 2000, l'accélération de cette épuration ethnique au nom d'Allah, présentée par certains comme de la " discrimination positive ", laisse ainsi un espoir assuré pour les projets pan-islamistes des plus radicaux des musulmans de cette bande de terre montagneuse à l'évidence stratégique.