Après 22 jours, les réfugiés afghans ont mis un terme à leur grève de la faim. Un dernier tour de négociations avec le médiateur fédéral a finalement débouché sur un accord.
Les Afghans eux-mêmes se montrent très
satisfaits du résultat. Ils n'obtiennent pas la régularisation
collective qu'ils demandaient au départ, mais les concessions du gouvernement
belge ne sont pas minces. Les Afghans peuvent demander une régularisation
s'ils se trouvent en Belgique depuis, respectivement, trois ans pour les
familles avec des enfants et quatre ans pour les personnes isolées.
Comme on l'avait déjà annoncé, ils peuvent rester en
Belgique jusqu'au début de l'année prochaine. La situation
en Afghanistan sera réexaminée à ce moment-là.
En outre, tous les Afghans dont l'ordre de quitter le territoire a été
suspendu obtiennent le droit de travailler ici aussi longtemps qu'ils ne
pourront pas retourner en Afghanistan. |
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Yasser Lotfi, porte-parole
des Afghans, est convaincu que les Afghans pourront rester après janvier
2004 : «Malheureusement, la situation en Afghanistan
ne connaîtra pas une amélioration rapide.» |
Il espère utiliser le répit qu'il vient d'obtenir
pour faire comprendre à la population belge qu'on ne peut pas renvoyer
des réfugiés dans un pays en guerre : «Je pense que l'opinion publique
en Belgique finira par comprendre quelle est la situation en Afghanistan.»
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Victoire pour tous les réfugiés
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Selma Benkhelifa, l'avocate
qui au début de cette semaine recevait encore les foudres du ministre
de l'Intérieur Patrick Dewael, a assisté les Afghans jusqu'au
bout. Elle estime que l'accord est une victoire pour tous les réfugiés.
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«Premièrement, la procédure de
régularisation de 1999, qui a permis aux réfugiés qui
se trouvaient ici depuis plus de trois ou quatre ans d'obtenir un titre de
séjour définitif, prend un caractère permanent.
En second lieu, toute personne qui introduit une demande d'asile a la garantie
que son dossier sera traité dans un délai raisonnable. Si elle
n'obtient pas de réponse dans les trois mois, elle peut faire intervenir
le médiateur fédéral. Avant, la procédure pouvait
traîner pendant un an et demi.»
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Il faut souligner que ces acquis concernent donc tous les réfugiés
et pas uniquement les Afghans. Ainsi, tous les réfugiés dont
l'ordre de quitter le territoire a été suspendu pour une raison
ou une autre auront désormais le droit de travailler en Belgique.
La réévaluation promise de la situation en Afghanistan sera
également beaucoup plus sérieuse que ce n'était généralement
le cas jusqu'à présent.
«Actuellement, le ministre de l'Intérieur
établit son rapport objectif sur la base d'un rapport du commissaire
général aux réfugiés et aux apatrides Pascal
Smet, qui dépend de son ministère. Donc, finalement, sur la
base d'un rapport de son propre rapport. Désormais, il devra tenir
compte des rapports du ministère des Affaires étrangères
(qui déconseille aux Belges de se rendre en Afghanistan,
cc), de compte-rendus d'ONG et de la politique
menée par d'autres pays.»
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Amnesty International n'est pas politiquement correcte
Ce dernier point a été une des notes les plus désagréables.
«Pendant les négociations, le médiateur
fédéral a dit que le ministre Dewael ne pourrait jamais aligner
sa politique sur une ONG comme Amnesty International, qui
ne serait pas ’politiquement
correcte’.»
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Malgré cette sortie, le médiateur
fédéral a été la personne qui a conduit les négociations
vers le dénouement. «Le médiateur fédéral a
été le premier négociateur en qui nous ayons confiance»,
déclare Mohamed Nazari, un autre porte-parole
afghan. «Il était sympathique et a fait preuve
d'un intérêt humain pour notre situation.»
Yasser Lotfi était du même avis. «Il a rétabli la confiance. Il n'était peut-être pas plus
neutre, mais il était meilleur. Nous avions perdu toute confiance
en Pascal Smet.» |
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Après un séjour de 22 jours dans les nefs d'une église,
les Afghans peuvent donc enfin rentrer chez eux. Mohamed Nazari obtiendra
très certainement une régularisation, puisqu'il est ici avec
sa famille depuis plus de quatre ans. Yasser espère trouver du travail
pendant la période d'attente jusqu'au début 2004. Les trois
semaines resteront longtemps dans les mémoires. «De véritables amitiés se sont
nouées ici. L'assemblée des voisins a été un
soutien énorme. Les contacts seront certainement conservés», déclare Yasser.
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En tout cas, il est à noter
que les Afghans, qui viennent d'un pays déchiré où différentes
ethnies sont en lutte, sont restés solidaires jusqu'à la fin.
«Vivre ensemble est une chose tout à fait normale. C'est
la guerre qui est la cause des divisions, pas les personnes ni les religions.» |
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