Contre le mur de l'apartheid by divers Wednesday August 06, 2003 at 02:41 AM |
Depuis la publication de la "feuille de route" les médias sont devenus encore plus discrets sur la situation en Palestine la poursuite de la construction du mur (qualifié de plus en plus de "barrière de sécurité") est à peine évoquée à l'occasion de la visite de Sharon aux Etats Unis et encore moins sa signification et ses conséquences.
L'extension des colonies comme celle qui à Khan Yunis (Bande de Gaza) isole la ville de la zone côtière d'Al Mawasi dominant le sinistre check point d'Al Toufah et d'où partent les principales attaques contre le camp de réfugiés est passée presque inaperçue. Il est en est de même pour les importantes manifestations contre le mur qui ont lieu à l'initiative des Palestiniens, des pacifistes israéliens et des internationaux. Vous trouverez ci-dessous pour le cas où vous ne les auriez pas eu le compte rendu de deux de ces manifestations. Résister !
Manifestation à Deir Al Ghason par Ellis Brooks
1er Aout 2003 Région de Tulkarem
Aujourd'hui, plusieurs centaines de Palestiniens se sont réunis dans la ville de Deir Al Ghason et ont défilé dans une manifestation enthousiaste vers une porte de la soi-disante " Barrière de sécurité " d'Israel. Ils ont été rejoints par 75 internationaux, principalement de l'ISM, mais aussi du CCIPPP.
Ces internationaux partagent les revendications des Palestiniens de la région contre la construction de la " barrière " de près de 5 mètres de haut composée de fil de fer barbelé. Le mur pénètre en Cisjordanie où les militaires israéliens s'occupent d'annexer la terre palestinienne, prenant l'eau, la terre et les vergers aux fermiers locaux.
Cette porte particulière ne sépare pas seulement les fermiers de leurs terres inestimables mais empeche aussi les contacts avec le village voisin de Ibthain, avec qui les forts liens familiaux ont été coupés.
Cette action dramatique suit deux manifestations identiques qui ont eu lieu près des villes de Jénine et de Qalqilya, montrant l'importance de l'outrage que beaucoup décrivent comme le Mur de l'Apartheid. La manifestation représente aussi le point culminant d'un mois de protestations au Nord de Tulkarem où les fermiers ont été interdits d'accès à une grande partie de leurs terres.
Le groupe réunissant les Palestiniens et les internationaux est parti à midi puis a descendu la colline à travers les fermes qui se situent entre Deir Al Ghason et Attil. Avant d'accéder à la porte, le groupe s'est arrêté dans une oliveraie, et un Imam a dirigé la prière de la mi-journée pour les Palestiniens. Il a imploré la population de continuer à résister de toutes leurs forces à l'occupation, et d'avoir confiance dans leur proche délivrance de la persécution.
Ainsi inspirée, la foule s'est avancée vers la porte qui était ouverte, mais où étaient amassés des fils de fers barbelés que protégeait une importante force militaire. Les internationaux, jugeant qu'ils étaient moins vulnérables aux représailles israéliennes coupèrent les dangereux fils barbelés et ensuite les dégagèrent.
Ils formèrent ensuite une ligne defensive pour que les soldats israéliens ne puissent pas atteindre les Palestiniens. Le but était de permettre aux Palestiniens d'accéder sans encombres à la porte et à la " barrière " pour qu'ils ne puissent pas la démonter.
A ce moment-là, la forte intensité de colère ressentie par la population contre le vol de leurs terres et de leurs ressources fut montrée lorsqu'un garcon a jeté des pierres contre les jeeps blindées des militaires. Réagissant aussitot, les soldats ont utilisé des gaz lacrimogènes, puis des balles en caoutchouc pour forcer les manifestants à reculer. En quelques minutes, 2 palestiniens ont été touchés. Puis, huit internationaux, qui se tenaient pacifiquement face aux soldats, ont également été atteints. Bien que les soldats visaient les têtes des manifestants, il n'y a pas eu de blessures graves.
Après que la situation soit devenue plus calme, les internationaux tentèrent de négocier avec les militaires au nom des Palestiniens pour laisser la porte ouverte de façon permanente. Les soldats refusèrent de discuter. Devant le dangereux niveau de violence des forces israéliennes, les Palestiniens optèrent pour un retrait pacifique pendant que les internationaux tentaient de maintenir leur écran de protection en se tenant face aux soldats.
La scène s'est produite devant la présence des caméras de médias d'envergure internationale.
Alors que l'armée fermait rapidement la porte avec des fils barbelés, il y avait un sentiment d'encouragement parmi les Palestiniens qui se retiraient. Ils ont exprimé leur colère et ont défié les Israéliens contre l'injustice du mur. Ils ont envoyé un message au monde que le mur pouvait être construit, mais qu'il n'allait pas rester.
Information en provenance de l' ISM A
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NOUVELLE ACTION DE PROTESTATION PALESTINO-ISRAELIENNE CONTRE LE MUR
1er août - Ci-joint un message de Gush Shalom concernant une action commune de protestation palestino-israélienne, avec le soutien d'ISM (International Solidarity Movement) contre le Mur construit par le gouvernement israélien. A noter par ailleurs que Gush Shalom vient de publier une nouvelle annonce dans le quotidien Haaretz dont l'intitulé est "L'OCCUPATION, C'EST L'INFRASTRUCTURE DU TERRORISME : IL FAUT LA DETRUIRE". « Kodem Kol-Hachoma Tippol » (« En premier lieu, il faut que le mur tombe ! ! ») ont chanté les militants de la paix, lors d'une manifestation contre le Mur de l'Apartheid, en chœur avec les organisations publiques de la ville palestinienne de Qalqilya, l'association israélienne Gush Shalom et l'association internationale ISM.
La ville de Qalqilya s'est vu offrir cette semaine par Sharon son passage sous contrôle palestinien. Mais il n'est pas question de supprimer les murs et les clôtures qui encerclent presque totalement la ville, ne laissant qu'un passage étroit pour sortir. « Autrefois, centre commercial prospère pour sa région, notre ville a été réduite à une extrême misère » a déclaré dans un discours Ma'aruf Zaharan, maire de Qalqilya.
Ce matin Zaharan et des centaines de ses concitoyens ont marché depuis le centre de la ville jusqu'au Mur, déployant des drapeaux et des banderoles, accompagnés par une délégation non négligeable d'internationaux. Sur le chemin des enfants s'étaient débrouillés pour décorer le mur de toutes sortes de graffitis. Finalement, ils sont arrivés au sud de la ville - le rendez-vous prévu, où une clôture avec des barreaux permet de voir de l'autre côté. Là un groupe d'israéliens est arrivé, des militants qui se sont impliqués depuis 1967 (et même avant), côtoyant de dynamiques jeunes anarchistes. Nous avions aussi des internationaux avec nous, venus de pays aussi différents que les Etats-Unis, le Danemark, et la Pologne, - y compris un vétéran de la guerre du Vietnam devenu militant de la paix, qui la nuit dernière pilotait un avion à réaction de New-York à Tel-Aviv. « Cette nuit je dois être à l'aéroport Ben Gourion pour le ramener, mais cet intermède me permet de faire ce que j'ai choisi » a-t-il dit. Après être sortis du bus, nous nous sommes déployés en une longue ligne devant le mur avec des banderoles : « Le mur - un ghetto pour les Israéliens, une prison pour les Palestiniens », « La Ligne Verte : Frontière de Paix », « Là où il y a des murs il n'y a pas de paix ». Des Palestiniens, agitant leurs drapeaux au vent étaient nettement visibles de l'autre côté, à quelque vingt mètres. Ils entendaient les félicitations en arabe que leur adressait au mégaphone l'historien Teddy Katz, et ils répondaient de même. Prise en sandwich entre les deux bords une importante force militaire se déployait pour empêcher que les deux groupes ne trouvent le moyen de se rejoindre. Le jeune Itay Rotstein de Tel Aviv s'empara du mégaphone et s'adressa directement aux militaires : « Soldats, avez-vous la moindre idée de ce que vous êtes en train de faire ici ? Réalisez-vous qu'on vous fait garder un ghetto ? Oui, un ghetto ? Réalisez-vous que vous êtes les geôliers de dizaines de milliers de gens, empêchant les fermiers de cultiver leurs terres, empêchant les marchands d'avoir une clientèle, conduisant tout une population à la pauvreté et à la misère ? Pouvez-vous vous regarder dans la glace ? ». Les soldats semblaient imperturbables, sans réactions apparentes. Pour leur part, les camarades de Rotstein éclatèrent en slogans : « Pas de barrière mais un ghetto, pas de soldats mais des gardiens de prison » et « Refusez, Refusez, Refusez ». « Il y a un débat sémantique à propos des termes par lesquels il faut désigner cette chose qui est en face de nous : « mur » ou « clôture ». Parce que physiquement c'est un peu des deux » a dit Uri Avnery « mais en raison de sa fonction, le meilleur terme pourrait être « nœud coulant ». Un nœud étrange autour de Qalquilya, autour de tous les Palestiniens, autour du cou de nous tous dans ce pays et cette région, une menace directe contre tous nos espoirs de paix ». Vers la fin de la manifestation le commandant militaire sur place se calma au point de permettre à un seul Palestinien de traverser la barrière si bien gardée, et de saluer les participants israéliens. Il donna son accord pour une mesure aussi radicale, mais à contre-cœur, déclarant d'abord « c'est un risque pour la sécurité (déclaration qui fut accueillie par des remarques et des railleries de la part des manifestants)
Des photos de la manifestation de Qalqilya sont visibles sur le site du Gush Shalom http://www.gush-shalom.org/actions/q_fence_eng.html Pour une carte du mur de séparation : http://www.gush-shalom.org/thewall/index.html (en anglais)
Sur le chemin du retour à Tel-Aviv, nous avons écouté les informations, et notre petite action a été mentionnée (et le journal du soir de Channell II couvrit largement l'action du côté palestinien du Mur).
Parmi les nouvelles moins réjouissantes, nous apprîmes que la Knesset venait de voter le jour même la loi qui rend désormais impossible à un citoyen israélien de donner par le mariage la citoyenneté israélienne à son conjoint arabe pour vivre en Israël - une mesure qui obligera les arabes israéliens en particulier à choisir entre quitter le pays ou y vivre dans la clandestinité.
PS : De retour à Tel-Aviv, le bus du Gush Shalom s'est dirigé directement vers la Cour fédérale où quelque 25 manifestants ont rempli les bancs durant l'audience de deux internationaux qui après leur arrivée hier se sont vu refuser l'entrée et sont détenus durant leur recours en appel. Le juge, Tzippora Baron, s'est dite surprise que ces détenus fraîchement débarqués aient autant d'amis. La décision sera rendue plus tard dans la semaine. Parallèlement, David Watson et Michael Shake - deux « récidivistes internationaux » restent dans les cellules de détention fort peu confortables de l'aéroport. Ils sont défendus par les avocats Gabi Laski et Yoni Lerman. (Traduit par Carole Sandrel)