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Les nanas de la compagnie guépard III
by Wurufato Friday July 18, 2003 at 01:12 PM
wurufato@yahoo.com

La plus jeune combattante de la compagnie guépard ferme la série d'article sur les femmes de la compagnie guépard. Elle a eu ses heures de gloire avec ses camarades à l'Ouest et ne compte plus quitter sa kalach...

Les nanas de la comp...
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Les nanas de la compagnie Guépard III

Le soldat de 2ème classe Sita, dite ‘S’ est à 17 ans la benjamine des combattantes enrôlées au sein des Guépards. Du haut de son 1 mètre 60, elle porte fièrement sa tenue, sa kalach en bandoulière. Elle est revenue du front satisfaite de l’œuvre accomplie par sa compagnie. De leur mission dans l’Ouest ivoirien, elle ne garde que de bons souvenirs. Elle a tué pour la première fois ; pour la Cause. Des accords de Marcoussis et des modalités de leur application, elle ne dit pas grand chose ; ce n’est pas une intellectuelle. Elle souhaite simplement un retour à la normale dans son pays, longtemps miné par la xénophobie, la démagogie et la cupidité des politiciens. Avant la mutinerie et son engagement aux côtés des forces rebelles, elle gagnait modestement sa vie grâce à un petit commerce ambulant aux alentours de la gare de Yamoussoukro. Elle partait souvent en brousse pour vendre ses articles. Elle n’a jamais tiré à l’arme à feu auparavant. Au camp des Guépards, elle passe ses journées au bâtiment du commandant dont elle fait partie de l’entourage. De sa vie de femme, elle reste évasive. Son seul vrai rêve, c’est de retrouver au plus vite sa mère qui est la seule à l’avoir encouragé dans sa décision de se rejoindre au Mouvement du 19 septembre 02. Ses oncles auraient aimé qu’elle aille s’asseoir au village en attendant la fin des hostilités. La tentation était trop grande, avoue-t-elle, pour connaître la rébellion de l’intérieur. Elle voulait exister…

Ses débuts dans le Mouvement :
« Je me trouvais à Yamoussoukro quand les évènements ont éclaté en septembre 02. Ne pouvant plus travailler à la gare, je me suis rendue à Bouaké où j’ai de la famille et de nombreux amis. J’ai fais connaissance avec le Mouvement grâce à un cousin qui s’était engagé avec les forces rebelles en tout début de mutinerie. Un jour d’octobre qu’il était venu à la maison pour manger, je lui ai fais part de mes intentions de combattre à leurs cotés. Il m’amena avec lui à Tchèrèkro où il était en poste pour me présenter à son chef. Ce dernier me transféra après 2 semaines à Diabo. C’est à Diabo que le commandant de la future compagnie Guépard m’a remarqué et il me demanda de faire partir de ses éléments.
Mon intégration dans le groupe s’est faite sans difficultés au cours de la formation. La preuve, je suis devenue la petite chouchou de mes chefs et de mes frères d’arme. Nous sommes devenus une grande famille. Puis c’était le départ pour le front de l’Ouest ; mon premier front.

Les premières victimes de sa kalach au front :
Le jour où nous sommes arrivés à Zouhongnin, le chef nous a repartis en 3 groupes. Je faisais partie du groupe qui devait se positionner au stade. Dès les premiers bombardements ennemis, nous avons progressé vers l’école. Un peu plus tard, nous avons reçu l’ordre de replier alors que nous étions beaucoup trop avancés. Nous étions 4 éléments perdus dans la campagne. Nous avons alors décidé d’attaquer pour mieux nous défendre. Au premier village que nous avons rencontré, les villageois nous donnèrent 2 guides pour aller déloger des Libériens dans un village voisin. Nous avons eu une résistance molle. J’ai fais mes premières victimes avant même que le ratissage des Libériens ne commence. Au cours de cette phase du combat qui a eu lieu le 24 avril 03, j’ai abattu 8 ennemis avec ma kalach dans la ville de Danané. On disait que je serais traumatisée après le combat mais il n’en a rien été. Je me sentais aussi relax que d’habitude. Au contraire, le fait de tuer des ennemis à la guerre m’honorait. C’était parti pour de bon à ce moment là. J’ai continué la guerre avec plus d’enthousiasme et de détermination. Notre victoire sur les pilleurs libériens nous rendait invincible contre les loyalistes. Une victoire totale contre tous nos ennemis se profilait à l’horizon quand le cessez-le feu a été signé. Aussi, je n’ai en aucun moment douté de la suprématie de nos éléments sur les bandes armées qui terrorisaient la population de l’Ouest à cause du soutient indéfectible des habitants qui nous ont tout de suite adopté. Leur désolation fut grande de nous voir partir, début juin.
De la démobilisation des combattants :
Je pense en toute honnêteté que chacun des éléments devrait se poser la question de savoir ce qu’il a envie de faire pour gagner sa vie. Tout le monde ne sera pas engagé dans la nouvelle armée nationale. Moi par exemple, je pourrais retourner à mon petit commerce à condition que l’on mette un capital à ma disposition pour l’achat de nouvelles marchandises. Mais ayant connue le métier des armes, je sais que je ferai un bon soldat demain. Je pourrai donc demander d’être enrôler dans notre nouvelle armée. Pour être sincère, disons que je ne souhaite plus retourner à la vie civile et être à nouveau persécutée par les forces de l’ordre comme par le passé avant le soulèvement du 19 septembre. Je préfère rester du bon côté de la kalach, si vous voyez ce que je veux dire !
Je souhaite pour la Côte d’Ivoire une paix définitive et que nous puissions un jour parler de cette guerre comme d’un banal souvenir. »

Propos recueillis par Pablo Senior, alias Wurufato.
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