Confidences d'un ex-rebelle. by Wurufato Friday July 18, 2003 at 12:54 PM |
wurufato@yahoo.com |
La rébellion de Côte d'Ivoire tire probablement vers la fin depuis la déclarations des combattants des deux armées(loyalistes et rebelles)d'aller vers la paix le 4 juillet dernier... mais les rebelles continuent de vider leurs sacs.
Ahmed, un rallié des premières heures au MPCI.
De son ralliement :
Le 19 septembre 02 je me trouvais à Bouaké, précisément au BASS (bataillon d’artillerie sol-sol) sous le commandement du Colonel Dagrou Loula du 3ème bataillon. Ce monsieur était un xénophobe de la pire espèce. Une fois, j’ai échappé à une arrestation de la DST qui souhaitait m’interroger (me torturer en fait) dans le cadre des soi-disant enquêtes sur les complots contre le Président. Avant le soulèvement du 19 septembre nos parents nordistes et les ressortissants des pays voisins souffraient beaucoup de l’injustice. Au niveau de l’armée ivoirienne, les Dioula ou nordistes n’avançaient pas facilement en grade, tout simplement parce qu’ils sont du Nord. Certains jeunes militaires originaires du Grand Nord sont parti en exil vers la fin de la période de la transition militaire en Côte d’Ivoire sous le Général Guéi (déc.99 – oct.00). Ce dernier, souhaitant se présenter aux élections présidentielles a pris soin d’écarter ceux de ‘ses jeunes gens de décembre 99’ qui ne partageaient pas ce retournement de veste. Il avait promis aux jeunes militaires au moment de s’assoire dans le fauteuil présidentiel d’organiser des élections démocratiques avec tous les candidats, sans distinction d’ethnie et remettre le pouvoir aux civils. Et au lieu de cela, il les met aux arrêts à la poudrière et les fait violemment torturer. Par la grâce de Dieu ils ont réussi à s’échapper et quitter le pays. A l’arrivée de Laurent Gbagbo au pouvoir en octobre 01, les exilés lui ont demandé audience afin de pouvoir rentrer paisiblement au pays pour reprendre le service. Cette chance leur a été maintes fois refusée. Ne sont-ils pas eux aussi des fils du pays ? En tant que Président de tous les Ivoiriens et père de la famille ivoire, il aurait du les appeler et les mettre au travail. Ces gens d’armes doivent-ils se morfondre en exil et abandonner leurs frères de l’armée, toutes les populations du Grand Nord et les ressortissants des états CEDEAO à la maltraitance du pouvoir et de ses corps habillés ? Ne sont-ils pas les mieux placés pour savoir les dérives répressives dont est capable un tel régime ?
Le 19 septembre, lorsque j’ai appris la nouvelle sur RFI, je me suis rendu au corridor nord pour m’informer de plus près sur la situation. Un sergent que je connaissais m’a confirmé ce que je pensais. L’heure de la libération avait enfin sonné. J’ai pris ma mobylette pour me rendre au 3ème bataillon, m’habiller et me mettre à la disposition des mutins sans aucune hésitation. Voilà comment je me suis rallié au Mouvement.
De la mission à l’Ouest et du jeudi noir(23 au 24 avril 03) :
Nous sommes allés pour mettre de l’ordre dans la maffia qui pullulait dans la région. Il y a eu plusieurs détachements avant nous qui revenaient à chaque fois sans succès car ils étaient trahis par nos propres alliés dans la région. Lorsque l’on a fait appel à la compagnie Guépard pour l’Ouest, nous avons été avertis de la complexité des combats sur ce front. Nous étions fermement sur nos gardes. Le mercredi 23 avril, un groupe de Libériens, avec la complicité de certains villageois sont venus nous dire que les forces loyalistes de Gbagbo occupaient la ville de Zouongnin, dans la région de Danané. Notre chef envoya 50 de nos éléments pour tenter une embuscade. Du matin au soir il ne s’est rien passé. Le chef remarquait que les deux armes lourdes des Libériens étaient positionnées en direction de nos positions. Pressentant quelque chose de louche, vers 18h il me demanda d’aller chercher nos éléments partis pour Zouongnin. A notre retour nous avons tenu un briefing au cours duquel le commandant nous a demandés de nous tenir prêts mais de ne pas réagir au cas où entendions des tirs. Dès la tombée des tirs à l’arme lourde venant des positions libériennes se font entendre. Le commandant nous a réitéré ses consignes et nous a postés à différents endroits de la ville.
Vers 23h une forte pluie s’est mise à tomber et leurs armes se sont tues. Aucun de nos éléments n’a fait usage de sa kalach. Les ennemis ignoraient nos positions. Puis aux environs de 4h30 nous les avons entendus tirer à nouveau, mais cette fois-ci à la kalachnikov. Nous en avons déduit qu’ils étaient à cours de munitions pour leurs armes lourdes. C’est alors que nous avons donné l’assaut. Ils ont quitté leurs positions pour fuir et nous les avons pris en chasse jusqu’à la frontière du Libéria à Gbinta. C’était une véritable chasse à l’homme. Nous avons, au bout de 3 jours de combat réussi à déloger Sam Boukary qui a pris la fuite en direction du Libéria. Gbinta était libérée… »
Propos recueillis par Pablo Senior, alias Wurufato.
Pour Indymedia - Belgium