arch/ive/ief (2000 - 2005)

Simenon et antisémitisme : deux poids, deux mesures. Par Gilles Martin
C’est avec surprise que je vois fleurir un nouvel engouement pour un écrivain comme Simenon. Voilà le bonhomme en odeur de sainteté puisque édité sur papier bible dans la fameuse Pléiade de chez Gallimard. Pourtant, un grand manque apparaît au cœur de cette nuée d’éloges : pas la moindre allusion au discours nauséeux du personnage.

Quand on cause Simenon, que ce soit à la téloche, dans la presse écrite, on a l’impression de lire une gentille carte postale postée par une collégienne.

Quid de la part d’ombre de l’écrivain ? Pierre Assouline a démontré, dans sa biographie, la méchante attirance dudit Simenon pour la haine des juifs. Et Didier Daeninckx parle, lui, d’une obsession antisémite, semblable à celle de Céline, insupportable.

Mais cet antisémitisme-là n’est pas grave aux yeux des gardiens des idées bien comme il faut. C’est comme la passion de Céline pour le nazisme ou l’anticommunisme, le racisme et l’antisémitisme d’Hergé: faut comprendre le contexte, séparer ces prises de position de l’œuvre, etc.

Une fois de plus, le courant d’air qui vient de droite est toléré, banalisé.

Par contre, quand il s’agit de s’en prendre à la gauche un tant soi peu radicale, on n’hésite pas.

La grande tendance est de tomber à bras raccourcis sur la moindre critique de la politique d’Israël. Vous êtes pro-Palestinien ? Vous êtes sans doute un antisémite qui s’ignore.

La farce devrait faire rire. Elle est dramatique. C’est consterné que j’ai pu lire cette prise de position de Simone Veil, survivante d’Auschwitz : " Mme Veil estime que le risque de la banalisation du génocide des juifs et des Tziganes est plus grand que celui de sa négation. Cette banalisation est en cours, a-t-elle dit, et elle est "retournée contre Israël, accusé, de façon scandaleuse, de crimes contre l'humanité". Quant à l'antisémitisme en France, elle a souligné que, dans sa version actuelle, il ne vient pas de l'extrême droite, mais de la "dérive haineuse d'un antisionisme militant pratiqué par des groupuscules d'extrême gauche", et dans lequel le "mal-être de jeunes issus de l'immigration" a trouvé à se refléter. " (1)

Qu’il y ait des dérapages antisémites chez certains militants de la cause palestinienne est une évidence et il faut combattre ces dérapages avec force. Mais amalgamer gauche radicale, antisionisme et antisémitisme est scandaleux. On voit d’ailleurs où mène ce raisonnement : l’extrême droite est exonérée. Inquiétant.

(1) Le Monde du 16/05/2003

Hergé était issu de la très petite bourgeoisie belge qui lui a trouvé un boulot très jeune dans un journal catholique très à droite.
Hergé n'était pas plus raciste ou antisémite que les gens de ce milieu. Il n'a pas eu la chance de vivre dans une société ouverte, de voyager, de faire des études. Il a dû travailler (religion, famille, travail)
Il a peu à peu pris conscience de la bêtise et l'étroitesse d'esprit de ce milieu et en a fait une dépression nerveuse. Il a alors quitté sa femme et son oeuvre s'est transformée radicalement.

Facile de critiquer les erreurs d'un homme qui a eu le courage de se remettre en question.

Et où est l'éloge de la religion, du travail et de la famille dans Tintin?
Il n'y a que dans "Jo, Zette et Jocko" qu'il donne une image favorable de la famille à la demande du PC (!) français.
Quant à l'URSS et au Congo, ça l'emmerdait, c'était aux USA qu'il voulait envoyer Tintin. Mais il devait faire ce que lui demandait son patron. Il n'était pas rentier.

C'est trop facile d'accuser le contexte pour défendre l'homme, c'est quand même grâce à des protections cléricales (par ailleurs elles-mêmes par très nettes dans leurs comportement sous l'occupation) qu'il échappa de peut à un procès pour faits de collaboration (notamment avec le Soir "volé")...
On ne connaît par ailleurs aucun repentir public de sa part qu'en à ses "idées de jeunesses", et l'image du monde donnée dans ses oeuvres ultérieures reste largement emprumpt d'un paternalisme colonial prononcé et d'un vision à droite de la société...

Hergé est un grand dessinateur de BD, ça ne fait pas un doute.
Mais concernat ses opinions politiques le doute n'est pas non plus permis.
Quelques exemples:
* Tintin au pays des Soviet est un concentré d'anticommunisme primaire.
* Tintin au Congo est traversé par le racisme et le colonialisme.
* Un des richissime ennemis omniprésent dans la série [ son nom m'échappe ] est une pure caraicature du Juif
* Hergé n'a pas seulement été collaborateur à des publication chrétiennes ultra conservatrices et au Soir 'volé', il a été collaborateur de Signal revue fasciste pour la jeunesse.
* L'image donné des peuples étrangers, à commencé par les Africains, mais aussi les Arabes, etc ... relève aussi du racisme.

Certe, dans son époque et dans son milieu, dans les années 40 et 50, ce type d'idée étaient très répendues. Et alors ? On est raciste ou on ne l'est pas. A la même époque, beucoup d'autres artistes exprimaient des points de vues radicalement différents. Sinon on peu aussi excuser Goebbels: « C'est pas vraiment un nazi, c'est juste le contexte familial et social: le nazisme était très à la mode à l'époque ... »

Si l'on ne fait pas le procès de ces idées de manière systématique et intransigeante, elles seront remises à l'odre du jour sans aucune difficulté ...

Le méchant Rastapopoulos, homme d'affaires grec, n'est pas un archétype du juif. Rien ne permet de l'affirmer sinon son...gros nez, ce qui est un peu faible.

Par contre dans l'"Etoile Mystèrieuse", publié en 1943, le méchant est un financier juif américain du nom de Blumenthal. La il n'y a aucun doute, il s'agit bien du judéo-yankee de la propagande rexiste. Les explications d'Hergé sont celles de tous les collaborateurs au régime d'occupation : "j'ai fait ce que disait le Roi, j'ai repris le travail". Parfois avec un certain zèle, pourrions nous ajouter.

Par ailleurs l'image du buisnessman juif, américain et capitaliste est aujourd'hui de retour dans de nombreuses colonnes...mais aujourd'hui c'est pour la bonne cause, n'est-ce pas ?

Hergé est né en 1907.

Il entre chez les scouts catholiques pour fuir sa famille en 1921.

Ses premiers dessins paraissent dans la revue des scouts en 1923 (il avait 16 ans)

En 1925, il entre au journal de droite catholique.

En 1926, il crée Totor (pré-Tintin)

1927: service militaire.

En 1928, il devient redacteur en chef du supplément pour la jeunesse du journal de droite catholique.

Le 10 janvier 1929 (Hergé a 21 ans), Tintin part vers les Soviets à la demande de son patron qui lui donne un livre anti-communiste et lui demande de s'en inspirer.

Tintin part au Congo l'année suivante toujours à la demande du curé qui dirige le journal.

Hergé ne commencera à se documenter sérieusement sur les régions traversées par Tintin qu'en 1935 grâce à la rencontre d'un étudiant en sculpture à l'Académie des Beaux-Arts de Bruxelles chinois.

Pendant la guerre, Tintin continue dans le "SOIR" volé. Il y a eu une dizaine de pages e.a. dans "L'étoile mystérieuse" où les méchants étaient les Juifs. Il aurait pu en faire plus, il aurait pu en faire moins.

Dépression nerveuse dans les années 50. Quitte sa femme (l'ancienne secrétaire du patron du journal de droite catholique).

Relisez "Les bijoux de la Castifiore" (années '60), il se moque des racistes qui croient que les bijoux ont été volés par des Gitans. En fait, c'était un oiseau qui les avait volés.

Quant aux gros nez, la b.d. en est remplie... Gaston Lagaffe, c'est anti-sémite aussi ?

1) "Jo, Zette et Jocko" (fin des années '30) était une commande pour "Vaillant" l'hebdomadaire du parti communiste français. Hergé ne faisait pas de politique. Il travaillait.

2) S'il n'a pas eu trop d'ennui à la libération, c'est surtout parce que Michel Leblanc, ancien résistant, l'a engagé pour lancer le "Journal Tintin".

deux commentaires ont été cachés ici car ils étaient insultants. Pas de sexisme sur indymedia, même sous le couvert de "l'humour".