Le Blok "normalisé" / "Le cordon médiatique est capital"

Un ténor du Vlaams Blok qui va se faire raser chez un barbier turc dans une cité minière flamande: l'image est inattendue, et c'est bien pour cela que la VRT l'a suscitée, dans le cadre de son approche "ludique" de la campagne électorale. Le but était de confronter, sur le terrain, des candidats aux aspects délicats de leur programme.

Dans le cas de Gerolf Annemans, ce ne fut qu'une occasion de plus pour lui de débiter des mensonges et d'essayer de se rendre sympathique. Car cette fois-ci, force est de constater que la VRT a choyé le parti raciste en le traitant comme tous les autres, comme un parti normal. Fini, le cordon sanitaire. S'il semble déjà en mauvaise posture dans la pratique politique, à la VRT, cet isolement du Vlaams Blok a carrément volé en éclats.

Avant, on ne parlait pas des fachos, aujourd'hui, ils sont soudain devenus fréquentables. En soi, cela ne poserait même pas de problème majeur si tous les partis politiques étaient approchés avec un sens critique, aussi et surtout pendant la campagne électorale. Si les programmes étaient examinés à la loupe et qu'on sommait leurs auteurs de les expliquer sur le fond et sans complaisance, les choses seraient claires: le Vlaams Blok serait traité comme les autres, et son langage haineux et ses propositions iniques ne résisteraient pas longtemps à l'analyse critique et à la contradiction.

Mais comme le traitement journalistique de la campagne par la VRT (et la RTBF et d'autres, d'ailleurs) consiste principalement à offrir aux (grands) partis un forum pour exposer leur programme, sans questions qui fâchent, le problème saute aux yeux: traiter le Blok comme les autres, c'est le vendre aux électeurs comme on vend les autres.

L'effort a porté ses fruits: le parti raciste a progressé à peu près partout. De là à faire le lien avec la complaisance de la VRT, il n'y a qu'un pas, que les élus du Blok eux-mêmes sont les premiers à franchir. On voit mal comment les responsables de la télévision publique flamande pourraient encore faire l'économie d'une introspection critique, urgente et suivie d'effets.

* "Le cordon médiatique est capital"

Pour La Libre Belgique de 20 mai, Annick Hovine a fait un interview avec Manuel Abramovicz, spécialiste de l'extrême droite et collaborateur au Centre pour l'égalité des Chances."

Le titre du dernier chapitre de l'article était: "Cordon médiatique".

Hovine: "Le danger du Front national deviendrait politique s'il acquérait une visibilité médiatique. Abramovicz: "On dit que Daniel Féret, le président du FN, n'est pas charismatique. C'est faux. Dans son public, sur son terrain, il passe très bien, il parle bien, il est charmant, il sait comment caresser son électorat dans le sens du poil. Et je peux citer 5 ou 6 leaders d'extrême droite francophone qui, si demain, ils sont invités à 'Mise au Point', feraient un carton."

Conclusion de Hovine: "Le cordon médiatique est donc capital, même s'il ne réussira jamais à faire disparaître l'extrême droite."

arch/ive/ief (2000 - 2005)