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GUERRE EN IRAQ
by Journal Avant-Garde Saturday April 26, 2003 at 11:55 PM
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Analysis about war against Iraq. USA international policy, imperialism and global problems. Critics of Russian governement.

Guerre en Irak
Par Alexander Volnyi

1. L’intervention
Le 20 mars 2003 les missiles de croisière US entraient en action, exterminant la population irakienne, soumettant ses villes à des bombardements destructeurs. Un déluge de feu et de métal s’abattait sur l’Irak. Qui dira la douleur d’un peuple dont on tue les enfants sous ses yeux? Les barbares civilisés venus d’un autre monde décimaient la population, bafouaient sa coutume et sa culture. Dans le monde entier les gens qui n’ont pas su empêcher cette guerre sont devenus les partenaires involontaires de la grandiose tuerie.
Mais qu’arrive-t-il à notre monde ?
La guerre déclenchée par les États-unis et l’Angleterre contre l’Irak à l’ignorance de la volonté de l’ONU, des lois internationales, de la morale universelle et des protestations levées dans le monde entier, le montre clairement : la politique des gouvernements de ces deux pays vire définitivement à l’impérialisme.
Selon moi, la guerre en Irak s’inscrit dans une politique américaine délibérée et parfaitement prévisible. Celle de la superpuissance qui ne trouve à s’exprimer et s’affirmer que par la conquête des territoires étrangers, ayant pour aboutissement un nouveau partage du monde. Ce fut déjà le cas lors de la Première guerre mondiale, ce fut aussi le cas lors de la Seconde. Ce fut le cas tout au long du 20-ème siècle avec sa succession de conflagrations militaires, de renversements des régimes jugés indésirables, de corruption des gouvernements en place, de sanctions politiques et de blocus économiques iniques. L’essor des États post-industriels s’accompagnait nécessairement de guerres visant à accaparer les grandes ressources vitales, avec mise en œuvre des moyens militaires les plus évolués, ceux qui correspondaient au top niveau économique atteint à ce moment par la société.
2. L’Union Européenne et la guerre
Les dirigeants politiques de l’Union Européenne n’ont réagi que mollement à l’agression américaine, le principal reproche fait à la Maison blanche étant qu’elle n’a pas observé les formes. Dans leur esprit, on pouvait accéder au pétrole irakien et procéder à son partage par le biais des Résolutions de l’ONU, par le voie non violente d’une pression exercée sur Saddam Hussein – à l’instar de ce qu’on a vu en 1999, quand la Yougoslavie fut écrasée dans le cadre des Résolutions de l’OTAN et par les forces armées de l’OTAN. Il faut toutefois saluer les prises de position du Président français Chirac et du Chancelier allemand Schröder, et la fermeté avec laquelle ils ont maintenu leur opposition à la guerre. Leur prise de position contre la guerre est hautement appréciée des peuples d’Europe.
Mais les États-unis sont un pays voué au pragmatisme le plus primitif, il n’est pas question pour eux de concerter avec quiconque les problèmes politiques où leurs intérêts sont impliqués, ni avec leurs alliés, ni moins encore avec la Russie. En Irak, estiment-ils, il n’y a pas de place pour deux et pas assez de pétrole pour tout le monde. Le partage doit se faire à la force du muscle. Le milliardaire ne partage jamais son butin. Le butin lui appartient de droit, celui du plus fort, et en proportion du capital engagé.
Si l’opinion publique est choquée par la guerre même, elle ne l’est pas moins par l’énorme mensonge que les gouvernements américains et anglais érigent en politique officielle, comme quoi c’est une guerre aux nobles objectifs, pour les grands idéaux et les grandes valeurs de la démocratie. Autant dire que les mythes de cette guerre ne diffèrent en rien de ceux dont s’est accompagnées toute l’histoire des conflits du 20-ème siècle.
L’opinion mondiale se voit inculquer une vision de la guerre parfaitement mensongère, une opération militaire qui consisterait à délivrer les peuples de régimes dictatoriaux odieux, à faire valoir leurs intérêts profonds et instaurer un régime démocratique. Le calque exact de ce qui s’est passé en Amérique durant toute l’histoire des États-unis, du jour de leur fondation. Le calque de ce qui s’est passé dans les pays d’Amérique latine, au Viet-Nam, au Japon d’Hiroshima et Nagasaki, quand les États-unis, sous prétexte d’accélérer ainsi la fin de la Seconde guerre mondiale, usèrent de l’arme atomique contre des populations désarmées, les bombardements nucléaires recevant en outre une justification humaniste.
Aujourd’hui, les États-unis et l’Angleterre se prévalent du droit de la nation anglo-américaine dominante pour instaurer à travers le monde leur ordre à eux, leur volonté et leur Bill, ils défient le droit international, s’approprient les ressources et les richesses régionales, par la violence et le pillage systématique. Les États-unis qui ont toujours pratiqué la politique « du bras tordu » et de la concussion avec leurs propres alliés, y recourent avec d’autant plus d’aisance à l’encontre de pays non considérés comme tels. Sanctions économiques, politiques et financières contre les régimes indésirables, ceux qui s’obstinent à défendre leurs intérêts nationaux, avec le but avoué de les renverser.
Plusieurs États ont ainsi été sommés de se joindre à la coalition anti-irakienne. Et des pays comme l’Azerbaïdjan, la Géorgie, l’Ouzbekistan, l’Ukraine et quelques autres, connus pour être dirigés par des gouvernements fantoches, se sont ralliés à la politique extérieure américaine. Reconnaissons qu’en ce domaine les États-unis appliquent une ligne certes agressive, mais parfaitement explicite.
L’histoire universelle montre que la nation dominante, non seulement peut se faire l’expression de son époque, mais s’estime également en droit d’imposer sa volonté et son ordre social aux autres nations. À celles à qui une telle approche répugne, ne reste que choisir entre la défense de leur souveraineté et le rapide passage au statut de néo-colonie américaine.
En substance, la guerre déclenchée par les États-unis contre l’Irak est celle des lobbies pro-israéliens agissant aux USA et en Angleterre contre les États arabes, contre l’Union Européenne qui ne soutient pas l’agression d’Israël contre la Palestine et la condamne. Une guerre des palais contre les chaumines, des riches contre les pauvres – premier pas vers la dictature globale, attaque en règle contre les libertés et les droits de l’individu où qu’il vive.
Sous couvert de lutte contre le terrorisme international, les services secrets font front commun pour écraser les mouvements de libération nationale, les dissidences de toute sorte et cela où qu’ils se manifestent. Pour les puissances post-industrielles les peuples et les sociétés ne sont que la masse biologique indispensable à la production et la consommation des biens, à la production de capital. C’est l’avènement du vrai monde totalitaire. L’humanité fait face à une menace globale, ce qui est en cause est la liberté de l’individu, suprême valeur spirituelle de toute véritable civilisation. Le pouvoir de l’élite politique a supprimé Dieu, instauré le règne de l’argent, des armes et du cynisme absolu. L’Église s’est bien gardée de prendre la défense de la paix, aucun anathème n’a été lancé contre ceux qui ont déclenché la guerre. Son autorité auprès des croyants s’en trouve encore amoindrie.
3. La Russie et la guerre
La guerre en Irak s’affirme comme une répétition générale dans la perspective d’une grande guerre contre la Russie et la Chine, pour le nouveau partage du monde, le contrôle global des ressources énergétiques. Mais pourquoi viser la Russie et la Chine ? Parce que ces deux pays sont des puissances nucléaires et qu’à l’évidence, ils tenteront de s’opposer aux visées impérialistes qui poussent les États-unis à recomposer dans la perspective l’ordre mondial actuel. Curieusement, c’est au moment où la guerre est déclenchée en Irak que parallèlement se répand dans le monde l’épidémie de pneumonie atypique. Le dangereux virus parti de Chine se répand rapidement sur toute la Terre. Simple hasard ou diversion calculée ?
Je ne serais pas étonné si les États-unis ne réclament sous peu de placer l’armement nucléaire de la Russie sous contrôle international et ne taxent alors de nationalistes et de séparatistes les patriotes qui aiment leur pays. Vénal par définition, le gouvernement russe remettrait les clés de Moscou aux Américains, ceux-ci annoncerait à tous les échos que la menace nucléaire émanant de Russie est éliminée, que la liberté et la démocratie y sont cette fois bien instaurées.
Le 20 mars 2003, au moment où la guerre débutait, l’administration américaine envoyait à tous les gouvernements une circulaire exigeant le rappel immédiat de leur représentation diplomatique en Irak et le gel des avoirs irakiens. Il s’agissait d’isoler politiquement le gouvernement de Bagdad, de déclarer hors-la-loi l’équipe dirigeante de Saddam Hussein et d’étrangler le peule irakien en lui coupant les finances et paralysant les activités économiques. Les pays qui se déroberaient et refuseraient d’appliquer la politique de la Maison blanche risquaient d’être portés sur une liste noire lourde de sanctions variées.
La Russie qui entend jouer un rôle prééminent dans la politique mondiale, mais s’y prend on ne peut plus maladroitement, a opté pour la politique de l’autruche, autrement dit pour son conformisme traditionnel. Mis en demeure de renvoyer les diplomates irakiens chez eux et de geler les avoirs bancaires, le gouvernement russe a multiplié les formules évasives. Le Ministre des affaires étrangères Igor Ivanov déclarait : « Nous avons demandé à l’administration américaine un complément d’information. Jusqu’ici nous n’avons pas de réponse. Nous voulons voir ce que seront les justifications juridiques à nous présentées ». Et le Ministre des finances Alexéi Koudrine : « Notre législation nous donne le droit de geler les avoirs des pays étrangers lorsque ces avoirs sont utilisés par des organisations terroristes. Présentement, nous ne disposons pas d’information de ce genre concernant les comptes irakiens ».
Ces vaseux bégaiements de l’élite politique russe, au moment où la guerre faisait rage, avaient tout d’une adhésion indirecte de la Russie aux opérations militaires. Dans les grande lignes, la position du gouvernement et du parlement russes prend cette allure : nous serions ravis de renvoyer les diplomates irakiens et de geler les avoirs bancaires irakiens, mais il nous faudrait des justifications plus argumentées ainsi que l’assurance que la Russie sera présente dans la reconstruction de l’Irak au lendemain de la guerre, dans le partage de son pétrole.
Quant au Président Poutine, il a prudemment qualifié la guerre d’agression en Irak de « grande erreur politique », mais déclaré officiellement que les États-unis étaient le principal allié politique et économique de la Russie et que son pays ne verrait rien de bon pour lui à une défaite américaine en Irak.
Au moment où Vladimir Poutine répétait à son opinion publique que les États-unis sont les amis de la Russie, les forces coalisées bombardaient de nuit et de jour les quartiers habités de Bagdad, détruisaient des maternités, des hôpitaux. Le Département d’État multipliait les mises en garde à la Russie, accusée de fournir des armements à l’Irak – c’est égal, le président russe continuait d’encourager les Russes à faire ami-ami avec l’Amérique.
Faisant feu de tout bois pour tâcher d’être présente lors du partage du pétrole irakien au lendemain des hostilités, la Russie envoyait un avion-cargo chargé d’aide humanitaire, en l’occurrence des tentes destinées à accueillir les réfugiés irakiens dans la zone tampon limitrophe de l’Iran. Le peuple irakien avait besoin d’assistance militaire pour faire face à l’agression, l’aide « amicale » russe lui est apparue comme une trahison pure et simple, il l’a refusée. D’autant que les tentes russes n’auraient finalement trouvé aucun usage – loin de fuir le champ de bataille, le peuple irakien a courageusement engagé le combat contre l’agresseur et défendu avec héroïsme sa liberté et son indépendance. Des villes comme Basra, Um-Kasr et En-Nassiri resteront dans les livres d’histoire comme des cités héros.
Donc, les plans de guerre-éclair caressés par les États-unis et l’Angleterre ont piteusement échoué. Désormais on pourra apprendre la géographie de l’Irak et le nom de ses villes, dont nul jusque-là n’avait entendu parler, de la même façon que nous autres Russes, nous avons appris la géographie de la Tchétchénie au travers des communiqués militaires : Ourous-Martan, Gudermès, Chali…
Mais pour quelle raison la Russie a-t-elle choisi de fermer les yeux sur l’agression, de se rallier même à la position américaine ? Cette Russie qui, reparue sur la carte politique du monde, après la chute de l’URSS en 1991, en tant que pays capitaliste désormais, et qui dans l’intervalle a eu le temps, coup sur coup, de déclencher ses deux guerres de Tchétchénie ? Voici près de 20 ans que le pays est aux mains de gouvernements incapables et corrompus, occupés à voler les richesses nationales et à expatrier chaque année les dollars US par milliards. Selon des données très officielles, en 10 ans les fonctionnaires russes ont empoché sous forme de pots-de-vin la coquette somme de 12 milliards de dollars US. Un tel gouvernement est incapable de faire valoir les intérêts du pays à l’intérieur et moins encore à l’étranger. « Avec l’accession au pouvoir des Gorbatchev, Iakovlev, Chevarnadzé l’Union soviétique s’est engagée dans la voie de la catastrophe planifée de l’extérieur. »
D.Richelson, un des grands spécialistes américains du renseignement le déclare tout de go: « Une des méthodes pour conquérir la Russie sans coup férir, consistera à user de notre influence sur les politiques, les gouvernants et les personnalités publiques, à apporter notre soutien financier aux partis politiques, aux organisations publiques et aux particuliers dont l’action est conforme aux intérêts nationaux des États-unis » . Je dirais qu’à mon avis, font partie des organisations en question des formations politiques comme Russie Démocratique, Union des Forces de Droite, Iabloko, Russie Unifiée – cette dernière portant dans son nom même le germe d’une possible désintégration du pays.
La Russie a mené une politique de conciliation et de complaisance face à l’agresseur en faisant valoir l’argumentaire et la rhétorique de « ses intérêts spéciaux », en rapport avec une collaboration serrée avec les États-unis. Tout ceci n’est que paroles creuses, phraséologie vide de sens que l’on inculque à l’opinion publique par le trou du souffleur, si je puis dire, et qui sont activement diffusées par la Télévision nationale, télévision ayant depuis longtemps cessé d’être russe et nationale, dans la forme comme par le contenu.
Car la Russie actuelle se cherche une place sous le soleil, auprès d’amis de préférence les plus puissants et c’est aux États-unis qu’elle fait avant tout les doux yeux. J’en veux pour preuve l’attitude du Président Poutine, du gouvernement russe, du corps des députés qui ne cessent de parler les uns et les autres de coopération stratégique avec les Américains, de participation à une alliance soi-disant antiterroriste, du rôle éminent de la Russie dans la lutte contre le terrorisme international. À croire que l’histoire n’enseigne rien aux politiciens de Russie. Prenons ne serait-ce que cette formule spécialement concoctée à l’intention des Russes, des « 7 + 1 », des « huit grands ». Une sottise qui eut le chaleureux soutien du Président Eltsine, du gouvernement russe de l’époque et de politologues tels que Nikonov, Karaganov, Arbatov, tous installés aujourd’hui à la tête de fondations et d’instituts lucratifs, bardés de grades savants par eux-mêmes attribués. Et voici qu’à présent les politiques de Russie et le Président Poutine se voient suggérer de nouvelles comptines ayant trait à « la lutte contre le terrorisme international », au « triplette européen » et autres balivernes.
La réalité est tout autre, où dans le réaménagement global de la planète qui s’annonce c’est la Russie qui à son tour va être le gâteau à partager. L’occasion est bonne de rappeler ici ces vers qu’on connaît bien en Russie :
« Du haut de leur nuage ils t’avisent
Courbant la tête sous le joug des idiots.
Et toi tu bois, tu nostalgises,
Tantôt jeûnant et silencieux,
tantôt priant le Bon Dieu. »
Le gouvernement russe l’ânonne comme un antienne : nous sommes pour la paix, nous sommes contre la guerre, ramenons la discussion sur l’avenir de l’Irak au sein du Conseil de Sécurité de l’ONU, et cætera et ainsi de suite. Quelle sollicitude envers le peuple irakien, n’est-il pas vrai ? Prenez des leçons chez nos députés et nos ministres, sur le comment camoufler en idées humanistes le désir de prendre part au festin que d’autres ont déjà largement entamé. Il suffit d’écouter le représentant du peuple Marguélov, qui n’a jamais passé pour une lumière d’intellect, lorsqu’il lâche comme un perroquet sur une chaîne de la télévision puis sur une autre, qu’aux yeux du gouvernement russe le point essentiel reste l’amitié avec les États-unis, la reconstruction de l’Irak au lendemain de la guerre et la mise en avant de « nos intérêts » lors du partage du pétrole irakien.
Des régions entières de la Russie sont privées de chaleur et de lumière. 60% des profits de la vente des ressources énergétiques du pays sont appropriés par MM. Khodorkovski et Abramovitch. Les gens qui ne peuvent plus payer leur loyer sont jetés à la rue et dans le même temps le gouvernement russe ne verse pas leur salaire aux fonctionnaires, enseignants et médecins, les arriérés pouvant atteindre ici jusqu’à 6 mois. Cet hiver des centaines de personnes sont mortes de froid, et parmi elles des vétérans de la dernière guerre.
Le 9 avril dernier la Douma adoptait en urgence la loi qui autorise l’expulsion de leur logement des locataires incapables de payer leur loyer. Au même moment se tient à Londres un Forum économique Russie où les Tchoubaïs et les Khodorkovski font leur rapport aux « partenaires » sur les progrès spectaculaires accomplis par la Russie dans la mise en place d’une économie de marché et ce qu’il reste encore en Russie à privatiser, à brader au capital étranger.
De son côté le maire de Moscou Mikhaïl Loujkov suggère à son tour de détourner les grands fleuves sibériens pour en vendre l’eau aux pays d’Asie centrale. Que cache exactement ce projet ? Ce que Loujkov propose de détourner pour 10 ou 20 années ce sont toutes les ressources financières, intellectuelles et humaines, toute l’énergie du pays, pour réaliser des chantiers démentiels comparables à ceux des pyramides d’Égypte, au lieu de les consacrer au développement des sciences, des nouvelles technologies et à la solution des grands problèmes sociaux qui ne peuvent attendre.

« Ma patrie, ma patrie,
Endeuillée et muette,
Ma patrie, ma patrie,
Tu as perdu la tête… »
I.Talkov

4. L’ONU contre la guerre ?
Mon opinion est que les programmes humanitaires développés par toutes sortes d’OMG et spécialement l’ONU, représentent une forme détournée d’intervention dans les affaires des États souverains et sont en réalité l’instrument d’une pression politique soigneusement ciblée. Il faut également comprendre que ces dizaines et ces centaines de millions de dollars (dans le cas de l’Irak, il ne s’agit pas d’autre chose que de l’argent issu des ventes de son propre pétrole) servent à facturer les grands fournisseurs internationaux de produits alimentaires et finissent tous au fond des banques d’Europe et d’Amérique. Ceci fait de l’assistance humanitaire une plaisante affaire apportant des profits se chiffrant par millions, auréolée en outre d’amour du prochain. Un comble ? Où la guerre n’est pas une calamité pour tout le monde.
5. Toute la planète contre la guerre
Un monde qui souffre que le crime reste impuni
fait du crime un droit.
Dans tous les coins de la Terre des millions d’hommes et de femmes ont pris part à la puissante levée de boucliers contre la guerre, tous les slogans dénonçaient le profond fossé creusé désormais entre les opinions publiques et la politique des gouvernements. On l’a vu en Angleterre, aux États-unis, en Australie, en Italie, en France, en Espagne, bref – partout, mais pas en Russie ni en Israël.
Gravissime rupture entre l’élite politique et la majorité de la population. Et sa cause principale tient à l’antagonisme croissant qui oppose les peuples démunis et sans travail, d’un côté, et leurs États bourgeois de l’autre.
Les plus actifs à dénoncer la guerre en Irak ont été les jeunes, comme on l’a vu en Europe, en Australie, en Amérique latine, en Asie, aux États-unis, au Canada. À ces manifestations ont pris part des jeunes âgés entre 12 et 20 ans. Ceux-là n’ont pas hésité à se lancer dans de véritables batailles de rue avec les nouveaux centurions de notre époque – une police qui les réprime sans pitié.
Question : pourquoi les jeunes au premier rang des combats de classe ? Réponse : parce qu’ils n’ont encore perdu ni la foi en les idéaux de justice, ni la compassion pour ceux qui souffrent, parce les jeunes sont les premières victimes de la férocité de notre civilisation. Des bouches en surnombre, les proies désignées de l’industrie du narcotrafic. Hier on leur a pris leur travail, aujourd’hui on leur prend leur jeunesse, on leur prendra demain leur espérance de liberté. Là, ils n’auront plus rien à perdre…
6. Chute de Bagdad. Fin de la guerre et démarrage de nouveaux rapports internationaux
Qui veut conquérir un peuple commence par détruire ses dieux.
Le 7 avril dernier un cortège diplomatique aux couleurs de la Russie se dirigeant vers la Syrie essuyait les tirs des troupes américaines. Plusieurs ressortissants russes étaient blessés. L’ambassadeur de Russie en Irak Titorenko et ses collaborateurs, blessés compris, étaient allongés sur l’asphalte et retenus ensuite durant plusieurs heures. Selon l’ambassadeur Titorenko, les soldats américains s’employèrent à humilier les diplomates et les couleurs russes.
Le 8 avril, c’est un char américain qui tirait à vue sur la façade de l’hôtel Palestine, notoirement occupé par les journalistes et correspondants de guerre du monde entier. Deux d’entre eux y trouvaient la mort.
Le 9 avril, à la surprise générale Bagdad se rendait sans résistance à l’armée coalisée. Le Président Saddam Hussein et le gouvernement irakien légitime étaient forcés de quitter leur pays. La guerre ainsi en gros terminée, reste la question de savoir dans quel monde allons-nous vivre maintenant ? Et nous tous qui n’avons pas esquissé un geste pour nous opposer à l’agression militaire, comment allons-nous nous regarder en face ?
L’Irak est conquis, sa capitale est en ruine. La foule de la rue pille et profane les monuments nationaux. L’ordre public et la moralité cèdent la place à la maraude. Dans ce contexte, la récente déclaration du Président français Jacques Chirac prend toute son actualité et son importance, quand il insiste sur l’indispensable assistance à accorder à l’Irak, non seulement sous la forme humanitaire, mais encore sous celle de la restitution au peuple de l’Irak de sa dignité et de l’autorité sur son pays.
Le 11 avril les États-unis recommandaient à la France, à l’Allemagne et à la Russie d’effacer les dettes irakiennes respectives et d’épargner ainsi une lourde charge supplémentaire au nouveau gouvernement qui se mettra en place à Bagdad. Une telle mesure serait la contribution desdits pays à la construction de l’Irak d’après-guerre. Ainsi débute un nouveau poker politique où les mises se chiffrent en milliards de dollars, mais où le perdant est connu d’avance.
7. Conclusions
La guerre en Irak fut une action brutale des États-unis et de l’Angleterre, non seulement à l’encontre de l’État et du peuple d’Irak, mais aussi envers tous les autres peuples de la planète. Une action déniant le droit à la liberté. Déniant le droit à la vie. Déniant le droit à la non-ingérence. Bafouant le principe de présomption d’innocence. Les États-unis ont revêtu du treillis militaire leurs chômeurs de la veille et les ont lancés dans leur guerre pour qu’ils tuent et soient tués. De la sorte Washington fait d’une pierre deux coups, elle réduit son chômage et elle renforce son armée – la voici fin prête pour de nouvelles aventures militaires.
La guerre en Irak à montré :
– que c’était une guerre pour le pétrole, pour l’hégémonie totale sur le monde, pour la mise au pas de l’humanité entière, et qu’elle n’avait rien à voir avec le renversement du gouvernement de Saddam Hussein ;
– qu’en cas de conflit avec la Russie ou la Chine, les États-unis auront recours aux frappes nucléaires. Cela en fera une guerre plus efficace et plus courte ;
– que cette guerre est devenue possible du fait de la politique du laisser-faire adoptée par l’ONU et la Russie, deux des garants de la sécurité dans le monde ;
– que le dessein des États-unis, de l’Angleterre et d’Israël est de prendre en mains les destinées du Proche-Orient, de s’emparer des ressources énergétiques de cette région, d’en étouffer la conscience nationale et de réduire les Arabes au rang de serviteurs de l’impérialisme et du sionisme ;
– que la guerre en Irak signe le départ d’une nouvelle courses aux armements et fait resurgir devant l’humanité la menace de la catastrophe nucléaire qu’on avait un peu oubliée.