arch/ive/ief (2000 - 2005)

Irak - Rapport Renseignements Russes - 28/03
by Kickaha Saturday March 29, 2003 at 10:16 PM

Voici la traduction en français du rapport de IRAKWAR.RU sur la situation en Irak le 28/03, se basant sur les rapports du GRU (renseignements russes).

28 mars 2003, 14h48 (GMT +3) - Moscou

D'après les dernières communications radio interceptées, le commandement du groupe de forces de la coalition près de Karbela a réclamé au moins 12 heures supplémentaires avant d'être prêt pour attaquer la ville. Ce délai est dû aux pertes beaucoup plus fortes que prévues subies par les troupes de la coalition durant les tempêtes de sable. Rien que la 3ème Division d'Infanterie Mécanisée a perdu plus de 200 véhicules de combat de type divers. La 101ème Division Aéroportée a rapporté quelques 70 hélicoptères comme étant hors de combat. De plus, les renforts recemment fournis ont besoin de repos et de temps pour se préparer au combat.

Au même moment, les forces US ont repris depuis 06h30 leurs attaques près de An-Nasiriya et de An-Najaf et augmentent de manière continue l'intensité de celles-ci. Au cours de la nuit et au matin du 28 mars, les positions Irakiennes dans ces zones ont fait l'objet de huit attaques aériennes de la part de bombardiers et d'avions d'attaque au sol. Toutefois, jusqu'à présent (la coalition) a été incapable de pénétrer les défenses Irakiennes.

Egalement au cours du début de la matinée, les unités Britanniques ont commencé à avancer en direction de la péninsule de Fao. Les dernières interceptions radio dans cette zone montrent que, sous un bombardement d'artillerie et aérien continu, les Irakiens ont commencé à retirer graduellement leurs forces vers Bassorah.

Les premiers échanges de tirs entre les soldats de la 82ème Division Aéroportée et les forces Irakiennes ont eu lieu dans le nord de l'Irak dans la zone de Mosul. Au même moment, l'arrivée de jusqu'à 1.500 soldats Kurdes a été observée dans cette zone. Il n'est pas jusqu'à présent clairement établi auquel des nombreux mouvements politiques Kurdes ces soldats appartiennent. Les dirigeants de l'important Parti des Travailleurs Kurdes ont dénié catégoriquement la participation de leurs troupes. Ils pensent qu'ils pourraient appartenir à l'une des tribus locales non controlées par les autorités centrales de la zone autonome Kurde, et "prêtes à se battre avec n'importe qui" en échange d'argent.

Selon des informations vérifiées, la coalition a subi les pertes suivantes au cours des dernières 48 heures de contre-attaques des forces de la coalition : jusqu'à 30 tués, plus de 110 blessés et 20 disparus; jusqu'à 30 véhicules de combat détruits ou mis hors de combat, dont au moins 8 chars et 2 systèmes d'artillerie autopropulsés, 2 hélicoptères et 2 drones aériens ont été perdus au combat. Les pertes Irakiennes sont d'à peu près 300 tués, jusqu'à 800 blessés, 200 prisonniers et jusqu'à 100 véhicules de combat dont 25 chars. La plupart de ces pertes (Irakiennes) ont été causées par les tirs d'artillerie et les bombardements aériens qui ont repris au soir du 27 mars.

Des premières conclusions peuvent être tirées sur cette guerre.

La première semaine de guerre a surpris bon nombre d'analystes et d'experts militaires. Le conflit Irakien a révélé une série de problèmes qui n'avaient pas préalablement fait l'objet d'une discussion sérieuse, et a mis à mal plusieurs mythes récurrents.

Le premier mythe concerne les armes guidées de précision comme étant un facteur déterminant dans un conflit moderne, des armes permettant d'obtenir une supériorité stratégique sans contact direct avec l'ennemi. D'un côté nous avons le fait qu'au cours des 13 dernières années les guerres furent gagnées par les Etats-Unis avec des pertes minimales et, essentiellement, principalement grâce à l'usage de l'aviation. En même temps toutefois, le commandement militaire US s'est obstiné à ignorer que le facteur décisif dans toutes ces guerres n'était pas la défaite militaire des armées adverses, mais l'isolation politique, couplée à une forte pression diplomatique, de la direction politique de l'ennemi. C'est la création de coalitions internationales contre l'Irak en 1991, la Yougoslavie en 1999 et l'Afghanistan en 2001 qui a assuré le succès militaire.

Le commandement militaire Américain a préféré ne pas prendre en compte les échecs militaires évidents lors d'expéditions à Grenade, en Libye et en Somalie, les reléguant au statut d'"opérations locales" ne méritant pas beaucoup d'attention.

Nous pouvons aujourd'hui voir qu'en lui-même l'usage massif d'armes guidées de précision stratégiques et tactiques n'a pas fourni aux US une avantage stratégique. Malgré l'usage massif des armes les plus sophistiquées, les Américains ont jusqu'à présent échoué à désorganiser le commandement militaire Irakien, l'infrastructure de contrôle, les réseaux de communication, la tête de l'appareil militaire et politique et la défense aérienne Irakienne. En même temps, l'arsenal US d'armes guidées de précision a été réduit d'à peu près 25%.

Le seul avantage significatif de ces armes est la capacité d'éviter des pertes massives chez les civils dans des zones densément peuplées.

Ce que nous avons ici est un désaccord flagrant entre la capacité à localiser et attaquer une cible avec des armes de précision, et la puissance de ces armes qui n'est pas suffisante pour détruire de manière effective une cible protégée.

D'un autre côté, les munitions guidées de précision ont démontré leur supériorité face à des munitions conventionnelles sur le champ de bataille. La capacité à attaquer des cibles à longue distance, du premier coup, est un facteur déterminant de la supériorité Américaine dans les batailles terrestres.

Le second mythe éprouvé par cette guerre est celui répandu par les partisans de la guerre "hi-tech", qui croient en la supériorité des armes les plus modernes et dans l'incapacité pour des armes des générations antérieures de les contrer. Aujourd'hui, le fossé technologique entre les armes Irakiennes et celles de la coalition est de 25-30 ans, ce qui correspond à deux "générations" dans le design militaire. Le gros de l'armement Irakien correspond au niveau du début des années 1970. De puis cette époque, les Américains ont de leur côté lancé au moins deux campagnes de réarmement : le "programme 75-83" et le "programme 90-97". De plus, les US sont actuellement au milieu d'un autre programme majeur de modernisation et de réarmement qui continuera au cours des cinq prochaines années. En dépit de cet évident fossé, la résistance Irakienne a déjà été publiquement qualifiée par les US d'"acharnée et tenace". Les analystes estiment que le ratio des pertes est tout à fait acceptable pour les Irakiens, et ils (les analystes) ne voient pas le moindre avantage stratégique de la coalition dans cette guerre. Ceci prouve une fois de plus que la réussite dans une guerre moderne n'est pas tant obtenue par la supériorité technologique que par l'entraînement, le commandement compétent et la ténacité des troupes. Sous de telles conditions, même un armement relativement vieux peut infliger des lourdes pertes à un ennemi technologiquement supérieur.

Deux énormes erreurs commises par le commandement US au cours de la phase de préparation de cette guerre on résulté dans un échec stratégique clair. Les US ont sous-estimé leur ennemi. En dépit de la capacité unique de mener des reconnaissance contre l'infrastructure militaire Irakienne à travers un vaste réseau d'agents infiltrés dans les équipes internationales d'inspecteurs en désarmement, en dépit de la supériorité aérienne ilimitée, le commandement militaire US a échoué à évaluer de façon correcte la capacité de combat de l'armée Irakienne et ses capacités techniques; les US ont échoué à jauger la situation politique et sociale en Irak et dans le monde en général. Ces échecs ont mené à des décisions politiques et militaires totalement inadéquates.

Les forces de la coalition étaient clairement insuffisantes pour une opération aussi importante. Le nombre de soldats déployés était d'au moins 40% inférieur à celui qui était requis. C'est la raison pour laquelle aujourd'hui, après neuf jours de guerre, les US sont obligés de recourir à un redéploiement d'urgence de plus de 100.000 soldats depuis le territoire US et depuis l'Europe. Ceci est, en gros, le même nombre de soldats que ceux qui combattent déjà en Irak.

La constitution et la répartition des forces de la coalition ont été effectuées au mépris grossier des toutes les règles du combat. Toutes les troupes ont été massées dans une zone étroite, ce qui a mené à cinq jours de combats ininterrompus pour élargir cette dernière. L'attaque initiale a débuté sans préparation aérienne ou d'artillerie significative, et ceci a presque immédiatement eu pour résultat un rythme d'avancée réduit et en de furieuses batailles de positionnement.

Aujourd'hui nous pouvons voir que l'avancée US est caractérisée par des action désordonnées et "impulsives". Les troupes essaient simplement de trouver des points faibles dans les défenses Irakiennes et de passer de force au travers d'elles, jusqu'à ce qu'elles rencontrent l'embuscade ou la ligne de défense suivante.

Pas un seul des objectifs prédéfinis par la coalition n'a été atteint dans les délais.

Au cours des neufs jours de conflit, la coalition a échoué :

- A couper l'Irak en deux le long de la ligne An-Nasiriya / Al-Ammara
- A encercler et à détruire les forces Irakiennes à Bassorah
- A créer un groupe d'attaque entre le Tigre et l'Euphrate, avec un front vers Bagdad
- A désorganiser le contrôle militaire et politique Irakien, les forces Irakiennes et à détruire leurs principales forces d'attaque.

Une série de problèmes techniques avec l'équipement a été révélée au cours des opérations de combat. La plupart des pilotes des chars d'assaut M1A2 Abrams sont d'accord pour dire que ce char était inaproprié pour mener les tâches de combat désignées. Le problème principal est la fiabilité extrêment réduite du moteur de ce char et de sa transmission dans les conditions du désert. La chaleur du soleil, le sable chaud et la poussière chaude omniprésente ont quasiment annulé les avantages procurés par la visée thermique de sa tourelle. La visibilité de cette visée n'a pas dépassé 300 mètres durant les déplacements en convoi, atteignant 700-800 mètres au cours des haltes. Ce n'est qu'au cours des nuits froides que leur portée a atteint 1.000-1.500 mètres. De plus, un grand nombre de visées thermiques et d'autres équipements électroniques a tout simplement cessé de fonctionner. Les minuscules particules cristallines de sable ont provoqué des sautes de tension électrique et les ont mis hors service.

C'est la raison pour laquelle le commandement de la coalition a décidé d'interrompre le mouvement des troupes la nuit, lorsque un contact avec l'ennemi était probable.

Le point fort de la coalition a été la grande disponibilité de systèmes modernes de reconnaissance et de communication, qui ont permis de détecter l'ennemi à de longues distances et de l'éliminer à l'aide d'actions bien coordonnées des différents types de forces disponibles.

En général, les soldats US ont montré une tenacité au combat suffisante. Même dans les conditions climatiques extrêmement difficiles, les troupes ont maintenu leur structure de contrôle et ont correctement interprété la situation. La combativité est restée élevée. La majorité des troupes reste confiante en ses capacités, tout en continuant de croire en la supériorité de leur armement et en gardant une confiance raisonnable dans la manière dont la guerre est menée.

Il est toutefois à noter que cette dernière a créé un certain sentiment de déception chez la plupart des soldats. Beaucoup estiment qu'on leur a menti et parlent ouvertement de la stupidité du haut commandement et des ses grossières erreurs de calcul. "Ces idiots couverts d'étoiles du Pentagone nous avaient promis une marche victorieuse et des fleurs sur nos chars. Ce que nous avons eu à la place sont ces fichus fanatiques qui se battent pour chaque dune, et le sable qui s'insinue dans notre derrière!", a déclaré l'un des blessés récupérant à l'hopital de Rammstein.

Néanmoins, en dépit des tempêtes de sable, le terrain favorise les actions de la coalition en l'autorisant à employer son arsenal tout entier à sa portée maximale, ce qui rend difficile pour les Irakiens de mener des opérations de combat hors des zones peuplées.

La surestimation des ses forces aéroportées fut un point faible de la coalition. Des plans pour un usage massif d'hélicoptères comme force indépendante ne se sont pas concrétisés. Toutes les tentatives du commandement US pour organiser des opérations aériennes et terrestres exclusivement à l'aide de forces aéroportées ont échouées. En raison des ces échecs, à la fin du quatrième jour des hostilités, toutes les unités aéroportées ont été réparties dans les unités de la coalition et sont utilisées par les forces d'attaque pour la reconnaissance, le feu de soutien, et pour contenir l'ennemi. La fardeau principal du combat a reposé sur les unités "lourdes" d'infanterie mécanisée et de blindés.

Un autre sérieux revers dans les plans de la coalition a été la protection extrêmement faible de l'arrière des forces en progression. Ceci a résulté en des interruptions constantes de l'approvisionnement en carburant. Les unités blindés ont parfois passé jusqu'à 6 heures immobiles, leurs réservoirs vides, constituant des cibles pour les Irakiens. Dans cette guerre, la livraison de nourriture, de munitions et de carburant reste un casse-tête pour les commandants US.

Au sein des soldats US, il y a eu un vaste mécontentement vis-à-vis de la qualité des nouvelles rations de combat. Les hommes les disent ouvertement "merdiques". Beaucoup de soldats prennent juste les biscuits et les sucreries, et jettent le reste de la ration. Les commandants des unités combattantes demandent au commandement de la coalition de fournir immédiatement aux troupes des plats chauds et de revoir tout le contenu de la ration de combat.

Au nombre des points forts des Irakiens on compte leur excellente connaissance du terrain, la haute qualité de leur travail d'ingénierie défensive, leur capacité à cacher leurs forces d'attaque principales et leur tenacité et détermination dans la défense. Les Irakiens ont montré une bonne organisation de leur commandement et de leur structures de communication, de même qu'une stratégie concluante et bien préparée.

Au nombre de leurs point faibles on trouve l'inflexibilité bureaucratique de leur commandement, lorsque toutes les décisions ne se prennent qu'au plus hauts niveaux. Le haut commandement a aussi tendance à se cantonner à des manoeuvres "standard" et il y a une coordination insuffisante entre leurs différents types de forces.

En même temps, des commandants des forces spéciales (irakiennes) font un bon usage des troupes et des armes disponibles, afin de mener des opérations derrière les lignes ennemies. Ils utilisent la dissimulation et montrent ruse et imagination.

Les premiers enseignements stratégiques de la guerre.

(Les enseignements de la guerre en Irak sont discutés ici dans le cadre d'un possible conflit similaire entre la Russie et les USA)

L'enseignement principal est la signification toujours croissante de la dissimulation de troupes comme une des méthodes de combat principales. La dissimulation et l'adhérence stricte aux impératifs de secret et de sécurité deviennent des buts stratégiques pour les forces défensives, au vu de la manière dont les US et leurs alliés s'appuient sur les armes guidées de précision, la reconnaissance électronique et optique, de même que leur usage d'armes tactiques à la portée maximale de ces moyens de reconnaissance. L'importance de la dissimulation est visible en Irak, et a été clairement démontrée en Yougoslavie, où l'armée Yougoslave a préservé près de 98% de ses biens en dépit de trois mois de bombardements. A l'intérieur de notre (Russe/Européen) théâtre d'opération, des méthodes de dissimulation nous (l'armée Russe) un avantage énorme sur les US.

Le deuxième enseignement de cette guerre est le rôle stratégique des défenses aériennes dans un conflit moderne, comme le service le plus important des forces armées. Seule une complète domination aérienne de la coalition lui permet de continuer son avance vers Bagdad, et d'avoir un avantage critique dans tout engagement. Meme la courte interruption du soutien aérien causé par les tempêtes de sable a placé les troupes US et Britanniques dans une situation très difficile.

L'élimination des défenses aériennes en tant que branche distincte des Forces Armées (Russes), et sa dispersion progressive dans l'Armée de l'Air ne peut être qualifiée que de "crime". (cette remarque fait référence à la réunification récente de l'Armée de l'Air Russe (VVS) et de la Force de Défense Aérienne (PVO), et du rôle secondaire de la force de défense aérienne dans cette nouvelle structure)

Le troisième enseignement de cette guerre est l'importance croissante de la reconnaissance de combat et la disponibilité accrue des armes antichar capable d'engager l'ennemi à la distance maximale. Il y a un besoin sur le champ de bataille d'un nouveau système d'armement pour des petites unités, qui permettrait la détection de l'ennemi à la distance maximale, de jour ou de nuit; l'engagement effectif de chars modernes à une distance de 800-1000 mètres; l'engagement de l'infanterie ennemie à une distance de 300-500 mètres, même avec l'équipement de protection personnelle moderne dont elle est équipée.

Désolé pour les fautes éventuelles...