Cockerill : Interview de travailleurs by Arnaud Friday February 07, 2003 at 04:12 PM |
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Interview de travailleurs de Cockerill affiliés à la FGTB présents au rassemblement du 7 février à Seraing. [NB : Les noms des personnes et des filières de Cockerill citées peuvent contenir des erreurs orthographiques. Veuillez m'en excuser]
(Seraing :
le 07/02/03)
A : Comment réagissez-vous après le discours de Guy Mathot et la présence massive des politiques ?
T : Ce qu'il y a, c'est que la politique nous a lâché une première fois avec Collignon. Ce n'est pas qu'il nous a vendu à Usinor, c'est qu'il nous a bradé. On a vraiment été des moins que rien par rapport au gouvernement wallon. Ils ont vraiment été des lâches. Alors maintenant, c'est facile de se mobiliser quand il y a des élections qui arrivent.
Au niveau de la CSC, il faut savoir que nous autres (Ndr : la FGTB), au niveau du CESAL, avec le nouveau plan, le plan " Delta " qui prévoit la restructuration, nous on était pas d'accord, on a fait un mouvement, on a bougé, la FGTB a bougé alors que la CSC est restée à l'arrière alors lorsqu'on entend Liakos (Ndr : le représentant CSC à la tribune) faire des commentaires pareils, il peut d'abord aller se cacher. Nous on a déjà dit avec sept jours d'avance alors que eux ils sont franchement voilé la face.
A : On a entendu parler de la fermeture de Cockerill depuis janvier mais ça fait plus longtemps que le bruit court ?
T : D'abord, nous on ne veut pas fermer, nous sommes des travailleurs de Cockerill. Moi, j'ai 31 ans, ce n'est pas maintenant que je veux laisser tomber mon job. Donc lorsqu'on vient nous dire que on veut fermer la phase à chaud, qu'on veut arrêter une industrie intégrée, nous, on n'est pas d'accord. On peut continuer.
Maintenant, quand on parle de Florange en 2010, ce sont les derniers et nous on est les premiers. Si on ferme le chaud, le froid suivra, c'est inévitable. C'est ce dont il faut se rendre compte. Alors maintenant, lorsqu'on a certaines personnes qui viennent nous dire qu'ils croient au futur du froid, nous on remarque que sur notre ligne du CESAL, on en parle même plus alors qu'on a été les premiers à se mobiliser. Non, on n'est absolument pas d'accord et on se battra pour le chaud.
A : Maintenant, qu'allez-vous faire en tant que travailleurs de Cockerill ?
T : On continuera à garder notre outil de travail parce que de un, c'est notre gagne pain, de deux, c'est l'avenir de Cockerill, je ne parle pas ni d'Usinor, ni d'Arcelor parce qu'on ne les connaît plus. Nous, on est " Cockerilliens ", on est pas " Usinoriens " ou " Arceloriens ". C'est " Usine hors service " oui ! Mais nous on est " Cockerilliens ".
T2 : Il faut savoir que c'est depuis novembre qu'il y a la rumeur, depuis que nous on est en grève et que la grève est tombée à l'eau car on a pressentit cette rumeur de fermeture du chaud. Dès ce moment, c'est tombé à l'eau alors qu'on devait être unis dès ce moment-là.
A : Par rapport aux directions syndicales, même avant novembre, elles ont déclaré qu'il y avait le plan " Delta ", que Arcelor en prendrait compte et qu'il n'y aurait pas ce scénario-ci…
T : On est d'accord qu'il y avait une restructuration à faire, ça, on ne le nie pas. Maintenant, la FGTB a toujours été pour le dialogue quoiqu'en disent certains délégués CSC mais ils n'ont pas été pour brader la sécurité des ouvriers. Maintenant, la CSC, eux ont fait le jeu du patron et ils se rendent compte que le jeu du patron leur revient en pleine figure. C'est pour cela que quand on entend Liakos faire des commentaires pareils, non, c'est inadmissible.
T2 : C'est ça qu'on lui a reproché, c'est d'avoir fait double jeu. Un moment donné, quand ça l'arrangeait, il était pour ne pas faire une grève parce que le " Delta " n'a pas été respecté dès novembre et ils le savent bien, ils ont préféré fermer les yeux et maintenant, on se retrouve dans cette situation-là. Quelqu'un n'a pas une parole en novembre, il ne l'aura pas en décembre ni en janvier, voilà.
A : Dans les jours à venir, qu'est-ce qui va se passer pour vous ?
T2 : Pour l'instant, on est en attente. Ca c'est une première action et on verra bien dans les temps qui viennent. On va voir ce que nos instances syndicales vont décider mais en attentant, le froid du mois est tributaire de la volonté de certains politiques… etc… etc… On ne peut rien faire d'autres que d'attendre pour l'instant.
T : Il faut bien se dire qu'ici, on est dans le bassin liégeois, la population liégeoise comme le peuple belge n'en peut rien de la politique des Français et autres donc notre objectif n'est pas en parlant vulgairement de foutre la merde ici pour la Belgique. Non, si on doit casser, si on doit rentrer dans un mouvement plus violent, ce sera au Luxembourg, ce sera à Paris, pas ici en Belgique. Maintenant ici, montrer notre mécontentement, mobiliser la population, montrer qu'on n'est pas une petite entreprise qu'on peut fermer comme cela même si c'est le souhait de certains. On continuera à se battre, on a confiance en notre fédération, en la FGTB, en notre président Serge Duchêne et de là en découlera notre avenir.
A : Imaginez-vous un ralliement avec les autres travailleurs des autres sites qui de toute façon vont fermer si ce n'est en 2006, au moins en 2010 ?
T : C'est ce qu'on espère, c'est se mobiliser au Luxembourg, que nos
collègue d'Eko Stahl, de Brême et de Florange. Parce qu'eux sont menacés plus
tard mais ils sont menacés quand même. Si ça passe pour nous, ça passera pour
eux. Si maintenant ça passe difficilement pour nous ou si ça ne passe pas, à
ce moment-là, eux auront un espoir. Donc pour leur donner l'espoir, il faut
qu'ils viennent se battre avec nous.