arch/ive/ief (2000 - 2005)

Le WWF et le grand capital
by Jeffrey St. Clair Friday December 20, 2002 at 11:40 PM

Les liens troubles entre le WWF et les grands destructeurs de l'environnement..

Dans des temps anciens, temps bénis, une société qui entretenait des relations plus que distantes avec la nature aurait cherché à redorer son blason en attirant dans son directoire ou son service de relations publiques, un cadre ou un responsable d'un groupe de défense de l'environnement, grâce auquel on pouvait témoigner de la récente préoccupation de l'entreprise pour la Planète Terre en matière de déchets toxiques.

Mais les temps changent. Aujourd'hui se sont les groupes environnementalistes qui semblent chasser le cadre d'entreprise.

En effet, le dernier exemple de cette association douteuse nous fait nous tourner vers le World Wildlife Fund. Fin novembre le WWF a annoncé que Linda Coady, actuellement cadre supérieur chez Weyerhaeuser, sera bombardée dès janvier vice-présidente du récemment créé bureau régional du WWF pour la zone Pacifique.

Weyerhaeuser est LE géant de l'industrie du bois qui s'est illustré en ne laissant de son passage à travers les forêts de la zone N.O du Pacifique que ruine et désolation. Weyerhaeuser a sévi au Canada pendant de nombreuses années, mais depuis environ 10 ans l'entreprise a accéléré les coupes en Colombie Britannique de façon alarmante, en partie parce que ses vastes domaines dans l'Etat de Washington ont été pratiquement tondus à blanc mais aussi parce qu'elle veut s'éloigner des contraintes américaines en matière de loi et tribunaux pour ce qui touche l'environnement.

Avant d'intégrer Weyerhaeuser, Coady s'est fait les dents chez Macmillan-Bloedel alias MacBlo. Macmillan-Bloedel a gagné des milliards en exploitant la quasi totalité de l'Ile de Vancouver avant d'être racheté par Weyerhaeuser. Une mince parcelle de l'île a pu être sauvegardée que grâce à l'intervention de 900 personnes qui ont bloqué les routes pour le transport du bois ; c'était en 1993. Est-il besoin de dire que pas un seul cadre du WWF n'a sali sa belle veste imperméable en Gore-Tex dans de telles protestations orageuses.

Aucune de ces firmes n'a même daigné poser son regard sur les droits des membres de la First Nations of Canada qui déposent des réclamations concernant ce qui reste des forêts côtières de Colombie Britannique. Le Gouvernement Canadien a même choisi de laisser les industries déforester ces terres avant que les réclamations ne soient déposées. En effet, Weyerhaeuser est aujourd'hui poursuivie par la Nation Haida pour abattage illégal sur ses terres des Iles Queen Charlotte qu'ils appellent Haida Gwaii. "Ils sont venus et ont exploité chaque ressource naturelle l'une après l'autre", nous dit Guujaaw, chef de la Nation Haida en Colombie Britannique.

Il fait remarquer que Weyerhaeuser débite les anciennes pousses et les fait parvenir tout près de ses usines dans l'Etat de Washington. Les Haidas n'en retirent ni argent ni emploi. "Pendant des années, on a regardé partir les barges à bois et on a pratiquement rien reçu pour nous", ajoute Guujaaw.

Les forêts au sol mousseux de la Colombie Britannique sont bien plus vulnérables que celles de l'Etat de Washington, d'Oregon ou d'Alaska. Il n'existe que trop peu de lois sur l'environnement pour freiner les appétits des compagnies sylvicoles et le mouvement de protection est quant à lui pauvre en membres et dépassé par la tâche. Dès lors, les défenseurs des forêts séculaires du Canada bataillent avec un comité de préservation dirigé par un cadre de l'industrie du bois.

Les résultats de ce jeu de dupe se voient hélas de manière crue sur le terrain, là où les clairières s'étendent à perte de vue, où les saumons, ours et autres oiseaux de ces forêts disparaissent d'une manière alarmante. En tête de liste des espèces menacées vient le hibou tacheté, symbole par excellence des anciennes forêts de la zone NO du Pacifique.

Aux Etats Unis on a offert au hibou un niveau maximum de protection grâce au décret sur les espèces en danger -bien que GW Bush ait récemment évoqué son désir d'en supprimer les grandes lignes afin de rendre à l'industrie du bois son terrain favori. Mais au Canada le rapace ne bénéficie même pas du prétexte d'un havre protégé ; cet environnement de nidation et de chasse qu'il occupe depuis 200 à 800 ans, composé de pins Douglas et d'épicéas Sitka, est fortement menacé sans scrupule aucune. D'où il résulte, selon les scientifiques, une extinction probablement rapide -estimée à moins de 10 ans. "On dirait qu'on s'inquiète pour le dodo" nous dit Ken Macquisten, vétérinaire et directeur du Refuge pour les Espèces Menacées des Grouse Mountain. "On est passé du traitement des populations de hiboux en général à la prise en compte d'oiseaux spécifiquement identifiés".

Avec la tête de pont Weyerhaeuser qui dirige le plus grand groupe de conservation de la région, les perspectives d'avenir du hibou -et de pratiquement toute autre créature vivant dans ces forêts profondes- semblent assez sombres. Bien sûr, c'est difficile d'espérer aller au-delà des bonnes intentions avec cette récente entente des abatteurs et des défenseurs de la nature autoproclamés.

Après tout, le WWF fonctionne plus comme un conglomérat d'entreprises que comme un groupe d'intérêts publics. Le WWF fait de l'environnementalisme à la pièce et a empoché des millions et des millions en mettant en avant son panda comme logo, une marque de reconnaissance autant mise en avant que les "Nike Air". Mais, bien sûr, pratiquement rien n'a été fait pour préserver le panda, parqué de fait à cause de la déforestation rampante et du braconnage, sauf en distribuant des images à des épouses méritantes ou de pauvres étudiants en 3ème année. Appelez ça le porno-panda.

Mais la machine à billets qu'est le panda n'est pas la seule ressource financière du groupe. Le WWF amasse aussi des millions venant de sociétés telles que Alcoa, Citigroup, the Bank of America, Kodak, J.P. Morgan, the Bank of Tokyo, Philip Morris, Waste Management et DuPont. Ces dernières proposent même un prix annuel de la conservation abondé et délivré au nom de feu J. Paul Getty, baron de l'industrie pétrolière. Ce fonds gère ses propres cartes de crédit et fait fonctionner sa propre boutique en ligne. D'où un budget pour le WWF qui s'élève à plus de 100 millions de $ par an et qui ne baisse pas au contraire.

Où va l'argent ? La plus grande partie sert à financer des bureaux somptueux, des salaires conséquents et des opérations de publi-rédactionnel incessantes pour récolter encore plus d'argent. La Chief Executive Officer de WWF, la froide Kathryn S. Fuller, engrange quelque 250.000 $ par an bénéfice compris. C'est là la logique implacable de l'environnementalisme moderne pour lequel le volant non-lucratif est plus tourné vers la levée de fonds que vers les sociétés contre lesquelles il est supposé agir. En effet, l'inflexible chasse au fric porte ces organisations pour l'environnement à participer de manière tout à fait sereine à des conseils d'administration de sociétés, mais pieds et poings liés.

Il faut se souvenir qu'il y a 2 ans environ, le WWF a choqué plus d'un environnementaliste et activiste des Droits de l'Homme en attribuant une récompense à Shell, cette même compagnie pétrolière qui, avec ses associés, restait muette alors que la sanguinaire junte militaire au pouvoir lynchait Ken Saro-Wiwa et 8 autres défenseurs de l'environnement qui combattaient les opérations frauduleuses dans la province Ogoni dans le delta du fleuve Niger.

Cette cécité morale auto-imposée fait partie du jeu. Le WWF est l'une de ces structures qui pensent que le capitalisme est bon pour l'environnement. Le WWF a fait régresser les choses en la matière concernant à peu près tous les accords commerciaux de l'ALENA au GATT. Le WWF a aussi quelquefois glissé sur la même pente que des agences gouvernementales nauséabondes en avançant la même logique néo-libérale à travers le Tiers Monde, y compris l'agence pour l'Aide Américaine.

Le WWF est atteint d'une telle paranoïa concernant son image, qu'il a récemment engagé -puis gagné- une procédure contre la World Wrestling Federation -fédération mondiale du catch- pour que cette dernière change de nom, afin de na pas altérer l'image de marque déposée "WWF". Ce qui est certain, c'est que si vous vous souciez vraiment d'environnement, vous dépenserez mieux votre argent en regardant les superstars du catch mondial sur des chaînes payantes, qu'en devenant membre du WWF. Au moins, le catch, ça fait rire.

Vos dons au WWF iront gonfler le salaire d'un cadre de la sylviculture telle Linda Coady qui parade sous la cape de l'environnementalisme.

A vous dégoûter de vous déguiser au carnaval.

Quand la Nation Haida a lancé son offensive contre Weyerhaeuser et sa riche armée de lobbyistes et d'avocats en début d'année, Guujaaw remarquait : "on ne peut pas acheter notre mode de vie avec de l'argent".

Une leçon que les groupes environnementalistes comme le WWF feraient bien d'apprendre par coeur s'ils ne veulent pas découvrir qu'ils ne valent pas beaucoup plus que les zombies surpayés des sociétés avec qui ils ont couché. Je ne retiens pas ma respiration.

(Jeffrey St Clair, CounterPunch, 5 décembre 2002; traduction de Seb Villepou)

Article original (en anglais): http://www.counterpunch.com/stclair1205.html

Article en français: http://forums.transnationale.org/viewtopic.php?t=793

 

environnement et mondialisation
by François-Xavier Pelletier Saturday December 21, 2002 at 09:57 AM
homme.nature@wanadoo.fr

Le drame de l'environnement et de la protection de la nature c'est qu'il fait désormais partie de la mondialisation et que beaucoup d'argent est en jeu. J'ai moi-même été victime au Brésil d'une véritable mafia, dont le siège est aux USA, il s'agit de l'IWC (international wildlife coalition) :
http://www.homme-nature.com/baleiafranca.htm
J'ai contacté le WWF, Rebelle chez Greenpeace France, Reporters sans frontières, personne ne bouge car tout le monde défend sa chapelle. Pire Paul Watson de Sea Shepherd qui m'avait contacté pour récupérer mes images de massacre de globicéphales aux iles féroes pour l'insérer dans un film qui le montre "combattant de l'environnnement", devait en échange m'aider dans cette affaire baleia franca. Une fois les images insérées dans le film, plus de nouvelles...
Tant que la prétendue défense de l'environnement ne sera qu'une affaire de business, beaucoup de forêts seront encore rasées, beaucoup de communautés massacrées..