arch/ive/ief (2000 - 2005)

Le Lappersfort n'est pas encore sauvé
by Françoise Tuesday September 10, 2002 at 11:59 AM
fvermeersch@hotmail.com

Les activistes du Lappersfort ont appris ce lundi 9 septembre la décision du juge dans le procès que leur avait intenté Fabricom: * ils doivent quitter les lieux d'ici au 13 septembre * ils sont condemnés à payer la somme d'1 euro par jour par personne si l'occupation ne prend pas fin Résumé de la situation et du procès

La petite histoire

Depuis le 5 août 2001, des activistes occupent le Lappersfort, quelques hectares de bois et de nature situés à 2km. à peine du centre de Bruges. Depuis plus de vingt ans, le bois était laissé à l'abandon par le propriétaire, Fabricom SA, ce qui avait permis à la nature d'y reprendre ses droits.

En juin 2000, la conseil communal de Bruges a approuvé un nouveau plan d'aménagement, qui prévoit, outre l'aménagement d'une nouvelle route à 4 bandes, la construction d'un nouveau dépôt de bus pour De Lijn (la compagnie flamande de transports en commun) et l'aménagement du reste du terrain en zoning industriel à l'endroit du Lappersfort.

Pour éviter qu'une nouvelle fois la nature doive faire place à l'économie, des activistes ont décidé d'occuper le bois. Ils y sont depuis le 5 août 2001. Depuis le début de l'occupation, les activistes bénéficient du soutien de nombreuses associations environnementales, regroupés dans le Groene Gordelfront (Front pour une ceinture verte). Ils ne se limitent pas à la lutte pour la sauvegarde du bois, mais se battent pour le maintien des rares zones naturelles qui entourent Bruges.

Quelques succès

L'action pour la sauvegarde du Lappersfort a déjà connu quelques succès. Le Ministre Flamand pour la Mobilité a donné son accord pour changer les plans par rapport au dépôt de bus. Et après des contacts initialement assez hostiles avec le bourgmestre de Bruges, Patrick Moenaert, ce dernier a déclaré au mois d'août qu'il a entamé des négociations avec le gouvernement Flamand pour le rachat du bois, et que si le gouvernement flamand ne pouvait pas le racheter, il organiserait un réferendum local à propos du futur du bois. Le bois pourrait alors enfin être désigné comme réserve naturelle. Toutefois, les plans par rapport à l'aménagement de la route pour desservir le quartier de la gare, où il est prévu de construire un énorme complexe de cinémas, demeurent inchangés.

Les activistes du Lappersfront se sont donné pour but la reconnaissance du bois comme réserve naturelle, et n'ont pas l'intention de quitter le bois avant cette reconnaissance officielle.

Fabricom intente un procès contre les activistes

Au départ, Fabricom, le propriétaire du bois laissait faire. Mais il y a quelques semaines, Fabricom a commencé une action en justice contre les occupants du bois. Le 5 septembre, 'l'Affaire Lappersfort' passait devant le juge de la Paix. 22 personnes étaient appelées au procès en tant qu'occupants du bois.

La veille du procès, une grande manifestation en solidarité avec les activistes a rassemblé 500 personnes à Bruges. C'était la plus grande action pour la sauvegarde du bois jusqu'à présent. Après la manifestation, une cinquantaine de personnes sont restées camper sur les remparts en face du tribunal pour une veillée de soutien. Le collectif anarchiste Kokkerellen était venu les soutenir avec leur cuisine mobile.

Le jour du procès, beaucoup de monde avait répondu à l'appel. La salle du tribunal était trop petite que pour permettre à tous les activistes, leurs parents et les sympathisants de s'asseoir. L'argumentation de Fabricom était basée sur le fait que les occupants commençaient de plus en plus à traiter le bois comme étant le leur - en y organisant des visites guidées, des expositions culturelles, etc. Fabricom exigeait l'expulsion des occupants et la somme provisoire d'un euro par personne par jour d'occupation après le jugement.

Les avocats des activistes avaient basé la défense sur le fait que Fabricom n'avait pas inclus de titre de propriété dans le dossier, que les activistes ne faisaient qu'exercer leur droit de manifestation et à la libre parole, et, enfin, que les activistes n'avaient aucunement l'intention de rester dans le bois: ils ont, en effet, toujours dit qu'ils quitteraient les lieux lorsque le bois serait reconnu comme réserve naturelle. Ce plaidoyer fut accueilli par les applaudissement du public.

Les activistes perdent le procès

Le juge ne prononça pas de jugement immédiatement. C'est ce lundi 9 septembre que la décision est tombée: les occupants doivent quitter les lieux avant le vendredi 13 septembre, et sont condamnés à payer un euro par personne par jour s'ils continuent à occuper les lieux. Le juge n'a donc pas pris en compte le fait que Fabricom possède le bois depuis plus de vingt ans, en attendant de le vendre à haut prix ou d'être dépossédé par la ville de Bruges.

Cette décision peut avoir de lourdes implications pour l'action. Tout d'abord, un huissier peut venir expulser les activistes des lieux avec le support de la police. Ensuite, la somme d'un euro par personne par jour est provisoire: Fabricom serait donc en droit d'exiger une indemnisation plus élevée par après.

Les activistes n'ont pas l'intention de cesser leur actions et cherchent pour l'instant une solution créative pour continuer. Ils auront besoin du soutien des habitants des Bruges et de leurs sympathisants.

Nous continuerons à vous tenir au courant des actions à venir.