arch/ive/ief (2000 - 2005)

Le Nepal / situation politique (ONU)
by K Tuesday August 27, 2002 at 12:56 PM

Informations sur les droits de l'homme au Nepal : dernier rapport des nations Unies

Népal
Rapports thématiques
http://www.hri.ca/fortherecord2001/bilan2001/vol3/nepaltr.htm

Mécanismes de la Commission des droits de l'homme

Détention arbitraire, rapport du Groupe de travail(E/CN.4/2001/14, par. 4, 7, 64, 65)

Le rapport signale qu'une communication a été adressée au gouvernement népalais et qu'aucune réponse n'avait encore été
transmise; aucun autre détail n'est fourni sur cette affaire. Le Groupe de travail a en outre demandé au gouvernement de lui fournir
des renseignements sur les mesures prises pour appliquer les recommandations formulées dans le rapport qui avait été préparé dans
le cadre de sa mission au Népal (voir E/CN.4/1997/4/Add.2).

Disparitions forcées ou involontaires, rapport du Groupe de travail(E/CN.4/2001/68, par. 16, 17, 18, 80-84)

Le Groupe de travail a porté à l'attention du gouvernement 35 cas nouvellement signalés, dont 32 datent de la période allant de 1998
à 1999 et trois de l'an 2000. Parmi les victimes figurent un ingénieur des travaux publics, membre de la All Nepal Nationalities
Organization, et un chargé de cours d'anglais au campus de Nepal Lok de l'Université de Tribhuvan. Les intéressés avaient été
libérés de la prison centrale de Katmandou sur ordre de la Cour suprême mais avaient été immédiatement arrêtés de nouveau et
emmenés dans un fourgon de la police qui se trouvait à l'extérieur de la prison. Le gouvernement a fait savoir que les deux personnes
en question n'étaient pas en détention.

Une autre victime a été arrêtée de nouveau par une quinzaine d'agents de police dans les locaux de la cour d'appel de Butwal en juin
2000, immédiatement après que cette juridiction eut ordonné sa libération. Elle a été emmenée dans un véhicule dont le numéro
d'immatriculation était caché. Dans un autre incident, qui a eu lieu en avril 2000, une femme enceinte de cinq mois a été arrêtée de
nouveau à la prison de Morang par des membres de la police peu de temps après que la plus haute autorité du district ait ordonné sa
libération sous caution.

Des ONG ont informé le Groupe de travail que le phénomène des disparitions forcées, qui avait vu le jour en 1998, persistait. Des
officiers de police en civil obligeaient des personnes à monter dans des véhicules aux vitres peintes en noir et sans plaques
d'immatriculation et les conduisaient dans des lieux de détention non officiels tels que le centre de formation de la police à
Maharajgunj. Les victimes sont soupçonnées d'être membres du Parti communiste maoïste du Népal (PCN).

On a également exprimé des préoccupations ont été exprimées au sujet de l'utilisation de la loi sur la sûreté publique qui, au nom du
maintien de l'ordre, autorisait la détention provisoire de personnes pour des périodes allant jusqu'à 90 jours. Le Ministère de l'intérieur,
et un conseil consultatif mis en place dans le cadre de la loi, son tous les deux habilités à proroger la période de détention. Il a été
affirmé que la loi sur la sûreté publique était utilisée pour justifier des arrestations répétées de personnes soupçonnées d'être des
membres ou des sympathisants de la branche armée du PCN.

Exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraire, rapport de la Rapporteuse spéciale (E/CN.4/2001/9, par. 3, 12, 14, 18, 26,
30, 38, 65, 97, 102; E/CN.4/2001/9/Add.1, par. 313-319)

La Rapporteuse spéciale (RS) a transmis un appel urgent et quatre autres communications au gouvernement. Ces affaires
concernaient les personnes suivantes : une femme qui était en détention à la prison de Morang depuis son arrestation en janvier
2000 - elle aurait été emmenée de la prison de Morang par des policiers en avril 2000 et depuis, on ne sait pas où elle se trouve;
quatre personnes dont les corps auraient été retrouvés à un poste de police désaffecté à Simrutu, dans le district de Rukum. Sita Pun
- toutes ces personnes, dont deux étaient âgées de 13 et 16 ans respectivement, seraient mortes en garde à vue à la suite de
tortures ou d'une exécution délibérée; une jeune fille de 17 ans, qui aurait été tuée par la police à la suite d'un fusillades avec des
membres du Front de libération national Tharu (TNLF) - d'après la source, la police l'aurait interrogée longuement, puis l'aurait abattue;
quinze personnes qui auraient été tués par la police dans le village de Khara en février 2000; un garde militaire qui aurait été abattu
par des policiers. Le gouvernement n'avait répondu à aucune de ces allégations au moment de la rédaction du rapport.

La RS s'est rendue au Népal du 5 au 14 février 2000. Cette visite a été provoquée principalement par des allégations répétées faisant
état d'exécutions extrajudiciaires de civils non armés dans le cadre des affrontements qui opposent des groupes armés du Parti
communiste maoïste du Népal (CPN maoïste) et la police népalaise. On craignait en outre que la situation se détériore et donc que la
violence et le nombre de victimes n'augmentent. Durant sa visite, la RS s'est entretenue avec les responsables et représentants du
gouvernement. Le cabinet a été dissout peu de temps après la mission de la RC et remplacé par un nouveau, également formé de
membres du Parti du Congrès népalais. En conséquence plusieurs des responsables avec lesquels la RS s'est entretenu aux cours
de sa visite ne sont plus en fonction.

La RS a également pu s'entretenir avec un certain nombre de particuliers, notamment des juristes, des journalistes et d'anciens
hommes politiques œuvrant à la protection et à la promotion des droits de l'homme au Népal. Elle a également rencontré des
représentants d'un grand nombre d'ONG et d'organismes internationaux. Elle s'est par la suite rendue dans les villes de Gorkha et de
Nepalgunj. Elle regrette de n'avoir pu se rendre dans certaines des régions les plus touchées par les récentes flambées de violence,
en particulier dans les districts de Rukum et de Rolpa, mais l'insécurité qui y règne ne lui aurait pas permis d'effectuer son travail dans
de bonnes conditions, en particulier de se déplacer librement et de recueillir des témoignages en toute confidentialité.

Le rapport de la visite (E/CN.4/2001/9/Add.2, 9 août 2000) s'articule autour des pôles suivants : violations du droit à la vie imputable à
la police et au CPN (maoïste); disparitions et détentions non reconnues; impunité et questions d'ordre juridique; Commission nationale
des droits de l'homme; peine de mort; défenseurs des droits de l'homme et société civile. Dans ses observations générales, la RS fait
observer que le Népal est partie à tous les grands instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Toutefois, elle précise que
la répression d'un passé récent constituait l'un des plus gros obstacles au rétablissement de l'état de droit et de la démocratie dans le
pays. Le système sans parti Panchayat, instauré en 1960, a fait place en 1990 à la démocratie multipartite. La répression et la culture
politique de l'ère Panchayat ont marqué les institutions de l'État, notamment l'administration et le système judiciaire, qui demeure
fragile. L'instabilité politique et la succession de gouvernements de courte durée ont encore contribué à l'indécision de la politique
menée. Le fait que de nombreuses violations des droits de l'homme commises durant le régime des Panchayat sont restées impunies
n'a fait qu'aggraver l'amertume et la désillusion de la population face à la lenteur des réformes.

Les groupes politiques d'extrême gauche ont toujours participé activement à la lutte pour la démocratie. Ils ont parfois recouru à la
violence, sous l'influence de mouvements analogues dans des pays voisins. Sept partis de gauche ont constitué le Front populaire uni
et participé aux discussions concernant l'élaboration d'une nouvelle constitution. La question de savoir s'il fallait instaurer une
monarchie plutôt qu'une république a entraîné de nouvelles divisions au sein du Front populaire uni mais le mouvement a participé
aux élections parlementaires de mai 1991. Une nouvelle scission a finalement entraîné la formation du CPN (maoïste) en février 1995.
Les tensions politiques entre les Maoïstes et le Parti du Congrès au pouvoir ont alors pris un tour violent à Rolpa, fief du mouvement
maoïste. Pour mettre fin à ces troubles, le gouvernement a lancé en novembre 1995 l'« Opération Roméo », qui aurait conduit
10 000 hommes à se retrancher dans la jungle. Le CPN (maoïste) a présenté une liste de 40 exigences au Premier Ministre, qui
portaient notamment sur une réévaluation des relations entre l'Inde et le Népal concernant principalement les traités sur les eaux, le
commerce et l'ouverture des frontières mais aussi sur l'abolition des privilèges royaux, la libération des prisonniers politiques, la fin de
l'oppression et l'amélioration du statut des femmes. Il demandait également l'octroi de droits économiques aux femmes, aux paysans
et aux sans-abri. Le gouvernement a été sommé de répondre à ces 40 exigences d'ici au 17 février 1996, faute de quoi une "guerre
du peuple" serait déclarée. Elle l'a été le 13 février 1996. Des membres armés du CPN (maoïste) s'en sont pris à des postes de police
et à des bureaux de l'administration locale au cours de huit attaques dans cinq districts. Ces attaques se seraient poursuivies,
s'étendant à des banques, des sièges de partis politiques et les bureaux locaux d'organisations humanitaires internationales. En mars
1996, l'ancien Premier Ministre, Sher Bahadur Deuba, pour tenter de redresser la situation, a appelé tous les partis à se réunir et
formé un comité chargé de mener les discussions avec le CPN (maoïste), mais sans grand succès.

La RS fait observer que l'émergence du mouvement militant maoïste doit être analysée dans le contexte de la situation économique,
sociale et politique actuelle du pays. Le Népal est un des pays les plus pauvres du monde. Les inégalités sociales et économiques
entre les sexes, les classes, les castes et les régions y sont importantes. Le système des castes et la pratique du travail servile, ont
été abolis par la loi, mais ces graves atteintes aux droits de l'homme perdurent et continuent à dominer la vie sociale, économique et
politique, en particulier dans les zones rurales. Un certain nombre d'initiatives, soutenues par des bailleurs de fonds et des organismes
d'aide étrangers, ont été lancées ces dernières années pour éliminer progressivement les inégalités les plus criantes en matière de
propriété foncière et de richesse économique. Si ces initiatives ont permis l'émergence de poches de développement économique, les
programmes mis en œuvre à ce jour semblent avoir moins bien réussi à renforcer les institutions clefs du pays, en particulier le système
judiciaire, et à donner à la population les moyens de se prendre en charge. À l'évidence, le processus de développement a également
été freiné et entravé par les activités armées du CPN (maoïste). La contestation suscitée par la persistance des injustices sociales, le
manque de possibilités et la répression des paysans sans terre et des pauvres s'est amplifiée, alimentant ainsi le mécontentement
social sur lequel le CPN (maoïste) s'appuie.

La RS signale que le mouvement maoïste, qui en 1996, était surtout présent dans trois districts, serait aujourd'hui actif dans 45
des 75 districts du pays. Au début de décembre 1999, le Ministre de l'intérieur a annoncé l'adoption d'un "plan de sécurité intégrée"
en réponse aux activités armées du CPN (maoïste). Ce plan visait à trouver des solutions à la situation dans les domaines politique,
du développement et de la sécurité. La campagne de paix Ganesh Man Singh, au moyen de laquelle le Gouvernement s'efforce de
faciliter la réinsertion d'anciens militants maoïstes et d'indemniser les victimes d'actes de violence du mouvement. La RS fait également
état de la campagne de paix Ganesh Man Singh, au moyen de laquelle le gouvernement s'efforce de faciliter la réinsertion d'anciens
militants maoïstes et d'indemniser les victimes d'actes de violence du mouvement. Il semblerait toutefois que la campagne de paix
Ganesh Man Singh ne réussissait pas à convaincre un grand nombre de maoïstes de renoncer à la lutte armée.

Le rapport note que la majorité des allégations de violations du droit à la vie portées à son attention ont trait à des incidents survenus
dans le cadre du conflit opposant la police népalaise aux militants du CPN (maoïste). Un certain nombre de cas sans lien apparent
avec ce conflit, concernant des personnes qui auraient disparu pendant leur garde à vue et dont on craint qu'elles ne soient mortes,
ont également été communiqués à la RS, ce qui prouve que le problème des exécutions extrajudiciaires n'est pas exclusivement limité
aux régions touchées par des troubles internes.

S'agissant des violations du droit à la vie attribuées à la police, le rapport fait notamment état de ce qui suit : selon les données
reçues du Gouvernement, les opérations de la police n'ont fait aucune victime civile non maoïste; toutes les personnes tuées ou
blessées par la police sont répertoriées comme membres du CPN (maoïste) et toutes les pertes seraient intervenues lors
d'affrontements entre la police et des membres armés de ce mouvement; 126 policiers et 182 civils ont été tués par le CPN (maoïste)
depuis le début des violences en 1996 et plus de 800 personnes, présentées comme des membres armés du mouvement ont été
tuées au cours d'affrontements avec la police; de nombreux civils non armés figureraient parmi les victimes de la police; la police aurait
délibérément abattu des personnes qui n'étaient ni armées ni militantes du CPN (maoïste). La RS signale que des allégations et
témoignages reçus d'organisations non gouvernementales, de témoins et de parents des victimes font également état de cas dans
lesquels des unités de police auraient fait un usage excessif et inconsidéré de la force contre des civils non armés. La plupart des
exécutions extrajudiciaires présumées imputées à la police auraient eu lieu dans des régions éloignées et sous-développées, difficiles
d'accès en raison du terrain accidenté et montagneux. La police s'y débarrasserait souvent des corps en les incinérant sur-le-champ,
ce qui rend toute autopsie ou autre examen médico-légal quasiment impossible. Il semblerait également que les corps fassent
rarement l'objet d'une identification en règle avant d'être ensevelis. La RS fait valoir qu'il est donc extrêmement difficile d'instruire et de
vérifier les cas allégués d'exécutions extrajudiciaires par la police. Par ailleurs, rien ne prouve que les autorités se soient réellement
efforcées, où que ce soit, d'établir la responsabilité de la police dans les cas d'exécution extrajudiciaire présumée. Elle précise que les
installations et les ressources dont les autorités népalaises disposent actuellement ne sont pas suffisantes pour que les autopsies
soient pratiquées en conformité avec ces normes.

La RS a également reçu des informations faisant état de violations graves, notamment d'assassinats de civils, imputées à des
éléments du CPN (maoïste). Depuis le début des troubles en 1996, ce mouvement a attaqué à maintes reprises des postes de police,
des services publics, des écoles et des maisons particulières. Ses actes de violence et de harcèlement ou ses menaces visaient
généralement des agents de l'État, des hommes politiques, des policiers et des membres de la société civile, notamment des
défenseurs des droits de l'homme et des journalistes. On dénombre parmi les victimes un grand nombre de militants et de dirigeants
de divers partis politiques népalais. Des représentants du Parti du Congrès népalais (NCP) ont indiqué que 85 % de tous les civils tués
par les maoïstes étaient membres de leur parti. La RS a été informée que le CPN (maoïste) était lié au Mouvement révolutionnaire
international et qu'il adhèrerait à beaucoup des grands principes idéologiques du mouvement du Sentier lumineux au Pérou. Des
informations donnent aussi à penser qu'il entretient une coopération transfrontières avec des groupes de la même mouvance dans la
province du Bihar, en Inde.

Les documents de propagande diffusés par le CPN (maoïste) mettent en évidence un certain nombre de points que la RS juge
particulièrement inquiétants et qui concernent la tactique et les méthodes de lutte armée préconisées par ce mouvement, à savoir :
l'attaque délibérée des locaux d'organisations internationales d'aide installés dans des régions reculées du Népal; l'enrôlement
d'enfants pour ses opérations armées, notamment comme messagers - certains seraient entraînés à l'utilisation d'armes à feu et
envoyés dans des zones de combat. La RS fait observer qu'il semble que la « guerre du peuple » autodéclarée ait fait de
nombreuses adeptes chez les femmes, en particulier parmi les jeunes. Le CPN (maoïste) aurait également conçu une campagne
spéciale pour encourager les femmes à rejoindre le mouvement, ce qui montre bien qu'il recrute ses partisans en exploitant le
mécontentement, notamment dans le domaine social. Dans la société népalaise, les femmes sont traditionnellement en position de
faiblesse et de soumission, d'où l'attrait des programmes du CPN qui mettent résolument l'accent sur l'égalité, tant auprès du noyau
grandissant des femmes éduquées qu'auprès des femmes des zones rurales désavantagées. Les femmes qui rejoignent le CPN
(maoïste) restent résolument acquises à la "guerre du peuple" et souvent inféodées aux exigences de ses chefs. Il semblerait en
outre qu'elles soient de plus en plus marginalisées dans les instances décisionnelles du parti à mesure que le mouvement prend un
caractère plus militant.

S'agissant des disparitions et détentions non reconnues, le rapport signale notamment ce qui suit : les détentions non reconnue
augmentent le risque d'exécutions extrajudiciaires et de décès en garde à vue; la plupart des personnes disparues avaient été vues
pour la dernière fois alors qu'elles étaient emmenées par la police; la procédure d'habeas corpus, pourtant prévue dans la
Constitution népalaise, s'est très souvent avérée inefficace; dans d'autres cas, les décisions de la Cour suprême ne sont pas
appliquées par les instances gouvernementales concernées; les juges hésitent à ordonner aux autorités de leur présenter des
personnes disparues car ils savent que leurs instructions ne seront pas respectées.

La RS fait observer que les cas et incidents relatés dans son rapport illustrent le climat d'impunité généralisée dont bénéficient les
auteurs de violations des droits de l'homme, notamment d'exécutions extrajudiciaires, au Népal. Elle fait en outre état de ce qui suit :
les recours juridiques ouverts aux victimes de violations des droits de l'homme restent insuffisants; il n'existe pas de mécanisme
permanent et indépendant chargé d'enquêter sur les cas d'éventuelles exécutions extrajudiciaires par la police; les juges semblent mal
informés de leurs pouvoirs et affirment qu'ils n'étaient pas autorisés à enquêter sur les exécutions extrajudiciaires imputées à la police
ou à se saisir de ces affaires; la seule possibilité concrète qui s'offre aux familles des personnes disparues ou des personnes qui
auraient été tuées par la police est de prendre contact avec le commissariat de police local et de signaler la disparition; c'est donc la
police elle-même qui enquête sur les cas d'éventuelles exécutions extrajudiciaires, ce qui laisse planer un doute sérieux sur
l'indépendance et la transparence de la procédure; il existe une tension entre les policiers et les membres du pouvoir judiciaire,
chacun invoquant le « laxisme » de l'autre; les unités chargées des enquêtes et les juridictions inférieures sont inefficaces et
incapables de rendre justice aux victimes et de faire comparaître les coupables devant les tribunaux.

Concernant l'impunité, la RS fait signale ce qui suit : si la Constitution de 1990 reflète largement l'attachement du Népal aux normes
internationales relatives aux droits de l'homme, il est manifeste que la législation nationale et la manière dont elle est mise en œuvre
ne sont pas encore conformes à ces normes; le gouvernement a pris des mesures pour y remédier, notamment en créant une
commission de haut niveau chargée de revoir le système de justice pénale en vue de l'aligner sur la Constitution; des amendements,
dont l'objectif déclaré est de renforcer la position de la police dans la lutte qu'elle mène contre les groupes armés, ont été vivement
critiqués en tant qu'atteintes aux libertés et droits fondamentaux; ces pouvoirs étendus, qui reposent sur des textes au libellé vague et
ambigu, le terme «actes subversifs », par exemple, risquent d'amener la police à utiliser davantage les armes à feu, ce qui
augmenterait le risque d'assassinats et d'exécutions extrajudiciaires et permettrait aux forces de l'ordre de commettre de telles
violations des droits de l'homme sous le couvert de la loi; il est cependant encourageant que les amendements proposés incluent
également des dispositions pénales interdisant expressément l'utilisation d'enfants dans des activités violentes; en ce qui concerne la
question de l'indemnisation des familles des victimes d'exécutions extrajudiciaires. La RS fait observer que s'il est parfois difficile
d'établir la responsabilité individuelle de tel policier ou de tel fonctionnaire et de le faire condamner, il n'est pas impossible d'établir
qu'un décès est dû à un usage excessif de la force par la police ou par d'autres agents des forces de l'ordre; l'État doit alors
indemniser la partie lésée. Elle souligne toutefois que l'indemnisation des victimes et de leur famille ne saurait en aucun cas exonérer
les autorités de l'obligation d'enquêter sur les cas de violation des droits de l'homme et d'en poursuivre les auteurs.

S'agissant des autres questions abordées dans le rapport, il est notamment fait état de ce qui suit : la Commission nationale des droits
de l'homme, créée en 2000, n'est pas habilitée à traiter de questions impliquant les forces armées, ce qui doit être considéré comme
une grave limitation; en outre, il est manifeste que, pour être un mécanisme de recours efficace et accessible, la Commission devrait
être représentée au niveau local; la Commission devrait être autorisée à accorder réparation aux victimes de violations des droits de
l'homme et à leur famille dans le cadre de procédures parajudiciaires; le Népal est le seul pays d'Asie du Sud à avoir aboli la peine
capitale pour tous les crimes (en 1999); les affrontements entre le CPN (maoïste) et la police ont attisé les tensions politiques au Népal
ces dernières années ce qui rend le travail des défenseurs des droits de l'homme, des avocats, des journalistes, des ONG et d'autres
membres de la société civile d'autant plus difficile; il est inquiétant de constater que les défenseurs des droits de l'homme sont de plus
en plus la cible d'actes de harcèlement, de violences et de menaces, tant de la part de membres du CPN (maoïste) que de la police.

Les recommandations de la RS sont notamment les suivantes :

Le gouvernement devra intensifier ses efforts pour harmoniser la législation nationale avec les instruments internationaux
auxquels le pays est partie;
l'éducation et la sensibilisation dans le domaine des droits de l'homme devraient faire partie des programmes des écoles et
des établissements d'enseignement à tous les niveaux; le gouvernement doit continuer à former l'administration et la police
au respect des principes énoncés dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme; les dirigeants politiques
devraient être encouragés à soutenir et à promouvoir publiquement les normes et les principes qui se rapportent à ces droits;
le gouvernement devrait poursuivre le processus de démocratisation et intensifier ses efforts pour renforcer les institutions
démocratiques et protéger les principes fondamentaux dont cette démocratisation dépend; la communauté internationale
devrait le soutenir et l'aider en lui fournissant les ressources requises, notamment en matière de financement et de
savoir-faire;
il est urgent de mettre en place des mécanismes forts, indépendants et crédibles, chargés des enquêtes et des poursuites,
en cas de violations alléguées des droits de l'homme, notamment d'exécutions extrajudiciaires et de disparitions, dont la
police ou d'autres agents de l'État seraient responsables;
le gouvernement devrait envisager la création d'une commission ou d'une procédure indépendante chargée d'enquêter sur
les allégations d'exécutions extrajudiciaires passées et présentes dont la police ou d'autres agents de l'État seraient
responsables; des mesures devraient aussi être adoptées pour assurer une formation aux droits de l'homme visant à
sensibiliser ces forces aux principes fondamentaux d'un fonctionnement démocratique de la police; il faut dispenser d'urgence
une formation professionnelle aux policiers pour renforcer leurs compétences en tant que responsables de l'application des
lois, en particulier dans le domaine des enquêtes judiciaires;
eu égard au fait que les hôpitaux et les médecins légistes ne disposent pas des installations appropriées pour effectuer les
autopsies, ces installations doivent être améliorées d'urgence afin que les autopsies et autres examens post-mortem soient
effectués conformément aux normes internationales;
il conviendra de modifier ou de réviser la législation pertinente pour garantir que chaque citoyen ait pleinement et librement
accès à la justice;
eu égard aux faiblesses manifestes des juridictions inférieures, les magistrats à tous les niveaux devraient recevoir un soutien
et une formation qui les sensibiliseraient aux normes nationales et internationales relatives aux droits de l'homme et
renforceraient leur intégrité et leur indépendance dans l'exercice de leurs fonctions;
il convient d'ouvrir, à titre prioritaire, une enquête judiciaire au niveau de la Cour suprême sur les cas présents et passés de
disparitions;
les projets de développement pourraient être davantage axés sur la mise en réseau de groupes de femmes et leur intégration
dans la vie politique du pays; les stratégies visant à éliminer les pesantes pratiques traditionnelles devraient être soutenues
par le Gouvernement et par les organismes donateurs;
le gouvernement doit enquêter sur chaque cas d'assassinat d'enfant et veiller à ce que les auteurs d'exécutions
extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires soient traduits en justice;
le CPN (maoïste) doit cesser immédiatement d'utiliser des enfants dans ses opérations armées et faire en sorte que les civils
soient protégés de toutes formes de violence, de menace ou d'intimidation de la part des militants maoïstes;
le gouvernement devrait redoubler d'efforts pour remédier aux difficultés sociales et économiques qui font que les enfants
sont entraînés dans le conflit;
le gouvernement doit adopter d'urgence des mesures de nature à garantir la sécurité des membres d'ONG, des avocats, des
défenseurs des droits de l'homme, des journalistes et d'autres représentants de la société civile, et faire instituer des
enquêtes sur tous les cas de menaces ou de violence dirigées contre ces personnes;
tout comme il le fait déjà dans le cas des familles des policiers qui ont perdu la vie dans l'exercice de leurs fonctions, le
gouvernement doit veiller à ce que les familles des victimes de la violence policière obtiennent réparation pour leurs
souffrances et la perte subie;
le gouvernement doit s'abstenir de recourir à la force militaire pour mater l'opposition armée du CPN (maoïste); la police et
autres forces de sécurité devraient être maintenues sous strict contrôle civil;
le gouvernement doit poursuivre la recherche d'un règlement politique de la situation et continuer le dialogue avec le CPN
(maoïste); tout règlement devrait comprendre des dispositions garantissant que les assassinats extrajudiciaires et autres
violations graves des droits de l'homme perpétrés dans le cadre du conflit actuel feront l'objet d'une enquête et que leurs
auteurs seront traduits en justice.

Indépendance des juges et des avocats, rapport du Rapporteur spécial (E/CN.4/2001/65, par. 18, 20, 163-165)

Le Rapporteur spécial a envoyé une communication concernant certains agissements de la police portant atteinte à l'indépendance
du pouvoir judiciaire. Selon les informations fournies, la police était passée outre à plusieurs décisions judiciaires ordonnant la
libération de prisonniers illégalement maintenus en garde à vue. Concernant une des affaires transmises, le gouvernement a répondu
que la personne concernée n'était pas en garde à vue mais se trouvait dans son village.

Intolérance religieuse, rapport du Rapporteur spécial (E/CN.4/2001/63, par. 2, 105-106, 155, 182)

Le Rapporteur spécial a adressé deux communications au gouvernement. La première concerne l'Église des adventistes du Septième
Jour, présente au Népal à travers quelques églises, une école et un hôpital. Elle pourrait accomplir la plupart de ses activités
religieuses à l'exception des restrictions suivantes : interdiction de procéder à des conversions et non-reconnaissance du droit de
propriété par les autorités. La deuxième concerne un moine tibétain qui aurait été arrêté par la police en octobre 2000. Le moine
aurait tenté de s'échapper, mais aurait été grièvement blessé par la police; il aurait succombé à ses blessures. Le rapport signale que
le gouvernement n'a répondu ni à ces communications ni à celles dont il était question dans les rapports soumis à la Commission à la
session de 2000 (voir E/CN.4/2000/65). Il signale en outre que des restrictions sont, directement ou indirectement apportées aux
manifestations extérieures des croyances ou religions minoritaires.

Dans son rapport intérimaire soumis à l'Assemblée générale (A/56/253, par. 54-55), le RS fait état d'informations voulant qu'en octobre
2000, quatre chrétiens auraient été arrêtés et accusés de prosélytisme à Rajbiraj, dans le district de Saptari. Leur arrestation serait
intervenue alors même que des extrémistes hindous avaient interrompu une réunion évangéliste et agressé des fidèles chrétiens, dont
les quatre personnes concernées. En février 2001, le gouvernement népalais aurait mis des obstacles aux célébrations du Nouvel An
tibétain à Katmandou et aurait, par exemple, interdit l'affichage de photographies du dalaï-lama en dehors des monastères.

Liberté d'opinion et d'expression, rapport du Rapporteur spécial (E/CN.4/2001/64, par. 222-224)

Le Rapporteur spécial a adressé au gouvernement népalais un appel urgent concernant le rédacteur en chef de l'hebdomadaire de
langue népalaise Janadesh. Selon les informations reçues, il aurait d'abord été arrêté en avril 1999, pour avoir publié un entretien qu'il
avait eu avec un des leaders de l'insurrection maoïste au Népal. Il aurait été maintenu en détention en dépit d'une décision de la Cour
suprême prononçant sa libération. Il aurait été libéré en février 2000 et arrêté à nouveau le même mois. Toutefois, on aurait des
raisons de croire qu'il avait été transféré à la prison de Siraha et qu'il aurait été accusé de port d'armes illégal. Dans sa réponse, le
gouvernement a fait savoir que l'intéressé n'était pas maintenu en détention par la police.

Torture, rapport du Rapporteur spécial (E/CN.4/2001/66, par. 810-823)

Le RS a porté à l'attention du gouvernement plusieurs affaires de torture concernant notamment les victimes suivantes : un homme
arrêté en rapport avec un meurtre; un homme arrêté sur présomption d'avoir été mêlé à une altercation; un détenu, condamné à
l'emprisonnement à perpétuité, qui aurait été battu à deux reprises par des codétenus - les autorités de la prison se seraient
abstenues d'intervenir; l'administrateur adjoint d'un camp de réfugiés dans le district de Jhapa, qui aurait été arrêté sans mandat pour
vol présumé de marchandises appartenant au camp; le président du All Nepal Landless People's Union, qui avait été arrêté pour
appui présumé au Parti communiste du Népal (maoïste); un homme arrêté pour vol présumé et qui aurait été frappé à coup de pieds
lors de sa garde à vue puis relâché - il aurait succombé deux jours plus tard après s'être plaint d'avoir de la difficulté à respirer (trois
membres des forces de l'ordre qui avaient procédé à son arrestation ont été incarcérés relativement à cette affaire); trois individus
arrêtés pour vol présumé; un homme qui, dans le cadre d'une dispute entre marchants, aurait été roué de coups jusqu'à en perdre
conscience; un chauffeur de taxé arrêté pour avoir participé à un arrêt de travail; un réfugié du camp de réfugié Baldangi II (district de
Jhapa) qui avait été arrêté sans mandat par la police qui effectuait une perquisition.

Les méthodes de torture ou de maltraitance utilisées étaient notamment les suivantes : suspendre par les pieds et frapper sur la
plante des pieds, aux jambes et au dos; aiguilles insérées dans la plante des pieds; chocs électriques; rouer de coups; frapper sur
tous le corps avec une tige de bambou; privation de nourriture et d'eau; immersion dans un contenant rempli d'eau; suspendre par les
cheveux; forcer la victime à s'asseoir sur une chaufferette; exercer une forte pression sur les yeux; tirer les cheveux; suspendre la
victime la tête vers le bas; rouler une tige de fer sur les cuisses (belana).

Le Rapporteur spécial signale que le gouvernement n'a pas répondu à plusieurs affaires qui lui avaient été communiquées en 1997,
1998 et 1999. Il précise en outre que des allégations concordantes, reçues au fil des ans, laissent planer peu de doutes sur la
généralisation de la pratique de la torture par des responsables de l'application des lois. Il exhorte le gouvernement d'accorder la plus
grande priorité à remédier à cette situation.

Violence contre les femmes, rapport de la Rapporteuse spéciale (E/CN.4/2001/73, par. 5, 6; E/CN.4/2001/73/Add.2)

À l'invitation des gouvernements bangladais, népalais et indien, la Rapporteuse spéciale chargée de la question de la violence contre
les femmes a séjourné à Dhaka, à Katmandou, à Bhairahwa dans le district de Rupandehi, à New Delhi, à Bombay et à Calcutta du
28 octobre au 15 novembre 2000, afin d'étudier la question de la traite des femmes et des filles dans la région.

Son rapport combiné (E/CN.4/2001/73/Add.2, 6 février 2001) est conçu comme une étude de cas destinée à compléter son précédent
rapport sur la traite des femmes, la migration des femmes et la violence contre les femmes, présenté à la Commission des droits de
l'homme (voir E/CN.4/2000/68). L'Asie du sud a été choisie comme objet de cette étude à cause du grand nombre de rapports faisant
état de la pratique de la traite dans cette région et à cause des nombreux programmes et initiatives nationales et régionales en cours
qui s'attaquent à ce problème, et qui sont menées les États, des ONG, des organismes de l'ONU ainsi que par l'Association de
coopération régionale de l'Asie du sud (SAARC) qui se prépare à adopter une convention visant à prévenir et combattre la traite des
femmes et des enfants aux fins de prostitution.

La RS souligne la nécessité de concepts clairs et rappelle qu'elle se sert de la définition de la traite des personnes suivante : a) le
recrutement, le transport, l'achat, la vente, le transfert, l'hébergement ou l'accueil de personnes par le recours ou la menace de
recours à la violence, l'enlèvement, la force, la fraude, la tromperie ou la contrainte (y compris l'abus de pouvoir), ou par la servitude
pour dette en vue de : b) placer ou détenir ces personnes, contre rémunération ou non, aux fins d'un travail forcé ou de pratiques
esclavagistes, dans une communauté autre que celle dans laquelle elle vivait au moment où l'acte initial visé en a) a été commis.

Le rapport de la mission fait notamment état de ce qui suit : les États semblent déterminés à éradiquer la traite des femmes et des
enfants dans toute la région; en dépit de cet engagement, les institutions, législations et politiques visant à combattre la traite ne sont
toujours pas en place; de surcroît, il n'y a pas eu de mise en oeuvre concrète des dispositions existantes destinées à combattre la
traite; cette situation se reflète dans le faible taux de condamnation des auteurs de crimes de violence contre les femmes. La RS se
déclare également préoccupée par l'absence d'une conceptualisation claire dans le projet de convention de la SAARC, en particulier
compte tenu des échanges internationaux visant à en arriver à un consensus sur une définition de la traite. Elle a noté les
divergences conceptuelles suivantes : entre la traite et la prostitution - la traite transfrontalière ne s'effectue pas seulement à des fins
de prostitution mais également à d'autres fins; entre les réseaux de traite des femmes et les réseaux de traite d'enfants - le cas des
enfants nécessite des mesures additionnelles destinées à les prémunir de la traite; entre la traite et la migration - dans plusieurs pays,
la traite est considérée comme un problème relié à l'immigration et la lutte contre la traite s'inscrit dans la politique de fermeture des
frontières aux migrants. La RS souligne également la nécessité de ne pas envisager la traite comme étant un problème d'immigration
qui nécessite des mesures et des lois d'exclusion, mais plutôt comme un problème des droits de l'homme. Elle fait également observer
que la discrimination contre les femmes qui s'observe en Asie du sud trouve est reliée à la croyance voulant que les femmes, telles
des enfants, sont vulnérables et, qu'en conséquence, elles ont besoin de protection (la garde préventive, par exemple).

La RS se félicite de l'adoption de la convention de la SAARC mais exprime certaines réserves sur, notamment : le fait que ses
dispositions ne sont pas en conformité avec les nouvelles normes juridiques internationales sur la traite des personnes tel qu'énoncé
dans le Protocole additionnel à la Convention de l'ONU contre la criminalité transnationale organisée; le défaut de la convention de
distinguer entre les femmes et les enfants (le régime juridique relatif aux femmes devrait être fondé sur les droits et le concept de la
coercition en matière de traite alors que le régime applicable aux enfants devrait être d'une autre nature); le défaut de reconnaître
clairement que la traite peut s'effectuer à des fins autres que la prostitution et que la traite constitue un crime distinct sans égard à
l'incidence de la prostitution; l'absence de distinction entre les déplacements et les migrations qui sont légitimes et volontaires et ceux
qui résultent de la contrainte; le fait que la convention fait appel au concept de la garde préventive qui intervient après l'émancipation
et la réadaptation sans énoncer toutefois que tout séjour dans un refuge de l'État doit être volontaire; le défaut, dan s ce contexte, de
garantir les droits économiques et sociaux des femmes.

La RS fait valoir que l'on doit prendre en compte, à l'échelon national, que les initiatives partielles ne permettent pas de lutter
efficacement contre la traite et que cette lutte en Asie du sud doit incorporer les deux volets suivants: a) poursuite, et sanction des
responsables de la traite; b) mesures sociales pour les femmes qui souhaitent s'émanciper de la traite et gagner autrement leur vie -
ce volet met en jeu des politiques et des activités reliées au problème des victimes de la traite atteinte du VIH/sida.

S'agissant du Népal plus spécifiquement, la RS fait observer que ce pays constitue un des principaux points de départ de la traite en
Asie du Sud, le principal pays de destination étant l'Inde. On estime qu'entre 100 000 et 200 000 Népalaises seraient présentement
exploitées comme prostituées en Inde, dans d'autres régions de l'Asie du Sud et au Moyen-Orient. Chaque année, entre 5 000 et 10
000 femmes et filles seraient absorbées par les réseaux de traite.

La RS signale que les facteurs suivants semblent contribuer à l'expansion du phénomène de la traite de femmes et d'enfants
népalais : la privation de terre, le chômage et le sous-emploi, l'extrême pauvreté, la discrimination fondée sur le sexe généralisée ( de
jure ou de facto), l'acceptation pour des motifs religieux ou culturels de la pratique de la prostitution au sein de certains groupes; et
le fait que la migration soit perçue comme étant inéluctable. La RS cite également le régime successoral et les lois sur la citoyenneté
comme facteurs aggravants et insiste sur le fait que le Népal doit en priorité supprimer les clauses discriminatoires présentes dans sa
législation afin de mettre celle-ci en conformité avec les normes internationales.

Le rapport note que le gouvernement a déclaré en 1999 que la traite constituait une de ses priorités principales et a adopté le Plan
national d'action contre la traite des enfants et leur exploitation sexuelle à des fins commerciales. Sur le plan de l'action juridique, le
rapport fait état de ceci : la constitution de 1990 interdit formellement la traite des êtres humains, l'esclavage, le servage et le travail
forcé (tout comme d'ailleurs plusieurs des instruments internationaux dont le Népal est partie); c'est la loi de 1986 sur le contrôle de la
traite des êtres humains qui régit la question de la traite à l'heure actuelle; au moment de la rédaction du rapport, un projet de loi sur
la lutte contre la traite, alors au stade final de la rédaction, avait été soumis au cabinet; ce projet de loi, quoique digne d'éloge,
soulève certaines appréhensions s'agissant des droits fondamentaux, en particulier sur le plan de la pénalisation de la prostitution, de
l'extra-territorialité, du déplacement du fardeau de la preuve, et des pouvoirs draconiens accordés à la police en matière de
perquisition et de saisie; un projet visant à instituer des tribunaux spéciaux pour juger les affaires de traite (ces tribunaux seraient
autorisés à faire appel à des règles de preuves moins strictes, ce qui peut mettre en péril le droit à un procès équitable); des mesures
législatives en cours visant à promulguer des lois sur la violence au foyer, les droits de l'enfant, la mise ne place de tribunaux de la
famille, ces mesures ayant toutes un rapport avec le phénomène de la traite.

La section du rapport qui se penche sur les programmes et les orientations politiques visant à combattre la traite fait état du Plan
d'action national sur la traite - une initiative du ministère de la Condition féminine, de l'Enfance et du Bien-être social - et de ses six
champs d'application : a) élaboration de politiques et de stratégies d'attaque; b) adoption de textes de loi axés sur la prévention de la
traite et la sanction pénale des auteurs; c) sensibilisation de l'ensemble de la population ainsi que de l'appareil judiciaire en vue de
lutter plus efficacement contre cette pratique; d) santé; e) éducation; f) émancipation et réadaptation. La RS se félicite de la
conception ambitieuse et de la portée de ce plan d'action mais considère néanmoins que, comme d'autres initiatives similaires, l'accent
est mis sur la victime et sur les besoins en terme de sensibilisation, de santé, d'éducation et de réhabilitation mais pas assez sur la
répression et la sanction pénale des personnes responsables de ce trafic. La RS affirme en outre que le succès de l'entreprise
dépend largement de la participation active des ministères de la Justice et de l'Intérieur.

S'agissant de l'appareil judiciaire, le rapport fait état de ce qui suit : on étudie la possibilité d'intégrer aux programmes de formation des
forces de police la tenue d'ateliers axés sur les droits de l'homme qui seraient organisés par l'UNICEF; la direction des forces de police
à mis en place à chacun des commissariats une unité chargée d'enquêter sur les plaintes qui concernent la violation des droits des
femmes et de prendre des mesures qui s'imposent; dans le cadre de ses opérations de surveillance des frontières, la police reçois
l'appui de l'ONG Maiti Nepal, qui l'aide à identifier les trafiquants éventuels ainsi que leurs proies; la police des frontières semble être
sensibilisée au problème et déterminée à réagir vigoureusement; l'action du corps judiciaire dans la lutte contre la traite a été très
inégal; à part certains jugements controversés concernant le droit des femmes en matière d'héritage, la Cour suprême a généralement
soutenu que les normes internationales doivent prévaloir sur l'ensemble du territoire; les tribunaux de première instance ont
fréquemment acquitté des acteurs de la traite; les juges affirment que le taux élevé d'acquittement est relié à la faiblesse de la preuve
présentée par la police, qui est causée par le manque de moyen mis à la disposition de la police pour mener des enquêtes efficaces;
la Commission nationale des droits de l'homme ne s'est pas encore directement attaquée au problème de la violence contre les
femmes; on a proposé comme solution de nommer un rapporteur national au sein de la Commission, qui serait chargé de la question
de la traite.

S'agissant de l'émancipation et des services sociaux offerts aux victimes de la traite, le rapport note que, quoique ce soient au premier
chef les ONG qui se chargent de ces questions, le ministère de la Condition de la femme, de l'Enfance et du Bien-être social a ouvert
un centre de réadaptation pour les femmes à 45 km de Katmandou. Ce centre dispense une formation professionnelle aux femmes et
aux filles qui ont été émancipées des réseaux de traite où risquaient d'en être victimes. Il semble toutefois que ce centre n'est pas
accessible pour beaucoup de femmes et qu'il exclut les femmes qui ont des enfants à charge ou qui sont atteintes du VIH/sida; on
estime qu'il y aurait environ 38 000 personnes séropositives au Népal; selon l'information reçue, même les travailleurs de la santé
ignorent comment traiter les personnes atteintes et ne possèdent que des connaissances rudimentaires sur le mode de transmission
de la maladie; en outre, on saisit mal le besoin de confidentialité et de la pratique de dépistage volontaire; des hôpitaux auraient
refusé d'admettre des patients atteints du VIH/sida de crainte de propager la maladie; on réclamerait un montant plus élevé pour la
crémation de personnes mortes du sida.

Le rapport note également que les organismes internationaux travaillant sur le terrain ont été très actifs sur le plan de la lutte contre la
traite, en particulier, l'UNICEF, l'OIT, le HCR et le PNUD. Un groupe de travail interorganisations de l'ONU en place depuis deux ans
oeuvre à l'échelon local, national et transfrontalier. L'initiative principale issue des organismes internationaux est la JIT (Initiative
conjointe du Millénaire pour la lutte contre la traite des femmes et des filles au Népal) qui est coordonnée par le PNUD. L'objectif de
l'initiative est de réduire l'incidence de la traite en s'attaquant d'abord aux inégalités et à la discrimination dont sont victimes les
femmes et les filles, et qui accroissent leur vulnérabilité à la traite. Le projet préconise également la nomination d'un rapporteur au sein
de la Commission nationale des droits de l'homme, qui sera chargé de la question de la traite, la diffusion d'une publication traitant
des questions des droits de l'homme, la collecte de donnée sur la traite à l'échelon national, des activités de sensibilisation auprès des
médias, et la mise sur pied d'un mécanisme chargé du suivi des activités de lutte contre la traite. Dans le cadre du projet d'assistance
du HCR, on a conçu un projet pilote destiné à être mis en oeuvre dans deux districts présélectionnés. Il prévoit la création de
tribunaux spéciaux (en conformité avec la Constitution) chargé des affaires de traite. Les activités de ces tribunaux vont être épaulées
par une force de police spécialement formée dont le personnel sera recruté auprès de « commissariats de femmes ». D'autres activités
seront axées sur la réinsertion des femmes et des filles libérées des réseaux de traite. Par ailleurs, un autre projet sera axé sur la
promotion d'activités de collaboration entre les polices frontalières et les appareils judiciaires du Népal et de l'Inde.

La Rapporteuse spéciale formule dans son rapport les recommandations suivantes adressées aux gouvernements des trois pays
visités :

Niveau international

La communauté internationale doit continuer de jouer un rôle actif dans la prévention de la traite dans la région de l'Asie du
sud. Des ressources accrues devraient être allouées aux gouvernements de la région pour leur permettre de faire face à ce
problème.
Il convient de mettre en place une équipe spéciale interorganisations ou de lancer une initiative conjointe sur la traite à
laquelle seraient associées toutes les organisations internationales compétentes.

Niveau régional

Les pays membres de la SAARC devraient conjuguer leurs efforts en vue de recueillir des données complètes sur la traite. Il
est nécessaire de mettre en place une base de données centrale et de procéder à une étude régionale pour déterminer la
nature des problèmes, le nombre de personnes touchées, le profil des victimes de la traite et des trafiquants ainsi que pour
évaluer la réponse des gouvernements nationaux.
L'adoption d'une convention de la SAARC pour la prévention et l'élimination de la traite des femmes et des enfants à des fins
de prostitution devrait être encouragée. Si l'actuel projet de convention est signé, il faudra organiser une conférence des
Parties en l'espace d'une année afin de faire en sorte que la définition de la traite qui figure dans l'instrument de la SAARC
soit conforme au Protocole additionnel à la Convention contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir,
réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Les droits sociaux et économiques des
victimes de la traite devraient être respectés. En outre, il convient de mettre en place un mécanisme de surveillance ainsi
qu'un fonds régional pour aider ces victimes une fois qu'elles ont été secourues.
Il convient de créer une équipe spéciale intergouvernementale régionale sur la traite qui aura pour tâche d'élaborer et
d'appliquer une stratégie concertée pour la région. Il y a lieu en outre de mettre en place une équipe spéciale interrégionale
de police dont le mandat consistera à combattre la traite, à rechercher les trafiquants et à recueillir des renseignements sur
leurs réseaux

Niveau national (valable pour les trois pays concernés)

Les gouvernements devraient se doter chacun d'un plan national d'action pour combattre la traite, comprenant un mécanisme
de surveillance, auquel participeraient les pouvoirs publics, des ONG et des organismes internationaux.
Des lois destinées à combattre la traite devraient être envisagées, étant entendu qu'elles doivent être conformes aux normes
internationales relatives aux droits de l'homme et respectueuses des droits des femmes.
Les gouvernements devraient s'abstenir d'adopter des règlements et des décrets de nature à restreindre la libre circulation
des femmes sous le couvert de la lutte contre la traite. Il y aurait lieu, au contraire, de prendre des mesures afin de familiariser
les femmes avec leurs droits et de les sensibiliser aux conditions qui règnent dans les pays d'accueil. Les ambassades des
États concernés dans ces pays devraient s'employer activement à assurer aux femmes et aux filles victimes de la traite
l'assistance dont elles ont besoin.
Le recours à la « garde préventive » dans le cas des victimes de la traite devrait être reconsidéré. En conséquence, elles ne
devraient être internées que si elles le souhaitent elles-mêmes. Tout placement dans un foyer de l'État doit être librement
consenti. En outre, il faudrait assurer dans ces foyers des conditions telles que les femmes voudront y rester de leur propre
chef. D'autre part, il convient d'exécuter des programmes pour assurer une occupation aux victimes. Celles-ci devraient
bénéficier de services de consultation juridique et psychologique ainsi que de l'aide dont elles ont besoin pour planifier leur
avenir. La gestion des foyers devrait être confiée à des ONG qui ont déjà fait leurs preuves et être surveillée et contrôlée par
les pouvoirs publics.
Au lieu de détenir les victimes de la traite qui sont des ressortissantes d'autres pays dans des foyers publics pendant de
longues périodes, les gouvernements de la région devraient, selon qu'il conviendra, œuvrer pour faciliter leur retour librement
consenti.
Il y a lieu de former les forces de police à la lutte contre la violence à l'égard des femmes en général et la traite en particulier.
Cette formation devrait consister à sensibiliser davantage les membres de ces forces à la question, ainsi qu'à les doter
des techniques d'investigation appropriées.
La corruption au sein de la police, notamment dans le contexte de la traite, étant semble-t-il, un problème aigu dans tous les
pays de la région, les chefs des services de police devraient donner à cet égard des directives claires pour que chacun sache
que cette pratique ne sera pas tolérée et que les officiers de police qui s'y livreront seront sévèrement punis.
Il convient d'organiser des séminaires et des ateliers dans la région à l'intention des juges afin de les sensibiliser davantage
aux questions relatives à la violence contre les femmes ainsi qu'aux problèmes que pose la traite.
Les commissions des droits de l'homme de tous les pays de la région devraient mettre l'accent dans leurs travaux sur le
problème de la traite.
Des mécanismes de protection des témoins devraient être mis en place pour que les victimes acceptent de déposer contre les
trafiquants. De tels mécanismes devraient aider la police à produire les preuves requises devant les tribunaux et contribuer à
faire en sorte qu'un plus grand nombre de trafiquants soient condamnés.
Il convient de déployer des efforts concertés en vue de faire face au problème du VIH/sida dans la région. Des ressources
suffisantes devraient être affectées à l'action dans ce domaine. Il convient aussi de créer des centres spéciaux dans les
quartiers chauds pour aider les prostituées. La campagne relative au sida devrait être régie par les normes internationales
visant à faire en sorte que les tests soient librement consentis et confidentiels. Une formation sexospécifique devrait être
dispensée à la profession médicale afin que les femmes reçoivent un traitement confidentiel et ne soient pas jugées par les
personnes qui les soignent.
Des programmes de prévention devraient être lancés et revêtir la forme d'une sensibilisation par le biais des médias, du
système d'enseignement et des animateurs sociaux opérant dans les villages.
Il convient d'apporter un vaste soutien aux ONG qui travaillent dans ce domaine. Des encouragements spéciaux devraient
être prodigués à celles qui s'occupent des enfants, des prostitués et des victimes de la traite.