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Après l'affaire Danone, Esso s'en prend au site de Greenpeace
by Multitudes-Infos Sunday June 30, 2002 at 02:26 PM

Esso s'en prend au site de Greenpeace France au nom de la jurisprudence Danone

Trop c'est trop... Esso/Exxon Mobil a attaqué en justice GreenPeace et son site Internet pour détournement de son logo : "E$$O" au lieu de "Esso", double symbole du dollar américain remplaçant les deux S de la marque pour servir de drapeau à la virulente campagne internationale lancée par l'association de défense de l'environnement à l'encontre du groupe pétrolier. Bien que le logo détourné soit installé depuis 2001 sur les sites des 'green warriors' de Grande-Bretagne, des Etats-Unis, du Canada, du Luxembourg et d'Allemagne, ce sera en France que se règlera le conflit.

Le choix de la France pour une première riposte n'a rien d'anodin. La législation française, qui avait condamné le site "JeboycotteDanone.net" l'année dernière, protège davantage les marques que celle des autres pays. Malgré ce souvenir récent, l'assignation au Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris le 1er juillet prochain a "beaucoup surpris" les responsables du site. Comme le souligne Pierre-Emmanuel Rouzineau, webmaster de GreenPeace.fr, "Esso ne nous a jamais averti au préalable. Nous avons reçu l'assignation par lettre recommandée".

Face à la menace des 80 000 euros d'indemnité demandés, les responsable du site restent néanmoins optimistes. "Les charges ne portent que sur la forme, raconte Pierre-Emmanuel Rouzineau. Esso en fait des tonnes : nous avons utilisé que de la police 'Arial' pour faire le logo, et eux voient une référence aux 'SS', en plus écrits en gothique." Pour lui, une chose est certaine : "Quoi qu'il en ressorte de cette histoire, nous ne nous arrêterons pas là, nous agirons contre Esso tant qu'il restera un criminel climatique qui agit sur l'ensemble de la planète". D'ailleurs, le webmaster a déjà en tête d'autres stratégies d'attaques, avançant "pourquoi pas une tête d'un tigre barrée" pour remplacer l'actuelle image en cas de condamnation.

Comme pour "JeboycotteDanone", le site de GreenPeace France connaît actuellement une hausse de sa fréquentation. L'audience qui s'établirait à plus de 10 000 visiteurs uniques depuis l'ouverture du site, va sans doute augmenter ces prochains jours "grâce au relais médiatique" du conflit qui oppose Greenpeace à Esso. Mais les véritables relais de notoriété sont les 10 000 activistes français ou les 180 000 dans le monde, tous invités à venir sur le site pour envoyer des e-cards.

Quant à la compagnie pétrolière du monde, elle entend "vouloir ne défendre que ce qui lui est propre", soit sa marque. "Nous ne sommes pas contre l'existence même du site, quoique nous aurions beaucoup de choses à redire des allégations qui y sont faites", indique Emmanuel du Granrut, directeur de la communication d'Esso. Pour lui, la multinationale n'a "aucun souci" à se faire quant à sa respectabilité. Idem pour des conséquences 'fâcheuses' au niveau du rating social et environnemental : "Nous avons de quoi nous défendre, affirme-t-il. Nos salariés réprouvent la manière d'agir de GreenPeace. Ils ont plus un sentiment d'injustice qu'autre chose".

Au TGI de Paris, il y aura sans doute débat, mais pas sur le fameux Protocole de Kyoto, car "cela n'est pas le lieu pour y répondre", commente Emmanuel du Granrut. Il n'y aura pas non plus d'arrangement à l'amiable, car "avec de telles personnes, vous ne pouvez pas dialoguer". Les deux parties semblent se préparer à une guerre froide, l'un accusant l'autre d'être le "leader des tentatives de sabotage de l'action internationale de lutte contre le réchauffement climatique", l'autre démentant fermement les "accusations non fondées sur notre dumping environnemental". Entre temps, et au moins jusqu'au 1er juillet 2002, le site Greenpeace.fr continuera à afficher son "E$$O"...