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Sortie de "Retour de Palestine" chez Mille et une nuits
by Editions Mille et une nuits Monday June 24, 2002 at 01:40 AM

Retour de Palestine est une sorte de carnet de voyage de la 11e mission de la Campagne Civile Internationale pour la Protection du Peuple Palestinien (CCIPPP). Celle-ci se trouvait dans les territoires au moment de l'offensive israélienne baptisée Rempart.

Invitation à lire ...

Retour de Palestine
Aux éditions Mille et une nuits

Retour de Palestine est une sorte de carnet de voyage de la 11e mission de la Campagne Civile Internationale pour la Protection du Peuple Palestinien (CCIPPP). Celle-ci se trouvait dans les territoires au moment de l'offensive israélienne baptisée Rempart.

Témoins de l'horreur

Initialement, la 11e mission de la CCIPPP, basée à Paris, devait se trouver en Palestine pour le Jour de la Terre, le 30 mars, un jour qui commémore la violente répression des paysans palestiniens le 30 mars 1976. A cette occasion, José Bové, un des participants à la mission, était cette fois-ci accompagné par des représentants de Via Campesina, l'internationale paysanne, dont un membre du Mouvement des Sans Terres du Brésil. En tout, ils étaient une cinquantaine à participer à cette mission. Pour Bové, la dimension rurale de la solidarité est en effet essentielle : « Si le lien à la terre est si fort ici, c'est d'abord parce que les Palestiniens sont majoritairement des paysans qu'on a chassés de leur terre ». Mais arrivés sur place, la situation a donné une autre dimension à la mission de la CCIPPP, notamment avec la réoccupation des principales villes de Cisjordanie et le siège du quartier général de Yasser Arafat.
Retour de Palestine, qui vient d'être publié à Paris par les éditions Mille et une nuits, est un témoignage collectif, rédigé par des journalistes en huit jours seulement sur la base des carnets de route et des témoignages de la cinquantaine de participants à cette mission. Ces participants, ce sont des « gens ordinaires », des salariés, des retraités, des chômeurs, qui, se trouvant dans les territoires en plein offensive israélienne, entre le 27 mars et le 9 avril 2002, chacun raconte les événements dont il a été témoin sous un angle différent. Les tirs, les bombes assourdissantes, les larmes, les victimes, la situation dans les hôpitaux, l'impossibilité d'enterrer les morts ... mais aussi la soif et la faim dans la Moqataa (le QG d'Arafat), la peur, la solidarité avec les Palestiniens, les difficultés de la vie quotidienne ...
Sans oublier les échanges d'expériences avec les autres activistes, notamment des Italiens et des Suisses.
La préface, écrite par Rony Brauman, éclaire les choix des missions : « Les bombes humaines qui se font exploser parmi les civils en Israël commettent des actes effroyables. Mais quiconque s'est rendu, ne serait-ce que quelques jours, dans les territoires palestiniens constate que l'on y fabrique depuis des années le désespoir et la violence à grande échelle. Ce n'est pas le moins du monde une façon de justifier cette terreur, mais c'est juste une façon de constater qu'elle est d'abord le produit d'une autre terreur ».
Le but de la présence de ceux qu'on appelle désormais les « internationaux » était de protéger les Palestiniens, puisque les Israéliens étaient obligés de prendre en compte leur action. Leur présence a permis d'aider à faire entrer deux médecins et quelques convois du Croissant-Rouge dans le quartier général de Ramallah. Au début, seulement quelques représentants, dont José Bové, ont réussi à rencontrer le président Arafat assiégé dans son bureau. Bové résume ainsi sa première impression de la rencontre : « Je découvre quelqu'un que je suis sûr de connaître tellement je l'ai vu à la télé, et pourtant je suis surpris par sa taille : un mètre soixante pas plus, un regard vif, perçant et en même temps une vraie générosité ». Le président palestinien leur explique : « Je suis victime du terrorisme d'Etat de Sharon ».
En fait, les Israéliens ont laissé ces personnes entrer uniquement pour avoir des informations sur la situation dans le bâtiment assiégé. « C'est pour qu'on leur lâche des infos qu'ils nous ont laissés entrer », explique Bové. Mais finalement, le monde entier a vu les images : « L'image du visage de Yasser Arafat éclairé par les bougies, qui ne me quittera plus. Nous avions emporté avec nous une petite caméra. L'image a maintenant fait le tour du monde. Au moins nous avons gagné la guerre de l'image : dans la nuit, les Israéliens rétablissent l'électricité dans le quartier général. L'effet de cette image a été désastreuse pour Sharon », écrit José Bové.

Le livre, comme leur action est un cri de la société civile contre l'hégémonie américaine qui avorte toute résolution au conseil de sécurité des Nations-Unies, contre un nouvel holocauste commis contre un peuple sous occupation militaire. Un cri contre l'inaction. Comme on peut le lire dans l'introduction : « L'urgence nous a donné un slogan : il faut mettre en place une force de protection pour les gens de Palestine. C'est d'un peuple en danger de mort qu'il s'agit. Seule une intervention internationale peut empêcher l'inéluctable. Puisqu'aucun gouvernement, qu'il soit américain, européen ou arabe n'en est capable, puisque ni les ONG ni l'humanitaire ne s'en occupent plus, puisque la société civile israélienne est tétanisée, alors il ne reste plus qu'à en appeler aux gens ordinaires, aux citoyens, et d'abord à ceux qui se retrouvent dans la rue depuis Seattle ». « Je suis vraiment heureux. Ce que vous avez fait, aucun diplomate n'y est arrivé. Vous avez réalisé quelque chose d'incroyable », confesse Arafat aux membres de la mission. En fait, cette campagne a démontré qu'une nouvelle sorte de « diplomatie populaire » peut être efficace. Une « nouvelle diplomatie » est née, comme le dit le dernier témoignage, celui de Samir Abdallah.