Ne dites plus de mal de Bush au téléphone, vous pourriez aller en prison by yannindy Tuesday June 18, 2002 at 10:19 PM |
yannindy@yahoo.fr |
Une nouvelle loi vient d'être votée. Attention à vous, vous risquez la prison si vous utilisez internet..
Ne dites plus de mal de Bush au téléphone Notre très démocratique gouvernement arc-en-ciel nous a
gratifié d'une nouvelle atteinte à la liberté d'expression. Le message
devient clair: que les citoyens se taisent, et se contentent de voter tous les 4
ans pour réélire les mêmes. Et s'ils ont le malheur d'utiliser un moyen de
communication quelconque, on peut les mettre sur écoute, les arrêter, les
condamner. De quoi s'agit-il? C'est en fait très simple. Le gouvernement a fait voter
une loi (articles 111 et 114 de la loi dite "Belgacom"), qui punit
d'une peine d'emprisonnement de un à quatre ans "quiconque donne ou tente
de donner dans le Royaume, via l'infrastructure des télécommunications, des
communications portant atteinte au respect des lois, à la sécurité de
l'État, à l'ordre public ou aux bonnes moeurs ou constituant une offense à
l'égard d'un État étranger". En clair, et comme l'a parfaitement défini la ligue des
droits de l'homme, vous pouvez être condamné à quatre ans de prison pour
avoir transmis par internet une carricature de Dubya (surnom de Georges
www.bush.con). "Impossible en Belgique. Ils ne le feront
jamais", vous dites-vous? Erreur. En effet, la loi est censée ne viser que
les délits graves. Mais, et je cite la Ligue des Droits de l'Homme, "les
comportements susceptibles d'être poursuivis et sanctionnés sont définis de
manière extrêment large et floue ("atteinte au respect des lois"
notamment). De nombreux actes sont susceptibles de tomber sous le coup de cette
incrimination." Et si on réfléchit un peu, ca veut dire que vous pouvez
être poursuivis pour avoir appelé à la désobéissance civile (en tous cas,
si vous le faites par téléphone, fax ou internet). Dès que vous ne respectez
pas les bonnes moeurs, ça tombe. Dès que vous portez atteinte à un Etat
étranger (où à son chef, comme Sharon ou Mugabé), ça tombe. Quelle liberté
avons-nous encore? "Impossible en Belgique. Ils ne le feront
jamais", vous dites-vous? D'accord. Posez la question à Marek
et ses deux copains, qui seront jugés en procédure accélérée ce
mois-ci, simplement pour avoir été présents lors de la manifestation du 14
décembre. Posez la question à D'Orazio,
qui a été persécuté pendant des années par la justice, pour enfin voir les
charges contre lui levées après des dizaines d'audiences. Mais ça ne s'arrête pas là. En effet, il faut savoir
que les articles 111 et 114 font en effet partie de l'énumération des cas dans
lesquels le juge d'instruction peut autoriser des écoutes téléphoniques.
Donc, si vous critiquez Bush, Sharon ou Mugabé, non seulement, on peut vous
poursuivre, mais aussi vous mettre sur écoute! "Impossible en Belgique. Ils ne le feront
jamais", vous dites-vous? Encore faux. Il faut aussi savoir que ce genre de
"crime" est susceptible de démarrer une "enquête
pro-active" (comprenez, monter un dossier contre des gens qui n'ont
-encore- rien fait, mais dont la police ou la sureté de l'état pense qu'ils
pourraient commettre des délits). Quand on voit comment la police tente de
provoquer des dégâts lors des manifestations (voir ici
et ici),
on se demande où elle va s'arrêter. Et ce n'est pas le vote d'une telle loi
qui va les calmer. "Impossible en Belgique. Ils ne le feront
jamais", vous dites-vous? Allons encore plus loin, alors. Vous avez entendu
parler des techniques
partculières de recherche? Non? C'est très simple. Sur simple
présomption, des policiers inconnus, sans mandat, sans que vous puissiez avoir
accès au dossier, même si vous êtes condamnés, peuvent entrer chez vous pour
poser des micros, lire votre courrier, vous mettre sur écoute, utiliser les
provocations policières, etc.. Ca non plus, on le croyait pas possible en
Belgique. Et pourtant, c'est en discussion au Parlement en ce moment même. Et,
Ô surprise, "les techniques particulières de recherche : infiltration
policière, observation policière, indicateurs de police, interception de
courrier : ces techniques, qui sont actuellement en discussion au Parlement,
seront possible pour ces nouvelles infractions Belgacom" (je cite encore la
Ligue des Droits de l'Homme). "Impossible en Belgique. Ils ne le feront
jamais", vous dites-vous? Mais la Ligue va encore plus loin, en indiquant
que "L'ensemble des garanties posées par la Convention européenne des
droits de l'Homme et par Strasbourg ne sont par ailleurs pas rencontrées par
les articles 111 et 114 nouveaux de la loi Belgacom". Alors, quelle
utilité?? Ben juste pouvoir vous contrôler si vous dites quelque chose qui n'a
pas le bonheur de plaire à Mr Verhofstadt. Et à defaut, pouvoir vous mettre en
taule. Que peut-on faire? La ligue est sur la brèche. Tout d'abord, elle a posé
une question parlementaire, par l'intermédiaire de Mr Georges Dallemagne. Mr
Verwilghen, ministre de la justice, n'a pas trouvé utile de répondre. Il a
délégué cette tâche à Mr Charles Picqué, ministre de l'économie et de la
recherche scientifique (personellement, je me demande quel est le rapport). Vous
pourrez trouver le texte de cette question
parlementaire ici.
Le commentaire de la Ligue: "cette réponse ne
nous rassure pas du tout, loin de là. Le gouvernement n'a aucunement l'intention de recommander la
modification de la loi, ni pour l'incrimination ni pour l'extension des
possibilités d'écoutes téléphoniques et de recherche proactive." En clair, pas de réponse. Le gouvernement ne compte
absolument pas changer la loi, en aucune manière. Il ne compte pas ajouter quoi
que ce soit qui permette de limiter l'application de cette loi à des crimes
graves. Mr Verhofstadt surfe sur la vague du 11 septembre, comme beaucoup de
gouvernements qui cherchaient comment faire passer des lois liberticides sans
provoquer trop de tollé dans l'opinion publique. La Ligue des Droits de l'Homme a introduit un recours en
annulation devant la cour d'arbitrage. Discriminatoire Cette loi est-elle discriminatoire? Eh bien oui. Toujours
selon la ligue, elle l'est à plusieurs niveaux: Les commentaires de la Ligue Par ailleurs, il est intéressant de noter que le
Ministre lui-même déclare que la nouvelle infraction n'a pas tant pour
objectif de permettre des poursuites que d'assurer les enquêtes et la recherche
d'infractions. L'incrimination se met au service de la procédure. Ce qui nous
amène aux écoutes téléphoniques. Sur la compatibilité avec le droit au respect de
la vie privée de l'extension de la possibilité d'écoutes téléphoniques pour
toute "atteinte au respect des lois", alors que l'article 90ter
prévoyait jusqu'ici une liste limitative d'infractions, le Ministre se contente
de préciser que certaines limitations de la vie privée sont permises, sans
préciser en quoi celle qui nous occupe serait "nécessaire dans une
société démocratique". Enfin, il se retranche derrière le fait que la
mesure devra toujours être ordonnée par un juge d'instruction et seulement si
elle s'avère nécessaire pour l'enquête en cours. Ces deux justifications sont un
peu courtes, sans même parler de l'invocation agaçante des nécessités de la
lutte contre la pédophilie et le terrorisme. Le texte de loi Vous pouvez le trouver ici
en page 61 (Document Acrobat
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