Petite fable grotesque et sinistre by Anne-Marie Roviello (posted by protesta) Wednesday May 29, 2002 at 09:56 PM |
Il était une fois, Mesdames et Messieurs, un gentil petit Dutroux-pervers-isolé. Mis à part quelques enlèvements et viols d'enfants et de jeunes gens, et autres tortures infligées, dans ses moments d'égarement, à l'une ou l'autre dame, il était vraiment très gentil.
Ainsi, un beau jour, il se mit en tête de dépenser beaucoup d'énergie, beaucoup d'argent et de mettre en oeuvre tout son savoir-faire, vraiment extraordinaire pour un modeste petit Dutroux -, pour fabriquer des caches indétectables dans ses caves. Mais pourquoi donc, vous demanderez-vous, dépenser tant de temps et d'argent et de quelle énergie intérieure a-t-il pu tirer une telle connaissance technique pour accomplir cette tâche si titanesque et si sophistiquée? Ses proches lui posant cette question de manière vraiment trop récurrente, Dutroux finit par s'impatienter et il inventa une fable:"C'est pour y cacher des enfants en attendant qu'ils soient envoyés à l'étranger", dit-il à deux ou trois de ses connaissances qui, bien innocemment, le prirent au mot, de même qu'ils le prirent au mot lorsqu'il leur proposa d'enlever des enfants "parce que cela rapportait gros". Mais pourquoi donc inventer de tels contes de fée? Eh bien c'est que dans ce milieu de polycriminalité, il n'est pas de bon ton d'avoir de bons sentiments.
La vérité, voyez-vous, est que Dutroux se tourmentait à l'idée que son ami pervers-très-pervers, un nommé Weinstein, pourrait bien lui faire un jour la surprise impossible de lui apporter des enfants qu'il aurait enlevés sans son consentement Et, voyez un peu la coïncidence, quelques années plus tard, ce pervers-vraiment-très pervers amène à Dutroux, sans même l'avoir prévenu, Julie et Melissa!.
Un sacré sale coup pour Dutroux-l'isolé-vraiment-pas-très pervers qui s'arrache les cheveux: comment faire pour sauver ces enfants des griffes de ce dépravé?
Mais, bon Dieu! oui, il allait presque l'oublier: il y a les caches!. Dutroux-l'isolé-pas-pervers-pour-un-sous y abrite donc les enfants, et, sous le coup d'une indignation bien compréhensible, il sacrifie le pervers-très-pervers car, Mesdames et Messieurs, ce salaud voulait profiter des enfants et cela, Dutroux gentil petit isolé ne pouvait pas le tolérer!
C'est ainsi que Dutroux-l'isolé-grand-protecteur des-enfants offrit à Julie et Melissa logement, nourriture, et protection en attendant qu'elles grandissent pour pouvoir faire partie de la petite famille.
Mais voilà, quelque temps plus tard, Dutroux est emprisonné pour plusieurs mois, oh pour un fait bénin, et, désespéré, il s'arrache à nouveau les cheveux: comment faire pour que les petites continuent d'être nourries correctement? Il charge sa femme de poursuivre l'œuvre de compassion; mais celle-ci trahit sa confiance, elle pourtant si coopérante et si loyale jusque là, et les petites demeureront dans leur cachot sans air et sans lumière, et pratiquement sans nourriture.
Et pourtant, Messieurs et Mesdames, pourtant les deux petites sont arrivées à survivre, avec cette ration de nourriture qui devait suffire pour quelques jours, elles ont tenu très exactement jusqu'au jour précis où, 106 jours plus tard, Dutroux- leur est revenu de la prison pour pouvoir leur donner les derniers soins et recueillir leur dernier soupir. Ce fut, selon ses propres mots, le jour le plus terrible de son existence!
Jugez donc, Mesdames et Messieurs les jurés, jugez donc, à présent que toute la vérité a été faite sur cette très malheureuse affaire, jugez cet homme sur ses actes, et surtout n'oubliez pas de juger en votre âme et conscience!"
Vous trouvez cette fable sinistre?
Telle est pourtant la vérité judiciaire que l'on nous prépare pour le procès Dutroux. On a beau tourner et retourner dans tous les sens les "conclusions" auxquelles ont abouti cinq ans d'enquête menée par le juge d'instruction Langlois, on retombe toujours sur cette fable monstrueusement grotesque, seuls quelques points de détail pouvant varier.