arch/ive/ief (2000 - 2005)

Et si on en faisait encore un peu plus pour l?Afghanistan ?

A la lecture du rapport de mission remis par Bernard Henri Levy au Président de la République et au Premier Ministre sur la reconstruction de l?Afghanistan, les intellectuels français que nous sommes souhaitent d?abord témoigner au premier d?entre eux, au-delà des différends passés, présents ou futurs de la vie intellectuelle, à quel point ils lui sont louables de contribuer, plus qu?aucun autre, et depuis si longtemps, à réconcilier la pensée universelle et l?action politique.

Quels que soient les résultats des élections présidentielles de ces prochaines semaines, nous ne doutons pas que le courage politique du candidat élu sera à la mesure du courage intellectuel - mais aussi physique - de Bernard Henri Levy, accomplissant, en quelques semaines, une tâche immense : poser des fondations pour l?avenir du peuple afghan et au-delà, peut-être, tout l?Orient.

Cet Afghanistan, si lointain, si mystérieux pour beaucoup d?entre-nous, Bernard Henri Levy a su le comprendre mais aussi l?expliquer, le replaçant dans l?histoire héroïque et universelle, celle de la République qui culmine avec l?épopée de la Résistance : il faut être à la fois historien, écrivain, artiste pour accomplir cela, Philosophe des Lumières du XXIème siècle. Dans leur malheur, les Afghans peuvent se réjouir que cet aventurier de la Liberté, courant les " guerres oubliées " et en même temps absorbé par son oevre qu?on tarde pourtant à enseigner dans nos universités, ait pris le temps de s?arrêter : mais, en fait, comment aurait-il pu en être autrement ?

Nous adhérons de toutes nos forces intellectuelles aux propositions de Bernard Henri-Levy pour la reconstruction de l?Afghanistan.

Oui, il nous faut former ces " hussards noirs " de l?Afghanistan qui dans les villages les plus reculés des montagnes éduqueront des enfants qui ne seront plus ni Pachtouns, ni Tadjiks, mais tout simplement Afghans !

Oui, il nous faut créer cette Ecole Nationale d?Administration, cette E.N.A. , à Kaboul, et donner le nom de Massoud à la prochaine promotion de l?E.N.A., à Paris.

Oui, il nous faut créer ces centres internet où chaque femme afghane pourra correspondre avec ses soeurs émancipées de France, et ainsi télé-guidée sur le chemin difficile de la liberté des sexes se préparera peut-être à goûter, après quelques années, aux fruits difficiles de la parité.

Oui, il nous faut fouiller la montagne, pierre par pierre, à la recherche de ce Bouddha couché, Belle au Bois Dormant insouciante aux temps obscurs qui se redressera dans la Lumière sous le baiser des archéologues.

Oui, il nous faut financer l?Institut Massoud sur le modèle des Instituts Charles de Gaulle et François Mitterrand, pour que les générations futures n?oublient pas les grands hommes auxquels elles devront, un jour, de pouvoir voir et revoir Amélie Poulain dans la grande salle de l?Institut Français, le jour et la nuit.

Mais peut-être faut-il aller plus loin, et c?est la proposition que Bernard Henri-Levy, craignant de trop demander, n?a pas osé formuler, nous la confiant, heureux mais harassé, le soir de son retour parmi nous Boulevard St Germain, en nous demandant le secret.

Afin que la culture émancipatrice puisse se développer à Kaboul et au-delà, il faut que les intellectuels afghans puissent eux aussi trouver le réconfort de ces endroits secrets, auxquels, nous autres, intellectuels français, devons tant. Pardonne-nous, cher Bernard, si nous ne sommes pas fidèles à notre parole, en demandant, aujourd?hui, publiquement, que la France construise à l?identique sur un boulevard de Kaboul , le Flore, les Deux Magots, et - pourquoi pas ? - la brasserie Lipp.

Signataires ? ? ? ?

J-M. Colombani, A. Minc, G. Sorman, S. Agacinski, A. Adler, C. Millet, P. Sollers, L. Adler, D. Bensaïd, J. Julliard, F. Giroud, J. Daniel, S. July, E. Plenel ? ? ? ? ? ? ?

http://www.lemonde.fr/article/0,5987,3230--269582-,00.html