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Privatisation : Interview d'un travailleur de Belgacom
by Fico Monday March 25, 2002 at 12:15 AM
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"Pendant 25 ans, j'ai travaillé au service du public et un jour, on m'a demandé de travailler au service de l'argent. C'est une différence majeure pour celui qui est humaniste."

# Monsieur Guy Lemairg, Vous travaillez à Belgacom ?

Oui, depuis 30 ans mais pour l'instant, je suis malade à long terme mais je suis toujours dans les effectifs.

# Comment avez vous perçu le processus de privatisation à Belgacom?

Il y a eût deux éléments majeurs.
Le premier, c'est la fin du service public. C'est à dire beaucoup plus privilégier les nantis, les grosses entreprises par rapport aux "p'tites gens", comme on dit vulgairement, qui n'ont pas étés gagnants avec la RTT, loin s'en faut.
Le deuxième, c'est que les conditions de travail se sont rapidement dégradées et que cela a créé de véritables drames.

# Justement, par rapport aux conditions de travail, comment avez-vous vécut la dégradation de celles-ci?

La dépression nerveuse devenait un quotidien pour grand nombre des travailleurs. Le point culminant a été le suicide d'un de nos collègues qui s'est pendu dans les bureaux de Belgacom. Nous en avons tous été profondément affectés.

# D'autre part, quelles sont les conséquences de la privatisation sur les usagers?

Ils sont devenus des clients et ça, je le regrette car lorsque nous étions à la RTT service public, nous n'avions pas des clients, nous avions des abonnés. Donc des gens à qui nous rendions service . Pour être caricatural, la petite vieille au fond de sa campagne avait la même importance aux yeux de la RTT que les grosses entreprises.
Pendant 25 ans, j'ai travaillé au service du public et un jour, on m'a demandé de travailler au service de l'argent. C'est une différence majeure pour celui qui est humaniste.

# Comment la privatisation a-t-elle atteint les syndicats?

Personnellement, j'ai été président exclu pour avoir dénoncé les maladies et les problèmes liés à la privatisation.
Dans le cadre du secteur Belgacom de la CGSP, il y a eut une collaboration absolue avec la direction de Belgacom dans ses plans de destruction de l'entreprise.
Je pense que les managers de l'entreprise sont intelligents et qu'ils ont bien compris que, finalement en s'achetant - et là je ne parle pas d'argent ce sont des tas de procédés qui sont en vigueur - ,en s'alliant une direction syndicale négligeant totalement la base, de toute évidence, la tranquillité était assurée. Il valait mieux, comme on dit dans mon bon patois, 10 personnes dans sa poche que d'en avoir 200-300 qui posent problème.

# Comment la base syndicale a-t-elle été reniée?

La base syndicale ne représente strictement plus rien au niveau de la direction syndicale.
D'après mon expérience syndicale, je peux vous dire que dés que vous vous opposez à la direction de Belgacom où à celle des syndicats - que ce soit l'un où l'autre ou les deux, car finalement ce sont parfois deux noms pour une même personne - vous êtes exclu, détruit. Moi, en tout cas, j'ai eût ma vie détruite, j'ai même pensé au suicide, j'ai du vendre ma maison à cause des conditions dans lesquelles j'étais amené à vivre.
Cela veut quand même dire que si vous allez à l'encontre de l'entreprise, vous êtes condamné à mort socialement.
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