arch/ive/ief (2000 - 2005)

Jeudi 10 janvier 2002

Pensées multiples

Hugues LEPAIGE

Ecoutez-bien cette phrase, elle vaut son pesant d'audimat: "Celui qui se flatte de donner au public ce que souhaite ce dernier ne fait, le plus souvent, que créer une demande pour la médiocrité, afin de la satisfaire ensuite". Cette réflexion date de 1932, elle concernait la radio et a été prononcée par le premier directeur général de la BBC. Mais elle pourrait parfaitement illustrer le paysage audiovisuel dominant de notre époque, et plus particulièrement la fameuse émission "Star Academy~" dont bruissent tous les médias, ceux de référence ou de service public compris.

"Créer une demande de médiocrité pour la satisfaire ensuite": tout est dans ces mots pour éclairer le mécanisme. Tout est bien d'abord une question d'offre mise au point par une entreprise audiovisuelle. Il y a mille raisons pour expliquer le succès d'une émission érigée en phénomène de société. Il n'y en a aucune pour mégoter le plaisir de ceux qui s'identifient aux héros éphémères de la soi-disant "télé de la réalité".

On peut faire appel aux ressources de la sociologie, de la psychologie comme aux règles du marketing. On peut évoquer la fascination, les vieux rêves ou les plus anciens ressorts de la nature humaine. Mais il ne faut pas être dupes, ni confondre les genres. La télévision a toujours assuré, assumé et accentué le triomphe de l'air du temps. La grande machine du commerce médiatique a mis en œuvre tous ses moyens - et cette fois, ils sont gigantesques - pour assurer le succès de l'entreprise: une des plus importantes chaînes privées européennes + une de plus puissantes multinationales de la musique + une radio privée performante. Sauf maladresse extrême, l'association devait être gagnante en terme de marché médiatique.

La technique du matraquage était poussée au bout de sa logique, elle devait porter ses fruits. La hiérarchie des valeurs du spectacle en est elle-même bouleversée. La force de frappe du marché audiovisuel écrase tout et mélange tout sur son passage. Par ailleurs la duperie voire la supercherie-, est dans l'appellation du genre télévisé lui-même. La "télévision dite de la réalité" est d'abord la télévision du mensonge. Tout est fabriqué, trafiqué, scénarisé pour répondre à des recettes de production bien définies. On peut en goûter les épices ou en vomir le fumet, rien n'est plus étranger à la réalité que les différentes déclinaisons de ce genre audiovisuel. Un genre qui domine aujourd'hui une télévision mondialisée et dont les initiateurs et producteurs ont simplement réinventé la plus banale, parfois la plus sordide et, en tous cas la moins coûteuse des fictions.

Mais comme si cela ne suffisait pas, ce processus est plus profondément imprégné dans notre société que sur l' unique surface médiatique.L'école devient le relai de la création de médiocrité faute de moyens.A qui la faute me direz-vous?
A nos chers élus et aussi à nous même qui laissons faire.
Si nous ne voulons pas assister à la crétinisation de l'humanité, boycottons ces produits de cette société globalisante mise en avant par nos dirigeants qui sont eux-mêmes dirigés par les multinationales.
Il est clair que leur but est de crétiniser les populations pour mieux les manipuler à leurs dépends.
Boycottons ce que notre société fait de pire pour n'en garder que le meilleur.