Meeting des syndicalistes de lutte by Valérie Heuchamps Friday December 14, 2001 at 10:06 PM |
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J'ai ssisté à un meeting syndical où ont parlé des syndicalistes européens de combat (de France,Allemagne, GB, PB, Suisse, Norvège, ...) Ils s'opposent au syndicalisme de concertation. Intéressant après une manif syndicale qui réclamait "plus d'Europe"!(6500 caractères)
700 personnes au meeting des syndicalistes de combat
Après la manifestation syndicale du D13, l'Appel pour la Défense des Services Publics (initiative de Gérard de Sélys, journaliste et délégué syndical à la RTBF) a organisé un meeting avec des syndicalistes européens de combat, au Passage 44. Sept cents personnes y ont assisté, enthousiastes. Il est vrai que leur discours était bien différent des mots d'ordre des dirigeants syndicaux, qui ont fait manifester des dizaines de personnes pour «Plus d'Europe».
Robert Morris (Grande-Bretagne) a expliqué que les monopoles financiers sont toujours obligés de trouver de nouveaux marchés. Mais puisque ceux-ci sont saturés, ces monopoles lorgnent sur les services publics. Pourquoi? Car ce sont de gros employeurs, qu'ils bénéficient d'un budget important et qu'ils ne sont pas encore ouverts à la concurrence. Il a épinglé l'AGCS (l'Accord général sur le Commerce et les Services) et l'OMC comme les forces motrices de ce phénomène.
Elilia Papi (Italie), cofondatrice et dirigeante du syndicat autonome Rappresentanze Syndacali di Base (RdB-réseau de base), a fait le rapprochement entre la Sabena et la compagnie italienne AlItalia, où un «assainissement» provoquera 5.600 licenciements sur 20.000 employés. Elle a également insisté sur la nécessité de «se débarrasser du contrôle de plus en plus répressif des syndicats traditionnels, qui découragent les travailleurs.»
Un délégué français de Lu-Danone a mis en exergue l'absurdité du système capitaliste. Lu Danone est un groupe agro-alimentaire qui a fait 4,7 milliards de bénéfices en 2000, a-t-il expliqué. «Et pour remercier les travailleurs, ils en virent 1800!» Il a ensuite expliqué que les travailleurs de Lu Danone continuent à se battre contre cette injustice.
Lutz Kai Kressin, des Pays-Bas, a attiré l'attention sur le fait qu'énormément de travailleurs bossent dans des PME (petites et moyennes entreprises) et que les syndicats doivent également y être présents, car les CCT (conventions collectives de travail) n'y sont pas respectées.
Johan-Petter Andersen, de Norvège, appartient à la Confédération syndicale des travailleurs du pétrole. Licencié en 99 pour sa combativité, il a gagné son procès et a repris le travail. Il a parlé de la situation particulière de son pays dont la population refuse l'adhésion à l'Union européenne, comme elle l'a montré dans les référendum de 1972 et 1994.
Pierre Steiner, délégué chez Swissair, s'est indigné du fait que la domination du capital financier sur les salariés est telle que les syndicats se retrouvent réduits à négocier les dégâts. Il a expliqué que le monde politique et économique a injecté 4,6 milliards dans la nouvelle compagnie suisse (dont 2,1 milliards pour le privé). Les pouvoirs publics ont donc financé cette compagnie à 60%, mais ils n'ont que 35% de droit de vote dans l'entreprise. Le plan social n'est toujours pas négocié et les salariés ont perdu jusqu'à 35% de leur salaire.
Sabine Pustet, active depuis 1979 dans le syndicat des imprimeurs, qui fait partie actuellement de Ver.di, la centrale fusionnée des services privés et publics, la plus grande centrale d'Allemagne, a été fort applaudie lorsqu'elle a rappelé que la construction européenne (l'union douanière, monétaire, le marché libre, …) était déjà un projet des fascistes et que la forteresse Europe, loin d'être un facteur apaisant, est un baril de poudre et prépare la guerre.
Georges Mavrikos, le dirigeant du PAME, un courant de syndicalisme de classe fondé en 99 et qui entend redynamiser le syndicat traditionnel, s'est opposé à la guerre mais aussi aux mesures antidémocratiques qui sont prises par l'Europe, qui sait pertinemment que les peuples vont se battre contre ses mesures antisociales et antiouvrières. Il s'est prononcé en faveur de la renationalisation des secteurs du transport, de l'énergie, des télécoms, de l'enseignement et de la santé. Il a ensuite expliqué qu'il existe deux lignes syndicales différentes et qu'il faut faire un choix. D'une part, la ligne qui veut l'intégration des syndicalistes dans le système capitaliste, pour qu'ils deviennent co-gérants du système. Mais cette ligne qui prétend que le capitalisme peut avoir un visage humain déçoit les travailleurs et les décourage. Et d'autre part, la ligne du syndicalisme de lutte. Il a terminé par dire que ce n'est pas le capitalisme qui est invincible, mais bien la lutte des peuples, qui doit être coordonnée au-delà des frontières.
Maria Vindevoghel, déléguée CSC à la Sabena, était très attendue. Avec Patrick Wileputte (FGTB), elle a porté plainte contre Sabena et réclame 30 milliards de francs à la société. Ce montant correspond aux sacrifices consentis par les travailleurs sur le plan financier (réductions des salaires), physique et moral. Ils exigent que ces 30 milliards soient utilisés pour relancer la compagnie. Leur plainte a été rejointe par 500 travailleurs. Maria Vindevoghel a expliqué que la faillite de la Sabena est le résultat d'un long processus lancé par l'Union européenne, avec la collaboration du gouvernement belge. Actuellement, les salaires des pilotes réengagés à la DAT ont diminué de 30 à 40%, il n'y a plus de prime de nuit et il y a davantage de flexibilité. 10.000 emplois ont été perdus, dont certains ont été remplacés par des contrats intérimaires et des salaires moindres, comme chez Ryanair. Maria Vindevoghel a insisté sur le fait que pour qu'il n'y ait pas de Sabena bis, il faut exiger aujourd'hui la renatioalisation de la Sabena. Et pour cela exiger que les barrières imposées par l'Union européenne disparaissent.
Enfin, Osiris Ovieda de la Torre, de la Centrale des Travailleurs de Cuba, est venue apporter un message d'espoir aux syndicalistes européens et leur affirmer, comme son petit pays le prouve tous les jours, «qu'un autre monde est possible.»
Gérard de Sélys, organisateur de ce meeting, a conclu en expliquant qu'après avoir donné plus de 900 conférences sur les privatisations un peu partout en Europe, il estimait qu'il fallait maintenant passer à l'offensive, c'est-à-dire ne plus exiger simplement l'arrêt des privatisations, mais exiger et lutter pour la renationalisation. Il a expliqué que la course au profit mène à la répression et à la guerre et que nous ne pouvons plus accepter le dialogue social, ni de défiler par milliers pour une «Europe plus sociale». Il a annoncé qu'en juin 2002 se tiendra une conférence internationale des syndicalistes de lutte à Athènes.