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Les fantômes du Club de Paris
by Jean-Marie Coen Monday December 10, 2001 at 08:07 AM

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Les fantômes du Club de Paris

Quand on parle de la dette du Tiers Monde, un nom
revient souvent: celui du Club de Paris.
Régulièrement, ce groupement des principaux créanciers
du Sud se réunit pour "rééchelonner" la dette de l'un
ou l'autre pays. Pourtant, cet acteur majeur dans la
question de la dette n'a aucune existence légale,
aucun numéro de téléphone, aucun bureau, aucun
secrétariat où s'adresser pour demander des
informations.
Pour des raisons historiques, ce Club se réunit à
Paris dans les locaux du Ministère français des
Finances, à Bercy, et ce uniquement pour le temps de
ses sessions. Celles-ci sont de plus en plus
nombreuses: 30 entre 1956 et le début des années 80,
300 depuis lors. Ces dernières temps une vingtaine de
pays sont auditionnées chaque année. L'activité est
donc en croissance, preuve que le problème de la dette
concerne de plus en plus de pays.

En accord avec le FMI

Apparemment généreuse, l'activité du Club de Paris est
tout sauf philanthropique. Il s'agit d'un club de
financiers dont l'unique objectif est de recouvrer le
maximum de créances possibles. Si donc on rééchelonne
une partie de la dette, c'est parce que ces banquiers
avisés se rendent bien compte que sans ça, ils
n'auraient pas la moindre chance de récupérer ne fut
ce qu'une partie de "leur" argent. Il s'agit de racler
les dernières ressources de pays déjà exsangues, avant
qu'ils ne tombent en faillite complète.
Ce souci uniquement financier se révèle mieux quand on
sait que les allégements de dette consentis par le
Club de Paris sont toujours subordonnés au respect des
Plans d'Ajustement Structurel (P.A.S.) du FMI. De
plus, les remises du Club ne portent que sur la
période concernée par ces P.A.S.
Un autre souci du Club de Paris est d'éviter un front
uni de ses débiteurs. Les rééchelonnements de dette
sont toujours étudiés au cas par cas pour chaque pays.
Les statuts du Club interdisent aux pays du Sud de se
présenter en "front commun" face à leurs créanciers.
Que leurs "recommandations" se traduisent par des
pertes de vies humaines dans le Sud est un aspect des
choses qui ne traverse manifestement pas l'esprit des
membres du Club de paris. Vu ainsi, ce Club apparaît
véritablement comme un instrument de la domination
économique du Nord sur le Sud.

Jean-Marie Coen