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SABENA FLIGHT ACADEMY ou 2001 l'Odyssée privatisée
by antoine hermant Tuesday November 27, 2001 at 10:37 PM
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« SABENA FLIGHT ACADEMY ou 2001, l'Odyssée de l'enseignement privatisé » « La conclusion, c'est que dans cette école privée, ils ne veulent que notre argent, le reste, ils s'en foutent. […] Il faudra se battre contre la privatisation de l'enseignement.» Antoine Hermant pour le conseil des étudiants de la Haute Ecole Paul Henri Spaak (I.S.I.B.)

Xavier (21 ans, 1ère D) et Olivier (20 ans, 1ère D) ont tous les deux choisi de venir à l'ISIB depuis leur discussion dans les rangs du bureau de chômage à Bruxelles.
Dans le cadre de la lutte contre la privatisation de l'enseignement et de l'harmonisation européenne qui la précède, nous les avons interviewés. Ils nous ont expliqué le cauchemar qu'ils ont vécu au sein d'une des premières écoles privatisées de notre pays, la Sabena Flight Academy (SFA).

Quand est–tu entré à la SFA ?

« Je suis rentré il y a deux ans et j'ai passé l'examen en octobre l'année passée. Le premier jour, on nous a fait signer un papier sur lequel on s'engageait à ne pas attaquer l'école en justice… Ca commençait bien ! »
Comment se déroulaient les cours ?
« Pendant les ‘cours', il n'y avait pas d'horaire fixe. Par exemple, pour le cours d' ‘Opération', pendant 3 heures, le professeur nous a annoncé, en gros, ce qui se trouvait dans le syllabus qu'on allait recevoir. Il a donc décidé de ne plus donner le reste des heures de cours. »

Combien a coûté cette petite expédition dans l'enseignement privé ?

« Dans cette école, il y a ni aide de l'État ni de bourse. Pour rentrer, on doit passer différents examens (15 000frs). Le minerval à débourser est de 250 000frs, uniquement pour les cours théoriques. Sans compter les déplacements, le kot, etc. En tout, pour la première année, ça m'a coûté plus de 350 000frs.
Au départ, l'école annonce qu'il faudra payer 2 700 000frs pour la formation totale. Mais ils ne comptent pas, les faux frais. Il faut déjà compter 100 000frs pour la voiture vu que les transports publics sont peu développés aux Etats-Unis, là où les pilotes ont leur formation pratique. En plus, entre l'examen théorique et l'examen pratique, les parents n'ont plus droit aux allocations familiales.

Quel rôle a joué l'harmonisation européenne dans ce que tu as vécu ?

« Tous les questionnaires sont à choix multiples et la correction est de plus en plus automatisée. Sur 170 personnes de la Sabena Flight Academy qui ont tenté l'examen pratique seuls 11 étudiants ont réussi en première session ! Les cours et questionnaires européens sont très différents d'avant. Les questions ne reflètent pas du tout la connaissance de la matière. C'est uniquement du par cœur. Par exemple, il n'y avait aucune question sur le fonctionnement des moteurs ! Imaginez-vous un pilote aurait pu réussir sans rien connaître du fonctionnement des moteurs !

Les étudiants n'ont-ils pas réagit face à de telles injustices ?

« Pendant l'année, suite à tous ce qui s'était déjà passé, il y a eu une grande révolte dans l'école. Les étudiants ont tous décidé de réagir. Certains professeurs ont décidé de ne plus donner cours dans ces conditions. Le directeur a été obligé de faire une séance d'information. Au lieu d'apaiser nos craintes, il nous a imposé de passer le nouvel examen européen pour des raisons de marketing, pour la publicité pour l'école. »

Qu'est-ce que vous retirez de cette expérience ?

« Je peux parler à l'aise parce que j'ai réussi les derniers examens qu'il me restait à passer. La conclusion, c'est que dans cette école privée, ils ne veulent que notre argent, le reste, ils s'en foutent. Les étudiants qui participent à ces cours ne font pas partie du même monde que nous. Ce n'est pas du tout la même population que dans les autres écoles où l'enseignement est plus abordable. Certains étudiants n'avaient aucun problème d'argent… Ce sont les seuls qui peuvent continuer aujourd'hui. Cet enseignement est très dangereux, très clairement élitiste. J'ai des copains qui continuent, mais moi pas. Je n'ai plus d'argent, je suis obligé d'arrêter. Je viens de Schaarbeek, ça fait trois ans que mes parents ne sont plus partis en vacances pour payer mes études.
Quant on voit la situation de l'éducation dans le monde, où les habitants de la plupart des pays n'ont pas accès à l'enseignement, on voit qu'il faut se battre contre la privatisation de l'enseignement. Il faut que les étudiants sachent que si l'État n'intervient plus dans les écoles supérieures, la majorité d'entre-nous, ne pourrons plus faire d'étude. »