Clabecq : mobilisation contre le procès sans fin. by red kitten Monday October 01, 2001 at 05:43 PM |
ladyredkitten@hotmail.com |
Le procès de " Ceux de Clabecq " reprennait, pour la troisième fois, ce matin. C'était la 36ème audience d'un procès interminable contre 13 militants, principalement des délégués syndicaux des Forges de Clabecq. Plus de 200 personnes ont, une fois encore, marqué leur soutien aux accusés.
AMBIANCE AU PETIT MATIN.
Lundi 1er octobre 2001, 8 :45, devant l'imposant Palais de Justice de Bruxelles. Une trentaine de supporters de ceux que l'on appelle désormait " Ceux de Clabecq " discutent sous l'œil des gendarmes. Sur les marches, on remarque surtout les militants pour les droits des animaux qui sont venus pour le " procès des abattoirs d'Anderlecht ". Mais bien vite, les premiers arrivés sont rejoints par des dizaines d'autres, avec drapeaux rouges et verts, casquettes aux couleurs syndicales, et la chorale ! On chante, accompagné à l'accordéon, guitare et jembé, la chanson " Ceux de Calbecq ", bien sûr, puis " Hasta Siempre ", et une kirielle de chants engagés italiens.
LA LUTTE SYNDICALE
Vers 10 :00, Roberto D'Orazio, figure bien connue de la délégation syndicale des Forges, sort du tribunal, et du haut des escaliers monumentaux où se sont rassemblés les supporters, improvise un discours, histoire d'expliquer la situation. D'abord il dénonce ce procès comme un veritable harcelement, moral , mais aussi financier : plus de 2 millions ont déjà du être dépensés pour organiser leur défense, ils ont dû se rendre à 36 audiences. C'est clair ont cherche à les avoir à l'usure. Il revient évidemment sur l'exclusion du syndicats des délégués des Forges, en commençant par une note d'humour : " Aujourd'hui nous n'irons pas à la FGTB " (le public désaprouve en riant). Pour rappel, il y a presque un an, les supporters des Ceux de Calbecq, avait occupé les locaux de la FGTB après l'audience au tribunal. Roberto explique que s'ils ont été exclus c'est parce que pour eux, la luttes syndicale signifie autre chose que de négocier le montant des primes de départs quand les patrons licencient. Et de s'inquiéter du rôle de la " justice, non ce n'est pas le bon mot, de l'appareil judiciaire " dans les conflits sociaux, comme ça a été le cas pour les pilotes de la Sabena à qui l'on a interdit de faire grève ! Plus inquiétant encore, poursuit-il, c'est l 'attitude du syndicat face à cela, la même attitude que lors des fermetures de Renault Vilvorde, Bombardier ou la fermeture prochaine des Forges de Clabecq, que l'on est en train de démonter, avec un consensus au niveau de la direction syndicale. " Et que l'on ne m'accuse pas d'anti-syndicalisme ! Si vous voulez voir des anti-syndicalistes, faudra aller à la rue Haute, à la FGTB, ils ont leurs bureaux là-bas ! "
RESTONS UNIS!
Autre point important de son " speech ", il appelle à resserer les rangs. Il y a aurait des différents avec certaines organisations progressistes, mais il ne faut pas s'attarder sur ces différences, ce qui est en question ici, ce n'est pas la condamnation des " 13 ", mais bien de la liberté syndicale, mise à mal par l'article 66 .4 (adopté en 1886, après les " émeutes de la faim "). Et ce n'est pas la liberté d'être membre d'un syndicat qui est menacée, mais celle de pouvoir s'exprimer dans un syndicat. Il déclare qu'il y a eu des malentendus, qu'il n'a pas toujours été bien compris, qu'il ne s'est pas toujours bien exprimer, et qu'il a fait des erreurs aussi. " J'ai dis un jours que la mondialisation, j'en avais rien à foutre ? Je rectifie, ça m'intéresse, et je suis contre ! ". Et de conclure en rappelant qu'ils n'avaient plus de moyens, mais qu'ils appellaient tout ceux présents à continuer à mobiliser, à rejoindre le MRS (Mouvement du Renouveau Syndical) et que seule la présence permanante de militants et supporters lors de chacun de leurs procès avait permis de faire face jusqu'à aujourd'hui.
LE PROCES QUI N'EN FINI PAS...
Quand au procès même, ça n'avance tellement pas que ça donne l'impression de reculer. Flash back: les poursuites contre les "13" militants commencent en juillet 1998 et sont relatives au conflit social de 1996-1997, qui se conclu avec la réouverture des Forges, mais l'exclusions de tous les travailleurs engagés dans le mouvement syndical, puis l'exclusion des délégués. A l'automne 1998, le procès commence, dès le début taché d'irrégularités. Ce procès sera finalement arrêté, à cause de vice de procédure. La gendarmerie, partie civile, n'en démord pas et veux la tête des hommes qui leur ont tenu tête plus d'une fois, ces "dangereux terroristes, ces mafiosi" qui réclament ni plus ni moins que "les richesses produites par les travailleurs reviennent au travailleurs"! Un deuxième procès est engagé, avec le même succès que le premier, le tribunal finissant par ce déclarer incompétant (si c'est eux qui le disent...). Aujourd'hui c'est le troisième qui commence, autrement dit on en est toujours au point zéro... si ce n'est les 2 millions de francs que les accusés ont du dépensé, l'impossibilité pour eux de retrouver du travail dans de telles conditions, et 32 séances du procès qui ont mobilisés plusieurs milliers de personnes...
...ET QUI CONTINUE
Aujourd'hui était donc le premier jour d'un nouveau procès, comment celui-ci s'annonce-t-il? Les accusés ont demandés un report pour une durée inderminée ("sine die", pour les latinistes), jusqu'à la conclusion du procès qu'ils ont engagé contre l'état belge, pour récupérer l'argent dépensé lors des deux premiers procès (lesquels ont dû être abandonnés à cause des fautes de l'appareil judiciaire). La court rendra ça décision sur ce point ce mercredi 3 octobre. Mais on annonce déjà une prochaine séance pour le 17 décembre, juste après le Sommet Européen de Laeken "parce que la police sera surchargée d'ici là". Coïncidence ou pas, les vacances des magistrats commenceraient le lendemain, le 18 décembre, ce qui signifirait que le procès recommencerait à trainer lamentablement... Mais de nombreuses personnes suggéraient aussi que les nombreuses personnes venues manifester les 13, 14, 15 décembre pourraient peut-être prolonger leur séjour, histoire d'être là en masse à la reprise du procès...
Toujours est-il que ce procès tire vraiment en longueur, et, étant donné que la Charte Universelle des Droits de l'Homme stipule que chacun a droit à un procès dans un délai raisonnable, l'affaire pourrait être portée devant la Cour de Justice de Strasbourg. reste que même si celle-ci donnait raison à "ceux de Clabecq", celà ne signifierait pas nécessairement l'arrêt du procès pour la justice belge...
Ce qui est sûr, par contre, c'est que aussi longtemps que durera le procès il y aura toujours une foule qui viendra soutenir les accusés, et par là même défendre les droits syndicaux et démocratiques.