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Plainte de la LDH contre l'expulsion collective des Roms: RECEVABLE pour la CEDH
by Sylvie Lemaire Wednesday March 21, 2001 at 05:51 PM

La Cour européenne des Droits de l'Homme statue : La plainte introduite par la Ligue des droits de l'Homme contre l'expulsion collective de Tsiganes, en octobre 1999, a été déclarée recevable.

COMMUNIQUE DE PRESSE
Mercredi 21 mars 2001

Le 5 octobre 1999, plusieurs dizaines de Tsiganes sont renvoyés collectivement.
Beaucoup a déjà été dit sur cette scandaleuse opération planifiée et acceptée par l’ensemble des membres du gouvernement.
Cette expulsion s’est déroulée sur base d’un stratagème indigne dont les pièges ont été facile à déjouer.

En effet, comment ne pas s’inquiéter lorsqu’on remarque le moment précis où cette expulsion a été montée, à savoir, juste avant le début de l'opération de régularisation (si la régularité de celle-ci n'avait pas été contestée par le Conseil d'Etat).

La coïncidence est pour le moins troublante mais le résultat dévastateur. Quel étranger en séjour illégal aurait encore osé se présenter au guichet d'une
commune pour demander son formulaire de régularisation après la sinistre comédie dont les Tsiganes avaient été les victimes ? Comment, en confiance, se dévoiler
après cela ? Si l'objectif était de décourager, de faire peur aux éventuels candidats à la procédure de régularisation du gouvernement arc-en-ciel, il aura
sans aucun doute été atteint.

Suite au recours introduit par la famille Conka et la Ligue belge francophone des droits de l'Homme, la Cour européenne des droits de l'Homme s'est prononcée, ce 13 mars, sur la recevabilité des requêtes introduites

Pour la Ligue des droits de l'Homme, tant que la Cour européenne des droits de l'Homme ne se sera pas prononcée sur la conformité de ces expulsions collectives
avec l'article 4 du Protocole 4 additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, le gouvernement belge doit impérativement arrêter ces opérations répétées d'expulsion
collective. Il s'agit d'une obligation minimale de précaution que devrait, à tout le moins, respecter un gouvernement

Pour l'instant, la Ligue des droits de l'Homme est obligée de constater que certains demandeurs d'asile, en fonction de leur nationalité et uniquement parce qu'ils sont supposés être arrivés en Belgique à l'aide d'une filière, font l'objet d'une procédure d'examen de reconnaissance de leur qualité de réfugié pour le moins expéditive.

Ainsi, tant les demandeurs d'asile originaires du Kazakhstan que de Géorgie ne sont même plus actuellement entendus au Commissariat général aux réfugiés et aux
apatrides, instance qui se contente de trancher sur dossier, au mépris du principe du contradictoire. L'objectif des résultats chiffrés (la diminution du
nombre de demandes d'asile) prend le pas sur toute autre considération, en ce compris le respect des droits du demandeur d'asile. Il s'agit là sans doute d'une redoutable préfiguration de la future procédure d'asile qui multiplie les hypothèses de procédure accélérée.

Il appartiendra précisément à la Cour européenne des droits de l'Homme de se prononcer sur le caractère effectif du recours au Conseil d'Etat (en soi non suspensif) et devant la Chambre du Conseil quant à la légalité de la détention
avant expulsion.

Si elle devait arriver à la conclusion logique, pour la Ligue des droits de l'Homme, que ces recours ne sont pas effectifs, qu'ils ne garantissent en rien les droits des demandeurs d'asile, c'est toute la réforme de la procédure
d'asile projetée par le Gouvernement qui en serait affectée.

Pour conclure, en soutenant la famille Conka, la volonté de la Ligue des droits de l'Homme est d'arriver à sortir d'une logique de défiance perpétuelle qui guide nos administrations et juridictions compétentes.

Trop souvent, malheureusement, l'arrivée d'étrangers sur notre territoire est présentée uniquement sous l'angle de la criminalisation ou de la sanction, avec toutes les dérives que cela suppose.
Les Tsiganes, Kazakhs et d'autres en sont les exemples vivants.

A nos yeux, dans sa politique actuelle comme dans ses projets de réforme, le gouvernement belge oublie qu'une procédure d'asile est une procédure faite pour des réfugiés et non pour les autorités du pays d'origine.
En conséquence, c'est au travers du prisme de leurs droits, qu'il faut que cette politique soit construite.


Sylvie Lemaire
Chargée de communication
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