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Congo: projet de société CPP et parti kabiliste
by Ludo Martens Tuesday March 06, 2001 at 02:52 PM

Quelques jours après l¹assassinat du camarade Kabila, une discussion a été entamée dans les milieux kabilistes sur l¹avenir du projet stratégique du Président défunt, les Comités du Pouvoir Populaire.

Défendre le projet de société CPP
et créer le Parti révolutionnaire kabiliste

Ludo Martens, Kinshasa 24 février 2001

Quelques jours après l¹assassinat du camarade Kabila, une discussion a été entamée dans les milieux kabilistes sur l¹avenir du projet stratégique du Président défunt, les Comités du Pouvoir Populaire.
Des personnes proches du camarade Kabila ont développé l¹idée suivante : « Sous la pression des puissances occidentales, nous serons obligés d¹accepter la libéralisation des anciens partis néocoloniaux. Avec la démocratie bourgeoise classique qui reviendra en force, les CPP n¹ont plus d¹avenir. Les CPP devront se transformer en parti politique pour survivre et pour pérenniser les idées de Mzee Laurent-Désiré Kabila. »
D¹autres, partant de leur expérience avec les petits projets lancés par les CPP dans les quartiers et communes, ont également exprimé l¹opinion que l¹existence des CPP prendra fin avec la « normalisation » de la vie politique et ils en ont conclu que les CPP devront se transformer en Mouvement pour le Développement communautaire.
Nous estimons que ces deux propositions ne correspondent pas aux idées de Kabila. Elles partent d¹une conception fausse de ce qu¹est la fonction essentielle des Comités du Pouvoir Populaire, d¹une vision unilatérale sur le développement du pays et d¹une idée erronée sur les rapports entre les CPP et les partis.
En plus elles procèdent d¹une conception défaitiste qui s¹aveugle devant la puissance de l¹Occident et qui ne mesure pas la profondeur de la mobilisation populaire pour défendre l¹héritage de Kabila.
A la base et parmi les cadres des CPP de nombreuses voix se sont levées pour exiger un Congrès extraordinaire qui réaffirmera les idées que Kabila a développé sur son projet de société, les Comités du Pouvoir Populaire. Kabila est mort, mais ses idées nationalistes et révolutionnaires continuent à vivre dans les CPP. Un Congrès extraordinaire mettra fin à la confusion dont profitent ceux qui veulent achever l¹assassinat de Kabila en enterrant son idéal et ses idées.  

1. Le choix fondamental : un état répressif au service de l¹étranger

ou un état nationaliste et populaire ?

Le Pouvoir Populaire est l¹initiative stratégique du Président Kabila, le porteur de son projet de société nationaliste, démocratique et populaire.
Dans toute révolution, la question centrale est celle de la nature de l¹Etat. La tâche essentielle attribuée par le Président Kabila aux CPP, est de régler définitivement la question de l¹Etat colonial et néocolonial.
Le Président Kabila a souligné qui depuis 1885, depuis l¹époque de Léopold II, le peuple congolais a subi la répression et la terreur d¹un Etat dictatorial au service des intérêts étrangers. Après l¹indépendance formelle de 1960, l¹ancien Etat continua à fonctionner et à exercer la dictature contre toutes les forces populaires qui exigeaient un changement fondamental. Les anciens colons blancs à la tête de l¹Etat colonial ont simplement été remplacés par des collabos noirs ¦uvrant pour les puissances étrangères. Mzee Laurent-Désiré Kabila disait que l¹appareil d¹Etat néocolonial est resté au service des intérêts occidentaux par l¹intermédiaire d¹une minorité de grands bourgeois congolais.
Kabila affirmait ceci : « A un moment, Léopold II avait son Etat du Congo pour chercher le caoutchouc. Si vous l¹alliez pas en chercher, on vous amputait, vous deveniez manchot. La chicote était quotidienne. Ils ont pillé et pillé ! Ils sont partis et nous avons eu droit à un autre Etat, celui-là avec des Congolais à la tête, mais ils étaient des agents d¹autres puissances. Sa mission était de réprimer, toujours, partout. Š L¹Etat mobutiste avait une seule mission : faire primer les intérêts des grands pays sur l¹intérêt national. Le caractère répressif de cet Etat était nécessaire pour permettre aux intérêts étrangers de prospérer. »
Ainsi, Kabila explique très clairement que depuis Léopold II jusqu'à Kasavubu, Adoula, Tshombe et Mobutu, le peuple travailleur congolais a été opprimé par un appareil d¹état dictatorial construit pour servir les intérêts des puissances impérialistes.

La mission historique des CPP

La vocation historique des CPP est de créer un nouveau type d¹Etat démocratique et populaire, construit à partir de la base, de la rue, du quartier, de la commune, du village jusqu¹à la province et le niveau national. Le nouvel Etat doit s¹opposer à toute domination impérialiste et à toutes les forces congolaises au service de ces intérêts étrangers.
Le nouvel Etat de Démocratie Populaire devra être contrôlé en permanence par le peuple pour assurer qu¹il reste effectivement à son service. Il s¹agit d¹instaurer des mécanismes qui empêchent que les fonctionnaires et mandataires du nouvel Etat rétablissent les habitudes de l¹Etat néocolonial, ses rapports répressifs avec le peuple et ses rapports de subordination aux intérêts économiques étrangers.
Les CPP doivent donc veiller à la permanence de la révolution populaire pour que le peuple congolais gouverne réellement et progresse constamment vers sa libération totale dans les domaines politiques, économiques et culturels.  
Seul cet Etat contrôlé et dirigé par les masses populaires pourra assurer la reconstruction du pays de façon indépendante et dans l¹intérêt exclusif des 55 millions de Congolais. Seul un Etat de Pouvoir Populaire pourra construire cette économie nationale indépendante et puissante, cette industrie et cette agriculture planifiées dans l¹intérêt des ouvriers, paysans, travailleur et intellectuels dont rêvait le Président Kabila.  
Un Etat de Pouvoir Populaire est aussi nécessaire pour assurer que les rapports de coopérations, souhaités avec tous les pays du monde, soient basés sur les principes de la stricte égalité, de la non-ingérence et de l¹avantage mutuel.

Une rupture radicale avec l¹état compradore au service de l¹étranger

Kabila a expliqué que la victoire du 17 mai 1997 et l¹organisation des Comités du Pouvoir Populaire doivent être vues comme une rupture radicale avec l¹Etat existant auparavant.
Si après le 17 mai 97 on se serait limité à placer un nouveau personnel politique à la tête de l¹état répressif et anti-populaire qui en place depuis 75 ans, il ne pouvait y avoir de changement fondamental.
Kabila a souligné qu¹il fallait liquider l¹Etat néocolonial pour commencer l¹édification d¹un nouvel Etat nationaliste ou les masses gouvernent. « La liquidation politique du néocolonialisme mobutiste fut une étape obligatoire qui a permis aux masses d¹accéder aujourd¹hui à la tête des affaires publiques ».
Le 17 mai 1997, l¹Occident était prêt à soutenir Kabila, à condition qu¹il maintenait justement l¹ancien appareil d¹Etat.  Kabila a refusé catégoriquement et il a dit : « Nous avons refusé d¹être un autre gouvernement d¹un Etat compradore au service de puissances étrangères.» « Il fallait faire un choix. Ou bien, apeuré, se ranger et jouer le même rôle que l¹Etat précédent ». « Ou bien résister et créer un Etat qui privilège les intérêts nationaux. » Le choix était donc clair : les nationalistes pouvaient, par peur ou par intérêt, accepter d¹entrer dans l¹ancien appareil d¹Etat et le faire fonctionner comme auparavant, c¹est-à-dire dans l¹intérêt des plus riches et des étrangers ­ ou bien ils pouvaient se mettre à l¹¦uvre pour créer un nouvel appareil d¹Etat nationaliste aux service des masses populaires.
Les révolutionnaires congolais veulent créer un nouvel Etat radicalement différent de l¹Etat que le peuple a subi dans le passé. « Nous venons de prendre le pouvoir pour créer un Etat du peuple, et nous disons qu¹il faut confier le pouvoir au peuple. »
Mais comment créer un Etat du Peuple en rupture radicale avec l¹Etat répressif au service des puissances impérialistes ? « Pour que le peuple gouverne, il faut organiser le peuple et celui-ci s¹organise dans les Comités du Pouvoir Populaire qui sont indispensables à la vie de la nation. Š Les Comités du Pouvoir Populaire ont un grand avenir dans ce pays. Le peuple congolais a longtemps travaillé pour les intérêts étrangers. Il est temps qu¹il travaille pour ses propres intérêts.»

La démocratie des riches ou la démocratie des masses populaires

La nature de l¹Etat conditionne la nature de la démocratie. En effet, chaque classe sociale qui veut imposer ses règles à l¹ensemble de la société, développe une conception particulière de la « démocratie ».
La grande bourgeoise en général et l¹impérialisme en particulier ont un intérêt vital à présenter le système qui défend leurs intérêts égoïstes, comme étant « la véritable démocratie issue d¹élections libres et transparentes ». Quand ces gens parlent à longueur de journées de « la démocratie » et de « l¹Etat de droit », ils font, en réalité, référence à la démocratie bourgeoise et à l¹Etat de droit bourgeois. Or, dans une société ou les grands capitalistes dominent toute l¹économie, tous les moyens de communication, les échelons supérieurs de l¹administration, etc. nous nous trouvons en face, non pas de «la » démocratie, mais à une forme spécifique de démocratie, à la démocratie bourgeoisie.
Dans la démocratie bourgeoise, le peuple est appelé à voter et à faire son choixŠ entre plusieurs partis qui défendent tous le même maître : l¹impérialisme et la grande bourgeoisie locale. Que vous votez pour les partis au pouvoir ou pour ceux de l¹opposition, les deux camps se montrent soumis à l¹impérialisme et ils sont contrôlés par la grande bourgeoisie locale ou encore par des forces de la petite bourgeoisie alliées à la bourgeoisie pro-impérialiste.
En régime capitaliste, faire fonctionner un parti coûte beaucoup d¹argent et mener une campagne électorale aussi. En général, en Afrique, seuls les partis qui reçoivent beaucoup de fonds des puissances impérialistes et de la grande bourgeoisie locale sont en mesure de fonctionner régulièrement et de s¹imposer lors des élections qui sont très coûteuses.
L¹issue des élections est déterminée par l¹argent, par la propagande des radios étrangères, par le soutien des différentes organisations religieuses et sociales liées aux puissances étrangères.
La démocratie bourgeoise est une démocratie pour les riches et les puissants, qui implique pour les travailleurs et les pauvres : oppression, discrimination et exclusion, bref dictature dans les domaines essentiels de la vie pour les travailleurs et les pauvres. La démocratie parlementaire à l¹Occidental que le Congo a connu de 1961 à 1965 et de 1990 à 1997, c¹est en fait une illusion de démocratie. Le peuple n¹a rien à dire sur les questions qui décident du sort de la nation, toutes les décisions étaient prises à Bruxelles, Washington et Paris  ou dans le cercle étroit des puissants qui régnaient le Congo.
Le démocratie des Comités du Pouvoir Populaire est radicalement différente

Selon Kabila, une véritable démocratie à la portée des masses n¹est réalisable qu¹avec un pouvoir CPP. « Les CPP, mes chers compatriotes, constituent une démocratie nouvelle. » « C¹est avec les Comités du Pouvoir Populaire que la possibilité matérielle de la démocratie va se réaliser ». « Le CPP, c¹est le peuple organisé et structuré, c¹est un grand rassemblement de tous les Congolais patriotiques et conscients, poursuivant un seul but : être les maîtres indiscutables de leur destin. Vous n¹avez pas de maîtres. Le peuple est seul maître. »
Les élections du type CPP sont moins coûteuse à organiser que les élections de type parlementaire classique dont le coût monte à 250 millions de dollars.
Lors des élections CPP, les qualités et les réalisations des candidats pèsent plus lourd dans la balance que les moyens financiers dont disposent leurs partis.
Les élections de type CPP sont moins faciles à influencer et à manipuler par les puissances occidentales via leurs radios et via le financement de leurs partis favoris.
L¹ancienne démocratie parlementaire était un instrument au service des intérêts étrangers et des couches congolaises les plus riches liées à l¹Occident. Mais la nouvelle démocratie CPP est au service des intérêts nationaux et des masses populaires.
La démocratie parlementaire permet aux puissances extérieures et à la grande bourgeoisie locale de tromper et de manipuler les masses qui sont maintenu dans l¹ignorance des affaires de l¹Etat, dans la passivité, dans l¹exclusion. Mais la démocratie populaire, qu¹on appelle parfois démocratie gouvernante ou démocratie directe, est basée sur la conscientisation et la participation active des masses, elle entraîne les masses pour qu¹elles « surveillent » et contrôlent les élus en permanence.


2.
Achever l¹édifice des CPP

pour créer une économie nationale puissante

Le Président Kabila a entamé avec l¹organisation des Comités du Pouvoir Populaire, un bouleversement total des anciennes structures étatiques datant de la période coloniale et néocoloniale. Il savait qu¹il s¹agissait d¹une ¦uvre de longue haleine. Il a juste eu le temps de jeter les fondement de l¹édifice CPP.
A sa mort tragique, les CPP n¹en étaient qu¹à leurs premières expériences et les animateurs des CPP devaient encore passer, comme le dit le Président, par un processus de mûrissement politique.
C¹est ce qui explique les hésitations et l'attentisme qu¹on a pu constater chez plusieurs animateurs des CPP depuis la mort de l¹initiateur du Pouvoir Populaire.
Ils craignent la « normalisation », le retour aux pratiques étatiques de la période néocoloniale.
Et pourtant, le Président défunt, voyant très loin, avait déjà anticipé sur les doutes et reculades de ces camarades. Il a dit : « Le pouvoir d¹Etat, le pouvoir politique, c¹est l¹instrument capital qui détermine le destin des peuples. C¹est ici que la question de la conscientisation devient vitale. Š Vous n¹avez pas de longue expérience parce qu¹on ne vous a jamais donné la chance de gouverner votre propre destin. A cause de la maturation politique médiocre, on est capable de livrer son pouvoir à des charlatans. Lorsqu¹on parle de conscience politique des masses, c¹est pour que vous soyez moralement en état d¹alerte. Ceux qui ont perdu le pouvoir vous en feront voir : intrigues, artifices, tactiques. Eh bien ! Il faut mûrir politiquement. »
Kabila souligne ici que les personnes qui ne sont pas politiquement mûrs, ne comprennent pas l¹antagonisme entre la vieille « démocratie » des partis néocoloniaux et la démocratie populaire des CPP. Quand on a saisi la nature différente de ces deux régimes politiques, on défendra par tous les moyens le Pouvoir Populaire, on n'acceptera de laisser démanteler son pouvoir au profit de « charlatans politiques » qui veulent rétablir l¹ancien système.
« La lutte est encore âpre. On doit entreprendre sa propre transformation, sinon on est dépassé par les événements. On ne doit pas faire barrière à une révolution dont les finalités sont connues. » Après la mort du Président, les événements se précipitent, de l¹extérieur et de l¹intérieur des CPP se lèvent des voix pour en finir avec la Démocratie populaire. Les membres et cadres doivent « entreprendre leur propre transformation », ils doivent se former politiquement en tant que révolutionnaires pour faire front aux attaques et pour défendre le projet de société nationaliste et révolutionnaire.

Un Etat congolais de Pouvoir Populaire

Les Comités du Pouvoir Populaire n¹en sont qu¹à leur début à l¹échelle provinciale. Leurs expériences sont encore limitées. Cela explique pourquoi toute sorte d¹interprétations unilatérales ont été exprimées.
Certains camarades croient que les CPP servent essentiellement à impulser le développement local. D¹autres estiment que les CPP constituent le pouvoir au niveau de la rue, du quartier et de la commune tandis que les partis politiques interviendront lorsqu¹il s¹agit de déterminer la politique nationale.
A relire les discours du camarade Kabila sur les CPP, on se rend compte que ce ne sont pas les positions du Président. En réalité, Mzee Laurent-Désiré Kabila a indiqué que l¹action décisif du Pouvoir Populaire se situe au niveau national, et non pas au niveau local. Voici le passage clé de son discours du 21 janvier 1999. « Dans le passé, l¹Etat compradore a même empêché l¹éclosion de capitalistes nationaux. Il l¹a empêché, parce qu¹un capitalisme national allait faire concurrence aux monopoles (étrangers). C¹est pour cela que nous nous trouvons sans industries. Š Nous devons créer une nouvelle économie pour notre pays. C¹est l¹objectif de l¹Etat populaire. Moi, je voudrais voir ici de grandes usines de textile. Le moment est venu pour construire une économie nationale florissante. Les véhicules, nous devons les fabriquer nous-mêmes. Où est notre industrie lourde ? C¹est la mission de l¹Etat du peuple, la mission de ce peuple organisé en Comités du Pouvoir Populaire, de créer une forte économie pour nous faire respecter. Donc, nous avons la mission de créer une économie nationale. Vous voulez avoir des chars de combats, des blindés ? Mais nous pouvons les produire nous-mêmes. Quand nous avons pris le pouvoir, c¹était pour faire cela.»
Kabila estimait que l¹édification des CPP au niveau local servait à apprendre au peuple de se prendre en charge. Mais cet apprentissage devait finalement conduire à l¹organisation de l¹Etat du peuple, de l¹Etat du Pouvoir Populaire au niveau national.
Il avait donc encore un long travail à entreprendre. Ce travail tombe maintenant sur les épaules des nationalistes qui ont compris toute la profondeur des idées de Kabila. Le temps n¹est pas aux hésitations et reculades, mais au combat pour achever l¹¦uvre initié par le Président défunt.
L¹édifice des CPP ne sera achevé qu¹au moment où les élections démocratiques auront couvert tous les échelons de l¹Etat et tout le territoire national. Kabila a dit : « Les CPP sont le peuple organisé en organes du pouvoir d¹Etat  populaire et exercent directement la gestion de la chose publique à chaque échelon de l¹Etat. Š Les CPP, c¹est toute une chaîne, de bas en haut. »
Le système des CPP passe des élections dans la rue à l¹élection des responsables du quartier par les élus des rues. Les élus des quartiers sélectionnent ceux gouverneront la commune, les élus des communes décident de la composition de l¹Assemblée provinciale qui choisit à son tour le gouvernement provincial. Le niveau provincial déléguera ses élus à l¹Assemblée Nationale du Pouvoir Populaire. C¹est cet Assemblée qui contrôlera le « gouvernement CPP ».
Certaines modalités devront sans doute encore être mises à point, mais le cheminement de la base au niveau national est clair.
Une fois que tout l¹édifice est en place, de la base au sommet, le niveau national deviendra décisif. C¹est là que seront pris les décisions pour « créer une économie nationale forte pour faire respecter le Congo ».
Achever l¹édifice de l¹Etat du Peuple signifie également doter le Congo d¹une Constitution de démocratie populaire, d¹une Constitution qui consacrera les Comités du Pouvoir Populaire comme l¹organisation démocratique de l¹Etat la plus appropriée à la situation du Congo. Lors d¹un référendum constitutionnel, le peuple pourra décider quel type d¹état il veut édifier.

Une économie nationale indépendante et forte

Cette position de Mzee Laurent-Désiré Kabila sur la nécessité de créer une économie nationale indépendante et forte, mérite d¹être doublement souligné dans le contexte actuel. Certains qui ont lu le mot « libéralisation économique» dans le discours du Président Joseph Kabila, s¹apprêtent déjà à rejeter tout l¹héritage de Mzee ! On peut et on doit « libéraliser » quelques domaines bien précis de l¹économie, comme celui de la circulation des dollars. Mais cela ne signifie pas qu¹il faut foncer tête baissée vers le libéralisme, qui n¹est qu¹un autre mot pour la récolonisation.
L.D. Kabila a compris que sans un Etat fort et sans une économie nationale forte, il ne peut pas y avoir d¹indépendance économique. Un pays économiquement dépendant de l¹impérialisme voit nécessairement son indépendance politique réduite à une pure formalité. De son vivant, Kabila disait que le Congo n¹était pas encore décolonisé dans le domaine économique. « Vous voulez créer une nouvelle société complètement soustraite aux affres de l¹exploitation ? Le pouvoir économique, mes amis, reste encore à décoloniser ». Ce n¹est pas le libéralisme avec ses privatisations et l¹importation libre de produits qui permettra au Congo de se doter d¹une économie forte, gage de son indépendance économiqueŠ
Le Grand Congo avec ses 55 millions d¹habitants a un Produit National Brut d¹un peu plus de 5 milliards de dollars. Or, une seule entreprise américaine comme General Motors a un chiffre d¹affaires de 230 milliards de dollarsŠ Les 200 premières multinationales réalisent maintenant un chiffre d¹affaire annuel qui dépasse les 10.000 milliards de dollars. Face à ces monstres géants, les entreprises congolaises n¹ont même pas le poids d¹une puce. Elles seront écrasées impitoyablement par le « libéralisme » que les Américains et leurs alliés européens sont en train d¹imposer à l¹Afrique. Le Gecamines et Inga seront privatisées en un tour de main et pour peu d¹argent. Que restera-t-il alors de l¹indépendance économique du Congo ? L¹argent gagné par la Gécamines et Inga privatisés ira enrichir les multinationales étrangers : quel développement harmonieux poura-t-il alors y avoir pour les masses de l¹intérieur ?
Dans un de ses meilleurs discours sur les CPP, celui du 17 mai 1999, Kabila a dit ceci.
« Grâce au CPP, un peuple idéologiquement tourné vers soi-même  prend conscience que sans lui aucun miracle de développement ne se produira dans ce pays. Avec les CPP, c'est primordial d¹avoir foi en ses capacités créatrices et, sur une grande échelle, de compter d'abord sur soi-même. Nous avons pour mission de sortir notre pays de l'économie coloniale tournée vers l'extérieur. Notre tâche actuelle est de bâtir une économie réellement nationale tournée vers les besoins d'émancipation, de reconstruction de notre pays, de jouissance de nos populations longtemps trahies et contraintes à la dépossession et au dénuement. Cette option courageuse qui exclut toute fatalité et allégeance de type comprador rencontre encore une résistance acharnée de la part des prédateurs de nos richesses qui sont contre le changement. Š C'est l'extraction des richesses du sous-sol au service du financement de la construction des grands ouvrages : autoroutes nationales, ports, faire pousser à partir de rien des cités nouvelles, modernes, illuminées, pourvues des bureaux de poste, des banques, des téléphones, d'eau courante, des centres sanitaires, écoles, barrages hydroélectriques. Ce vaste programme s'étend sur tout le territoire national. Š. Le travail national de reconstruction n'est plus l'affaire d'un petit nombre d'acteurs. Les CPP en font l'affaire de toutes les forces physiques adultes de la nation (sport, défense civile, activités culturelles). Tout est affaire de tous au sein de la société tout entière. Les CPP mobilisent et contrôlent les immenses forces de la nation et les dirigent vers la création du bonheur, de la prospérité nationale. »
Il est donc clair que les CPP ne peuvent en aucun cas être réduits à un mouvement pour le développement local. Les questions essentielles du développement sont décidées au niveau de l¹Etat du Peuple. Les décisions de gouvernement populaire au niveau national auront des implications à tous les niveaux inférieurs, y compris celui du quartier et du village. D¹une planification nationale pour la production et la distribution de l¹électricité dépend en grande mesure la qualité du développement dans le village et le quartier. Bien sûr, le quartier et le village prendront seuls certains décisions qui leur concernent directement.

3.
Les Comités du Pouvoir Populaire

et les partis politiques

Depuis l¹assassinat de Président Kabila, Washington fait une pression terrible pour que le gouvernement congolais « libéralise » tous les partis néocoloniaux, du MPR à l¹UDPS en passant par le PDSC et autres FONUS. Au nom de la « démocratie », l¹impérialisme veut faire revenir tous ces partis qui ont si bien servi ses intérêts entre 1960 et 1997.
Dans tous les pays dominés et exploités par l¹impérialisme, il y a nécessairement une opposition irréductible entre d¹une part les forces et partis qui agissent pour maintenir et consolider cette domination-exploitation et d¹autre part les forces populaires et les partis politiques nationalistes qui veulent l¹indépendance économique et le pouvoir populaire.
Maintenant que les forces nationalistes congolaises, pour la première fois dans l¹histoire, ont eu le pouvoir d¹Etat en mains pendant presque quatre années, l¹impérialisme s¹agite fébrilement pour « libéraliser » les partis qui lui sont inféodés.
Mais lorsque ces gens avaient tous les pouvoirs entre leurs mains, ils ont conduit la pays à la ruine et ils n¹ont pas manifesté le moindre « libéralisme » envers les forces nationalistes et révolutionnaires. Lumumba, Mpolo, Okito, Mbuyi, Nzuzi, Elengesa, Muzungu, Fataki et tant d¹autres grands Congolais de 1960 ont été férocément assassinés ; puis Mulele, Mitudidi, Bengila, Mukwidi, Yumbu, Kikwe Cha Malenga sont tombés en martyr au cours des luttes de libérations des années soixante jusque quatre-vingt.
Exiger de « libéraliser » les forces politiques néocoloniales, ennemies du nationalisme révolutionnaire, cela fait partie de la guerre politique que l¹impérialisme mène contre le peuple congolais.
Cela n¹a rien d¹effrayant. Les révolutionnaires congolais ont la majorité écrasante du peuple pour eux. Ils peuvent être forcés à un moment donné, sous la pression et le chantage des forces impérialistes ennemies, à « libéraliser » les partis payés par l¹impérialisme. Mais ils doivent dans toutes les circonstances renforcer l¹organisation et la conscientisation des masses populaires, avoir confiance dans les masses et en eux-mêmes et garder le contrôle de la situation.

La « réconciliation nationale » pour retourner à l¹état mobutiste ?

Les puissances impérialistes et les partis néocoloniaux qu¹elles entretiennent n¹ont pas caché leur joie à la nouvelle de l¹assassinat du Président Kabila : sans honte, ils se sont exclamés qu¹il y a maintenant une chance  « pour le changement, pour la paix et la démocratie »!
Ensemble, ils mènent actuellement à nouveau une grande offensive sur les thèmes « dialogue, réconciliation, gouvernement d¹union nationale ».  Ces belles paroles servent depuis toujours à tromper la vigilance du peuple, à masquer les véritables enjeux.
Dans une situation politique donnée, il faut toujours saisir la contradiction principale. Aujourd¹hui, la question fondamentale qui domine toute la vie politique congolaise est celle-ci: après la mort de Mzee Laurent-Désiré Kabila, le Congo continuera-t-il ses efforts pour organiser un Etat de Démocratie populaire ou de démocratie gouvernante, une démocratie basée sur la participation maximale de la population aux prises de décision à tous les niveaux - ou bien le Congo retournera-t-il vers la démocratie parlementaire bourgeoise, une démocratie dominée par l¹argent et par les puissances étrangères et basée sur l¹exclusion des masses populaire ?
On n¹a rien compris à la pensée de Kabila, si l¹on n¹a pas saisi cette opposition inconciliable entre l¹Etat néocolonial des années 1960-1997 et l¹Etat populaire qu¹il a voulu mettre en place grâce aux CPP.
Pour Kabila, tout Etat néocolonial a les caractéristiques suivants : « L¹Etat mobutiste avait une seule mission : faire primer les intérêts des grands pays sur l¹intérêt national. Le caractère répressif de cet Etat était nécessaire pour permettre aux intérêts étrangers de prospérer. » Les puissances occidentales veulent faire revivre cet Etat « traditionnel » grâce à la « réconciliation » et à la formation d¹un « gouvernement d¹union nationale » où leurs hommes dominent.
A l¹occasion de l¹arrivée au pouvoir de Joseph Kabila, les impérialistes ont redoublé leur propagande sur ces thèmes. Mais il faut se rappeler qu¹avant le 17 mai 1997 déjà, ils exigeaient un gouvernement d¹union nationale où il y aurait un tiers de fidèles de Mobutu, un tiers de soi-disant opposants et un tiers de kabilistes. Le but était de minoriser les nationalistes dans un gouvernement à majorité pro-impérialiste. Dès les premiers mois du gouvernement Kabila, les Kengo et Tshisekedi ont commencé leur propagande pour une « Table ronde » qui permettrait aux partis pro-occidentaux d¹entrer en force au gouvernement. Et on se rappelle qu¹en juillet 1999, les E.U. ont fait inscrire la formule d¹un gouvernement à majorité pro-occidentale dans l¹Accord de Lusaka.
Kabila avait déjà mis en garde que les CPP seront combattus par les impérialistes et par les partis qu¹ils manipulent. « Les CPP font peur aux politiciens (néocoloniaux) et à ceux qui les ont toujours utilisés pour piller le pays. Les vautours volent autour de vous. Si nous ne sommes pas structurés, si le peuple n¹est pas conscient politiquement, il peut perdre le pouvoir. Les agents qui servent l¹étrangers tentent encore de reconquérir le pouvoir perdu par des intrigues comme Œla table ronde¹, Œle gouvernement de large union nationale¹, ou Œle gouvernement de réconciliation nationale¹. »
L¹Etat démocratique et national que Kabila voulait construire, est à l¹opposé de cet Etat néocolonial que Washington, Paris et Bruxelles ont toujours voulu maintenir en place à Kinshasa: « Notre mission était de mettre fin à cet Etat compradore qui était le courroie de transmission des directives de l¹étranger. » (Il fallait) « créer un état populaire, un Etat du peuple, un état qui pense d¹abord et avant tout aux intérêts du Congo ». C¹est pour avoir affirmé haut et fort devant l¹Afrique toute entière que l¹objectif des Congolais était de créer un Etat nationaliste et populaire en rupture avec l¹état néocolonial, que les Américains ont très tôt décidé d¹avoir la peau de Kabila. Kabila mort, les impérialistes veulent maintenant achever leur crime en détruisant son héritage spirituel, en liquidant son projet de société, les CPP.

Les CPP sont une arme contre les partis néocoloniaux

Aujourd¹hui, certains élus et responsables des CPP semblent pris de panique : « Il faut voir la réalité en face : sous la pression des Américains et des Français, nous serons obligés de faire revenir tous les partis de l¹ancien régime, et alors les CPP seront enterrés. »
Nous avons difficile à comprendre pourquoi ces camarades sont saisis d¹une telle panique. N¹est-il pas vrai que le camarade Kabila avait déjà prévu cette situation ? Il y a deux ans déjà, il enseignait ceci : « Nous sommes à la veille de la promulgation de la loi légalisant les activités politiques. Š Face à la possibilité de chaos lors de la libéralisation des partis politiques, les Comités du Pouvoir Populaire sont la solution. » Alors nous nous étonnons : comment des kabilistes peuvent-ils affirmer que la libéralisation des partis néocoloniaux signifie l¹enterrement des CPP ? Dans la conception de Kabila, le nouvel Etat nationaliste, démocratique et populaire, c¹est-à-dire l¹Etat des Comités du Pouvoir Populaire, est une arme qui empêchera les partis anti-nationalistes Œressuscités¹ de confisquer à nouveau le pouvoir et de rétablir la dictature néocoloniale au Congo.
Même si Mzee Laurent-Désiré Kabila était resté vivant, la lutte pour l¹implantation et la consolidation des CPP serait encore longue et âpre. Maintenant que Kabila est mort, chaque nationaliste doit se considérer comme un combattant qui défendra à tout prix le nouveau Pouvoir Populaire.
Dans son premier discours, le 21 janvier 1999, Kabila mettait déjà en garde : « Vous devez défendre votre pouvoir, parce que les autres n¹ont pas encore désarmés ».
Dans son discours du 21 avril 1999 aussi, Kabila a évoqué cette lutte acharnée et prolongée entre l¹ancien pouvoir néocolonial, représenté par les partis politiques liés à l¹impérialisme, et le nouveau Pouvoir Populaire. Affirmant qu¹au début de leur existence, les CPP commettront inévitablement des erreurs, Kabila affirma qu¹il faut faire une distinction entre erreur et capitulation-trahison. « Si vous lâchez le pouvoir et que les autres s¹en emparent, ne criez pas à l¹erreur ! Ce n¹est pas une erreur quand vous vous vendez consciemment comme esclave à quelqu¹un. »
Il fallait s¹attendre à ce que le nouvel Etat du peuple, l¹Etat des Comités du Pouvoir Populaire, serait combattu avec acharnement par cette infime minorité de Congolais qui s¹est mis au service de l¹impérialisme. Pour reprendre l¹expression de Kabila : « Nous savons qu¹ils feront beaucoup de tentatives pour récupérer leur Etat, surtout par le biais des partis politiques qu¹ils cautionnent. »  Ici, Kabila fait référence aux partis néocoloniaux qui acceptent ou dirigent l¹Etat néocolonial : « Dans le système qui vient d¹être renversé, une multitude de partis politiques coopéraient avec l¹ancien Etat. »

Les CPP et le parti révolutionnaire kabiliste

Est-ce que l¹Etat du Pouvoir Populaire est hostile à l¹existence de partis politiques? Est-ce qu¹avec l¹organisation des Comités de Défense Populaire tous les partis sont devenus nocifs et inutiles ? C¹est ce que la plupart des partisans des CPP croient. Mais ce n¹était pas l¹avis du camarade Kabila.
Bien sûr, beaucoup nationalistes disent que les CPP suffisent pour unir le peuple et pour le mobiliser et qu¹on n¹a pas besoin des anciens partis néocoloniaux. Ils ont, d¹une certaine façon, raison. Le fonctionnement actuel des CPP est viable et les anciens partis de l¹époque mobutiste sont une nuisance dans la lutte pour l¹indépendance et le pouvoir populaire.
Néanmoins, il ne faut pas oublier que la situation actuelle est provisoire.
D¹abord, Kabila a suspendu les activités des anciens partis, dont plus de 90 % étaient des partis néocoloniaux, pour un temps limité. Kabila lui-même avait déjà envisagé la libéralisation de la vie politique et en conséquence la vie des CPP deviendra nécessairement plus compliquée.
Mais il y a plus. Certes, les CPP constituent la forme étatique la plus démocratie possible dans les conditions actuelles du Congo. Cependant, même la meilleure forme, la meilleure structure de l¹Etat n¹offre pas une garantie que les masses populaires seront en mesure de consolider leur pouvoir. Kabila comprenait que, dans les conditions sociales et économiques actuelles, la forme de démocratie la plus parfaite possible, celle des CPP, amènera à des fonctions de responsabilité des personnes ayant des conceptions politiques fort différentes. La meilleure structure d¹Etat peut dégénérer, si elle est « meublée » par des acteurs qui ne sont pas à la hauteur ou qui adoptent le même comportement que les politiciens de l¹ancien état néocolonial.
C¹est ici certaines remarques de Mzee Laurent-Désiré Kabila prennent leur véritable signification Kabila a dit : « Les CPP doivent faire un effort nécessaire pour mûrir politiquement. Notre maturation politique devra nous aider à faire le bon choix parce que la vie est pleine d¹embûches ». Cela implique que cette  maturation politique doit être organisée. Comment assurer le mûrissement politique d¹une population qui a été marqué par la culture et les habitudes néfastes du mobutisme ?
Kabila était conscient de la nécessité de constituer une organisation capable d¹assimiler sa philosophie politique, capable d¹inspirer et de guider les CPP au cours du long combat pour l¹indépendance économique et politique. Kabila, n¹a-t-il pas déclaré que les CPP ne sont pas un parti politique, mais qu¹il peut y avoir un ou plusieurs partis qui soutiennent le projet de société des Comités du Pouvoir Populaire ?
Mais en attendant la création d¹un parti révolutionnaire, Kabila lui-même était, pour ainsi dire, le noyau dirigeant de la révolution congolaise. A lui tout seul, il assumait en quelque sorte les fonctions du parti d¹avant-garde : il maîtrisait la longue expérience de la révolution congolaise depuis 1960, il connaissait l¹histoire de la révolution soviétique et chinoise, il s¹était familiarisé avec les masses profondes du Congo et connaissait leurs caractéristiques. Kabila comprenait parfaitement les ravages que 36 années de néocolonialisme et de mobutisme avaient causé dans la mentalité, la conscience, la conception de la vie des Congolais. C¹est lui seul qui dirigeait, prudemment, pas à pas, le mûrissement politique de cette population qui commençait à s¹éveiller.
Cette situation comportait évidemment de graves dangers qui sont apparus au grand jour après l¹assassinat de Kabila. Le noyau de la révolution ayant disparu, beaucoup de nationalistes congolais qui ont suivi en toute confiance le Président Kabila, se trouvent jetés dans un désarroi profond. Ils se demandent : qui aura maintenant les capacités pour diriger la lutte révolutionnaire vers la victoire finale, comme le fit, pas à pas, sans précipitation mais sûrement, le Président défunt ?
C¹est là qu¹intervient la question du parti d¹avant-garde, un parti qui a étudié et assimilé l¹expérience de tous les partis révolutionnaires et anti-impérialistes du monde. Le camarade Kabila lui-même, aurait-il pu parler en 1999 des Comités du Pouvoir Populaire, s¹il n¹avait pas reçu une formation politique approfondie au cours de ses voyages autour du monde au début des années soixante et s¹il n¹avait pas créé en 1967 le Parti de la Révolution Populaire ? Au cours des derniers mois de sa vie, le Président Kabila n¹a-t-il pas chargé un de ses plus proches compagnons de combat de préparer un document sur la formation d¹un parti d¹avant-garde ?



Kabila renaîtraŠ

C¹est ici l¹endroit d¹évoquer une interrogation sur le bien-fondé de la stratégie adoptée par Laurent-Désiré Kabila dans le domaine de l¹organisation.
Depuis le 17 mai 1997 et avec une insistance croissante à mesure que le temps passait, de nombreux révolutionnaires congolais ont posé cette question : pourquoi le Président ne fait-il aucun effort pour réunir tous les nationalistes et révolutionnaires qui partagent son idéologie et sa conception politique ? Il leur semblait évident qu¹un homme seul, même s¹il est un génie en politique, ne pouvait pas maîtriser un processus aussi complexe que celui du développement de la révolution congolaise. Il fallait la sagesse collective de tous les combattants anti-impérialistes réunis dans un parti discipliné, un parti capable d¹orienter, dans la ligne de Kabila, les CPP, le gouvernement, l¹armée, les services de renseignement, l¹information, etc.
Un responsable d¹un pays allié nous disait récemment : « Si Kabila avait créé un parti révolutionnaire, d¹innombrables nationalistes s¹y seraient engagés. Ils y auraient acquis une vision commune des perspectives de la révolution. Maintenant, après sa mort, le parti aurait pu reprendre le flambeau. »
C¹est tout à fait vrai.
Mais il n¹est pas encore trop tard pour s¹attaquer à cette question cruciale.
En effet, après l¹assassinat de Kabila, des dizaines de milliers de révolutionnaires et de nationalistes congolais se sentent envahis par un sentiment d¹impuissance. Mais chacun, individuellement, a conscience qu¹il y a tant d¹autres compatriotes qui ont les mêmes aspirations et les mêmes idéaux que lui et qu¹il suffirait que tous se trouvent réunis pour que Kabila renaisse. Non pas en tant qu¹individu, mais comme idéal nationaliste et programme révolutionnaire incarnés dans un parti, dans une grande collectivité kabiliste.
Aujourd¹hui, seul un parti lumumbiste-muleliste-kabiliste sera en mesure de continuer l¹¦uvre de ces trois héros congolais, seul un tel parti pourra orienter les CPP, structure démocratique de l¹Etat populaire, avec la sagesse et l¹expérience dont fit preuve le camarade Kabila.

Les CPP face aux partis néocoloniaux et aux partis nationalistes

Certains disent que l¹existence des CPP est incompatible avec le multipartisme selon le schéma occidental et qu¹ils sont donc condamnés à disparaître. Ces camarades proposent de « capitaliser » la grande sympathie que l¹idée des CPP rencontre dans les masses et de « transformer » les CPP en parti politique.
Nous estimons qu¹il est impossible de « transformer » les CPP en parti politique parce qu¹on ne peut pas transformer une structure de l¹Etat en parti.
Dans un état démocratique du Pouvoir Populaire, des candidats de plusieurs partis et sensibilités politiques participeront aux élections pour les CPP. Le parti kabiliste ­ ou le front des partis kabilistes -, quant à lui, regroupe uniquement la sensibilité politique qui se reconnaît dans le nationalisme congolais représenté par Lumumba, Mulele et Kabila. Il combattra les partis néocoloniaux qui veulent s¹accaparer de l¹Etat CPP pour le liquider. Le parti kabiliste se donne comme objectif d¹¦uvrer au maintien et au développement des CPP selon les enseignements laissés par Mzee Laurent-Désiré Kabila.
Dans la conception de Kabila, les CPP n¹excluent pas l¹existence de plusieurs partis politiques, même de partis néocoloniaux dont le programme proclame le retour au mobutisme dur et pur des années 1965-1990 ou au multi-mobutisme de la Transition 1991-1997. Tous les partis pourront faire leur propagande et leur travail conforme à la loi réglant l¹activité des partis.
Mais lors des élections, on ne demandera pas à la population de se prononcer pour des partis, mais pour des individus qu¹elle a vus à l¹¦uvre et dont elle a pu apprécier les qualités. Lors des élections dans la rue, le quartier, la commune, etc., le peuple souverain ne se demandera pas si un candidat appartient à tel ou tel parti, mais il analysera le comportement du candidat dans la vie de tous les jours, ses positions vis-à-vis des grandes questions qui déterminent l¹avenir du Congo. Le système CPP avantagera les partis qui formeront des cadres et des militants révolutionnaires dévoués à la cause du peuple, proches des masses, qui se soucient des intérêts des travailleurs et qui sont rigoureux en matière de gestion et de finances.
Le système des CPP, qui permet de révoquer à tout moment un élu qui a tourné le dos aux aspirations de ses électeurs, facilite le mûrissement politique de toute la population. Kabila a souligné que la possibilité d¹exercer un contrôle permanent sur les élus constitue une distinction essentielle entre la démocratie populaire et la démocratie parlementaire Œclassique¹. A propos de l¹ancien système parlementaire, il dit : « Lorsque les politiciens viennent solliciter un mandat, ils font des promesses très alléchantes. Une fois élus, ils disparaissent et les problèmes demeurent ». Kabila a dit aussi : « Il s¹agit de nous assurer que le peuple tout entier s¹implique et exerce un contrôle direct sur le pouvoir.» Fini le temps où l¹on se faisait élire en distribuant l¹argent et où l¹on pouvait ensuite s¹enrichir tranquillement pendant des années par des vols, des détournements, de la corruption, etc.
Kabila a été le penseur et le bâtisseur de l¹état démocratique de type CPP. Sa fonction d¹architecte et de maçon de l¹édifice CPP devra maintenant être remplie par un architecte et un maçon collectif : par un parti kabiliste ou par un front de partis nationalistes kabilistes.

La leçon des jeunes de Masina, Ndjili et Kimbanseke
     
La question de l¹heure n¹est donc pas la « transformation » des CPP en parti politique, mais la défense farouche de l¹héritage de Kabila, les Comités du Pouvoir Populaire, l¹intensification et le renforcement du travail des CPP et leur implantation dans tout le Congo.
L¹heure est aussi au regroupement des nationalistes dans un parti ou un front kabiliste capable d¹orienter le travail des CPP selon les idées que Mzee Laurent-Désiré Kabila a laissé.
Les jeunes de Masina, de Ndjili et de Kimbanseke qui sont descendus par dizaines de milliers acclamer le Président Joseph Kabila à son retour de l¹Occident, ont bien compris les enjeux du moment. Obligeant le Président de descendre, ils lui ont crié : « Nous les jeunes sommes derrière vous, n¹ayez pas peur, les Blancs ne vont rien pouvoir vous faire ! » Spontanément, le peuple sent que les puissances impérialistes profitent de la mort de Mzee Laurent-Désiré Kabila pour lancer une grande attaque contre toutes les idées et tous les projets de Président défunt. Le peuple sent que l¹Occident tente d¹imposer le retour à la « normalité » néocoloniale en profitant du désarroi provoqué par l¹assassinat de L.D. Kabila et de l¹inexpérience supposée du nouveau Président. Mais les jeunes ont dit cette grande vérité au jeune Président qu¹ils considèrent comme un des leurs : ne pliez pas devant le chantage des impérialistes, restez fidèle aux idées nationalistes révolutionnaire de votre père, le peuple vous soutient massivement.
Celui qui a vu ces masses de jeunes en mouvement le jour des funérailles de Mzee Laurent-Désiré Kabila et le jour du retour triomphal de Joseph Kabila, sait que le peuple congolais est désormais debout.
Le retour au néocolonialisme que certains projettent déjà, se heurtera à une résistance farouche d¹une population éveillée par trois années de lutte pour l¹indépendance et le pouvoir populaire. Au moment où l¹Occident a « convoqué » le nouveau Président pour l¹envoûter avec des promesses d¹aide, le peuple se souvient de l¹avertissement du camarade Laurent-Désiré Kabila aux CPP : « Si nous choisissons à nouveau le chemin de l¹allégeance à l¹étranger, le chemin de la facilité et de la pauvreté parce qu¹on nous promet de Œl¹assistance¹, nous ramperons à quatre pattes. »
Cette grande force des masses pèsera lourdement sur le cours des événements - à condition que les CPP soient redynamisés et qu¹ils donnent la priorité à l¹encadrement, la mobilisation et la formation de la base.
On peut dire que le véritable testament politique se résume dans cette seule phrase : « Je vous assure qu'il n'y a pas de meilleur chemin que celui des CPP. C'est pourquoi je vous recommande d'en faire la préoccupation de tout le monde et de tout un chacun. ». Oui, dans le concept du Pouvoir Populaire se fondent toutes les idées et les projets de Mzee Laurent-Désiré Kabila.
Il appartient désormais à tous les Congolais qui s¹identifient avec l¹¦uvre du Président Mzee Laurent-Désiré Kabila d¹agir pour que le Congo se donne une Constitution de type démocratie CPP, une constitution capable de pérenniser le projet de société nationaliste et révolutionnaire de Laurent-Désiré Kabila et de ses prédécesseur, Patrice Lumumba et Pierre Mulele.