lettres de témoignage des expulsés ouïgours by (posted by Arnaud) Monday January 29, 2001 at 01:05 PM |
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Dernière lettre de témoignage des expulsés ouïghours.
On a tous demandé l’asile politique au Haut Commissariat aux Réfugiés, à notre arrivée en Belgique.
Le premier interview s’est bien passé, la plus grande partie des questions avait trait au cheminement fait jusqu’à la Belgique.
Après un premier Négatif, directement on nous a emmené dans un Centre Fermé, où étaient enfermés les « illégaux », je n’avais plus de contact avec le monde extérieur, même téléphoner à mon avocat, prévenir mes proches, prendre des effets personnels : tout était interdit. Parmi nous une bonne partie avaient un appartement et une résidence.
Le deuxième interview s’était passé au Centre Fermé de Brugges, on nous a empêché de communiquer avec les avocats, difficilement on a pu les avoir. Certains n’ont pas vu leurs avocats avant le 2ème interview : tout contact avec les avocats était impossible.
Les avocats ont reçu les documents nécessaires et les informations assez tard, le fax durait 4 jours. On s’est arrangé à mettre la confusion dans nos documents. Ils ont essayé de déporter certains d’entre nous à l’approche du second interview sans aucune explication.
On avait donné des Annexes en main, les copies sont restées au Centre Fermé de Brugges. Les réponses les plus courantes « NE CONVIENNENT PAS A LA CONVENTION DE GENEVE ».
Beaucoup d’entre nous ont reçu un Négatif après le second interview. On a su par hasard qu’un meeting de soutien se tenait en face du Centre, en regardant par la fenêtre.
Pour défendre nos droits on a demandé de rencontrer des représentants de l’ONU. On a réussi à concrétiser cette demande qu’après de la grève de la faim, qui a duré 05 jours (du 20/11/00 au 24/11/00).
Durant l’entrevue avec les représentants de l’ONU, nous leurs avons demandé, si c’est possible de rapatrier des demandeurs d’asile par la force ? Ils nous ont répondu qu’il y a un ordre de la Reine interdisant les déportations par la force. Ils nous ont promis qu’ils allaient étudier nos dossiers et nous ont donné la GARANTIE QUE SANS NOTRE ACCORD IL N’ Y AURAIT PAS DE DEPORTATION PAR LA FORCE.
Une autre rencontre a eu lieu au Parlement Bruxellois avec le député Vincent Decroly qui a confirmé l’ordre de la Reine. (Vincent Decroly, député groupe écolo. Palais des Nations 1008 Bruxelles.T.02/549.89.09.F.02/549.89.02)
Des diplomates kasaques sont venus 2 fois au Centre Fermé, l’administration ne leur a pas interdit l’accès, on nous a mis en leur présence avec un gardien, sans explication et sans demander notre accord au préalable. Il y avait une représentante du Commissariat Général qui a interviewé certains d’entre nous la première fois.
Les diplomates savaient tout sur nous : la date et le lieu de naissance, le lieu de résidence, connaissaient les dates de nos demandes d’asile politique et possible qu’ils connaissaient aussi le contenu de nos dossiers.
Les diplomates kasaques ont refusé de montrer leurs documents prouvants leurs fonctions comme représentants de la Ligue des droits de l’Homme. leur visite était justifiée parce qu’ils voulaient confirmer nos nationalités. Ces derniers ont fait part de notre refus de répondre à leurs questions à :
L’administration du Centre Fermé,
Le Parlement Bruxellois, V. Decroly,
L’Ambassade de la république du Kazakhctane.
Avant de nous emmener à l’aéroport, on nous a enfermé dans une pièce, où il était interdit de téléphoner à nos avocats. Durant cette période le téléphone du Centre était débranché de 14h30mn jusqu'à 20h00.
On a essayé de résister à la déportation par la force, mais le personnel du Centre a usé d’une violente force physique. Ils ont appelé la Gendarmerie qui comptait 50 personnes, on nous a mis dans des « cages à poules » jusqu’à l’arrivée de l’autobus.
Avant de quitter le Centre les gardes nous ont soigneusement fouillés, on nous a dévêtu totalement, on nous a confisqué des objets personnels que par la suite on ne nous les a pas remis. On ne nous a pas téléphoné pour vérifier les bagages et mes effets personnels.
Après la fouille, on nous a menottés, chacun accompagné d’un garde vers l’autobus, qui avait un « passeport blanc » et un document prouvant qu’il détient les bagages de son « pupille ».
Vers 3h00 du matin l’autobus escorté par des motos arriva à l’aéroport directement vers l’avion. il était impossible de résister, car les policiers étaient prêts à user de la force.
Dans l’avion il y ’avait des représentants de la Gendarmerie, en plus des gardes aux côté de chaque déporté et des militaires, on était toujours menottés : on allait aux toilettes accompagnés par notre « garde personnelle », on faisait nos besoins la porte ouverte.
Après quelques heures de vol, on nous a annoncé le retour vers Bruxelles pour des raisons climatiques. Arrivés à Bruxelles on nous a encore installés dans l’autobus au vitres sombres et dirigés vers le Centre Fermé. C’est à l’arrivée au Centre qu’on nous a enlevés les menottes, qu’on a gardé au total 18 heures d’affilé de 17h00 le 04/01/01 à 11h00 le 05/01/01.
Dans une pièce isolée on a attendu le second voyage. Mais cette fois ci on nous a permis de téléphoner à nos avocats. Vers 2h00 l’autobus « spécial » est arrivé. De nouveau on nous a fouillé exactement comme la première fois, cette fois ci on est restés menottés 11heures : de 2h00du matin jusqu’à 13h30mn le 05/01/01(horaire belge) afin qu’il n’y ait aucune résistance, on nous a par force fait des injections de tranquillisants, on nous a même menottés les pieds, un jeune était en camisole de force, les policiers l’ont portés jusqu’à l’avion.
Avec tous nos respects
NATASHA
TANIA
LENA
NINA
ZARINA
KAMILLE
SERGEÏ