arch/ive/ief (2000 - 2005)

Asile: interview complaisante & propagande nauséabonde
by Fred Tuesday January 09, 2001 at 08:10 PM
fredolev@hotmail.com

Analyse de l'interview donnée par Pascal Smet, commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, à la RTBF, dans l'émission "Matin première" du 4 janvier.

En ces temps de déluge pour la Convention de Genève et les droits de l’homme, une voix céleste nous rassure sans cesse sur la justesse de ce qui se passe dans nos tristes contrées pour les demandeurs d’asile. Cette voix est celle du ministre de l’intérieur qui nous répète continuellement que la politique d’asile appliquée est celle décidée par le gouvernement, que c’est la seule politique viable, qu’il n’y en a pas d’autre, que ceux qui protestent ne rendent pas service au pays,...


Antoine Dusquene est en fait la Margaret Thatcher de la politique d’asile: « There’s no alternative ». Sa politique, il la dit équilibrée et il faut l’accepter dans un Etat de droit. Toute autre position est angéliste, extrémiste et/ ou ferait le jeu de l’extrême droite.

Et ce discours passe sans discontinuer à travers les canaux de la presse traditionnelle, qui ose encore parfois s’appeller quatrième pouvoir. Bien sûr, les médias dominants, qu’ils soient publics ou privés, relatent aussi, et parfois honnêtement, les initiatives de ceux qui contestent cette façon de voir et de faire. Mais, globalement, le discours du pouvoir se voit accordé davantage d’espace dans le champs médiatique.

Samedi 6 janvier, le journal télévisé de la RTBF, à 19h30, avait choisi d’inviter le ministre de l’intérieur pour que celui s’explique et justifie l’expulsion collective des ressortissants de l’Etat du Kazakhstan ainsi que la situation des demandeurs d’asile faisant interminablement le pied de grue devant l’Office des Etrangers. Le choix de cette invitation n’était pas neutre. Pourquoi ne pas inviter un spécialiste des droits de l’homme, d’Human Rights watch ou d’Amnesty International pour débattre de la situation en Asie centrale ? Pourquoi ne pas inviter un représentant de la communauté ouighour afin qu’il ou elle explique la situation d’oppression de son peuple tant en Chine que dans le domaine privé de Nazerbaiev [Kazakhstan] ? Quelques mots dans un reportage ne font pas le poids par rapport à un invité sur le plateau. Plateau qui devient, de fait, le lieu où le ministre peut répéter sans cesse ses fausses vérités, ses phrases toutes faites et ses discours simplistes afin que chaque téléspectateur enregistre et fasse siens les propos du pouvoir.

Bien sûr, les médias sont libres d’inviter des représentants de l’Etat, mais pourquoi ne les soumet-on pas à une interview où les questions seraient autre chose qu’une perche tendue à l’autorité pour légitimer sa politique, où les journalistes chercheraient les failles pour montrer les contradictions d’un discours réducteur ?

Les hommes politiques sont friands d’émissions radio et télé parce qu’ils savent qu’ils ne risquent rien. Les us et coutumes du petit cirque politico-journalistique sont à chaque fois préservés parce que les participants jouent tous le jeu. Parce que les journalistes semblent tous accorder une légitimité au discours de l’autorité alors que celui-ci, en matière d’asile et d’immigration particulièrement, est d’une bêtise et d’une dangerosité indéniables.

Faisons l’étude d’un cas : analysons l’interview qu’a donnée Pascal Smet, nouveau commissaire général aux réfugiés et aux apatrides et futur patron de l’administration fédérale de l’asile, à la RTBF radio, dans l’émission « L"invité de Matin première », le jeudi 4 janvier.

[Remarque : Pascal Smet est néerlandophone, c’est pourquoi la retranscription de ces propos semblera parfois un peu choquante pour tous les admirateurs dogmatiques de la langue de Molière]

Alors que des centaines de réfugiés passaient jour et nuit dehors, faisant le pied de grue devant l’Office des Etrangers afin d’enregistrer leur demande d’asile, Pascal Smet, lui estimait qu’il ne fallait « pas trop exagérer » à la vue des images télévisées, que la situation était différente quand on se rendait sur le terrain. Ce n’est pas ce que répétait à longueur de journée les membres de Médecins Sans Frontières qui tentaient vaille que vaille d’améliorer une situation qui relevait des devoirs de l’Etat et non pas d’une organisation humanitaire privée.

Pascal Smet explique cette situation humanitaire désastreuse par la conjonction de deux événements : d’une part, la fin de l’année et les jours feriés qui ralentissent le traitement des dossiers et, d’autre part, le remplacement de l’aide financière par l’aide en nature. Ces éléments auraient donc provoqués un « afflux énorme » d’étrangers.

« Afflux énorme » que n’a pas pu empêcher le rétablissement, fin décembre, des contrôles aux frontières. Par conséquent, le ministre reconnaîtra-t-il la faillite de telles mesures ? On peut en douter ! Antoine Duquesne prétendra sûrement que, grâce à cette mesure, on aura éviter le pire. En tous cas, le journaliste ne dit rien sur le fait que l’on rétablit les frontières internes au sein de l’espace Schengen et qu’a lieu corrélativement un « afflux énorme » de candidats à l’asile. Le fait que ces derniers résideraient déjà en Belgique ne peut tout expliquer.

Toujours concernant la situation devant les portes de la sinistre administration, Pascal Smet prétendait : « Il ne faut pas exagérer le problème. Je sais, pour les gens, c"est un peu embêtant » - en effet, se retrouver sans rien à la rue dans un froid glacial, c’est embêtant – « mais d"un autre côté, c"est eux aussi qui ont choisi de venir chez nous demander l"asile puisque tous les indices le montrent très clairement, de chercher l"aide financière et pas vraiment l"asile ».

Ainsi donc, si les réfugiés se retrouvent à la rue, c’est leur faute, il n’avaient qu’à pas venir pour profiter de la générosité de nos CPAS. Evidemment, il ne viendra pas à l’esprit du journaliste de répondre à Pascal Smet que l’Etat belge est tenu d’accueillir dignement tout demandeur d’asile. Il ne viendra pas non plus à son esprit que les longues files de gens devant l’Office des Etrangers sont composées de candidats à l’asile dont le cas n’a pas encore été examiné. Mais Pascal Smet les considère, bien évidemment, à l’avance comme étant tous des fraudeurs, c’est-à-dire des « réfugiés économiques ». Le nouveau commissaire général aux réfugiés et aux apatrides nous assurent que « tous les indices le montrent très clairement ». Lesquels ? il y aurait eu un sondage ? Une enquête quelconque ? Le journaliste n’a pas creusé la question. Tout ce que l’on sait, c’est que Pascal Smet a lu dans les journaux que « des petits gosses iraniens de dix ans ont dit qu"ils sont venus pour l"aide financière ». Assez maigre comme « indices », n’est-ce pas ?

Concernant cette fameuse aide financière et son remplacement en aide en nature, Mr Smet nous affirme que ce changement est l’une des raisons de « l"afflux énorme ». Mais, en même temps, au cours de cette interview, il prétend « qu"un grand nombre d"entre eux n"étaient pas au courant du fait que le système financier avait changé ».

N’y a-t-il pas là une contradiction ? Des étrangers viennent pour bénéficier des derniers jours de l’aide financière et en même temps ils ne savent pas que l’on ne reçoit plus cette aide. Peut-être que Mr Smet fait référence ici au fait que la date de la transformation de l’aide financière en aide en nature a été avancée et que les réfugiés n’avaient pas suivi l’actualité. Ce qui est évidemment difficile quand on se trouve dans la rue.

Et, en effet, le système d’aide en nature est entré plus tôt en vigueur face à « l"afflux énorme » de candidats réfugiés (le 3 janvier au lieu du 10 prévu). Et pour prendre cette mesure, le gouvernement Verhofstadt était présent et a su réagir rapidemment. Par contre, en ce qui concerne les appels d’aide de Médecins Sans Frontières, le gouvernement était « en vacances ». Sa réaction fut en tout cas moins visible et moins rapide.

Parmi tous les nouveaux arrivants, Pascal Smet concède tout de même qu’ « il y a naturellement des gens qui viennent pour la protection, c"est claire, et ça, c"est à mon avis le plus dramatique dans cette histoire que les vrais réfugiés sont victimes de cette situation ». Argument classique et redondant : celui de diviser pour régner. La Belgique n’est pas responsable, l’Europe non plus, ce sont les « faux réfugiés » qui affaiblissent le droit d’asile et qui empêche que les « vrais » soient bien traités et soient reconnus par l"administration comme victimes de persécutions. Le fait que les pays européens n’aient aucune politique d’immigration, ce n’est pas trop le problème pour le commissaire général. Il nous affirme dans l’interview que c’est « le Sommet de Laeken de décembre 2001 qui va évaluer toute la politique européenne de l"immigration ». C’est rassurant, on en débat en haut lieu. Mais, pendant ce temps-là, des gens continuent à croupir dans les centres fermés, à mourir aux portes de l’espace Schengen, à être expulsés vers des lieux qu’ils ont fuient ou à être victimes de ces fameuses filières de trafics d’être humains.

Et ces fameuses filières acheminant des étrangers en Belgique sont devenues le nouvel « Empire du Mal ». Le gouvernement a trouvé un nouveau credo pour justifier l’injustifiable : les méchants trafiquants d’être humains de tout poil. A entendre le discours actuel autour des réformes de la politique d’asile, on pourrait croire que le phénomène des migrations a pour cause l’existence des filières. Ce qui est évidemment faux, l’existence et la floraison des mafias de ce type n’est pas une cause mais une conséquence de la politique européenne en matière d’immigration.

Lors de l’interview de « Matin Première », Jean-Pierre Jacqmin, le journaliste, a demandé à son illustre invité si « on a des preuves que ces filières existent bel et bien ?». Pourquoi ne pas demander aussi si les Africains sont noirs, s’il y a de la fraude fiscale en Belgique, si la cigarette c’est mauvais pour la santé ou si Jean-Marie Lepen est raciste ? Cette question n’en est en fait pas une. Bien sûr qu’il existe des filières et que les preuves existent. En fait, moins qu’une question, cette phrase sert avant tout d’introduction au propos du commissaire général. Le journaliste introduit le sujet et Pascal Smet montre comme 1+1=2 que la politique d’asile belge est adéquate et que nous sommes entourés de trafiquants d’être humains.

Voici donc la réponse du commissaire général à la non-question de l’intervieweur:

« Oui, on a par exemple envoyé des fonctionnaires à l'immigration vers le Kazakhstan ; ça, c'est un exemple effrayant là-bas, les agences de voyage, ils vendent une histoire, ils adaptent l'histoire à nos décisions. Ils sont très bien organisées. »

Et le journaliste de renchérir : « Il y a des agences de voyage qui disent voyage en Belgique, accueil financier ? »

Et Mr smet qui en remet une couche : « Et en plus ils laissent passer les gens au moment où ils arrivent en Belgique par quelqu'un soit un avocat, soit quelqu'un de la filière pour leur donner une histoire et pour faire mémoriser l'histoire et comme ça les gens passent devant les fonctionnaires de l'administration. Et encore hier, les fonctionnaires de l'administration du commissariat m'ont raconté que ils prennent des décisions et constatent très rapidement que dans les milieux ils savent les arguments, ils savent ... et adaptent leurs histoires...

Et le journaliste de reprendre son « interview » sur : « Vous dites il y a des gens en Belgique, des avocats en Belgique, qui participent à ces filières ?

Et Pascal smet : « Je dis pas qu'ils participent mais il y a de toute façon des non avocats ou des gens liés qui participent à des filières ça c'est clair. »

Conclusion logique: il faut traquer ces trafiquants et leurs victimes et puis les expulser.

Le journaliste fait purement et simplement de la propagande, il ne va jamais en sens contraire de ce que dit le commissaire, il pose des « questions » afin que Pascal Smet poursuivent toujours plus loin son argumentation. La presse comme contre-pouvoir ?

On peut en douter surtout quand on voit que le journaliste poursuit sur sa lancée : « Ce que vous nous dites à propos de raccourcissement des délais office des Étrangers, CGRA, commissariat général aux réfugiés et aux apatrides. Pourquoi est-ce que cette décision a pas été prise avant ? Pourquoi est-ce qu'on n'a pas mis en oeuvre plus rapidement une procédure accélérée rappelons qu'on est pas encore dans la grande réforme décidée par le gouvernement ça ça sera dans quelques mois quand les lois seront votées mais pourquoi en gros vous qui étiez Mr Réfugiés au cabinet d'Antoine Duquesne vous n'avez pas vu la crise arrivée ? ». Jean-Pierre Jacqmain reproche seulement ici à Mr Smet de ne pas avoir pu mieux anticiper cette crise. Quant au bien fondé de la nouvelle procédure accélérée, il n’est pas mis en question. Le journaliste considère sûrement cette réforme comme équilibrée, c’est-à-dire humaine mais ferme ou ferme mais humaine.

La question suivante, le journaliste de la radio publique la pose en se mettant dans la position de l’idiot innocent demandant au savant commissaire général de le rassurer : « Autrement dit, vous assurez quelque part qu'avec une procédure accélérée il n'y a pas de demandeurs d'asile qui pourraient être reconnus comme réfugiés politiques qui pourraient être déboutés qui pourraient être virés sans attention ? »

A cela, Pascal Smet répond en bon gestionnaire, en précisant qu’il s’agit d’une « question d’organisation… de moyens…de personnel… »

Le journaliste, toujours aussi complaisant, enchaîne : « Avec Pascal Smet, il n"y aura pas moins de demandeurs d"asile reconnus en Belgique que les années antérieures ? » A cette question, le commissaire général ne va évidemment pas répondre : « Bien sûr, Jean-Pierre, je vais tous les envoyer sur les roses, j"en garderai juste quelques-uns pour faire le ménage chez moi et pour les prêter à mon beau-frère qui est dans le bâtiment. » Par contre, pour prouver qu’il lui reste encore un semblant de valeurs socialistes derrière sa façon de faire pragmatique, il a répondu : « Mais non je crois que tout le monde qui doit avoir la protection doit l'avoir. Et ceux qui suggèrent le contraire je trouve ça quand même grave personnellement que moi-même ou des autres ne voulons pas donner la protection aux gens qui sont à la rue, je trouve ça scandaleux. Un être humain qui a besoin de protection, doit l'avoir la protection chez nous et je vais faire tout et cette personne peut l'avoir en Belgique. » Pascal Smet montre donc ici son grand coeur et ses convictions profondes quant à sa volonté de respecter la Convention de Genève qui ne doit sûrement pas figurer dans ses lectures préférées.

Mais à ce moment-là, le journaliste réagit et demande tout de même au commissaire général : « Pourquoi est-ce que vous avez la réputation d'être en quelque sorte la ligne dure du gouvernement et en particulier du parti socialiste flamand le SP ? » A cette question, l’intéressé répond : « Oui je sais qu'il y a certains qui le disent mais moi je considère que j'ai plutôt la ligne correcte c-à-d j'ai jamais voulu mélanger l'asile et l'immigration. Moi, j'ai toujours pensé que le commissariat général aux réfugiés il doit se prononcer sur la demande d'asile et pas sur la demande de séjours sur le territoire pour les autres motifs, ça c'est la tâche de l'office des étrangers et moi j'ai jamais voulu régulariser des gens par la procédure d'asile. Je trouve la procédure d'asile c'est pour des demandeurs d'asile qui ont besoin de la protection et ceux qui veulent rester sur le territoire sur base des autres motifs, que ce soit humanitaires c'est pas la compétence du commissariat de le décider. Et ça j'ai toujours refusé de le faire et de là, j'ai la réputation dure. A mon avis c'est une position correcte et légale. ET nécessaire dans un état de droit. » Position correcte et légale, donc, et nécessaire dans un Etat de droit. Encore un argument redondant : ce fameux Etat de droit où il faut respecter la loi comme si celle-ci était naturelle, comme si elle ne pouvait pas être changée, comme si la loi divine avait imposée la législation actuelle sur l’asile et que nous, pauvres ères, nous ne pourrions rien y faire…

Mr Smet prétend donc respecter la légalité. Est-ce que c’est légal de « libérer » une Sierra-Léonaise d’un centre fermé sans lui rendre ses papiers d’identité et lui donner un Ordre de Quitter le Territoire dans les trente jours ? Est-ce que c’est légal de « libérer » une autre jeune Sierra Léonaise d’un centre fermé avec également un Ordre de Quitter le Territoire alors qu’elle porte sur son corps les marques des rebelles sierra-léonais, ce qui signifie qu’elle fut esclave (sexuel) de ces rebelles. Est-ce légal et correct d’empêcher un avocat de voir ses clients et d’intenter un dernier recours pour empêcher une expulsion ? Est-on aussi compétent qu’on le dit à l’Office des Etrangers quand on délivre un Ordre de Quitter le Territoire à un ressortissant d’… Union Soviétique (c’est véridique et cela se passe près de chez vous) ?

Mais bon, cela provient de sources non officielles, seulement de militants et de gens qui travaillent sur le terrain. Cela n’a probablement pas de valeur suffisante pour qu’un journaliste consciencieux s’en soucie et interpelle le commissaire général aux réfugiés et aux apatrides. C’est vrai que Mr Smet est un connaisseur en ce qui concerne les problèmes du dit tiers monde, lui qui n’a jamais été plus loin qu’Ibiza.

Mais continuons sur notre interview du 4 janvier.

Le journaliste : « Est-ce que pour vous une société peut accepter un grand nombre d'étrangers d'un coup ? » Le journaliste pose la question comme si c’était vraiment à l’ordre du jour alors que seul 14.718 demandeurs ont effectivement reçu le statut de réfugiés politiques ces douze dernières années, soit un taux de reconnaissance de 8,4%.

Mais Pascal Smet a sa réponse toute faite : « D'un coup, non, puisque là je suis complètement convaincu que notre type de solidarité qu'on connaît dans la société européenne va disparaître ça c'est clair. Et pour moi le vrai enjeu de débat de l'immigration, c'est un débat de société, quel type de société on veut. Moi je veux une société avec la solidarité entre les gens. Et là je suis tout à fait d'accord il faut des étrangers dans notre société c'est bon pour notre culture, le multicharisme j'ai aucun problème avec ça. Et ça il faut gérer puisque autrement on va perdre la solidarité il y a une opposition des gens qui va arriver. ET ça va provoquer beaucoup de problèmes et de tensions dans notre société. Et je sais c'est dur parce que finalement c'est un peu égoïste venant de notre société occidentale puisque nous sommes riches quand on compare avec le reste du monde. Quand je regarde l'Europe nous sommes une île dans un océan de misères. Ça je suis très bien conscient. Mais je suis aussi conscient qu'on ne va pas résoudre la misère dans le monde en accueillant toutes les misères chez nous, au contraire. »

Le type de solidarité dont parle Mr Smet est la sécurité sociale qu’il faut préserver. Les étrangers, « c’est bon pour notre culture » (en effet, tout le monde aime danser la salsa et manger de temps en temps un couscous) mais, financièrement, si l’on en croit les propos du commissaire, c’est un poids que la Belgique ne peut supporter car [tout le monde en coeur pour chanter cet éternel refrain] « on ne va pas résoudre la misère dans le monde en accueillant toutes les misères chez nous ».

Comme on le voit, Pascal Smet développe un discours qui lui très personnel. Le coup de « la misère du monde », on ne l’entend pas souvent celui-là. Mais, heureusement, notre journaliste se réveille à ce moment-là et frise le discours subversif : « Est-ce que c'est pas un peu le discours du Vlaams Blok ça ? » Et évidemment, Pascal Smet de répondre : « Pas du tout, puisque eux ne veulent pas des étrangers, pas du tout. Mais moi je les veux puisque comme je dis c'est enrichissant pour notre culture. Eux, ils ont peur des étrangers, moi pas et les gens responsables ne doivent pas avoir peur des étrangers. Mais ce qui ne va pas, chaque sociologue peut vous raconter ça [aaaah, ce fameux argument scientifique] s'il y a trop de gens qui arrivent et même puisqu'il ne faut pas oublier quand les gens arrivent, ils ne parlent pas nos langues, ils ne sont pas éduqués ils ... vous voyez immédiatement quelles tensions ça va provoquer. Et on ne peut pas oublier non plus qu'entre les étrangers on constate ça déjà un peu maintenant il y a des frictions qui peuvent naître aussi. Puisqu'on ne peut pas oublier que même aujourd'hui encore la deuxième troisième génération de l'immigration qu'on a connue dans les années 60, 70 ils sont pas toujours intégrés complètement. On a encore des problèmes [la petite touche de Verwilghen, le ministre de la justice : les allochtones criminels ?]. Et souvent ils vont se trouver sur le même marché du travail. Et ce que je trouve un peu dans le débat maintenant il faut poser des questions et après les réponses. Et parfois je constate que les gens donnent déjà les réponses avant d'avoir posé les questions. Là j'espère que la grande conférence internationale que la Belgique va organiser l'année prochaine, peut vraiment clarifier les questions. »

Remarquable aussi cette réponse ! Vous ne trouvez pas ?Un ensemble de phrases toutes faites digne du kit international des discours pratiques pour ministre de l’intérieur et hauts fonctionnaires.

Ainsi, l’accueil de plus de réfugiés causeraient des problèmes avec ceux déjà installés. On divise donc de nouveau pour règner. Les nouveaux arrivants freineraient l’intégration des immigrés vivant déjà chez nous. Quant à la discrimination ? Quant aux politiques de ghettoïsation ? Quant aux politiques sociales en général ? Pas un mot, ni du commissaire, ni du du journaliste qui aurait pu approfondir sa question à faisant une brève analyse comparative du programme gouvernemental en matière d’asile et de celui du Vlaams Blok. Mais je ne vais pas accabler ce pauvre Jean-Pierre. C’est trop facile, après coup, à tête reposée, de donner des leçons à tout le monde. Il y aurait d’ailleurs encore beaucoup de choses à dire sur cette interview que vous pouvez trouvez sur le site de la RTBF : http://www.rtbf.be/radio/premiere/matin/index.html

Je terminerai juste en disant que Pascal Smet est un homme dangereux, et d’autant plus qu’il a quitté le cabinet du ministre pour s’installer dans l’administration où son impunité est quasi assurée, Mr Schewebach (l’actuel directeur de l’Office des Etrangers) en sait quelque chose.

Pour en savoir plus sur P. Smet : http://archive.indymedia.be/display.php3?article_id=1726