arch/ive/ief (2000 - 2005)

Des nazis turcs assassinent un jeune Turc d'Anvers
by Kevin, Jan, Isabelle, An, Hakim, Wendy, Jan, Tuesday December 12, 2000 at 07:21 PM

Parce que Cafer ne supportait pas l'injustice Le jeune Cafer Deleri, un Turc d'Anvers, a été assassiné à Rotterdam, samedi 9 décembre vers 7 heures, par un commando de fascistes turcs des Loups Gris. Cafer était en visite auprès des grévistes de la faim solidaires des prisonniers politiques en Turquie. Ses amis anversois de United against Fascism lui adressent ce message d'adieu.

Des nazis turcs assa...
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Cafer,


Dimanche après-midi, vers 14h30, durant la manif des sans-papiers à Bruxelles, un de tes camarades est venu à nous. Quand il m'a serré la main, je lui ai demandé si tu étais là aussi. Il m'a répondu très sèchement que tu étais mort. "Cafer est mort", a-t-il dit. Je me suis tu, j'ai continué à avancer, secoué par la nouvelle et incrédule en même temps et je me suis mis à crier très fort: "Belges et immigrés, unité. Des papiers pour tous et maintenant." Un peu ridicule, quand j'y repense maintenant, car tu es mort et je ne peux que crier. Mais non, tu l'aurais voulu toi-même, tu étais le premier à dénoncer l'injustice. Toi-même, tu étais réfugié politique.

Tu avais rendu visite à tes camarades qui, depuis quinze jours, faisaient grève de la faim à Rotterdam, exprimant ainsi leur solidarité aux 816 détenus politiques eux-mêmes en grève de la faim en Turquie. En leur compagnie, ils protestent contre la construction de cellules d'isolement de type F. Ces cellules d'isolement sont destinées à démolir les prisonniers tant physiquement que psychiquement. Toi-même tu avais participé à la grève et tu comptais rester avec tes camarades jiusqu'à la fin du week-end.

Tu étais dans une tente avec quatre autres grévistes lorsqu'une quarantaine de Loups Gris vous ont attaqués. Ils étaient armés de bâtons et de couteaux. Les fachos t'ont planté une lame dans la poitrine. Vers minuit, tu décédais.

Tu nous parlais toujours des tortures en Turquie, mais maintenant, on nous les colle sur le nez même ici. En Turquie, combattre le fascisme, c'est braver la mort. Tu en avais assumé le risque et c'était très courageux de ta part. C'est un enseignement, pour nous.

Il y a un an et demi, tu est venu en Belgique, dissimulé dans un camion allemand. Tu avais fui et tu n'avais qu'un sac à dos. Tu n'étais pas venu en Belgique pour y mener une vie tranquille, mais pour poursuivre la lutte contre le fascisme. Tu étais véritablement un jeune révolutionnaire. Ensemble, cet été, nous avions organisé le concert United Against Fascism. Tout de suite, tu avais été enthousiaste, tu avais emporté des dizaines de dépliants pour les distribuer dans ton quartier et à tes amis. Tu t'inquiétais sans arrêt de la meilleure façon d'aborder les choses. Tu n'étais pas vite satisfait, tu y allais toujours au finish. Quand nous hésitions, tu nous incitais toujours à continuer à aller de l'avant.

Tu savais en effet ce que signifiait le fascisme. En Turquie, tu avais même connu la prison, tout simplement pour avoir distribué des tracts. Ton enthousiasme était contagieux pour nous, tu motivais tout le groupe. Tu interpellais tout le monde à propos de ce qui t'était arrivé, de la situation en Turquie. Tu n'étais guère gêné de ne pas très bien parler le néerlandais. Tu parlais beaucoup avec nous et ça t'avait permis, petit à petit, d'apprendre notre langue. La dernière fois que nous t'avons vu, nous nous étions très bien compris. A ton tour, tu nous avais appris un peu de turc à l'aide du journal que tu emmenais toujours avec toi.

Ta vie était tout sauf facile. Tu vivais avec ta mère, tes frères et soeur, dans un appartement social près du Kiel. L'argent que tu recevais du CPAS suffisait à peine à payer les cours de langue à l'université anversoise de l'UFSIA. Tu travaillais pour 50 francs de l'heure dans une pitteria. 10 heures par jour. Chaque jour, tu gagnais 500 francs. Ton billet du concert coûtait 250 francs, il t'avait donc fallu travailler cinq heures pour te le procurer! Du peu d'argent que tu avais, tu en réservais régulièrement une partie pour nous offrir un pot.

Mais le plus important dans ce qui nous reste de toi, c'est que tu disais toujours: "Pas de problème!" Tu ne vivais pas pour toi-même, mais pour les autres.

Tu étais un ami, pour nous. Tu nous invitais directement, soit chez toi, à la maison, soit dans un bistrot turc. Tu étais toujours accueillant. A la fête d'anniversaire de Kevin, tu avais dansé toute la soirée, tu entraînais tous les autres sur la piste. C'est la dernière fois que nous t'avons vu. Déjà, à ce moment, tu parlais de la grève de la faim et tu nous avais demandé d'y collaborer.

Tu te battais toi-même contre le fascisme et nous poursuivrons cette lutte avec plus de conviction que jamais. Nous pensons aussi à tes amis et camarades en Turquie qui, présentement, entament leur 52e jour de grève de la faim.

Cafer, tu vas nous manquer. Nous continuerons ton combat.


Kevin, Jan, Isabelle, An, Hakim, Wendy, Jan, Hans, Tim, Lise, Karel et tous tes autres amis et camarades.


Nous ne pouvons tolérer de telles choses! Contactez-nous afin de monter tous ensemble une action symbolique. Tél. 0496/941.966 (Isabelle Verbiest) ou 0478/490