arch/ive/ief (2000 - 2005)

Lre point à 15h00 sur l'affaire du Béguinage
by poisson soluble Tuesday November 28, 2000 at 04:00 PM
poisson.soluble@infonie.be

Les sans-papiers de l'Eglise du Béguinage relâchés dans la matinée sauf un rom roumain menacé d'expulsion imminente

Les sans-papiers de l'Eglise du Béguinage ont passé la nuit au commissariat et ont été relâchés progressivement entre 06h00 et 12h00 ce matin à une exception (peut-être deux), un Rom connu sous le nom de Giovanni, menacé d'expulsion imminente. Trois personnes ont par ailleurs été relâchées avec ordre de quitter le territoire. La Ligue des Droits de l'Homme a offert un local au collectif afin d'aménager un centre de crise où la presse a pu être reçue. Le collectif a notamment dénoncé le comportement du directeur du CPAS, Mayer, pour avoir proposé de fausses solutions aux sans-papiers qui entendent poursuivre leur lutte politique et refusent d'être séparés. La seule solution collective proposée consistait en un hébergement à la station de métro Yser. Par ailleurs Mayer a ordonné l'expulsion des sans -papiers après avoir fait apposer des draps blancs sur les fenêtres et fait sortir toutes les personnes venues soutenir ceux qui auraient pu tout aussi bien périr quelques heures avant dans l'incendie du Béguinage, à l'exception notable des représentants du CIRE... Mayer aurait lui même participé aux violences et une plainte sera déposée contre lui. A 15h00, le collectif a quitté les locaux de la Ligue vers une destinantion inconnue.

Béguinage en résistance?
by Fred Tuesday November 28, 2000 at 04:48 PM
fredolev@hotmail.com

"Continuer leur lutte politique"... Quelle lutte? Cela fait bien longtemps que les sans papiers du Béguinage ne luttent plus.
Je suis à fond derrière les sans papiers dans leur lutte pour la régularisation. Mais au Béguinage, il ne s'agit plus d'une lutte depuis longtemps. Ce n'est plus un lieu de "résistance" comme cela l'a été à une époque. Plusieurs personnes apportant leur solidarité se sont fait jeter là-bas.
Ils se sont plaints qu'ils n'avaient plus de soutien du monde associatif. Qu'est-ce qu'un militant d'une quelconque organisation pouvait aller faire en allant les voir au Béguinage? Apportez de la bouffe ou du fric? C'est le Samu social ou l'Armée du Salut qui sont concernés, pas tel collectif ou autre association.
Je pense sérieusement que la raison pour laquelle ils restaient dans cette église n'était pas pour maintenir allumée la flamme de la résistance (même si certains essayaient de s'en convaincre) mais pour une simple raison de non-choix. Ils étaient SDF s'ils ne restaient pas dans cette église. Ils n'ont pas le choix comme des milliers d'autres dehors sans boulot et sans aide sociale.
Ce qui m'intéresse, c'est éventuellement de travailler avec des sans papiers qui veulent vraiment s'auto-organiser, se prendre en charge et lutter. On n'a pas eu vraiment cela en Belgique. On va pas courrir derrière eux s'ils ne font rien, simplement pour satisfaire nos caprices de militants frustrés.
En octobre 98, c'est le Mouvement national (Cire et consorts) qui a placé dans les églises ses "échantillons de misère du monde". Quand certains sans papiers ont tenté de s'autonomiser du Saint Père Mario Gotto, le "mouvement" s'est ramassé. C'est dommage, un mouvement autonome de sans papiers n'a pu se construire. Au Béguinage, au mouvement national, dans les collectifs, les gens se battaient.

Concernant l'actualité, Mayeur s'est comporté comme une ordure quoiqu'il s'est passé à l'intérieur du CPAS. Surtout que notre si susceptible député PS se trouve souvent avec des manifestants devant les centres fermés, mais bon...
Il y a aussi une chose vraie dans ce qu'il a dit hier à Télé Bruxelles, c'est l'Etat fédéral qui est responsable et si lui (le CPAS) ne veut pas payer pour loger les gens du Béguinage, rien ne l'y oblige. N'oublions que des milliers de sans papiers en attente d'une éventuelle régularisation de leur séjour, vivent actuellement sans aide sociale, et cela malgré les décisions judiciaires. Mayeur voulait se débarrasser depuis longtemps des occupants de l'Eglise. Une incendie lui a permis de réaliser ses désirs. Il a fait, du moins, selon les infos que j'ai reçue, des propositions ne plaisant guère aux sans papiers parce que cela allait diviser leur groupe; bon, d'accord, mais, légalement, il ne doit rien. Il y en a des milliers dehors sans rien ou presque rien, ce n'est sûrement pas une trentaine de plus dans la merde qui l'empêchera de dormir. Je crois que Mayeur a fait des propositions, les sans papiers l'ont envoyer pêtre (si j'ai bien compris) mais le rapport de force n'est en faveur de ces derniers, par conséquent...
Par contre, pour les flics, là c'est vraiment, vraiment...

Re
by ? Tuesday November 28, 2000 at 07:02 PM

Bravo comme commentaire; c'est marrant c'est exactement le discours de Gotto et compagnie...

C'est bien connu les sans papiers de l'eglise du beguinage ne luttent; ils sont juste la pour gratter du fric ou de la bouffe...

Bravo pour la lecon de moralisme a deux balles!!!

Béguinage à 18h00
by benoit EUGENE Tuesday November 28, 2000 at 07:02 PM
poisson.soluble@infonie.be

Ce que tu dis est dans l'ensemble exact et j'avais présenté une analyse succinte mais plus complexe de ce problème dans le texte que je poste à la suite. Je suis donc bien placé pour refuser aujourd'hui qu'on "défausse la cause des sans papiers du béguinage" comme cela m'a été reproché à l'époque, dans un moment aussi critique. C'est aussi l'absence de mobilisation en faveur des sans papiers, la faiblesse de la résistance aux expulsions et aux centres fermés, l'ambiguité de certaine association subsidiée (pour ne pas dire plus) et de certains partis politiques participant de la coalition gouvernementale, la régularisation en faux semblant indigne d'un Etat qui sont responsables aujourd'hui. "Ils ne veulent pas s'auto-organiser", ce n'est pas une analyse politique : le peuvent-ils seulement ?

J'appelle tous les gens qui se sentent concernés à soutenir les expulsés du Béguinage qui se trouvent actuellement au siège d'ECOLO, rue Charles VI à St Josse. J'en appelle à la conscience collective qui peut demeurer dans ce pays à inventer de nouvelles formes d'actions et de mobilisation afin de ne pas laisser les mains libres aux "responsables" politiques, dont le cas du député socialiste Mayeur n'est qu'un exemple ordinairement odieux.

Sur la table ronde tenue à bruxelles
by Benoit EUGENE Tuesday November 28, 2000 at 07:06 PM
bendyglu@freegates.be

Sur la table ronde tenue à bruxelles dans le cadre de café 9, consacrée aux
sans-papiers, le 22/09/2000 :

1) éléments de mon intervention :

j'ai été invité à cette table ronde, bien que je ne sois pas engagé
personnellement, et encore moins physiquement, dans les luttes souvent
héroïques qui se mènent depuis de longues années, aussi je ne me sens aucune
légitimité pour parler au nom de ceux qui mènent concrêtement ces luttes, et
je voudrais profiter de cette situation pour mettre en garde, si besoin est,
contre les prises de parole opportunistes mais aussi le pouvoir des
"experts" qui tendent à monopoliser la parole publique et se situent souvent
structurellement du côté du pouvoir et de la raison d'Etat, comme l'exemple
français, avec la politique de régularisation en trompe l'oeil engagée par
le gouvernement le démontre depuis plusieurs années.

La difficulté est d'autant plus grande que, par définition, le mouvement des
sans-papiers est un mouvement de démunis et de dépossédés, dépourvus
notamment de capital politique directement mobilisable sur les différentes
scènes politiques nationales, associant des personnes dont les trajectoires
sociales liées aux conditions et aux causalités de leur émigration peuvent
être très différentes, même si l'expérience de l'immigration, et notamment
le déni des droits les plus élémentaires et l'exploitation sur le marché du
travail, les rapproche : c'est le cas particulièrement de l'expérience des
congolais/zaïrois et, par exemple, des marocains, en Belgique, ce que le
terme générique d'"immigrés" et plus encore de "sans papiers" contribue à
dissimuler, même si dans le deuxième cas elle constitue peu à peu, grâce au
travail militant accompli par tous, une forme de capital politique
mobilisable, mais aussi détournable et accaparable.

Tout indique que la question des médiateurs et des porte-paroles prend un
tour particulièrement critique dans cette situation, ce qui explique sans
doute leur multiplication, notamment autour de l'occupation des églises.

En effet, la Belgique n'est pas la France, et si on peut comprendre et
soutenir évidemment la volonté de fédérer les luttes et de les universaliser
au niveau européen, on ne peut pas faire l'impasse sur l'analyse des
conditions particulières de mobilisation et de médiatisation du mouvement
des sans-papiers, ici et maintenant, dans les différents contextes
nationaux.

J'avancerai ici l'hypothèse que la stratégie d'occupation des églises en
Belgique peut, pour partie, s'analyser comme une stratégie importée, dont la
réussite médiatique ne doit pas dissimuler aux acteurs de ces luttes
eux-mêmes, la nécessité de parvenir à de véritables mouvements dans lesquels
s'inventeraient des formes de solidarité, de résistance et de lutte,
capables de mettre véritablement à profit le capital médiatique que
constituent ces occupations. En effet ce capital médiatique doit sans doute
beaucoup à la spécificité du champ médiatique, au moins francophone, en
partie dominé par le champ médiatique français. Et c'est le travail
d'accumulation de capital médiatique réalisé en France qui a permis le fort
écho de l'occupation des églises en Belgique (NDR :pour dire les choses de
façon volontairement caricaturale et sans doute injuste pour beaucoup de
journalistes, on peut dire qu'une partie de la presse francophone est
toujours très heureuse de pouvoir faire le même titre qu'un journal
français, ce qui apparaissait très clairement au sujet des "émeutes de
Forest", échauffourées très limitées auxquelles une partie de la presse a
appliqué avec enthousiasme les clichés français de "l'embrasement des
banlieues"). Ceci m'amène à trois remarques principales :

- l'existence de ce capital médiatique mobilisable a pu conduire à des
formes d'appropriation et de domination dont il serait bon de tirer les
leçons

- ce phénomène a pu entraver la constitution d'un véritable mouvement
des sans-papiers dont je suggérais toute la difficulté en commençant (la
question des rapports entre les sans-papiers, leurs représentants et les
associations devrait certainement d'être abordée frontalement).

- les modalités de la médiatisation en Belgique demanderaient à être
analysées afin de mettre au point des stratégies plus réflexives fondées sur
l'expérience acquise.

La clef des champs tentant d'associer des militants, des chercheurs et des
artistes afin de réfléchir à des stratégies symboliques efficaces à
différents niveaux, c'est à ce titre que j'ai voulu m'exprimer ici ce soir.

Benoit EUGENE

2) quelques réflexions et insatisfactions sur cette réunion.

je veux évoquer ici l'énorme sentiment de frustration que j'ai éprouvé à
l'occasion de cette soirée, sans pour autant jeter la pierre aux
organisateurs, je regrette simplement de ne pas avoir pu consacrer le temps
nécessaire à la construction d'une "intervention" efficace. En effet,
j'étais loin d'imaginer que, par le biais de Bruxelles 2000 et de
l'internet, tous les moyens (non-financiers) étaient disponibles pour créer
un véritable événement, associant notamment des artistes, quitte à susciter
tous les débordements. je ne sais pas si l'occasion s'en représentera. Mais
il est clair que la volonté de faire une rencontre européenne, avec des
objectifs européens, a occulté les spécificités du contexte local. Alors que
cette ambition européenne et une organisation depuis Prague nous offrait sur
un plateau des conditions que nous n'aurions jamais pu acquérir dans le
contexte politique, mais aussi culturel, local, nous n'avons pas su les
utiliser pour faire passer des revendications ici et maintenant articulées
sur la situation locale et notamment la campagne de régularisation en cours,
au moment même où les conditions de la dénonciation de ce qui apparait de
plus en plus comme une manoeuvre politique sont réunies.

C'est donc l'occasion de mettre en garde contre une certaine Europe des
réseaux qui, au-delà de grands discours cyber-humanistes qui ne convainquent
que les convaincus , ne se donnent pas les moyens de considérer les
contextes locaux et nationaux à l'échelle desquels se fait encore la
politique. Il importe de lutter efficacement contre cette tendance et au
contraire d'utiliser les réseaux européens, qui par exemple rendaient
possible la tenue d'une telle réunion et potentiellement sa médiatisation,
pour engager des actions à l'échelle où la politique se fait.
L'internationale des bons sentiments n'est pas une politique, avec ou sans
internet.

A Bruxelles, le 13/10/2000

Benoit EUGENE

Réponse à ?
by Fred Tuesday November 28, 2000 at 08:56 PM
fredolev@hotmail.com

C'est vrai, leur présence dans l'Eglise où les flics pouvaient venir les arrêter est, je peux en convenir un "acte de résistance" du simple fait qu'ils restent "à découvert". Mais à part cela... Je ne vois pas trop comment ils résistent si ce n'est leur struggle for life quotidienne, ce qui est déjà beaucoup.
Ce que j'ai dit ci-dessus, je l'ai entendu dans beaucoup de bouches de militants "pro-sans papiers", je le pense sérieusement. Et ce n'est pas parce qu'ils sont maintenant encore plus dans la merde que je vais changer d'avis...
Qui allait encore à l'Eglise?
S'ils représentent vraiment un groupe, pourquoi laissent-ils toujours parler les Bouchouk et autre Kalubi en leur nom, alors que ces derniers ne résident pas (je crois) à l'Eglise? (ils ne s'y rendent, avec leur plus beau costume, que quand la presse est là)
Je ne dis pas qu'ils sont là pour la bouffe ou les tunes puisqu'ils n'ont rien et ne reçoivent rien.
Je ne fais pas de leçon de morale quelconque, je dis ce que je ressens depuis longtemps par rapport à cette occupation du Béguinage.
Quant à Mayeur, il avait fait des promesses, il ne les tient pas (qui cela surprendra-t-il?), du moins pas comme les sans papiers le veulent, c'est-à-dire une solution où ils resteraient ensemble.
Je suis plein de désillusions par rapport à ce groupe, ça c'est clair. Après toutes les merdes à l'Eglise et l'occupation foireuse à l'ULB, je ne crois plus guère dans ce groupe,... c'est comme cela...

Encore moi...
by Fred Tuesday November 28, 2000 at 09:46 PM
fredolev@hotmail.com

J'ai encore des choses à dire
S'ils luttent tellement, pourquoi les gens ne se mobilisent que maintenant quand ils sont au fond du trou? Quand ils n'ont même plus de toit pour pieuter?
Pourquoi leur apporter un soutien maintenant plus qu'avant? cela faisait deux ans et un mois qu'ils étaient dans l'Eglise.
C'est vrai, ce qu'a fait Mayeur est crapuleux (appeler les flics) et c'est une raison de se mobiliser, mais pour le reste...
Aller manifester au nom des sans papiersà 10, 20, 30, j'en ai marre. Chaque semaine, je reçois des infos sur des situations intolérables. Renseignez-vous chez Relais et Guidance, par exemple. Je ne peux rien faire à part me mobiliser avec des gens qui le veulent aussi.
Le fait que les sans papiers soient dans la rue, c'est de la responsabilité de l'Etat. Cela me révolte, on peut tenter de se mobiliser comme il y a deux ans. Mais il y a un constat qui me semble évident&: la situation n'est sûtrement pas meilleure.
Non je ne suis pas résigné mais je "choisis" dans quoi j'ai envie de m'investir.
A l'église, moi, je n'y allais plus parce qu'il n'y avait plus de raisons de s'y rendre. Ce que j'ai ressenti en rencontrant quelqu'uns des occupants ces derniers mois, c'était un besoin d'aide pour survivre. Cela, étant donné mes moyens, je ne peux guère leur apporter. L'esprit chrétien du sacrifice, pas trop pour moi, merci,...

C'est comme si je vais au Brésil par exemple, je préfère travailler avec le mouvement des paysans sans terres et apporter ainsi un soutien "politique", aider de cette manière des gens qui veulent se battre que faire de l'humanitaire en apportant de la bouffe à d'autres paysans qui ne se battent pas. OXfam ou MSF? C'est simpliste mais bon, vous comprenez...C'est un choix et je le revendique. Les gens doivent pouvoir survivre (bouffer, boire, se soigner) pour se battre, c'est un fait. Mais cela, ce n'est pas mon domaine, ni celui, je crois, de beaucoup de militants du CCLE ou autres.

PS: Quand je me relis, j'ai l'impression d'écrire des choses contradictoires. En fait, je ne sais plus trop quoi penser, j'ai difficile à exprimer une position claire parce que ce n'est pas claire dans ma tête, il est tard...