arch/ive/ief (2000 - 2005)

Yougoslavie: victoire du peuple ou du FMI?

by ANTOINE RENARD Monday, Nov. 20, 2000 at 3:23 PM

Fin septembre, plus de dix mille manifestants se réunissent à Prague contre la mondialisation. Ils sont en colère. Chaque année, le FMI et la Banque Mondiale appauvrissent la planète et plongent des millions de gens dans la misère. Face à ce maudit pouvoir qui n'a d'autres buts que de privatiser les structures économiques et de réduire le budget de l'Etat au profit des multinationales, de plus en plus de gens se soulèvent.

A Dhaka, pendant la même période, la population aussi s'est
soulevée. Les gens en ont ras le bol de faire confiance au
FMI. Au Bangladesh, la misère est totale. Alors que la
pauvreté, la pollution, la destruction de l'industrie et de
l'environnement ne fait qu'augmenter, la responsabilité du FMI et de la Banque Mondiale se fait de plus en plus claire. Alors que le fossé criminel entre les pays riches et les pays pauvres ne cesse d'augmenter, les peuples du Tiers-Monde veulent prendre leur sort en main. Et un nouveau mouvement de solidarité est en train de se mettre sur pied dans les pays du Nord. Les énormes manifs de Seattle, Washington, Millau, etc... sont là pour nous le rapeller.

La protestation des étudiants à Prague ou l'illusion de ceux de Belgrade?

Un mois après cette énorme manifestation, plusieurs personnes étaient toujours incarcérées dans les cachots de la capitale tchèque. Leur seul crime: avoir voulu résister coûte que coûte à politique désastreuse du FMI.
Au moment même où les manifestants anti-mondialisation se
faisaient tabasser à Prague, des miliers de gens défilaient
dans les rues de Belgrade pour demander la révocation du
Président yougoslave au profit d'un homme presque inconnu mais au programme plus qu'incertain. Qu'espèrent donc ces jeunes et qui les dirigent? Qu'est-ce qui se cache derrière le mouvement OTPOR? Qu'attendent-t-ils au
juste de l'occident?
Pour mieux comprendre leurs motivations, nous avons lu leur programme. En effet, de nombreux jeunes ont arboré fièrement les slogans de OTPOR. Que revendique-t-il exactement? Sur son site internet, un slogan choc: "université libre, élections libres, médias libres". Que laissent sous-entendre exactement ces beaux mots? En parcourant leur programme plus en profondeur, nous nous sommes rendu compte que leurs principales revendications prenaient en ligne de compte toutes les exigences du programmme de Kostunica et du G17 (groupe d'économistes) auquel il fait partie. Comment croire encore à l'indépendance d'un tel mouvement alors que son mot d'ordre préféré n'est autre que "Hey chief, when are you going to Hague?"1 et relaye un des voeux les plus chers des pays occidentaux: celui d'envoyer Milosevic au Tribunal Pénal International de Yougoslavie (qui représente une évidente parodie de justice) et d'ainsi rejeter les seules responsabilités du conflit sur les seules forces serbes? L'occupation et la colonisation de la Yougoslavie ne gêne nullement les militants de OTPOR. D'ailleurs, avant même les élections, on pouvait lire dans le "Monitor", journal bulgare, que plusieurs de ses représentants s'étaient déplacé à Sofia pour recevoir une formation de la CIA. Et les récents sacages du parlement et de la télévision d'Etat nous ont appris que de nombreux étudiants d'OTPOR étaient directement impliqués. "On se rend facilement compte que le but du mouvement étudiant était de provoquer des actions en concert avec les agents cachés US à l'intérieur et à l'extérieur de la Yougoslavie et spécialement autour des élections"2 écrit Jared Israël. Les jeunes de OTPOR sont utilisés par les USA comme cinquième colonne pour parachever leur tâche de colonisation de la Yougoslavie entreprise depuis déjà une dizaine d'années.

Coup d'état ou révolution?

Peu avant les élections, un nouvel homme fait parler de lui. Cet homme n'est autre que Kostunica. Réputation d'homme intègre et légaliste, il a tout pour plaire à l'occident d'autant plus que son programme répond à merveille aux voeux de la "démocratie européenne". En effet, son parti se bat pour aligner la Yougoslavie sur l'économie de marché et rêve d'atteindre le niveau de prospérité des pays occidentaux en applicant les mêmes recettes libérales qui ont déjà "fait leurs preuves" et semé la misère à l'Est:

1 réduction des dépenses publiques
2 légalisation du commerce en Deutsch Marks
3 intégration complète du monde bancaire yougoslave sur le FMI
4 retrait immédiat des prix subsidiant les pauvres
5 privatisation de toute l'économie nationale etc.

Pour mener à bien ces buts destructeurs, on n'a pas lésiné sur les moyens. Les versements de dons étrangers et
particulièrement américains n'ont pas cessé d'affluer durant les derniers mois précédant les élections.
C'est à coup de millions que les dollars sont tombés dans les poches des partis d'opposition, médias soi-disant
indépendants, ong etc. 100 millions de dollars "officiels"
d'aide à la démocratie ont même été voté par le Sénat
américain. Les paroles de Joscha Fischer au "Der Spiegel" sont d'ailleurs éclairantes: "It could have all ended far bloodier" and "for Germans, it was an obligation based on history to back the push for democracy". La Norvège aussi a prétendu avoir aidé l'opposition.
La déclaration du maire de Cacak, Velimir Ilic, aussi, vient compléter le ableau: "Nous sommes venu à dix mille de Cacak, nous avons brisé six barrages de police, battu des policiers, pris leur radio motorola grâce à quoi nous pouvions poursuivre nos actions (...) Nous avons aussi amener de quoi briser le parlement et la TV car nous savions que quand ils tomberaient, il n'y aurait plus de Milosevic."4
Et d'autres sources appuient ce raisonnement. Dans l'article de Christophe Châtelot et Natalie Nougayrède, on peut lire ceci: "Il semble bien que sur cette "fulgurante" révolution plane l'ombre d'un complot ourdi de l'intérieur et que c'est la conjonction des deux éléments qui aura été fatale à Milosevic. Le parlement n'était pratiquement pas défendu, la présence organisée par le maire de Cacak, de parachutistes de la 63e brigade basée à Nis ralliés à l'opposition, des policiers en civil équipés de talkies-walkies. Des supporters de l'équipe de football Etoile Rouge avaient été sollicités pour participer à l'insurection. Une bonne coopération était assurée avec Otpor..."6
"Le sommet de l'ironie, c'est que durant de longs mois, les
médias dominants n'ont pas arrêtés de parler du "nettoyage
ethnique" serbe mais lorsqu'on apprend qu'une partie des
types qui ont participé au sacage du parlement et à la prise des médias gouvernementaux ne sont autres que des criminels de guerre, cette fois-ci, nos médias les encenssent comme de vrais héros."7

Couverture des médias

Durant les élections avant et après, il y a une constante: les médias occidentaux ont fait l'éloge de l'opposition et on approuvé directement ou indirectement tout ce qui pouvait faire valser le pouvoir en place. Au sein des rédactions aussi, les objectifs étaient bien définis à l'avance. On savait très bien de qui l'on ferait l'éloge et qui l'on diaboliserait. Les phrases utilisées par les journalistes sont très significatives de cet état d'esprit.
Voici quelques titres de la presse ocidentale qui ont entourés ces élections. "Milosevic c'est fini", "Kostunica, président de la Serbie libérée", "Stratégie d'urgence de la Serbie pour
venir en aide à la Serbie démocratique"... Toutes ces titres de la RTBF révèlent un traitement manipulateur de
l'information. Avant l'apparition de Kostunica, on avait
affaire à une dictature mais depuis sa victoire aux élections, l'Union Européenne lui promet son aide. La presse rentre dans le jeu. Peut-on encore parler d'impartialité et d'indépendance de la presse?
De Prague, les lecteurs assidus du "Soir" ou du "Monde" n'ont reçu que quelques brèves. A Belgrade, par contre, les
journalistes iront jusqu'à parler de révolution d'octobre.
Aussi, pendant tous les mois qui auront précédé les élections, le financement des partis de l'opposition par les USA et par l'Allemagne est passé sous silence. Et lorsque des médias alternatifs comme Indymédia veulent faire entendre un autre son de cloche, soit on les boycotte, soit on les accusent de complot comme le Ministre de l'Intérieur et le Premier Ministre tchèque l'ont fait dernièrement.
Ce qu'il y a d'extraordinaire dans la presse occidentale c'est qu'avant même les élections ils pouvaient prédire que les votes seraient truqués et qu'il y aurait de la fraude. Mais si Milosevic l'emportait ce serait dû à la tricherie.5 Ce qui nous étonne aussi, c'est que pendant de long mois, on n'a pas arrêté d'accuser Milosevic de nationalisme mais voici qu'on place au pouvoir un Kostunica bien plus chauvin. Si lui ne risque pas trop de souffrir du changement, la population oui. En regard de ce qui se passe dans les autres pays de l'Est, cela ne surprendra personne.


* Pour de plus amples informations, je vous conseille ce site internet: http://www.lai-aib.org (ligue anti-impérialiste). Votre collaboration est la bienvenue également

** Pour d'éventuelles remarques ou suggestions:
arenard@ulb.ac.be ou 0486861345


1. Otpor is an american tragedy, Jared Israel, 9.08.00;
http://www.tenc.net [Emperor's Clothes]
2. email de Jared Israel, emperor clothes, 8.10.00
3. http//http://www.lai-aib.org
4. déclaration du maire de Cacak in "Journal de bord de
Belgrade" de Michel Collon
5. Reuters in http://www.tenc.net
6. Châtelot et Nougaydère in "La grande manipulation", article de Frédértic Delorca
7. http://www.zmarg.org



Soirées ULB, débats et films:

Prochainement, nous souhaitons également ouvrir un débat
approfondi à l'ULB avec tous les jeunes qui se sentent
concernés par la question de la guerre en Yougoslavie et qui veulent continuer à se battre pour la paix.

Première activité: conférence sur l'uranium appauvri.
Tournage d'un film de Martin Messonier (canal +) suivie d'une discussion sur l'uranium et sur les conséquences que cela entraînera sur l'environnement ainsi que sur la vie des habitants de Yougoslavie et du Kosovo. Rencontre entre jeunes Serbes et Albanais qui parleront de leurs peurs et espoirs pour l'avenir.
Deuxième activité: qu'est-ce qui se cache derrière OTPOR?
Troisième activité: y a-t-il un lien avec le Moyen-Orient?
Quatrième activité: comment développer un site internet
alternatif et faire participer le plus de convaincus possible?
Cinquième activité: à discuter ensemble


Agenda des activités:

-chaque mercredi midi: stand MML entre les deux restaurants de l'ULB, discussion sur le Proche-Orient
-chaque mercredi soir: soirée pour la paix au Centre
International (CIC), 171, bvd Lemonnier 1050 Bruxelles
-18/11: 11-18h: CIC: La Colombie dans toutes ses couleurs:
film et débat
-21/11: conférence sur Indymédia et l'information alternative, ULB
-6/12: 20h; CIC: Médiamensonges et Balkanisation en Afrique
centrale et dans les Balkans
-7/12 et 8/12: sommet européen de Nice: manif anti-
mondialisation
-16/12: 11-18h: CIC: L'Irak, 10 ans après la guerre du Golfe
-20/12: 20h: CIC: Le rôle caché de Berlin dans les Balkans
-20/01: forum-festival: 15h: auditorium passage 44: &à ans de guerre du Golfe: arrêt de l'embargo


Projet de parrainage d' un orphelinat: si vous souhaitez soutenir un projet de solidarité. Médecine pour le Tiers Monde s’occupe actuellement de recueillir des fonds pour l’orphelinat « Village des Enfants Dr Milorad Pavlovic », fondé en 1975 et pouvant abriter 150 orphelins de 3 à 23 ans. Il se situe à Sremska Kamenica près de Novi Sad. Nous recherchons pour chaque enfant une famille qui assurerait le parrainage de 1200 FB par mois. Pour de plus amples informations, contactez le MML soit par téléphone, soit le mercredi à midi entre les deux restaurants à l’ULB.




Tout n'est pas blanc ou noir

by Fred Monday, Nov. 20, 2000 at 4:31 PM

Bien sûr qu'avec Kostunica, la Yougoslavie va se mettre dans le giron de l'UE et des grandes institutions internationales. Il est aussi évident que que les Etats-Unis ont soutenu les partis d'opposition et les étudiants d'OTPOR. Oui, oui, oui, mais, s'il-vous-plaît, ne laissez pas entendre que le régime de Milosevic était meilleur. C'est du moins l'impression que j'en ai en lisant cet article.
Ni Otan Ni Milosevic
Ni Milosevic, ni Kostunica
Il n'y a pas le bien et le mal, pourquoi doit-on choisir entre les deux?
Qu'on ne me parle pas de la théorie du complot. Les Etats-unis et leurs amis ont tout fait pour faire chuter la caste de Milosevic, c'est vrai! Mais les gens, dans la rue aussi, en avait marre. Même s'il y a eu des manipulations, tout n'est pas blanc ou noir. Un peu de nuance, bordel!

Oui, mais...

by Ataulfo Riera Monday, Nov. 20, 2000 at 5:17 PM

D'accord, les puissances capitalistes occidentales ont tout fait pour renverser Milosevic. D'accord, des manipulations ont eu lieu et des mannes de dollars ont été versés à certains mouvements oppositionnels. D'accord, Kostunica, c'est vraiment pas le paradis.

Mais il ne faut pas oublier que les premiers à avoir ouvert les portes au FMI et à la Banque mondiale furent Milosevic lui-même et sa clique. Fin des années '80, le pouvoir de Belgrade avait déjà accepté - sous la contrainte de sa dette extérieure, mais accepté tout de même - des mesures d'ajustements prônés par le FMI et la BM... mesures qui furent, entre autres, la source de la crise sociale qui provoqua l'éclatement de la Yougolsavie de Tito.

Jusqu'aux accords de Dayton en 1995, Milosevic était considéré comme un interlocuteur valable aux yeux des puissances capitalistes et sans cesse courtisé par les chancelleries de ces pays.

Tout comme ses confrères Tudjman et autres, en jouant la carte du nationalisme grand-serbe pour détourner son peuple des véritables problèmes sociaux, il a directement participé l'éclatement du pays... à la grande satisfaction de l'impérialisme allemand et autre.

Le mauvais calcul de Milosevic, c'est d'avoir cru qu'il pouvait continuer ce jeu-là avec le Kosovo. Mal lui en a pris; il est tombé dans un piège car les Etats-Unis ont alors changé leur fusil d'épaule et décidé de le diaboliser à outrance pour intervenir coûte que coûte et installer leurs bases militaires.

Le parallèle avec Saddam Hussein saute aux yeux: pendant sa guerre contre l'Iran de Kohmeyni, il fut le chouchou de l'impérialisme US et autres. Après l'invasion du Koweït, on connaît la suite...

Quant au renversement du régime lui-même, s'il faut être conscient des manipulations occidentales, il ne faut pas non plus tomber de l'autre côté du cheval: c'est le peuple serbe qui, en définitive, s'est débarrasé de Milosevic. Et avec à son avant-garde la jeunesse et les ouvrier (surtout les mineurs).

Les déclarations du maire du Cacak sont évidemment édifiantes, mais elles révèlent surtout la volonté d'une nouvelle caste politicienne à tirer toute la couverture du prestige de la victoire à soi et à en déposséder le peuple.

L'exemple des usines où des comités ouvriers ont chassé les directeurs pro-Milosevic est à ce sujet éclairant: Kostunica s'est immédiatement désolidarisé de ces comités et les a mêmes condamnés, les appelant à "rentrer dans les rangs".

sluitstuk

by JB Thursday, Feb. 14, 2002 at 5:57 PM

Via mail niet veel toe te voegen aan dit:

ik zeg ook niet dat Milo onschuldig is

ik zeg wel dat ik hem steun tegen het tribunaal

en wat jij ervan denkt, manu, is onduidelijk: voor of tegen het tribunaal?

meer stond er niet, maar dat was voor velen blijkbaar al te veel.