arch/ive/ief (2000 - 2005)

Asile : Pas de liste de pays sûrs ? Pas sûrs !
by Frédéric Lévêque Monday November 20, 2000 at 01:44 PM
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Ca y est, le gouvernement « arc-en-ciel » a défini sa nouvelle politique d'asile. Il fallait s'y attendre, pas de quoi sortir confettis et cotillons pour célébrer la nouvelle, bien au contraire !

Ca y est, le gouvernement « arc-en-ciel » a défini sa nouvelle politique d’asile.
Il fallait s’y attendre, pas de quoi sortir confettis et cotillons pour célébrer la nouvelle, bien au contraire ! Les nouvelles réformes envisagées vont dans le même sens que celles adoptées précédemment. Chaque année, on rajoute une serrure sur la porte de la maison Belgique alors que les migrants continuent à entrer par les fenêtres. L’incarcération « administrative » des déboutés et des clandestins et leur expulsion reste l’axe central de la politique d’asile de la Belgique , terre d’accueil (sic).
Nouvelle administration (l’A.F.A), poste d’enregistrement aux frontières, procédure à deux vitesses, centres ouverts privatisés, maintien des centres fermés, aide matérielle et non plus financière et … liste de pays sûrs. Ou du moins, pas sous ce terme-là. Les professionnels du consensus ont voulu laisser à l’arc-en-ciel toutes ces couleurs… brunâtres. Mais il ne faut surtout pas le dire au PS et aux écolos qui croient vraiment, une fois de plus, s’en être bien sorti. Ainsi, Le dit « camp humaniste » se pavane en affirmant avoir obtenu une accélération des régularisations et des naturalisations. Humainement, il n’y rien à redire, c’est positif. Politiquement, ce « front humaniste » n’a obtenu que la confirmation de la réalisation de choses normalement déjà acquises. Drôle de victoire ! Drôle de compromis ! Pauvres réfugiés !

L’accord gouvernemental sur les réformes, obtenu après de longues heures de négociations et de compromis belgo-belge, gommerait, selon nos humanistes en herbe, les propositions les plus critiquées, comme la liste de pays sûrs chère au VLD (libéraux flamands). C’est vrai, ce terme ne figure pas dans l’accord, il n’est pas inscrit aussi clairement que dans le programme des fascistes du Vlaams Blok. Théoriquement, chaque personne, entrant sur le territoire et demandant l’asile, aura droit à un examen individuel de son cas. Les juristes, fidèles à la Convention de Genève, peuvent donc retourner à leur besogne quotidienne.
Mais cette évidence, elle est théorique. Et l’on sait qu’entre la théorie (la Belgique, signataire de la déclaration universelle des droits de l’homme) et la pratique (les « incidents » dans les centres fermés et les avions), l’écart est immense. Immense comme la marge entre les discours sur l’Etat de droit de nos braves représentants et l’impunité totale dont dispose la gendarmerie dans ce pays. Immense comme le gouffre entre les sommes allouées annuellement à la coopération au développement et ce que rembourse chaque année le « Sud » comme service de la dette. Immense comme le déséquilibre de cette politique tendant toujours plus vers le répressif aveugle.
Le premier ministre voulait une liste de pays sûrs, il l’a obtenue en partie via une pirouette. Elle s’appelle procédure accélérée. Elle est prévue, entre autres, pour les personnes dont la demande d’asile a été jugée comme manifestement infondée. Demande manifestement infondée, « cette tarte à la crème de la procédure actuelle qui écarte 90% des demandeurs d’asile en évitant d’aborder toute question de fond » (Martine Vandemeulebroecke, Le Soir). Ainsi, tomberont dans cette catégorie, entre autres, les personnes provenant de pays où l’on respecte théoriquement les droits de l’homme. Pour rappel, Amnesty International a comptabilisé, l’an passé, quelques 140 pays où des infractions aux droits de l’homme ont eu cours.

La procédure accélérée durerait au maximum 21 jours. A ce niveau, ce n’est pas accéléré, c’est expéditif. Après avoir vu sa demande déclarée comme non fondée, le demandeur d’asile, ou plutôt le futur expulsé, a 5 jours pour introduire un recours devant la Juridiction administrative de l’asile (JAA). Et dans les dix jours qui suivront, le juge statuera après avoir entendu l’intéressé. Cette procédure ne concerne pas que les ressortissants des dits pays sûrs, mais les vise surtout.
Ces pays sûrs, ce sont essentiellement les anciens pays communistes de l’Est. C’est de cette région que proviennent les 70% à 80% des demandeurs d’asile. Et ceux-là n’auraient aucune raison de chercher refuge au royaume merveilleux de Philippe et Mathilde et des réseaux pédophiles qui n’existent pas. Ces pays, qui, petit à petit, vont intégrer le marché unique, ont une forme de régime démocratique, c’est vrai ! L’heure n’est pas au polpotisme à l’Est même si des infractions aux droits de l’homme y sont répertoriées. Leurs ressortissants ne peuvent, dès lors, n’être que des « réfugiés économiques », nous dit-on. Beaucoup de gens ne pénètrent en effet dans l’espace Schengen que pour simplement améliorer leurs conditions économiques de vie. En parlant de pays sûrs ou en mettant en place une procédure accélérée, le gouvernement vise ces dits « migrants économiques » (terme extrêmement réducteur et ne rendant nullement compte du phénomène migratoire) afin de les exclure de la procédure d’asile. Mais ils en sont déjà exclus actuellement. Depuis 1988, le Belgique n’a accordé le statut de réfugié qu’à 14.718 personnes, soit 8,4% des demandes (La Libre Belgique). Par conséquent, la nouvelle politique n’excluera probablement pas plus de personnes du statut. Les Roms slovaques sont déportés parce que la Slovaquie serait un pays démocratique. Déjà, actuellement, il n’est pas tenu compte de l’origine ethnico-culturelle de ces populations, de leurs conditions de vie catastrophiques et des persécutions racistes dont elles sont victimes. Les réformes ne sont que l’officialisation d’une réalité. Les nouvelles mesures vise à mettre en place une meilleure gestion de ces exclusions : réduire les coûts, la durée de la procédure et empêcher que ces gens s’intègrent dans la population.
Nouvelle gestion, alors, mais qui n’empêchera pas les gens de continuer à émigrer. La nouvelle politique d’asile n’aura pas d’effet sur cela. D’une part, parce que cette question ne peut se résoudre au niveau national et, d’autre part, parce que l’Europe est fermée aux migrations légales de main-d’œuvre. Alors, liste ou pas liste, peu importe ! Les socialistes et les écolos croient avoir sauver la face en ayant empêcher le premier ministre de faire passer sa liste de pays sûrs. Elle existe déjà ! Il y aura toujours moins de statuts de réfugiés accordés et toujours plus de clandestins. Et, par conséquent, les mafias pourront continuer à s’épanouir grâce à une politique que le ministre décrit comme équilibrée et réaliste.