L’affaire aurait pu et dû connaître un tout autre cours. Il y a plus de deux ans, le 19 janvier 2000, Albert Faust signe une déclaration: si le Setca national constate des manquements sérieux dans la comptabilité et la gestion de sa centrale, une tutelle financière et comptable sera instaurée sur la section bruxelloise. Si Faust était convaincu qu’il s’agissait d’une attaque venant de droite, il aurait pu mobiliser son bastion de gauche. Il ne l’a pas fait. Avec ses permanents majoritairement à gauche et sa base combative, il aurait pu fournir une réponse politique et financière à la direction nationale. C’est le contraire qu’il a fait. Aucune explication sensée n’a été livrée, ni par lui, ni par ses partisans. Pourquoi 95 délégués demandent-ils une tutelle nationale? La base syndicale doit savoir ce que deviennent les cotisations syndicales. En cas de tripotages et de dépenses excessives, les organes de base doivent pouvoir se prononcer et décider de sanctions éventuelles. Mais Faust a rendu tout contrôle démocratique impossible. Il ne répond à aucune accusation. C’est donc sur la responsabilité de Faust lui-même que repose l’approbation de la tutelle nationale sur les finances par 100 des 108 présents (dont 95 délégués) à la réunion du Comité exécutif du 25 août. Une tutelle financière totalement inutile dans un syndicat qui travaille démocratiquement, et une arme dans les mains des dirigeants de droite. Les défenseurs inconditionnels de Faust ferment les yeux. L’utilisation des cotisations syndicales de les intéresse pas. Ou ils estiment, comme le président du PC Pierre Beauvois, que Faust doit être félicité pour sa brillante gestion financière. Une alliance suspecte C’est dans ce contexte que, le 10 septembre, un article remarquable est posté par les trotskistes de LSP (Militant) sur le site internet d’Indymedia. Le titre: «Les staliniens et De Vits: une alliance sans principe». Un trotskiste initié comprend bien sûr directement que «stalinien» est une injure à l’adresse du PTB. Et non, il ne s’agit pas du PTB. Il s’agit de trois permanents de gauche du Setca-Industrie, cités nommément: Eric Van der Smissen, Henri Jean Ruttiens et Hendrik Vermeersch. «Une alliance contre nature s’est forgée entre une poignée de carriéristes de droite prêts à tout (Thierry Nollet, Frissen,...) et les permanents du secteur industrie de Bruxelles-Hal-Vilvorde (Van der Smissen, Ruttiens, Vermeersch).» Le LSP a dès le premier jour et sans nuances, choisi le camp de Faust. Sans rien savoir des plaintes des trois permanents, qu’il range maintenant définitivement parmi les «staliniens». Pourquoi les trois permanents, qui n’ont pas fermé les yeux sur les tripotages financiers de Faust, sont-ils «staliniens»? Le LSP a découvert que les trois permanents s’inspirent des années 30, une époque où le méchant Staline collaborait soi-disant avec les fascistes contre la brave social-démocratie. Suit la comparaison: les «staliniens» collaborent avec Mia De Vits contre Faust. «La comparaison a bien sûr ses limites», écrit le LSP, car Mia De Vits n’est pas fasciste et Faust n’est pas social-démocrate. Comprenez bien: les seuls pour qui la comparaison tient la route, se sont les trois «staliniens»! Le LSP veut pour «preuve» de stalinisme l’«alliance sans principe» entre les trois permanents d’une part et le permanent Thierry (fils parachuté de) Nollet d’autre part. Mais s’ils se trouvent aujourd’hui dans le même «camp», Faust ne le doit qu’à lui-même. Pour faire impression, le LSP agite en long et en large les pratiques de droite et non-démocratiques de Nollet junior. Mais il ne dit pas qu’un grand groupe de permanents et de délégués qui soutiennent les accusations contre Faust sont tout aussi méfiants envers Thierry Nollet. C’est pourquoi ils ont imposé qu’une tutelle financière ne peut en aucun cas avoir une influence sur l’orientation politique et financière de la section. Revoilà les taupes Nous ne savons pas si les trois permanents prennent comme un compliment de se faire traiter de «staliniens» par des trotskistes Mais une qui se réjouira certainement de cette «révélation», c’est Mia De Vits. La mise en garde trotskiste ne peut pas être mal comprise par le sommet syndical: que peut-il y avoir de pire pour des bouffeurs de communistes que de couver trois «staliniens»? Les permanents du Setca ont répondu au tract «La Vérité» d’Albert Faust, plus précisément à sa thèse selon laquelle il est la première victime d’une chasse politique aux sorcières, annoncée par Mia De Vits au récent congrès de la FGTB. Ils rappellent que, début 99, au moment où quatre permanents de l’Industrie ont demandé un droit de regard sur la comptabilité et un rapport détaillé sur les finances, Albert Faust a fait au journal Le Soir des «révélations» à propos de taupes du PTB au Setca B-H-V. Quelques mois plus tôt (octobre 98), Herwig Jorissen avait annoncé vouloir chasser les PTBistes hors du syndicat et Mia De Vits l’avait rejoint en faisant référence, entre autres, au Setca bruxellois. Faust a-t-il voulu à l’époque montrer au national qu’il pouvait se charger lui-même de l’affaire? Le LSP découvre aujourd’hui quelques autres taupes «staliniennes». Le LSP veut-il relancer la chasse? Le LSP ira sans doute s’excuser de cette gaffe auprès des trois permanents en question. Car le but était bien sûr d’attaquer le PTB. La question reste posée: qui fait alliance avec qui? Et si le LSP veut absolument une comparaison avec les années 30, essayons alors celle-ci: Trotsky pensait aussi qu’il ne fallait jamais oublier qui était l’ennemi principal. Et c’était pour lui l’Union soviétique socialiste. Alors qu’Hitler se préparait à attaquer l’Union soviétique, Trotsky a fait front avec les nazis en appelant à l’insurrection politique pour renverser la «clique bureaucratique» de Staline. Qui parlait d’alliances suspectes?