1. L'Université de Liège a récemment décidé de se retirer de ce centre scientifique... Si l’ULg n’a que récemment déclaré sa décision de se retirer de la station scientifique, elle préparait le coup depuis plusieurs années. Il est surprenant de constater qu’elle ne dévoile cette décision que plusieurs mois après l’avoir prise au niveau du Conseil d’administration du 26 septembre 2001. Alors que d’autres fermetures étaient annoncées, la décision sur la station était délibérément passée sous silence. 2. Quelles sont, selon vous, les raisons invoquées et justifient-elles la décision prise ? Le rectorat de l’ULg a invoqué diverses raisons, et ce au gré du temps. Nous ne les connaissons qu’au travers des coupures de presse. Ce sont nos seules sources «fiables». Il a notamment parlé d’une faible fréquentation de la station, de résultats « médiocres » et d’un coût élevé pour son maintien. A chacune de ces accusations, qui nous semblent gratuites, nous avons répondu par des arguments fiables et vérifiables. Il y a eu, par exemple, 4945 visiteurs et 2215 nuitées en 2000, 5340 visiteurs et 2035 nuitées en 2001, 470 publications, 120 mémoires de fin d’études et 25 thèses de doctorat. Quant au Plan financier imposé par la Communauté française, il n’aura été qu’un prétexte à une fermeture orchestrée et planifiée en coulisse depuis plusieurs années. Ce plan tombait à pic et permettait de faire tomber le couperet sur la station. 3. Que perd l'ULG en se retirant de la Station ? L’ULg perd avant tout un centre de recherche « de terrain ». Elle perd indéniablement une expérience pratique. Elle perd également une vitrine de son image qu’elle s’était forgée sur le Haut-Plateau. Le nom de l’ULg était associé à la protection et à la gestion de la plus grande Réserve Naturelle de Belgique. C’était une image forte, claire, et très bien perçue. Actuellement et dans l’arrondissement de Verviers, l’ULg devient synonyme de fermeture et d’abandon de la recherche. Ce n’est pas notre action qui lui a donné ce caractère dramatique, L’ULg se l’est forgé elle-même, nuisant à sa propre image. 4. Quelles sont les mesures que vous avez prises pour essayer de faire changer d'avis les responsables de l'Université ? Nous avons établi de nombreuses actions en tous genres. Nous avons écrit au Recteur, mais nos courriers sont restés sans réponse. Je tiens à faire remarquer que nous n’avons pas subi de pressions dans nos actions et que nous nous exprimons librement. Du côté de l’ULg, faire le « blocus » est une position de force peu courtoise au niveau d’une institution ouverte. Ils ont choisi la voie du « moins on en dit, mieux c’est ». Pour nous, c’est le contraire car nous devons apporter les preuves de la viabilité de la station. Nous avons, en outre, lancé une pétition qui compte actuellement 2400 signatures. Le soutien est très marqué au sein de l’ULg avec la signature réfléchie de nombreux professeurs de différentes facultés. Nous avons également contacté le Commissaire fédéral à la Recherche, les ministres de la Région wallonne et de la Communauté française afin de trouver des subsides. On parle tant de politique « croisée »... Dans les dépliants et sur papier, c’est toujours parfait, mais quand il s’agit de s’impliquer, c’est un autre histoire. Nous avons reçu aussi un soutien massif de nombreux universités, écoles supérieures, centres scientifiques et organisations allant bien au delà de nos frontières. 5. On a récemment entendu parler d'un plan qui consisterait à faire de la Station Scientifique du Mont-Rigi un Centre touristique. Qu'en est-il réellement et quelle est votre réaction vis-à-vis d'un tel plan ? Disons plutôt l’éventualité d’une privatisation des installations ou de l’exploitation du site. Cette piste a été évoquée par le Recteur en forme de menace. Nous sommes (hormis l’un ou l’autre) totalement opposé à n’importe quelle forme ou possibilités de privatisation du site ou de son exploitation. Nous sommes en zone classée et en bordure de la Réserve naturelle. On ne peut y faire n’importe quoi et se moquer des arrêtés préservant cet environnement exceptionnel. Nous répétons que la vocation du site est la recherche et l’enseignement et pas n’importe lequel : un enseignement légal, reconnu et subventionné, pas « privé ». Surtout que les « écoles de tous genres » fleurissent un peu partout : ainsi on pourrait très bien y voir une école de skis, de kayak, de rafting, de VTT, de rambos en herbe, … C’est cela que nous voulons éviter, tout comme l’installation d’un hébergement touristique. Le seul hébergement tolérable doit rester au niveau de la recherche et de l’enseignement. Pas de concession, location ou sous-location à des opérateurs privés. Le site doit rester du domaine public. 6. Quel est, selon vous, l'avenir de la station. Etes-vous optimiste qu'une solution satisfaisante sera trouvée ? L’avenir de la station est scientifique, que ce soit du domaine de la recherche ou de l’enseignement. La station est un outil de travail et de découvertes. Des chercheurs peuvent y mener des recherches minutieuses et de qualité au niveau des sciences naturelles tout comme d’autres disciplines (la station n’est pas réservée à une seule faculté). Il reste encore du travail en matière d’études du climat, des tourbières, des eaux, des sols, des forêts, des pollutions… Autant de matières qui peuvent déjà intéresser des jeunes étudiants du secondaire, mais à leur niveau d’études. De quoi prendre goût pour des études supérieures. C’est mieux qu’un prospectus. C’est pour cela que nous avons proposé de développer en parallèle d’une équipe de recherche, un Centre d’Immersion Scientifique. Cela se fait pour les langues, pourquoi pas pour les sciences ? Cela serait une première en Communauté française. Nous avons également proposé de réorienter la station scientifique vers les modèles allemands et hollandais de Stations Biologiques. On pourrait encore englober la station dans le projet d’Aquapole de l’Eau qui sera développé à Verviers. Je pense à une « Station scientifique des milieux humides ». Comme on le voit, l’avenir de la station a du pain sur la planche. Les défis sont faits pour être relevés. Nous ne voulons pas fuir devant les difficultés, mais au contraire les surmonter avec réalisme. Nous maintenons notre position selon laquelle l’ULg doit maintenir sa présence à la station au travers de la présence d’une équipe de recherches scientifiques basée au Mont-Rigi même.