Une mise au point pour Redkytten tout d'abord: pour ta gouverne, les trotskystes sont des communistes.L'étiquette "anticommuniste" que les stals' collent aux trotsk' est sans doute l'une des plus stupides qui soit et elle s'accompagnait historiquement de l'insulte "d'agent hitlérien" ou d'autres trucs dans le même délire. Je m'étonne toujours de la voir employer aujourd'hui avec autant de conviction. Je ne connais pas le gars de RSF que tu cite mais je doute qu'il ait dit qu'il était "trotskyste" ET "anticommuniste". A moins qu'il ne se soit dit "ex-trotsyste"? Ce qui n'est pas étonnant vu qu'il y en a pas mal en France dans l'appareil d'Etat, le monde intellectuel, celui des grands médias... tout comme des ex-maoïstes ou staliniens, style les philosophes BHL, Alain Finkelkraut, les historiens réactionnaires François Furet ou Stephane Courtois - l'auteur du sordide Livre Noir sur le communisme, ce qui, dans le genre anticommunisme primaire n'est pas mal du tout! Mais bon, le débat ici n'est pas là-dessus. Puisque le fait d'avoir été à Cuba semble un bon argument de poids (mais dans quel contexte?) j'ai également séjourné deux fois dans ce magnifique pays en 1993 et en 1999 à chaque fois pendant près d'un mois. La première fois, c'était à l'invitation de l'Union de la Jeunesse communiste (UJC) et la seconde à titre individuel (pour ne pas dire touristique tant le mot me fait mal au vu des effets néfastes du tourisme de masse à Cuba aujourd'hui. Pour ce qui est de la presse cubaine, il me semble que réduire l'alternative à: soit la situation actuelle c-à-d une presse "unique" (même s'il y a plusieurs titres de presse ils sont tous sous le contrôle du pouvoir) ou soit une presse capitaliste contre-révolutionnaire qui effectivement ne profitera qu'aux bourgeois cubains réfugiés à Miami me semble réducteur. Entre les deux, pourquoi ne pas assurer la liberté d'expression à toutes les tendances qui se prononcent ouvertement pour la révolution, ses conquêtes et son prolongement? Pourquoi n'y a-t-il pas de journaux anarchistes, trotskystes ou d'autres tendances révolutionnaires? Je pense qu'un authentique pouvoir socialiste doit assurer la libre expression de toutes les opinions qui vivent parmi les travailleurs. J'aimerai citer ici les critiques fraternelles de Rosa Luxemburg envers la Révolution russe et ses dirigeants Lénine et Trotsky: "c'est un fait absolument incontestable que, sans une liberté illimitée de la presse, sans une liberté absolue de réunion et d'association, la domination des larges masses populaires est inconcevable. (...) La liberté seulement pour les partisans du gouvernement, pour les membres d'un parti, aussi nombreux soient-ils, ce n'est pas la liberté. La liberté, c'est toujours la liberté de celui qui pense autrement. Non pas par fanatisme de la "justice", mais parce que tout ce qu'il y a d'instructif, de salutaire et de purifiant dans la liberté politique tient à cela et perd de son efficacité quand la"liberté" devient un privilège. Seule l'expérience est capable d'apporter les correctifs nécessaires et d'ouvrir des voies nouvelles. Seule une vie bouillonnante, absolument libre, s'engage dans mille formes et improvisations nouvelles, reçoit une force créatrice, corrige elle-même ses propres fautes. Si la vie publique des Etats à liberté limitée est si pauvre, si schématique, si inféconde, c'est précisément parce qu'en excluant la démocratie elle ferme les sources vives de toute richesse et de tout progrès intellectuels. Ce qui vaut pour le domaine politique vaut également pour le domaine économique et social. Le peuple tout entier doit y prendre part. Autrement le socialisme est décrété, octroyé, par une douzaine d'intellectuels réunis autour d'un tapis vert. Sans élections générales, sans liberté illimitée de la presse et de réunion, sans lutte libre entre les opinions, la vie se meurt dans toutes les institutions publiques, elle devient une vie apparente, où la bureaucratie reste le seul élément actif. C'est une loi à laquelle nul ne peut se soustraire. La vie publique entre peu à peu en sommeil. Quelques douzaines de chefs d'une énergie inlassable et d'un idéalisme sans borne dirigent le gouvernement, et, parmi eux, ceux qui gouvernent en réalité, ce sont une douzaine de têtes éminentes, tandis qu'une élite de la classe ouvrière est convoquée de temps à autre à des réunions, pour applaudir aux discours des chefs, voter à l'unanimité les résolutions qu'on lui présente, au fond par conséquent un gouvernement de coterie - une dictature, il est vrai, non celle du prolétariat, mais celle d'une poignée de politiciens, c'est-à-dire une dictature au sens bourgeois, au sens de la domination jacobine." (1) Je pense que ces critiques sont fondamentalement d'actualité lorsque l'on veut aborder la question cubaine. (1) Pour lire l'intégralité du texte: http://www.marxists.org/francais/luxembur/revo-rus/rrus4.htm