Qui s’en inquiète
encore vraiment ? Le réchauffement de la planète s’accélère (la
température devrait augmenter, selon les estimations, de 1,4 à
5,8 degrés Celsius en moyenne d’ici à 2100) et provoque de
multiples catastrophes : inondations, montées du niveau des océans
(entre 9 et 88 cm d’ici à 2100), cyclones, épidémies,
sécheresses, disparitions d’espèces, etc. Ce constat effrayant est dressé
dans un rapport de l’ONU du groupe intergouvernemental sur l’évolution du
climat (IPCC) présenté lundi 19 février. On peut toutefois douter
qu’il change fondamentalement la politique environnementale des pays de
la planète. Cette estimation des impacts du réchauffement climatique est
le deuxième volet d’un rapport de l’ONU, le premier ayant dressé un
constat des phénomènes climatiques fin janvier 2001 et le troisième
devant énumérer une série de proposition pour limiter les dégâts la
semaine prochaine.
Principales menaces :
l’Inde et la Chine
Depuis 1995, date
du précédent rapport de l’ONU, s'est tenu le sommet de Kyoto, en
décembre 1997, au cours duquel des gouvernements s’étaient engagés à
réduire leur production de gaz à effet de serre (le gaz carbonique,
notamment) responsables du réchauffement. "Mais seuls les pays
développés se sont engagés, sur une période limitée qui plus est,
rappelle Michel Petit, l’expert français du groupe II de l’IPCC. Alors
que le problème aujourd’hui est de savoir comment vont se comporter les
pays en voie de développement, comme la Chine et l’Inde. Vont-ils se
développer en consommant leur charbon ? C’est un problème essentiel."
Le bilan de 2001 n’est pas plus catastrophiste que celui
de 1995. Mais il est peut-être plus précis. On sait désormais, par
exemple, que 95 % des glaciers dans le monde se retirent, et les
neiges du Kilimandjaro ne seront bientôt plus qu’un souvenir. Les
végétaux sont aussi plus précoces, et les oiseaux pondent de plus en plus
tôt. En France, les glaciers alpins fondent inexorablement, la montée des
eaux en Camargue menace l’environnement local et la sécheresse sur le
pourtour méditerranéen est de plus en plus marquée. "Mais le
problème n’est pas en France, estime Michel Petit. Le vrai
problème, c’est que des pays vont devenir invivables à cause des
sécheresses ou des épidémies. La donne géopolitique va changer. Il y aura
des flux migratoires. Et il faudra apprendre à vivre avec ça."
Aucune raison d’être
optimiste
Pour l’expert
français, il n’y a aucune raison d’être optimiste. "Aujourd’hui,
la démocratie et l’économie, qui gouvernent le monde, ne voient qu’à
court terme : les politiques sont élus pour cinq ans, la Bourse
réagit du matin pour l’après-midi. Alors comment voulez-vous faire face
au réchauffement climatique ?" Lui qui a vu les
représentants des pays producteurs de pétrole, l’Arabie Saoudite en tête,
"combattre pied à pied" pour édulcorer le bilan de
l’IPCC ne se fait aucune illusion. Les solutions techniques ou
économiques (les fameuses éco-taxes) qui pourraient être prises n’y
changeront rien. C’est trop tard : l’homme va devoir apprendre à
vivre avec quelques degrés de plus...
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